Voici une sélection,
ce 6 janvier 2025, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias
ou sur les réseaux sociaux en France.
► Emmanuel Macron (Président de la République)
> [Discours à l'occasion de la Conférence des ambassadrices et
des ambassadeurs]
(…) Nous nous retrouvons en janvier, non
en septembre, car vous étiez mobilisés pour les Jeux olympiques et
paralympiques qui ont été un succès populaire, sportif et organisationnel, un
succès diplomatique aussi, dans la mesure où la France a rayonné et offert un
visage éclatant au reste du monde. Et je vous remercie de la contribution qui,
là aussi, a été apportée au bénéfice de ce grand événement sportif pour le pays
et au-delà. Et vous retrouver en janvier, c'est évidemment avant toute chose
l'occasion pour moi de vous présenter mes vœux sincères pour vous, vos familles
qui, je le sais, contribuent ô combien à la mission qui est la vôtre et à
l'ensemble des équipes qui, auprès de vous, servent le pays. Tous mes vœux pour
l'année qui s'ouvre.
Alors, j'avais l'occasion de le dire aux Françaises et aux Français le 31
décembre soir, nous sommes au tournant du quart de siècle et celui-ci ouvre une
période qui n'était pas forcément celle que nous attendions. Et alors qu'on
nous écrivait en l'an 2000 une histoire qui était toute tracée, la démocratie
conquérante, la fin des conflits, la lucidité de nous conduire à voir qu'un
quart de siècle plus tard, ce n'est pas tout à fait ce que nous vivons. Et donc
oui, vous servez la France et ses intérêts dans le désordre du monde, avec une
exigence particulière qui va avec le métier diplomatique pour vous-même et vos
proches et l'ensemble de vos équipes. Et c'est pourquoi, en le disant, je le
dis à des femmes et des hommes qui savent l'exigence de cette mission et la
réalité de ce que ce mot « désordre » signifie. Et je veux exprimer une
reconnaissance toute particulière à nos agents, à Kiev, à Beyrouth, à Jérusalem
et Tel-Aviv, à Bamako, Ouagadougou, à Port-au-Prince, Port-Vila, à Caracas, et
partout où il a fallu chaque jour, ces derniers mois, montrer du courage dans
l'action et où servir le pays était particulièrement dangereux.
Ce courage, il en faut dans le fracas du monde, en effet, compte tenu de tous
ces désordres. Il faut bien le dire, 25 ans après, nous nous réveillons dans un
monde, et je dirais même simplement 10 ans après, où ce qui paraissait
impensable est en train d'advenir. Désordre né de l'affaiblissement des règles
internationales, contestées par d'autres puissances qui ne jouent plus le jeu,
se déploient sans complexe dans de nouveaux espaces de confrontation
internationale et tentent de fragmenter le monde à leur avantage. Il y a 10 ans
— et je salue ici, la mobilisation de la diplomatie française et le ministre
qui la conduisait à l'époque — nous concluions un accord historique, les
Accords de Paris pour le climat. Qui pourrait l'imaginer aujourd'hui ? Désordre
des démocraties menacées par la remise en cause de leurs promesses de
prospérité, d'ascension sociale, de partage du progrès, et directement
attaquées par des puissances de déstabilisation. Il y a quelques semaines à
peine, la Roumanie a dû annuler une élection présidentielle en raison
d'ingérences et de manipulations électorales clairement attribuées à la Russie.
Qui l'aurait imaginé il y a 10 ans à peine ? La France a été elle-même attaquée
par des ingérences inacceptables dans la plupart de ces territoires
ultramarins, et tout particulièrement en Nouvelle-Calédonie ces derniers mois,
par l'Azerbaïdjan qui pensait, là, régler ses propres incompréhensions du fait
que nous défendons le droit international et l'Arménie. Qui l'aurait imaginé ?
Voilà 10 ans, si on nous avait dit que le propriétaire d'un des plus grands
réseaux sociaux du monde soutiendrait une nouvelle internationale réactionnaire
et interviendrait directement dans les élections, y compris en Allemagne, qui
l'aurait imaginé ? C’est le monde dans lequel nous vivons et dans lequel nous
avons à faire de la diplomatie.
Désordre aussi des révolutions technologiques qui bouleversent nos habitudes,
nos modes de vie, nos conceptions mêmes de l'histoire. Désordre dans lequel les
États menacent d'être dépassés par la puissance et la force de frappe
d'entreprises privées, mais désordres en clair-obscur, car ces innovations
technologiques portent aussi résolument des innovations, des transformations de
nos vies pour le meilleur, et du spatial à la biologie, des évolutions qui vont
nous permettre de mieux faire. Désordre enfin des défis globaux : réchauffement
climatique, dont chacun mesure chaque jour les conséquences, de l'Espagne à
Mayotte, nouvelle pandémie, inégalités qui ne se réduisent pas assez,
divergences de développement sur lesquelles prospèrent tous les fomenteurs de
troubles, narcotrafiquants, passeurs de migrants, terroristes.
Au fond, ce monde que je décris, et j'ai eu l'occasion de le faire ces
dernières années, mais malheureusement, il prend un tour de plus en plus clair,
est marqué par le retour des pulsions impériales, les bouleversements de
l'information et du savoir et la remise en cause très violente de l'humanisme.
Et c'est donc au fond un triple dérèglement : stratégique, technologique et
politico-philosophique. Et cette période rappelle en quelque sorte celle de la
Renaissance. Et la question est simple : dans cette Renaissance, quelles sont
les nations qui s'en sortent ? Celles qui obéissent aux règles du monde d'avant
ou bien celles qui ont compris qu'il fallait un réalisme qui sache garder ses
idéaux ? Et au fond, il nous faut tout à la fois la force morale, mais la force
aussi tout court. Et il nous faut sortir, à bien des égards et sur bien des
sujets, d'une forme de naïveté, ou en tout cas d'usage, qui continue à avoir
cours dans nos pratiques.
J'ai eu l'occasion de le dire il y a quelques mois en prenant la métaphore des
herbivores et des carnivores, mais nous en sommes là. Ceux qui continueront à
appliquer des règles que les autres grandes puissances n'appliquent plus auront
le privilège d'être dévorés. Pour autant, décider d'être fort ne vaut que si
c'est pour servir les valeurs qui sont les nôtres et les principes auxquels
nous souscrivons, ce qui nous différencie principiellement de ces forces
autoritaires qui reviennent. Alors, cette sortie de l'innocence ne doit pas
aller sans un volontarisme. Et depuis 7 ans, j'ai toujours tenu ce langage de
vérité, quoi qu'il m'en coûte, sur le refus d'un affaiblissement européen, les
transformations de notre lien transatlantique, les pesanteurs de notre système
pour appréhender le monde et la nécessité de lire le monde tel qu'il va et les
choses telles qu'elles sont.
Aussi, en m'exprimant devant vous aujourd'hui, j'ai bien conscience que je le
fais sans doute devant des diplomates de haut rang qui se posent des questions
sincères, et aussi à un moment où nos compatriotes se posent des questions très
sincères. Il suffit de lire la presse pour se dire : finalement, tout est
fichu. La démocratie, c'était un idéal d'hier. Tout le monde semble être
fasciné par un nouvel ordre qui vient et qui bouscule toutes les règles. Et, en
quelque sorte, on finirait presque par se demander s'il est nécessaire de se
battre. Je crois tout le contraire, oui, cela en vaut la peine et nous avons
quelques armes. D'abord, la première question qu’on se pose beaucoup, qu'on se
pose parfois à lire les chroniques, et l'esprit de défaite ambiant : « La
France a-t-elle toujours les moyens de sa politique ? » Oui, assez simplement.
La Constitution est solide et claire, nos choix le sont tout autant et les
atouts qui sont les nôtres demeurent. Les atouts français n'ont pas disparu.
Notre force diplomatique, notre présence sur tous les océans, le rayonnement de
notre langue, nous l'avons encore vu lors du dernier Sommet de la Francophonie
que la France a eu l'honneur d'accueillir. Ce sont des forces. La puissance de
notre culture est là. Il suffisait de voir le monde entier venir au chevet de
Notre-Dame de Paris rebâtie. Et la capacité de la France à tenir des grands
événements, comme nous l'avons montré aux Jeux olympiques et paralympiques, est
là. Il faut simplement que tous les Français et toutes les Françaises aient la
lucidité du reste du monde sur nous-mêmes. Nous avons cette capacité, elle est
là, et ce socle d'histoire, de valeurs, de culture est bien présent, tout
autant que notre force de recherches académiques, technologiques et
industrielles.
Durant ces dernières années, nous avons aussi renforcé nos atouts, consenti des
efforts importants de la nation pour renforcer notre présence diplomatique et
militaire. Et je sais la volonté du Premier ministre de continuer celui-ci et
de s'engager résolument dans cette voie. Investissements dans notre diplomatie.
Moi, j'entends tous les pourfendeurs de la France qui sont en train de
s'effacer, de s'effondrer. Que n'ont-ils, quand ils étaient aux affaires,
défendu un budget au moins à la hauteur de celui que vous avez aujourd'hui ?
Nous ne sommes pas à un moment de décroissance des investissements dans le
réseau diplomatique. Depuis 7 ans, nous avons investi dans la diplomatie,
relevé le budget du ministère, du nombre des emplois, je l'ai évoqué l’année dernière,
de nos contributions volontaires aux organisations internationales. Nous avons
lancé un agenda de transformation pour adapter nos moyens aux défis du temps,
avec un vrai changement des méthodes, un effort important en termes de
communication, d'information, d'influence, absolument indispensable et qu'il
faut poursuivre, et je sais en la matière pouvoir compter sur vous. Et j'étais
venu moi-même en mars 2023 au ministère annoncer tout cela.
L'investissement est bien réel et il est là. Investissement dans nos armées,
j'y reviendrai lors de mes vœux devant les forces armées le 20 janvier, au
terme de la loi de programmation militaire, nous aurons doublé notre budget
militaire en 10 ans. Quel pays peut en dire autant ? Et nous n'avons pas
attendu 2022 pour nous réveiller. Investissements solidaires aussi, de 2018 à
2022, nos investissements solidaires ont augmenté de 50 %. En matière absolue,
une hausse passant de 10,3 milliards, 0,4 point de RNB, à 15,1 milliards, 0,56
point de RNB. Quel pays peut en dire autant durant cette période ? Avec cette
ambition, nous sommes devenus le quatrième bailleur de l'OCDE. Sur la même
période, nous avons créé 48 alliances françaises, portant leur nombre à 835,
quand tant réduisaient leurs réseaux, renonçaient à leurs ambitions. Sur la
même période, 150 000 élèves supplémentaires ont été accueillis dans les écoles
du réseau d'enseignement français. Ils sont désormais 600 000. Quel pays peut
en dire autant ? Sur la même période, nous nous sommes donnés les moyens de
notre rayonnement au travers de la Cité internationale de la langue française,
à Villers-Cotterêts, dans la Cité du développement, que nous construisons à
Paris, ou dans la Maison des mondes africains, dont nous poserons les
fondations en 2025.
Ce sont à chaque fois des investissements pour la nation dans un contexte
financier difficile. Nous y sommes engagés, et je remercie le Premier ministre
et les ministres de continuer sur cet engagement. Et donc, oui, le pays est
solide. L'engagement international, diplomatique et militaire, est solide. La 2ᵉ
question que j'entends souvent, c'est est-ce que l'Europe a encore les moyens
de sa politique ? Est-ce que l'Europe pourra avancer ? Regardez, le président Trump
arrive, c'est terrible. D'abord, je dois vous dire, c'est la chance de
l'expérience sans doute, mais plusieurs d'entre vous l'ont vécu à mes côtés,
c'étaient exactement les mêmes questions il y a 8 ans. Et on nous prédisait le
pire. Le président Trump élu, le Brexit était là, l'Europe était fichue. Quand
je regarde ces 7 dernières années, nous n'avons pas démérité en Europe. La
France proposait la souveraineté européenne, davantage d'indépendance,
l'autonomie stratégique, baliverne française, nous disait-on. Jamais ça
n'arrivera, faites-vous plaisir, allez-y, faites des discours. Ce discours est
européen aujourd'hui, il est dans tous les textes européens, au cœur des
missions de la Commission, victoire gramscienne. Défense européenne, on disait.
Idées françaises, allez-y. Il n'y a que l'OTAN, point d'autre. Plus personne ne
discute aujourd'hui le pilier européen de l'OTAN et l'ensemble des instruments
que nous avons mis en place ces 7 dernières années. Endettement commun, oh, le
rêve, la folie. Allons-en. 2020, en plein covid, accord franco-allemand et
accord des Européens pour un endettement commun face à celui-ci. Si on décide
d'être défaitiste, il n'y a aucune chance de gagner. Mais avec des idées
claires, une volonté d'avancer, nous avons fait avancer notre Europe durant ces
7 dernières années résolument, et celle-ci est aujourd'hui capable de relever
les défis qui sont les siens, et j'y reviendrai, car nous avons aussi donné un
nouvel élan, un nouveau socle à nos relations au sein de cette Europe, avec
l'Allemagne, par le traité d'Aix-la-Chapelle qui a renforcé nos liens
bilatéraux, en nouant aussi des traités pour le nouveau siècle avec l'Espagne
et l'Italie. Et nous nous préparons pour le printemps à traiter de la même
ambition avec la Pologne, qui sera signée à Nancy, et en nouant un partenariat
stratégique avec la Grèce. Nous avons fait preuve d'initiative. L'Europe est à
la fois notre devoir et notre chance, et c'est cette méthode qui doit
continuer. Ambition de l'agenda communautaire, volonté d'engager les relations
bilatérales partout à travers l'Europe. J'ai visité toutes les capitales durant
mon premier mandat et je ferai pareil durant le second. Et refus en quelque
sorte d'une fatigue de celle-ci. Ne cédons donc rien à l'esprit de défaite et à
ce nouveau fatalisme. L'Europe a bien une place, à nous de lui donner une
ambition.
Et puis la 3ᵉ question simple, est-ce que l'élection du président Trump signifie
plus d'incertitude encore ? Pour les mêmes raisons, je ferai montre d'une
prudence relative. De 2016 à 2020, la France a su travailler avec le président
Trump. Alors, nous savons ce sur quoi il y a des désaccords. La question
climatique, l'ordre international. Je constate aussi que la 1ʳᵉ visite à
l'étranger du président élu fut pour Paris, Notre-Dame, et une discussion
stratégique commençait. Je sais aussi une chose, c'est que si on décide d'être
faibles et défaitistes, il y a peu de chances d'être respectés par les
États-Unis d'Amérique du président Trump. Et donc, à bon entendeur, salut. À
nous de savoir coopérer avec le choix qui a été fait par le peuple américain.
Je crois que le président Trump sait qu'il a en France un allié solide, un
allié qu'il ne mésestime pas, qui a des vues claires, qui croit dans l'Europe,
qui a confiance en lui, qui porte une ambition pour la relation
transatlantique, mais une ambition lucide. J'aurai l'occasion d'y revenir en
regardant très clairement le fait que, depuis 2011, les présidents américains
successifs nous disent tous la même chose. Leur priorité est d'abord les
États-Unis d'Amérique, puis la relation avec la Chine. L'Europe a un autre
rang, une autre place. Soyons suffisamment lucides pour le voir et donc œuvrons
en étant cohérents.
Une fois répondu, au fond, à ces trois questions ambiantes, et vous l'avez
compris, avec volontarisme, détermination, c'est bien en étant lucides sur la
situation, mais en ayant cette volonté à la fois d'audace et de porter des
politiques claires pour nos compatriotes que je veux ici revenir devant vous
autour des trois priorités que je nous assigne pour l'année qui vient. D'abord,
on a une mission première collective : contribuer à la sécurité de la France et
des Français. La deuxième, c'est œuvrer à la prospérité française et européenne
qui est un combat existentiel. J'ai eu l'occasion de m'exprimer là-dessus, il y
a quelques mois à la Sorbonne, mais je voulais y revenir. Et la troisième,
c'est la défense de l'ordre international et de nos valeurs, qui, je le crois,
est tout à la fois la défense de nos intérêts et d'une certaine vision du
monde. Contribuer donc à la sécurité de la France et des Français, c'est en
effet notre priorité absolue. D'abord face aux risques terroristes, et j'y
reviens avec gravité dans cette semaine où nous aurons à commémorer les 10 ans
de l'attentat perpétré contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher, comme nous nous
souviendrons en novembre des attentats de Paris, 10 ans.
Pendant ces 10 années, nous avons porté le combat contre le terrorisme, avec un
travail remarquable qui a été fait par l'ensemble des services, la DGSE, la
DGSI, les services de police et de gendarmerie, nos magistrats, pour contrer la
menace, assurer la sécurité de nos concitoyens. Et nous avons adapté à la fois
notre arsenal législatif, notre organisation et nos moyens, en réinvestissant
là aussi massivement. Mais c'est un combat que nous avons porté également hors
de nos frontières, de manière fort logique au Levant comme au Sahel. Et je veux
saluer ici nos diplomates comme nos militaires qui se sont engagés durant toute
cette période. Nous avons, en effet, au Sahel, réussi à empêcher la mise en
place d'un califat territorial qui aurait menacé les intérêts de la France et
sa sécurité. Et sans les militaires français, la chose était déjà décidée. Et
nous avons œuvré, et continuons de le faire, dans le cadre de l'opération
Inherent Resolve contre le terrorisme au Levant, avec là aussi un engagement
exemplaire.
Mais il nous faut, et je veux le redire aujourd'hui, alors même que nous avons
été en Europe touchés encore par le terrorisme, et je pense à nos amis
allemands et à l'attentat de Magdebourg, ou à nos amis américains et l'attentat
de la Nouvelle-Orléans, nous savons que le terrorisme est un risque qui demeure
prégnant dans nos sociétés, et qui implique qu'il n'y ait aucun relâchement et
une vigilance collective. Il ne faut donc aucun répit dans la lutte contre le
terrorisme, et je demande évidemment à tout le gouvernement de continuer à être
mobilisé, le ministre de l'Intérieur, au premier chef, les autorités du Premier
ministre, l'ensemble de ses collègues. Nous devons tenir en bloc et continuer
de le faire à l'international.
Au Proche-Orient, nous devons regarder sans naïveté le changement de régime en
Syrie. J'aurai l'occasion d'y revenir, mais nous savons aussi que c'est depuis
ce sol qu'ont été conçus et fomentés les attentats de 2015, en novembre, et que
les groupes terroristes continuent à agir dans la région. Et nous devons, au
Levant, au Sahel, dans d'autres régions du monde où des groupes terroristes
s'organisent, continuer l'extrême vigilance, la mobilisation de notre réseau,
l'organisation de nos services de sécurité.
De la Corne de l'Afrique au golfe de Guinée en passant par le Khorassan et
d'autres régions, nous savons que l'emprise des groupes terroristes continue de
prospérer. En somme, la menace n'est pas derrière nous, c'est même tout
l'inverse et notre rôle, votre rôle, est de continuer de l'avoir en tête,
d'agir, de protéger nos compatriotes par cette vigilance, ce travail de
compréhension et également la poursuite des alliances utiles pour lutter contre
ces groupes.
Les guerres du Proche-Orient ne sont pas des conflits lointains. Et parlant de
notre sécurité, je veux d'abord me pencher sur ce théâtre. En effet, c'est tout
à la fois la sécurité des Français et notre unité, compte tenu des répliques
sismiques, en quelque sorte, de ce qui s'y joue, de ce qui est en jeu. C'est
pourquoi, d'abord, notre solidarité avec Israël face au terrorisme, face à la
barbarie des attaques perpétrées par le Hamas sur son sol le 7 octobre 2023 est
complète et ne souffre aucune nuance. Les otages encore détenus à Gaza doivent
être libérés sans plus attendre, et nous continuons de nous battre pour la
libération d'Ofer Kalderon et d'Ohad Yahalomi, nos compatriotes, comme pour la
libération de tous les otages.
Nous comprenons aussi la nécessité pour Israël que plus jamais le pire ne se
produise et que la sécurité des siens soit pleinement garantie. C'est pourquoi,
d'ailleurs fidèle à notre amitié historique, nous assumons nos responsabilités
à ses côtés, et nous l'avons montré durant l'année dernière à chaque occasion
lors des attaques iraniennes ou Houthis. Nous l'avons aussi montré en jouant
tout notre rôle dans la conclusion du cessez-le-feu le long de la ligne bleue
pour mettre fin aux tirs du Hezbollah dans l'intérêt du Liban comme d'Israël.
Il faut aussi bien admettre que quoi qu'on en pense, des interventions, en
particulier des interventions ciblées israéliennes au Liban, en Syrie, en Iran,
ont changé la donne stratégique au Moyen-Orient. Il nous faut pour cela,
collectivement, en tirer les conséquences et rouvrir la perspective d'une paix
solide, durable et sûre pour tous dans la région.
Cette paix-là ne peut se construire avec une réponse uniquement sécuritaire.
Elle doit passer par un travail humanitaire et politique qui est sa condition
absolue. À Gaza, d'abord, il n'y a aucune justification militaire à la
poursuite des opérations israéliennes, aux entraves délibérément misent à
l’aide humanitaire et à l'état de faim et de dénuement extrême auquel la
population civile est réduite. Dès novembre 2023, la France s'est exprimée en
demandant clairement à un cessez-le-feu et en organisant ici même la première
conférence humanitaire de soutien. Notre priorité reste ce soutien humanitaire
en lien avec nos partenaires de la région et le soutien à toutes les
populations.
Au-delà, il faut sans plus attendre qu'Israël mette fin à la guerre, admette
qu'il a des partenaires pour la paix et s'engage à un règlement juste et
durable de la question palestinienne en coordonnant avec l'ensemble des pays de
la région pour la question de Gaza, en préservant les conditions politiques en
Cisjordanie et à Gaza de la construction d'un État palestinien et en œuvrant
avec les pays de la région et la communauté internationale à la possibilité de
deux États vivant en paix et en sécurité.
La paix est possible. L'Arabie saoudite et nos partenaires arabes de bonne
volonté, la Jordanie, l'Égypte, le Qatar, les Emirats arabes unis notamment, se
sont engagés sur celle-ci, et la France a apporté et continue d'apporter tout
son soutien. Je souhaite à cet égard que l'Europe agisse de concert avec eux
pour mettre en œuvre la solution des deux États dans le respect des nécessités
de sécurité des Israéliens comme des inspirations légitimes des Palestiniens.
Il faudra être ferme sur les principes, créatif sur les modalités et déterminé
à construire un nouveau cadre de sécurité et de coopération au Moyen-Orient.
C'est l'objectif même de la conférence internationale que nous avons initiée
avec l'Arabie saoudite et qui aura lieu à New York en juin prochain. Il nous
reviendra d'en faire un moment décisif, et c'est dans cette perspective que
nous pourrons aller vers la reconnaissance de l'État de Palestine.
Notre engagement reste aussi complet au Liban, où nous avons tant des nôtres,
tant d'amis et une si longue histoire. Nous serons là pour que le calme soit
durablement rétabli le long de la ligne bleue avec le concours de nos soldats
servant dans la FINUL et notre appui aux forces armées libanaise pour qu'elle
se déploie de manière décisive au sud du Litani et évidemment, notre
contribution au mécanisme de supervision du cessez-le-feu. C'est l'action des
États-Unis d'Amérique et de la France qui a permis d'obtenir ce cessez-le-feu
que d'aucuns pensaient impossible il y a quelques semaines. Nous sommes
ensemble engagés dans ce processus de suivi et ce mécanisme donc de
supervision, et nous y apportons notre crédit. Là aussi, fierté française et
détermination française.
Il nous faut aussi continuer ce travail avec patience et humilité, et je
remercie le concours de tous nos militaires à la fois dans ce mécanisme de
supervision comme au sein de la FINUL, mais il nous faut aussi aller plus loin
et réussir le processus politique. Jean-Yves Le Drian continue ses bons offices
et a été encore ces dernières semaines sur place, et nous souhaitons, aux côtés
de l'ensemble des forces politiques libanaises, qu'un président puisse enfin
être élu lors de la session du 9 janvier qui a été programmée ou pour la suite,
car c'est le choix décisif qui permettra seul la reprise pleine et entière
d'une souveraineté libanaise, et donc la possibilité ensuite de former un
gouvernement capable de mener les réformes nécessaires. La France, avec
constance, s'est engagée ces dernières années, avec exigence et lucidité. Nous
sommes là, nous avons été là pour obtenir ce cessez-le-feu, et nous serons là
dans la durée pour obtenir cette transition.
En Syrie, soyons fiers de n'avoir jamais cédé à la facilité de croire que le
dictateur pouvait être réhabilité. Restons fidèles aussi à notre engagement,
jamais démenti depuis 2011, pour une Syrie souveraine, libre et respectueuse de
sa pluralité ethnique, politique et confessionnelle. Nous serons fidèles à nos
alliés dans la lutte contre l'État islamique, et je l'ai dit ici avec force,
car nous savons aussi la dette que la France a à l'égard de l'ensemble des
forces démocratiques syriennes et de combattants de la liberté comme les
Kurdes, qui, à nos côtés, dans des années si difficiles, ont eu le courage de
lutter contre les groupes terroristes. Nous ne les avons pas abandonnés quand
d'aucuns leur tournaient le dos en 2018, nous ne les abandonnerons pas davantage
dans le processus en cours. Et nous sommes vigilants sur le cours de la
transition politique qui débute.
Monsieur le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, et je l'en
remercie, s'est rendu avec sa collègue allemande à Damas il y a quelques jours,
et il a très clairement rappelé nos attentes : intégrer toutes les composantes
de l'opposition à l'ancien régime, assurer la sécurité des réfugiés pour leur
retour en Syrie, poursuivre la lutte contre le terrorisme avec clarté, et
démanteler toutes les structures de production d'armes chimiques et les réseaux
de production et de trafic de drogue. Nous souhaitons que la nouvelle Syrie
participe, en effet, à la sécurité et à la stabilité régionale, et c'est dans
cet esprit que nous organiserons au printemps une troisième édition de la
conférence de Bagdad pour faire de nouveaux projets concrets à l'échelle régionale
dans l'intérêt de tous pour la paix et la sécurité.
Au fond, l'agenda que nous poursuivons, en Irak comme en Syrie, est celui de la
défense à la fois de la souveraineté de chacun de ces pays, mais aussi du
modèle pluraliste qui est constitutif de ces derniers.
Mais au fond, au-delà de ces crises, on voit bien que le défi qui nous est posé
dans la région et au-delà est l'Iran. C'est le principal défi stratégique et
sécuritaire pour la France, les Européens, toute la région et bien au-delà.
L'accélération de son programme nucléaire nous amène tout près du point de
rupture. Son programme balistique menace le sol européen et nos intérêts.
L'Iran est d'ores et déjà impliquée dans la guerre de la Russie contre
l'Ukraine par un soutien militaire affirmé et totalement identifié. Son soutien
au groupe dangereux sur tous les terrains de confrontation au Moyen-Orient, ses
tentatives de déploiement en Afrique amplifient encore ce danger à travers ce
qu'on appelle ses proxys, et la pratique de terrorisme revendiqué se poursuit.
Et donc dans ce contexte, la question iranienne est sans doute l'une des
principales sur lesquelles nous allons réengager le dialogue avec la nouvelle
administration américaine et sur lequel, au fond, la vision de la France est,
là aussi, constante depuis 2018.
Et souvenez-vous, lorsque les États-Unis d'Amérique ont décidé de dénoncer le
JCPOA, qu'ils avaient eux-mêmes promu, la France avait une vision simple : nous
devons aller vers un accord plus large. C'est aujourd'hui la ligne que nous
portons. L'Iran est un risque si nous la laissons hors du cadre. Et il nous
faut, sur la question du nucléaire, sur la question de l'activité balistique,
sur les manœuvres de déstabilisation régionale, avoir, en effet, une discussion
d'ensemble et bâtir des solutions vérifiables, irréversibles.
Ceci exige d'engager tout à la fois la nouvelle administration américaine et
les principaux pays de la région. L'Europe est crédible parce qu'elle est
constante en la matière. La France, mais avec elle, ses principaux partenaires,
nous n'avons pas varié durant ces dernières années. Nous étions plus exigeants
avant même les accords de 2015, nous avons contribué à les durcir. Nous aurons
d'ailleurs, dans les prochains mois, à nous poser la question d'utiliser, et
nous y sommes prêts, les mécanismes de rétablissement des sanctions d'ici à
octobre prochain, mais il nous faut engager plus large pour avoir justement un
traité plus exigeant. C'est à mes yeux l'un des sujets prioritaires de la
discussion stratégique avec les États-Unis d'Amérique et pour toute la région.
Je viens de parler de l'Iran, notre autre grand défi sécuritaire et stratégique
est bien évidemment la Russie, avec la guerre en Ukraine et au-delà. Là aussi,
je le sais, une fatigue parfois se répand : fatigue du soutien à l'Ukraine,
doute qui dissout les bonnes volontés, qui met en cause les montants et le sens
de notre aide. J'ai vu beaucoup de commentaires ces derniers mois pour dire que
l'arrivée du Président Trump, ce serait la fin de tout, des solutions rapides
et autres.
D'abord, je veux vous dire que, là aussi, nous essayons d'être constants, et
cela paye, et que nous nous sommes engagés dans la bataille diplomatique, car
rien n'est jamais écrit. La France a eu à organiser le premier échange entre le
Président Trump et le Président Zelenski, ici même à Paris en décembre dernier,
qui a permis d'identifier tous les défis de ce qui s'y jouent, la réalité du
conflit sur le terrain et la nécessité d'apporter des réponses qui prendront
sans doute un peu plus de temps qu'il n'était au début anticipé, ce qui est une
bonne chose.
Je veux, ici, dire pourquoi ce qui se joue en Ukraine est si important. Parce
que cela concerne en quelque sorte la sécurité internationale et les intérêts
très directs des Européens et des Français. La sécurité internationale d'abord,
parce que se joue là un révisionnisme et un impérialisme désinhibés. Si on
laisse une puissance internationale revoir les frontières internationalement
reconnues sans réaction, et le droit international à être foulé aux pieds et
par une fatigue, parce que ça nous coûterait cher, ou parce que ceci ou parce
que cela, accepter en quelque sorte de transiger, bon courage pour la suite.
Parce que ça veut dire que simplement, la crédibilité de tous sera battue en
brèche. Et donc se joue là la crédibilité de l'ordre international et de ces
règles. Mais surtout parce que ces dernières années, la Russie a accéléré son
agressivité et aussi changé la nature de son agressivité à l'égard des
Européens et d'une bonne partie de la planète. Changement radical dans ce
comportement en matière de doctrine nucléaire, qu'elle a fortement durci, dans
la menace portée à ses voisins. Ce n'est pas totalement une nouveauté, car nous
avions vu ces dernières décennies monter la tension. Elle est maintenant
beaucoup plus claire, beaucoup plus explicite. En Arménie, où la Russie, en
changeant brutalement d'alliance, a soutenu les actions de l'Azerbaïdjan, parce
que pour la première fois, elle avait un premier ministre avec courage qui lui
tenait tête. En Géorgie, où elle a, de manière évidente, déstabilisé le
processus électoral et falsifié ce dernier. En Moldavie, où elle a tenté la
même chose, échouant. Et je salue le courage et la détermination de la
Présidente Maia Sandu. A nous, collectivement, d'être vigilants pour les
élections législatives qui viennent dans quelques mois. Et je pourrais aussi,
ici, reparler des élections roumaines où la Russie n'a pas été frileuse pour
manipuler le processus électoral dans un des pays membres de l'Union
européenne. Elle a, à travers ses essais multiples, menacé le sol européen en
montrant sa capacité claire à l'atteindre avec des technologies avancées,
multiplié les perturbations aussi dans l'espace cyber, et elle a de facto
décidé de mondialiser le conflit ukrainien. Il n'y a qu'une puissance
escalatoire en Ukraine, c'est la Russie.
En associant l'Iran, comme je l'évoquais, pour produire des composantes, en
ayant une approche avec beaucoup de composantes chinoises sur des structures
duales, et c'est le dialogue exigeant que nous avons avec la Chine, et de facto
en impliquant la Corée du Nord dans le conflit. Là aussi, qui eut cru il y a
même 5 ans que la Corée du Nord viendrait s'impliquer dans un conflit sur le
sol européen. Nous en sommes là et c'est la responsabilité de la Russie. Et
donc, en quelques semestres, la nature du conflit a profondément changé et
c'est la responsabilité totale de la Russie.
C'est pourquoi ce que nous disions ici même en février dernier est sans doute
encore plus vrai aujourd'hui. Nous ne pouvons pas, comme Européens, laisser
gagner la Russie en Ukraine. Nous ne le pouvons pas pour l'ordre international,
nous ne le pouvons pas pour notre propre sécurité. Et donc la question n'est
pas de savoir si ou cela, la question est de savoir comment nous organiser
pour, en effet, tenir dans la durée, permettre aux Ukrainiens de résister et
d'être dans les meilleures conditions pour pouvoir négocier une paix durable.
C'est-à-dire une paix qui sera voulue, conçue avec les Ukrainiens, et qui
permet, là aussi, de trouver les voies et moyens d'encadrer cette menace russe
pour nous tous Européens.
Là-dessus, n'ayant aucune illusion, et je crois qu'elle apparaît de plus en
plus clairement à tous, il n'y aura pas de solution rapide et facile en
Ukraine. Le nouveau président américain sait lui-même que les États-Unis n'ont
aucune chance de gagner quoi que ce soit si l'Ukraine perd, et je vais le dire
de manière très simple, en quelque sorte, en quelques lignes : aucune solution
ne doit être trouvée en Ukraine sans les Ukrainiens, aucune solution ne doit
être trouvée pour la sécurité en Europe sans les Européens, aucune solution
rapide qui signifierait la capitulation de l'Ukraine ne saurait être bonne pour
les Européens et les Américains.
Une fois qu'on a ces principes simples en tête, il nous faut nous mettre en
capacité, quels que soient les scénarios, d'apporter un soutien durable à
l'Ukraine pour pouvoir résister, être dans les meilleures situations pour
pouvoir négocier. Et au fond, les États-Unis d'Amérique ont à nous aider pour
changer la nature de la situation et convaincre la Russie de venir à la table
des négociations. Les Ukrainiens ont à mener des discussions réalistes sur les
questions territoriales et eux seuls peuvent les conduire. Et les Européens ont
à construire des garanties de sécurité qui seront leurs responsabilités au
premier rang, car c'est une réalité géographique et géopolitique.
Tout ça me conduit, au fond, quand on regarde le moment, à constater, ensemble,
que nous sommes face à un changement profond de l'environnement stratégique qui
est le nôtre. La guerre en Europe, la Russie qui a complètement transformé son
industrie de guerre et qui produit aujourd'hui autant que la totalité des
Européens. On a fait beaucoup, on a fait cette économie de guerre, on s'en est
félicités, mais nous sommes très loin de ce que nous devons faire, nous,
Européens. La totalité des Européens, c'est un effort de production,
d'industries de défense de base technologique que celui de la Russie. Les
États-Unis accélèrent cet effort et ont des discussions stratégiques de plus en
plus désinhibées. La Chine continue de produire un arsenal, là aussi, dont la magnitude
n'est pas à notre échelle, soyons lucides. Et donc, dans ce contexte, la France
a des atouts. Celui d'avoir anticipé cette transformation par un
réinvestissement depuis 2019, Mais très clairement, il y a une accélération,
une transformation de la menace et un changement profond de l'environnement
stratégique qui est proliférant, escalatoire et désinhibé. Et il l'est dans
tous les domaines.
J'aurais pu évoquer ici, au-delà de cela, le maritime, le spatial et le cyber.
Et donc, il nous faut ici réagir. La France a l'arme nucléaire, une armée
forte, qu'elle a réparée et qu'elle a projetée vers l'avenir avec une stratégie
d'innovation. Nous avons une alliance, l'OTAN, qui doit s'adapter aux menaces
dans l'espace euro-atlantique sans chercher à se déployer au-delà, au risque
sinon de diluer ses moyens. Et nous avons une Union européenne qui doit
continuer à gagner en robustesse. Au fond, tout ce que j'évoquais tout à
l'heure, nous avons, sous impulsion française, réussi à faire passer en Europe
ce pilier européen de la défense, c'est très bien, mais ce n’est déjà pas
assez.
Et donc, il faut aller maintenant beaucoup plus vite et beaucoup plus fort. Sur
beaucoup de ces axes stratégiques, nous avons vu juste, mais il y a une telle
accélération et transformation de la menace qu'il nous faut durcir notre
position et aller beaucoup plus loin. L'adoption de la boussole stratégique, la
volonté d'engager davantage sur notre base industrielle et technologique de
défense, le lancement de l'initiative européenne d'intervention, l'accélération
de programmes industriels ambitieux, tout cela était nécessaire, il nous faut
maintenant aller plus loin. D'abord avec un programme massif d'investissements
européens et d'assumer une préférence européenne. Au moment où nous discutons
ce fameux programme dit EDIP, je le dis très clairement, la question n'est pas
de savoir s'il faut tel plafond, tel plancher. On continue à parler comme il y
a 10 ans. La question est de savoir si les Européens veulent, pour les 20 ans
qui viennent, produire ce qui sera nécessaire à leur sécurité ou pas.
Il y a fort à parier que dans 15 à 20 ans, la priorité américaine sera leur
propre défense et sera beaucoup plus autour de la mer de Chine et dans cette
région qu'aux confins de l'Europe. Si nous dépendons de la base industrielle et
technologique de défense américaine, alors, nous aurons de cruels dilemmes et
des dépendances stratégiques coupables. Nous devons, nous, Européens, produire
davantage nos propres capacités. Alors, on a commencé à le faire avec des
initiatives, avec nos amis allemands, britanniques, italiens, avec l'initiative
ELSA, avec plusieurs partenaires européens. Mais il nous faut davantage
d'ambition et une vraie préférence européenne dans nos programmes. Il nous faut
aussi aller beaucoup plus loin à l'échelle européenne, plus d'investissements
au sein de l'Union européenne et aussi plus d'ambition au sein de la communauté
politique européenne qui doit être un lieu de construction, de coopération, de
défense. Pourquoi ? Parce qu'il est à l'échelle du continent. Et ce n'est pas
le même message ni la même grammaire que celle de l'OTAN. La communauté
politique européenne que la France a proposée en 2022, qui est aujourd'hui une
réalité, nous devons la durcir sur le plan militaire et stratégique parce que
c'est le bon périmètre pour faire travailler ensemble les Britanniques, les
Européens de l'Union européenne, les Ukrainiens, les Moldaves, l'ensemble des
Balkaniques et les Norvégiens, c'est-à-dire des pays qui, aujourd'hui, sont
face au même défi stratégique et qui ne sont pas forcément tous dans les mêmes
enceintes géopolitiques. La communauté politique les rassemble parce que, comme
Européens, ils ont ce défi stratégique à embrasser.
Enfin, parlons de notre sécurité, je veux ici avoir un mot pour l'immigration.
Oui, protéger les Françaises et les Français, leur sécurité, c'est protéger nos
frontières. J'ai eu l'occasion ici, à plusieurs reprises d'y revenir, et je
veux en dire un mot. En effet, l'Europe, ces dix dernières années, a été
bousculée par plusieurs phénomènes migratoires. Elle a vécu elle-même une crise
politique profonde dans plusieurs pays et dans sa capacité à coopérer. Mais
elle a aujourd'hui des instruments et nous avons une mobilisation collective à
avoir qui doit nous permettre d'être à la hauteur de ce défi. D'abord, sous
présidence française, nous avons réamorcé le dialogue européen sur la question
de l'asile et de l'immigration. En effet, en prenant l'initiative d'une
approche graduelle, nous sommes sortis de la crise qui bloquait complètement
depuis 2015 l'avancée des textes européens, et le pacte asile-migration est une
avancée majeure pour les Européens en termes de capacité à affronter justement
ce défi.
C'est la fin de l'hypocrisie d'un système qui laissait certains en première
ligne, la fin de l'égoïsme avec l'idée qu'il ne peut y avoir de cavalier seul
et que chacun doit prendre sa part. La fin des postures aussi en assumant
l'inconditionnalité de l'asile pour mieux garantir son effectivité et en
traquant la fraude, les abus, les contournements qui rongent ce système. Avec
ce pacte, on s'est aussi dotés de moyens de contrôle et d'enregistrement à
l'arrivée sur le sol européen et de suivi, mais aussi de mécanismes plus
efficaces de retour. C'est pourquoi la stratégie de la France dans ce contexte
est d'accélérer la mise en œuvre du pacte asile-immigration, de le compléter,
de le renforcer sur les retours, d'utiliser tous les leviers européens pour
favoriser la coopération avec les pays tiers et la réelle mission, et en
continuant à renforcer la protection des frontières extérieures de l'Union
européenne.
Toute cette réponse au niveau européen, c'est ce que, sous l'autorité du
Premier ministre, du ministre de l'Intérieur, et du ministre de l'Europe et des
Affaires étrangères, et l'ensemble des collègues porteront dans les enceintes
européennes. Nous croyons dans cette approche organisée, volontariste. Je vais
être clair, j'entends parfois parler d'approches innovantes en Europe. Je serai
très prudent sur ces approches qui, bien souvent, ne sont pas conformes au
droit européen qui est le nôtre ou aux conventions que nous nous sommes données
à nous-mêmes. Mais surtout, quiconque les a vues marcher, je suis très preneur.
Ce n'est pas vrai. Ce qui a été efficace en Europe, c'est ce dont je suis en
train de parler, c'est-à-dire une approche européenne coopérative et exigeante.
Les approches nationalistes ne marchent pas, en particulier pour la France,
l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, qui, jusqu'à changement plus radical, ne sont
pas des îles, et donc, sont dépendantes de la coopération avec les pays
limitrophes. Ce qui fonctionne, ce qui produit des résultats, c'est une
approche européenne plus exigeante : protection de nos frontières, suivi des
migrations et des flux secondaires au sein de l'Union européenne et dialogue
plus exigeant avec les pays d'origine et les pays tiers. Ce n'est pas d'aller
rapatrier des gens vers des pays qui ne les ont jamais vus, ce n'est pas
d'aller, en quelque sorte, brandir des menaces au droit international, ce n'est
pas vrai. C'est ce qu'on est en train de faire et ce sur quoi les ministres
sont engagés, soir et matin, pour justement protéger les Françaises et les
Français. Mais là aussi, nous devons, nous, pour nous-mêmes, être plus
exigeants et plus cohérents. Je crois qu'il faut savoir écouter les Français
dans leur exigence, ce qui me paraît de bon sens et que nous partageons.
Nous voulons mieux intégrer, mieux accueillir, mais les peuples exigent de
reprendre le contrôle et nos compatriotes au fond ne comprennent plus que,
alors même que nous avons des gens dangereux sur notre sol, qu'on veut pouvoir
les expulser et qu’ils ne sont pas repris par certains pays, à qui on devrait
délivrer des visas sans exigence. Vous conviendrez avec moi que le bon sens
contrevient à ce précepte. C'est parfois ce qu'on fait encore un peu. Alors, la
méthode radicale et aveugle ne marche pas bien. On l'a testée dans certains
pays. La lucidité, là aussi, doit nous conduire à voir qu'au fond, il faut
simplement avoir un engagement extrêmement précis, rigoureux, mais qui consiste
à être beaucoup plus exigeant avec les pays pour qu'ils coopèrent davantage sur
ces politiques. Sous l'autorité du Premier ministre, les ministres des Affaires
étrangères et de l'Intérieur auront un travail, et je souhaite qu'il y ait une
coordination très étroite entre les ambassades, les services de consulat et
notre ministère de l'Intérieur, et nos préfets, pour que, là aussi, on mette
d'abord en œuvre le rapport Hermelin, qui, je crois, dit très précisément les
choses tout à fait pertinentes pour cette stratégie, et réussir à avoir une
exigence, de regarder en quelque sorte notre politique consulaire, en ciblant
les effets qu'on cherche à certains publics, qui généralement nous permettent
d'avoir des réactions plus rapides et pas toucher les binationaux ou les gens
qui participent à la vitalité de la relation bilatérale.
Mais d'être plus exigeants avec certains pays qui ne délivrent pas les
laissez-passer consulaires qui sont attendus pour que nous ayons une politique
migratoire efficace. On ne peut pas accepter dans la durée quand il y a une
non-coopération sur ce volet-là. Je demande donc vraiment une très grande
exigence, des résultats en la matière.
Nous devons continuer d'être un pays attractif ; on veut continuer d'attirer
les talents; on veut continuer d'avoir une immigration choisie ; on veut
continuer d'avoir une aide publique au développement qu'on a d'ailleurs
augmentée, un vrai volontarisme ; on veut continuer d'avoir justement cette
circulation de tous ; mais il faut le faire en ayant une certaine exigence et
lucidité, et savoir parler aussi à des pouvoirs quand ils ne jouent pas le jeu
sur les laissez-passer consulaires pour des irréguliers qui sont sur notre sol.
Ce travail est indispensable et c'est celui pour lequel, je sais, le
Gouvernement est profondément engagé. Au-delà de l'immigration, nous
continuerons de renforcer aussi la lutte contre tous les réseaux de
criminalité, en particulier les narcotrafiquants, là aussi pour laquelle la
coopération est absolument indispensable en la matière.
Le deuxième axe et la deuxième priorité sur laquelle j'attends beaucoup de
vous, de nous pour cette année, c'est la prospérité, la croissance de la France
et de l'Europe. Là-dessus, beaucoup de choses ont été dites, et je ne vais pas
être long dans le constat, mais l'Europe qui a beaucoup fait ces dernières
années pour continuer d'avancer, de se réformer, est face à un vrai risque de
décrochage face aux États-Unis d'Amérique et à la Chine.
Les rapports de Letta, le rapport Draghi, beaucoup de rapports d'économistes
éminents en France et ailleurs, l'ont identifié. Il y a aussi tous les chiffres
qui peuvent être convoqués. Un seul suffit à l'éclairer. Je parlais du quart de
siècle. En 25 ans, le PIB par habitant américain a cru deux fois plus vite que
le PIB par habitant européen. Les États-Unis d'Amérique sont mieux positionnés
en termes d'investissement et de masse d'investissement que les Européens sur
les technologies vertes, l'intelligence artificielle et l'industrie de défense.
On peut avoir les esprits de défaites : on est foutus, c'est fini, et achetons
américains au fond. Je dois dire parfois que dans les comportements ou dans les
évidences que certains défendent, on en est là. Je vous le dis, je pense qu'il
n'y a aucune fatalité en la matière.
Pourquoi l'Europe serait le vivier de talents qui vont travailler en
Californie, la caisse d'épargne des bourses étrangères, nous qui sommes le
continent qui a le plus d'épargne, et le marché final de la Chine ? C'est un
choix. C'est un choix stratégique. La voix que porte la France, c'est de faire
l'inverse. C'est de se dire, au fond, ce Marché unique qu'on a créé n'est pas
simplement le triomphe des consommateurs, mais c'est une force de frappe. Nous
avons 450 millions d'habitants au sein de l'Union européenne. Les États-Unis
d'Amérique, c'est 350 millions d'habitants. Mais on l'a toujours regardé, comme
au fond, une forme d'ajustement.
On a ouvert notre marché pour obtenir les grâces des autres. On a dit : On va
acheter américain pour la défense, c'est notre ombrelle. On va essayer d'être
gentil avec les Chinois parce que c'est un marché de débouchés, puis
maintenant, on les laisse rentrer. Mais il n'y a aucune fatalité à ça. Le
réveil stratégique européen qu'on a commencé avec les notions que j'explicitais
tout à l'heure, avec ce que je commençais à dire sur la question de défense, il
doit être radical sur la possibilité d'une prospérité européenne et française,
sans naïveté. C'est d'ailleurs le seul moyen d'être respecté par les
Américains, les Chinois et les grands émergents. Aussi longtemps que nous leur
tiendrons un discours qui est le contraire de ce qu'ils font pour eux et chez
eux, nous serons vus comme les grands naïfs de l'histoire. Au fond, des gens
qui sont déjà en train de disparaître. Ils savent qu'on est déjà en train de
vieillir, que nous produisons moins qu’eux d'énergie, que nous l'achetons plus
chère. Ils sont en train de se dire « et en plus de ça, ils sont gentils. » Ce
n'est pas un métier d'être gentil. Et en tout cas, ce n'est pas comme ça qu'on
construira notre avenir. En la matière, je propose d'avoir une stratégie
européenne et une stratégie française. La stratégie européenne, elle tient en
quelques mots, et c'est pour moi l'agenda de 2025 et au-delà, mais c'est en
2025 que se joueront beaucoup de choses avec la Commission qui arrive. Les
États européens ont un rôle clé, car je le rappelle, l'impulsion est donnée par
le Conseil et c'est exécuté par la Commission. Je réunirai, en février,
plusieurs collègues ici et dès le mois de mars, nous allons porter cette
ambition pour avoir, justement, une Europe qui répond à ces défis.
Point numéro un de cette stratégie européenne, la simplification. Nous avons un
immense problème et là, il faut faire notre mea-culpa collectif, nous y avons
tous coproduit ces dernières années. L'Europe s'est désynchronisée avec le
reste du monde, parfois avec les meilleures intentions, mais on investit moins,
on innove moins, mais on surlégifère. Cela ne marche pas du tout. On
surlégifère à peu près dans tous les domaines. Nous devons resynchroniser
l'agenda réglementaire européen. On légifère avec les meilleures intentions du
monde. Nous avons, nous-mêmes, porté certaines régulations avec de très bonnes
intentions, et j'en partage la philosophie. Mais dans le moment que nous
vivons, nous devons, en quelque sorte, savoir les suspendre tant qu'on n'a pas retrouvé,
la capacité à rentrer dans la compétition. Sinon, on sera balayés du champ de
l'innovation. Donc simplification qui doit aller beaucoup plus loin qu'un
simple toilettage. On doit faire une pause réglementaire massive, mais on doit
revenir sur des réglementations, y compris récentes, qui entravent notre
capacité à innover. Il faut simplement regarder de manière très lucide où on en
est, ce qui permet d'avancer ou pas. C’est cette exigence que nous devons avoir
à l'égard de l'Europe.
Sur la simplification, le deuxième élément, s'appelle le Marché unique. On doit
aller au bout du Marché unique pour avoir un vrai marché domestique pour nos
entreprises. On a un levier de croissance formidable qui ne coûte pas un euro
d'argent public, c'est de lever les barrières entre les 27 pays membres. Dans
tous les domaines où ça existe déjà, on doit l'accélérer. Si on veut que nos
startups, nos géants, nos champions de l'intelligence artificielle soient dans
la compétition internationale, il faut juste que leur marché domestique ne soit
pas le marché français, mais le marché de l'Union européenne. Approfondissement
du marché européen, c'est exactement la clé aussi en matière de numérique, en
matière d'énergie, de télécommunication.
Sur ces domaines clés, on doit casser les règles entre les 27 et les harmoniser
beaucoup plus rapidement. On doit aller beaucoup plus vite sur un Marché unique
de l'énergie et l'interconnectivité, les interconnections électriques, c'est
une priorité pour la croissance européenne, car aujourd'hui, nous payons notre
non-compétitivité électrique en la matière, enfin plutôt énergétique, alors
même que les Européens ont des capacités de renouvelable et de nucléaire,
simplement, nous ne savons pas les mutualiser et les faire circuler librement
au bon coût sur notre sol. Le marché unique est un élément de simplification
décisif.
Le deuxième élément de la stratégie européenne, c'est de repenser le commerce.
Je le disais tout à l'heure, parce que nous avons été trop naïfs. Repenser le
commerce, c'est d'abord savoir nous protéger et assurer la loyauté des
échanges. En septembre 2023, quand je m'exprimais devant vous, je défendais
déjà cet argument en parlant des véhicules électriques chinois. Je me souviens
très bien, je parlais devant vous des différences de taxation qu'il y avait
entre la Chine et l'Europe. C'est une très bonne chose que la Commission
européenne s'en soit saisie. Je défends totalement ce que la Commission a fait
sur les véhicules électriques. Ça a été un signal très fort. Nous, nous
continuerons d'être aux côtés de nos producteurs qui ont subi les mesures de
rétorsion, que nos producteurs de cognac et d'armagnac sachent la mobilisation
de l'ensemble du Gouvernement de la France. Le ministre le sait bien, et je
remercie Jean-Pierre Raffarin qui a fait l'une de ses multiples missions de
bons offices avec nos ministres en la matière, et on continuera d'avancer. Le
Premier ministre aura l'occasion de se rendre en Chine pour obtenir l'avancée
sur ce sujet. Mais on a raison de faire ça. S'il n'y a pas de loyauté des
échanges, il n'y a pas la possibilité de produire de manière compétitive sur le
sol européen. C'est simplement ce que font les Chinois et les Américains pour
eux-mêmes. L'Europe a commencé à rentrer dans cette dynamique. Nous devons aller
plus loin et défendre un contenu européen dans notre production.
Sur les véhicules électriques, ce n'est pas suffisant, ce qu'on a fait, parce
que sinon, les constructeurs iront chercher des sous-traitants chinois et iront
assembler en Europe. Mais on doit défendre dans chaque portion des grandes
chaînes de valeur, la capacité à produire européen. Cette idée, je vous
rassure, n'est pas résolument hétérodoxe. Elle n'est pas crypto-marxiste et
elle n'est pas contraire au commerce international. C'est tout simplement ce
que, depuis des décennies, font les États-Unis d'Amérique, pour eux-mêmes et
avec leurs partenaires au sein de l'ALENA. Simplement, nous, on se l'est
interdit à nous-mêmes. Au fond, on se dit, ce qui serait peut-être une bonne
idée, mais moi, je n'ai toujours pas compris, au moment où les règles de l'OMC
ne sont plus respectées ni par la Chine ni par les États-Unis d'Amérique, nous,
on va continuer de le faire, mais tout seul. Ça ne marche pas.
Donc, réveillons-nous,
regardons ce qui est fait. Et on doit défendre par notre politique commerciale
et assurer justement un niveau de compétition qui soit équitable, loyal, et on
doit défendre un contenu européen, c'est indispensable.
On doit être cohérent et avoir un agenda européen, commercial, qui est cohérent
avec notre agenda réglementaire et climatique. Et mettre des mesures qu'on
appelle clauses miroirs ou des mesures de sauvegarde qui nous permettent de
défendre cet agenda. Je ne sais pas expliquer qu'on réduise la capacité de nos
producteurs, par exemple dans le domaine de l'agriculture, à utiliser certains
produits phytosanitaires et en même temps ouvrir des accords de libre-échange à
des puissances qui ne les utilisent pas pour qu'ils viennent dans notre marché.
Quand on ne sait pas l'expliquer à quelqu'un dans la rue, c'est généralement
mauvais signe. Donc c'est une mauvaise idée. C’est pourquoi la France a
défendu, par exemple, le CETA, l'accord avec le Chili, l'accord avec la
Nouvelle-Zélande, parce qu'ils ont des clauses miroirs substantielles, parce
qu'ils ont des mesures de sauvegarde qui nous permettent de réguler les choses
en cas de déséquilibre. Mais au vu des informations qui nous ont été données
sur le Mercosur, ces dispositions n'existent pas aujourd'hui dans cet accord.
Il n'y a pas de clauses de sauvegarde si certains marchés sont déstabilisés. Il
n'y a pas de vraies clauses miroirs. Et donc on doit aujourd'hui être beaucoup
plus exigeants. Ce n'est qu'une signature et je vous rassure, là aussi, pour
tous ceux qui pensent que tout serait perdu et que c'est un effacement de la
France que la Commission ait signé l'accord avec le Mercosur. La longévité me
donne un privilège, c'est d'avoir peut-être un peu de recul. J'ai déjà signé un
accord Mercosur, plus exactement assisté à une signature au G20 d'Osaka. Il a
ensuite été balayé parce que les mêmes qui l'avaient signé n'ont pas respecté
ce qu'ils avaient dit qu'ils feraient. C'était le début du Brésil de Monsieur Bolsonaro.
Donc, je vous rassure, la messe n'est pas dite, dirais-je en bon laïc, dans ce
palais républicain. On continuera de défendre avec force la cohérence de nos
engagements, et donc, politique commerciale cohérente.
Les Européens doivent regarder les critères de sécurité nationale pour leur
politique commerciale. L'approche américaine doit nous inspirer. L'approche
chinoise doit être regardée. Nous ne pouvons pas être les seuls à considérer
que quand on parle de télécommunications, d'opérateurs, quand on parle de tas
de secteurs. La mobilité et les véhicules assistés aux États-Unis d'Amérique,
c'est un critère de sécurité nationale, ce qui leur permet de contrôler l'accès
à leur marché des véhicules électriques et de certains dispositifs
d'assistance. Ça se regarde. Si ça l'est pour les Américains, ça doit peut-être
l'être pour les Européens. Là aussi, nous avons besoin d'un vrai réveil et
d'une plus grande lucidité.
Troisième élément, c'est d'assumer une politique industrielle et d'innovation.
Donc simplifier, avoir une politique commerciale qui change de nature et qui
protège, et avoir une vraie politique industrielle et d'innovation. Là aussi,
ces 7 dernières années, on a transformé les choses. Politique industrielle
était un gros mot en Europe. Sous le premier mandat d'Ursula von der Leyen,
avec le travail remarquable de Thierry Breton, on a lancé des politiques
industrielles communes. Semi-conducteurs, batteries, hydrogène, on a eu des
vrais projets européens, c'est une bonne chose.
Il faut qu'on aille beaucoup plus loin et beaucoup plus fort sur l'intelligence
artificielle, les cleantech et la défense. Dans tous ces domaines, on doit
avoir une politique européenne industrielle et d'innovation plus volontariste
et beaucoup plus ambitieuse. À ce titre, la France aura à accueillir le 10 et
11 février prochain le sommet sur l'intelligence artificielle. Un sommet pour
l'action, nous l'avons appelé. Alors, ce sommet va permettre d'avoir une
conversation internationale sur l'intelligence artificielle. Il y aura en
particulier le premier ministre Modi qui, à cette occasion, enchaînera sur une
visite importante dans notre pays et parce que nous voulons mener justement, un
dialogue avec toutes les puissances sur l'intelligence artificielle, États-Unis
d'Amérique, Chine, mais aussi des grands émergents comme l'Inde, qui ont un
rôle clé à jouer, et les puissances du golfe.
Au-delà de cette conversation de ce que nous voulons faire pour l'intérêt
public, avec une fondation que nous allons mettre en place et toute une série
de sujets sur lesquels nous aurons l'occasion de revenir, le cœur, pour moi, de
ce sommet, ce sera l'innovation et la capacité à attirer les talents. Et c'est
de remettre les Français et les Européens au cœur de la bataille pour
l'intelligence artificielle. Formation, investissement et, sur tous les
segments de la chaîne de valeur, de dire que nous avons un rôle à jouer, mais
que, pour cela, il nous faut investir davantage et réussir à continuer de
former. On a déjà beaucoup d'atouts, mais il faut passer à l'échelle. Former,
investir, déployer. Je veux utiliser avec vous tous, et la mobilisation de tout
le réseau diplomatique en vue de ce sommet de l'intelligence artificielle,
notre capacité à porter une stratégie française et européenne pour
l'intelligence artificielle pour les années qui viennent.
Le quatrième et dernier axe de cette stratégie européenne de croissance et de
prospérité, c'est les investissements et le budget. Tout ça, on ne peut le
faire qu'en investissant beaucoup plus. Nous devons préempter la discussion
budgétaire dès maintenant, plus de ressources propres, des capacités à investir
dans la durée et à emprunter sur les marchés, mais les Européens doivent
investir davantage ensemble. Ce n'est pas simplement des aides d'État
nationales qui fragmenteraient le marché unique. C'est une capacité des
Européens à investir sur les priorités, sur les industries vertes, sur la
défense, sur, justement, l'intelligence artificielle. Et le faire à l'échelle,
c'est quasiment un doublement du budget qu'il nous faut faire. C'est ce que
nous avons su faire pendant la période Covid. Et en quelque sorte, le défi
n'est pas de même nature, mais il est au moins de même ampleur. C'est cela que
nous devons bâtir.
Dans le même temps, mieux mobiliser l'épargne européenne : nous sommes le
continent qui épargne le plus, simplement celle-ci n'est pas bien allouée et va
vers d'autres. La clé de cela s'appelle la réforme des marchés de capitaux
européens et d'avoir une vraie Europe de l'épargne et de l'investissement. Et
là aussi, c'est un des chantiers prioritaires des prochains mois au niveau
européen. Cette stratégie de prospérité européenne doit être consolidée par une
stratégie française.
D'abord, c'est par une
politique macroéconomique : nous avons depuis 7 ans des résultats établis en
termes d'attractivité, de baisse du chômage, de réindustrialisation. Et je sais
combien le Premier ministre veut consolider cette politique de l'offre et de
l'attractivité et il l'aura l'occasion d'y revenir dans les prochains jours
dans son discours de politique générale.
Deuxième axe, c'est de consolider notre attractivité avec les rendez-vous de «
Choose France ». En mai prochain, nous aurons une nouvelle édition, elle
continuera d'être très importante. Et je veux remercier l'ensemble des parties
prenantes, Business France, BPI France, toute la team export, comme on dit en
bon français, l'ensemble de nos réseaux là aussi qui sont mobilisés, car nous
devons continuer d'attirer les investissements dans à peu près tous les
secteurs et d'accroître l'attractivité de la France. Là aussi, c'est servir la
prospérité française et l'ensemble des territoires français par cette capacité
d'avoir une politique d'attractivité. Et grâce à votre mobilisation à tous, ces
dernières années, nous avons pu créer des dizaines de milliers d'emplois dans
tous les territoires du pays. Chaque année, je suis allé consacrer d'ailleurs
ces investissements, il n'y a pas une région qui a été exclue par ces derniers,
il nous faut poursuivre ce travail.
Donc politique macroéconomique de croissance et de l'offre, stratégie
d'attractivité, stratégie de sécurisation de nos approvisionnements. Nous avons
bâti une stratégie sur les minerais rares, les matériaux critiques, les terres
rares, qui a été élaborée il y a deux ans. On est en train de la déployer. Je
veux ici insister sur votre mobilisation à tous. Dans beaucoup des pays où vous
êtes, il y a encore des capacités qui sont non exploitées et qui vont nous
permettre de sécuriser toutes nos filières. Nous sommes loin d'avoir obtenu le
résultat. Et si nous voulons une France plus indépendante et qui réussisse dans
les années à venir face à ces grands défis, nous devons sécuriser sur le
lithium, sur l'uranium, sur le cobalt, sur énormément, justement, de ces
capacités.
C'est un véritable jeu diplomatique qui a commencé il y a plusieurs années avec
une agressivité chinoise qui est connue de tous. Là aussi, nous avons su le
faire ces dernières années par la politique que nous avons menée à l'égard de
la Mongolie, par exemple, inédite, mais qui permet des premiers résultats :
l'accord que j'ai lancé par le premier voyage qui avait été fait en Mongolie a
été présenté au Parlement en décembre. Et donc de la Mongolie a beaucoup de
pays de l'Amérique du Sud et de l'Afrique, nous avons des stratégies matériaux
critiques, minerais rares à poursuivre. Et vraiment, je compte sur votre
mobilisation et je demanderai, là aussi, que les ministres puissent revenir sur
cette feuille de route.
Au-delà de ça, il faut continuer d'améliorer notre balance commerciale et de
densifier notre politique d'accompagnement à l'export. Je tiendrai au mois de
mai prochain un Conseil présidentiel du commerce extérieur et le Premier
ministre aura l'occasion, avec les ministres compétents, de revenir sur chacune
de ces filières. Mais même si nous faisons déjà beaucoup, le bilan commercial
français n'est pas bon et nous le savons. Pourquoi ? D'abord parce que nous
avons une dépendance énergétique. Elle est là. Et donc je le dis aussi pour
tous ceux qui pensent que la stratégie de décarbonation de la France, du
climat, serait une lubie de progressistes. Ceux qui veulent améliorer le bilan
carbone du pays et en même temps réduire sa dépendance commerciale ne devraient
avoir qu'une priorité, c'est baisser notre dépendance aux énergies fossiles. Il
se trouve qu'on ne les produit pas, elles nous coûtent cher et c'est le cœur de
notre déficit commercial. Donc tous mobilisés pour décarboner l'économie
française, c'est le meilleur moyen d'améliorer la balance commerciale
française. Ça remet aussi les choses un peu en place.
Deuxième élément : on a des filières avec encore un énorme potentiel à
l'export. L'agroalimentaire est tiré par des fleurons, on le sait, vins et
spiritueux et quelques secteurs. Mais des semences à beaucoup d'autres
filières, on peut faire encore bien davantage : la filière santé, la filière
énergie, la filière ville de demain et ville durable, les filières tech, etc.,
ont encore un potentiel à l'export qui est considérable, avec lequel je veux
qu'on organise une stratégie filière et pays, qu'on re-balaye, parce que tout
ça, c'est un travail qui a déjà été fait plusieurs fois, mais sur lequel on
doit pouvoir faire encore bien mieux compte tenu des atouts qui sont
aujourd'hui les nôtres et qu'on puisse aussi mettre tous nos instruments en
tension.
Nous avons augmenté
notre aide publique au développement, nous avons des crédits, quels que soient
d'ailleurs les instruments de l'AFD, dont je salue la mobilisation, qui sont
là. Je pense qu'on doit, là aussi, faire l'évaluation de tout ce qui a été fait
ces dernières années. Et je ne peux pas dire que ce soit parfois un succès
quand on voit des grands projets qu'on finance à grands frais, avec des
opérateurs publics français et qui permettent à des opérateurs privés chinois
ou autres de déployer leur offre industrielle. Là-dessus, il faut aussi qu'on
resynchronise un peu les choses chez nous. Et donc, regardons le retour sur
investissement pour nos propres entreprises, pour nos propres filières. Il n'y
a pas de fatalité. En tout cas, je pense que dans une ère d'argent rare dans
laquelle nous sommes et nous allons continuer d'être, il est clair que nous
devons mobiliser tous les canaux côté financement pour maximiser cet impact.
C'est indispensable.
Pour réussir cela et cette stratégie de prospérité, il nous faut diversifier
nos partenariats. Là aussi, je ne serai pas exhaustif, mais je veux citer
quelques points. On a des partenariats de croissance sur lesquels je veux qu'on
réinvestisse. D'abord, nos amis britanniques. Nous tiendrons en 2025 un nouveau
sommet franco-britannique pour une nouvelle ambition aux traités de Lancaster
House et renouveler notre coopération stratégique. Il n'y a évidemment pas que
les sujets économiques et pour moi, on doit, avec nos voisins britanniques,
faire encore bien davantage.
Le deuxième, c'est l'Europe au sens large. Je parlais tout à l'heure de
communauté politique européenne en parlant des aspects stratégiques, mais c'est
un potentiel de croissance économique qu'il nous faut bien mieux mobiliser. Et
soyons lucides, au moment du dernier acte d'élargissement massif que nous avons
porté, la France a beaucoup moins bénéficié de l'élargissement que nos voisins
allemands. Nous avons été moins bien organisés et moins volontaristes. Mais il
n'y a pas de fatalité à ça. L'Europe réunie, c’est 700 millions d'habitants et
donc de consommateurs. C'est un marché relativement homogène de gens plus
riches que la moyenne mondiale. C'est une terre d'expansion et donc, je
souhaite qu'au sein de la CPE, on ait aussi une stratégie de croissance, de
partenariat qui repose sur cette volonté de faire.
L'Indo-Pacifique,
au-delà des sujets stratégiques et de ce que j'ai eu l'occasion de dire ces
dernières années, est évidemment pour nous une terre de priorité. Je pense que
la France y a une voix singulière. Depuis 2018, on a bâti une stratégie, elle
est cohérente. Nous l'avons ensuite européanisée et c'est une stratégie qui
aide à une forme d'indépendance à l'égard de la Chine, nombre d'États, sans
être conflictuelle. Et nous avons, en quelque sorte, la beauté de la tierce
partie. Nous ne sommes pas inféodés aux intérêts chinois dans la région, nous y
sommes présents par nos territoires ultramarins, mais nous ne sommes pas dans
une stratégie de confrontation et nous n'entendons pas y entrer, contrairement
aux États-Unis d'Amérique. Nous avons un potentiel en Indo-Pacifique énorme, ce
qui nous a permis d'ailleurs d'y bâtir des contrats de défense historiques. Le
plus grand contrat de défense des dernières décennies de la France, bien
supérieur en capacité, en retour sur l'industrie française, que feu le contrat
AUKUS pour lequel nous avons eu une alliance de revers, c'est celui que nous
avons bâti avec les Émirats arabes unis, qui est un contrat remarquable en
termes stratégique et de défense. Mais au-delà des Émirats arabes unis, ce que
nous avons avec le Qatar, avec l'Inde, avec l'Indonésie et avec beaucoup de
puissance de la région, la capacité que nous avons à arrimer cette présence
avec Djibouti et ce qui s'entoure est déterminante. Et donc, nous avons en
Indo-Pacifique, en effet, encore un potentiel considérable, là aussi pour notre
prospérité, dans tout le domaine des industries de défense, ce qui fait que je
me rendrai à Singapour pour le dialogue de Shangri-La au printemps prochain,
puis dans plusieurs pays de la région.
En Amérique du Sud, là aussi, soignant les affinités anciennes que nous avons,
cherchant des accords mutuellement bénéfiques dans tous les secteurs, nous
avons une stratégie de croissance à construire. C'est ce que nous avons, là
aussi, relancé avec le Brésil du président Lula, ce que nous avons consolidé
ces dernières années avec l'Argentine, et avec un fil conducteur, c'est
justement l'industrie décarbonée et les métaux critiques. Ce continent a des
potentialités. J'évoquais le Chili tout à l'heure avec les accords signés et
que nous avons consolidés par la visite récente que j'ai pu y effectuer. Mais
dans la plupart de ces pays, il y a des stratégies là aussi très cohérentes
avec la nôtre. Et je pense en particulier aux accords justement de sécurisation
d'approvisionnement que nous avons signés et de croissance décarbonée avec le
Brésil.
Dans la péninsule arabique, nous devons amplifier notre stratégie
d'investissements croisés. L'Arabie Saoudite a été l'occasion de le faire le
mois dernier, mais nous avons là aussi des partenaires de confiance dans la
durée avec lesquels nous avons plusieurs opportunités.
C'est dans cet agenda de prospérité et ces nouveaux partenariats que je veux
évoquer le continent africain. Et je veux le faire là aussi avec beaucoup de
reconnaissance pour tout le travail que vous faites et de clarté.
D'abord, nous avons un agenda qui doit sortir en quelque sorte des obsessions
du passé. J'ai fait le maximum des efforts, et je continuerai de le faire, pour
regarder les questions historiques, culturelles et mémorielles. Je crois que
nous l'avons fait avec beaucoup de sincérité ces dernières années, et du
travail inédit qui a été fait sur l'Algérie avec la commission Stora, en
passant par le discours qui a été donné par le Ministre à Thiaroye pour le
Sénégal, à la politique de restitution des œuvres d'art, conformément à
l'agenda de Ouagadougou que j'avais évoqué. Nous avons, ces dernières années,
profondément changé ce logiciel. C'est-à-dire que la France regarde son passé
dans sa complétude : elle a nommé les choses et elle cherche à avoir une
approche scientifique, historiographique, à la fois décomplexée et
dépassionnée, et nous le ferons encore avec le Cameroun, avec le comité
d'historiens que nous avons installé. J'assume totalement cette politique, elle
est bonne. Je le dis en tant que Président, la République naît après la
décolonisation : dans un continent qui à 75 % a moins de 25 ans, le dialogue
avec l'Afrique ne peut pas être l'otage d'un panafricanisme de bon aloi
contemporain qui utilise en quelque sorte un discours postcolonial en ayant
d'ailleurs des soutiens de revers qui sont les impérialistes d'aujourd'hui.
Cette espèce de combination, de faux intellectuels, manipulant les réseaux
sociaux, utilisant le désarroi d'une jeunesse et les intérêts de la Russie ou
d'autres en Afrique, soyons lucides, mais n'y cédons pas. Et donc, dans ce
contexte-là, non, la France n'est pas en recul en Afrique, elle est simplement
lucide, elle se réorganise. Je dis ça parce que quand je lis une bonne partie
de notre presse et beaucoup de commentaires, les gens, regardant avec les
lunettes d'hier, disent que c'est terrible, l'Afrique, on est en train de
disparaître. Non, on a choisi de bouger en Afrique. On a choisi de bouger parce
qu'il fallait bouger. 1) On a regardé notre relation passée, mémorielle,
culturelle. On la factualise, on l'assume, on se dit la vérité, mais on ne cède
rien à la désinformation et aux ingérences. 2) Nous avions une relation
sécuritaire. Elle était de deux natures, en vérité. Il y a une partie, c'était
notre engagement contre le terrorisme depuis 2013. On avait raison. Je crois
qu'on a oublié de nous dire merci. Ce n'est pas grave, ça viendra avec le
temps. L'ingratitude, je suis bien placé pour le savoir, c'est une maladie non
transmissible à l'homme. Je le dis pour tous les gouvernants africains qui
n'ont pas eu le courage vis-à-vis de leurs opinions publiques de le porter,
aucun d'entre eux ne serait aujourd'hui avec un pays souverain si l'armée
française ne s'était pas déployée dans cette région.
J'ai une pensée émue pour nos soldats qui, parfois, ont donné leur vie et
pendant des années se sont battus. Nous avons bien fait. On est partis parce
qu'il y a eu des coups d'État, parce qu'on était là à la demande d'États
souverains qui avaient demandé à la France de venir. À partir du moment où il y
a eu des coups d'État, où les gens ont dit : « notre priorité, ce n'est plus la
lutte contre le terrorisme », c'est ceci ou cela, qu'importe, la France n'y
avait plus sa place, parce que nous ne sommes pas les supplétifs de
putschistes. Donc, on est partis. Et ensuite, on a décidé, ça, c'est le
deuxième volet, de réorganiser notre présence militaire. Pourquoi ? Parce qu'on
avait, en quelque sorte, une rémanence, et on nourrissait nous-mêmes un
discours post-colonial. Parce que dans les pays d'Afrique francophones, il y
avait cette histoire, et donc, on avait laissé une présence installée dans nos
bases. Est-ce qu'elle avait encore une justification ? Plus tellement. Est-ce
que c'était ça, le rayonnement de la France ? Non. Je salue tous ceux qui ont
servi, ça ne l'était plus là. Et ça n'était plus compris, c'était utilisé.
C'est-à-dire que tous les réseaux d'activistes que j'évoquais venaient dire : «
Regardez les Français, ils ont un camp avec 2 000 soldats, là, donc ils vont
préparer un coup d'État ». Et toutes les désinformations possibles étaient
utilisées contre nous.
Donc, nous avons patiemment, et je remercie Jean-Marie Bockel, je le remercie à
double titre, personnel et pour cette mission, parce qu'il fait partie de ceux
qui ont vécu dans sa chair et la chair de sa famille, ce que j'évoquais tout à
l'heure. Mais il a mené patiemment, en lien avec les ministres et le CEMA, cette
mission. Et donc, nous avons proposé aux chefs d'État africains de réorganiser
notre présence. Comme on est très polis, on leur a laissé la primauté de
l'annonce. Mais ne vous trompez pas, c'est nous qui l'avons... et parfois, il a
fallu y pousser. Mais ce n’est pas parce qu'on est polis, corrects, et qu'on se
réorganise nous-mêmes, qu'il faudrait que ce soit retourné contre nous en
disant : « ils sont chassés d'Afrique ». Je peux vous dire que dans quelques
uns de ces pays, on ne voulait pas enlever l'armée française ou même la
réorganiser, mais on l'a assumé ensemble. C'est ça, le partenariat. Et donc,
oui, nous sommes en train d'ouvrir un partenariat de sécurité et de défense
nouveau, où on aura des bases stratégiques. Djibouti en fait partie, c'est pourquoi
elle est d'une toute autre nature. Je l'ai évoquée devant nos militaires, elle
sera pérenne, stable, parce qu'elle est régionale, et on va demander à nos
partenaires de savoir exprimer leurs besoins en termes de défense. On va aussi
faire plus de formations, plus d'équipements, plus de renseignements, plus de
contrats aussi dans la durée de défense. On va qualifier la menace avec eux et
on va aussi inventer de nouvelles relations, comme on l'a fait ces dernières
années avec le Bénin, relation inédite, comme on va le faire avec le Nigeria,
où on a commencé un dialogue stratégique qui n'existait pas jusqu'alors, ce qui
était une aberration, etc. Partenariat stratégique de défense, désinhibé, mais
d'avenir.
Au-delà de ça, le continent africain, c'est un continent de croissance, et
là-dessus, nous sommes trop frileux. Je le dis aussi parce que quand je lis,
toujours, la presse, les lunettes françaises sont obsédées par l'Afrique
francophone. Il faut regarder l'Afrique francophone avec fierté. On y a des
intérêts, on y a des amitiés chères chez les dirigeants, dans la société civile
et ailleurs. Mais enfin, on a bien fait de faire le premier grand voyage depuis
25 ans du Nigéria en France il y a quelques semaines, 25 ans. Ce n'est qu'un
pays à 250 millions d'habitants. On a bien fait d'aller faire la première
visite au Kenya. Imaginez. On a bien fait de retourner pour la deuxième fois en
Éthiopie, pays de plus de 100 millions d'habitants, d'avoir consolidé une stratégie
énergétique et d'investissement avec l'Afrique du Sud. Nos lunettes sur
l'Afrique ne sont plus les bonnes, quand on parle de l'Afrique. C'est un
continent où il y a des grands émergents, où il y a des potentiels de
croissance formidables, et nous sommes en train parfois de désinvestir.
Il faut retrouver de l'audace, repenser nos financements, et là-dessus, nous
devons, en interministériel, repenser nos financements pour prendre plus de
risques et accompagner plus de risques, repenser nos règles européennes pour
qu'on ait une capacité de financement de nos grands acteurs, et avoir une
stratégie avec nos entrepreneurs, toutes filières confondues, beaucoup plus
ambitieuse à l'égard du continent africain et de la regarder comme un continent
d'opportunités sur la question commerciale et économique, sur la question
alimentaire et agricole, sur la question de l'innovation dans tous les
domaines, sur la question artistique et culturelle, sur la question sportive,
qui sont là aussi des domaines où nous avons des expertises, où on les a
montrées au monde entier, en particulier avec les Jeux olympiques et
paralympiques, et où il y a toute une stratégie export qu'on doit déployer,
parce que tous les acteurs français qui ont travaillé pour nos Jeux, on veut
qu'ils aillent travailler pour la Coupe d'Afrique des Nations et d'autres
grandes compétitions, et que ce soit, ce faisant, une politique qui vienne en
soutien avec ce qu'on fait en matière éducative et autre. Et donc, je vous fais
confiance pour que ce logiciel, qu'on a commencé à changer à Ouagadougou, soit
à chaque fois réexpliqué, porté, assumé, comme un logiciel de conquête.
Comme toutes les transitions, c'est difficile parce qu'il y a des nostalgiques,
parce qu'il y a des gens qui ne comprennent pas ou qui ne veulent pas
comprendre, et parce qu'on bouscule des intérêts acquis. Mais croyez-moi, c'est
une bonne chose, parce que le monde change et que nous avons besoin d'embrasser
justement ce nouveau partenariat.
Et, en parlant du continent africain, c'est en particulier ce qu'on veut faire
avec le Maghreb. Pour moi, un des temps importants de ces derniers mois a été
ce que nous avons réussi à bâtir avec sa majesté le roi Mohamed VI. Lors de la
visite d'État, plusieurs d'entre vous m'y accompagnaient il y a quelques
semaines, nous avons construit un partenariat pour les décennies à venir
totalement nouveau. Il est dans tous les domaines, il est d'une ambition
inédite, et il est pour moi véritablement constitutif de cette nouvelle
approche. Il doit d'ailleurs être un de nos relais à l'égard d'une approche
africaine réinventée. C'est-à-dire qu'on aura des projets franco-marocains sur
le continent africain. Parce que c'est une autre façon aussi d'aborder ce
continent et de changer le regard à l'égard de la France quand on l'aborde
ensemble. Et donc le Maghreb sera aussi dans cette stratégie, pour moi au cœur
d'un agenda positif : la saison Maghreb, le Fonds Maghreb, l'Académie des
talents. Et nous ne devons pas nous résoudre, malgré les tensions qui peuvent
exister avec certains, à la nécessité d'avoir un tel agenda.
Enfin, cet agenda de prospérité, nous devons le penser également dans ces
stratégies de partenariat avec nos Outre-mer. J'ai eu l'occasion de le dire à
plusieurs reprises, mais nous n'avons pas réussi collectivement, et c'est une
question d'organisation, à réussir à remettre véritablement la France
archipélagique au cœur de notre stratégie internationale.
La France est un archipel. On regarde trop rarement comme ça en disant que ce
n'est qu'un hexagone. Nos territoires ultramarins nous permettent d'être au
cœur de tous les continents. Et comme nous sommes en même temps un grand pays
jacobin, et que tous nos territoires ultramarins ont ce jacobinisme en eux,
chacun avec leur histoire, ils regardent toujours Paris. Ce n'est pas le
meilleur moyen toujours pour avoir une stratégie de croissance et optimiser nos
potentiels. Il faut avoir une stratégie régionale pour tous nos territoires
ultramarins. J'ai lancé ça il y a 7 ans, elle avait mis au cœur de la stratégie
le ministère des Outre-mer, et je suis confiant sur l'autorité du Premier
ministre, que le ministre d'État et le ministre de l'Europe puisse bâtir vraiment,
en lien là aussi avec les préfets et les ambassadeurs, des vraies stratégies.
Alors, on s'est réancrés ces dernières années dans les formats régionaux. Je me
félicite que la Martinique ait rejoint la CARICOM. On s'est battu pour être
membre dans l’océan Indien de la Commission de l'Océan Indien. La Réunion a pu
rejoindre. On va maintenant se battre pour que Mayotte puisse rejoindre. On
s'est battus aussi avec l'Unité du Pacifique Sud, le FIP. Et donc ces dernières
années, dans toutes les enceintes régionales, nous avons fait un gros travail
diplomatique pour nous réinsérer dans ces enceintes où on était parfois
totalement absents.
Maintenant, il faut maintenant les faire vivre, mais avoir des stratégies de
recherche, de croissance, de potentiel dans tous les domaines d'activité avec
les pays de la sous-région. Avoir une stratégie sur le sport avec la Jamaïque,
quand on est aux Antilles, ce n'est pas une mauvaise idée. Avoir une stratégie
de développement avec tous les pays de l'Océan Indien en matière touristique,
de développement. Aider Mayotte à répondre aux défis de la reconstruction, avec
évidemment la réunion, mais toute la sous-région, c'est ce qu'il nous faut
faire. Réussir à avoir une stratégie en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie
française, là aussi avec toute la sous-région, c'est évidemment ce qu'on est en
train de bâtir et qu'il faut accélérer. Avoir une stratégie amazonienne pour la
Guyane, c'est exactement ce que nous voulons avec le Brésil. C'est un potentiel
de retour pour nos compatriotes dans ces territoires qui est transformant. Et
je remercie le Gouvernement ô combien mobilisé pour Mayotte, à la fois,
l'urgence et sa reconstruction.
Là aussi, la coopération avec la sous-région sera déterminante, y compris en
termes migratoires. Et il nous faudra avoir une coopération exigeante et
respectueuse avec les grands voisins, dont les Comores. J'entends les propos
faciles qui sont parfois tenus. On a toujours des succès d'estrade quand sur
place, on va insulter les Comores. La réalité fait que d'abord, les choses sont
toujours plus compliquées qu'on ne veut bien le faire croire. Mais ensuite,
qu'il faut surtout engager, là aussi, un dialogue exigeant, mais respectueux.
C'est ce que nous ferons avec toute la sous-région. Enfin, et je terminerai
là-dessus, je vous rassure, et ce sera plus court, après la protection et la
prospérité sur la capacité que nous aurons à construire nos solutions communes.
Dans tous ces désordres, on a quand même quelques défis sur lesquels il nous
faut continuer à bâtir une capacité à agir ensemble. Et où la France a un rôle
singulier à jouer, en particulier pour les mois qui viennent. Le changement
climatique, la santé et l'alimentation, les inégalités de rôle de la finance et
la défense de nos démocraties.
Le climat d'abord, je le disais, les accords de Paris ont dix ans. Ils ont déjà
été menacés en 2017 lorsque le Président Trump a annoncé sa sortie. Je pense
que la situation est plus grave encore aujourd'hui, si je devais être honnête
avec vous. Parce qu’à la fois, le Président Trump menace une sortie de ces
accords, mais il reprend, de manière décomplexée, une production massive
d'énergie fossile, et va lancer une production décomplexée dans beaucoup de
pays, et que ces dernières années s'est noué un malentendu avec le Sud, et en particulier
beaucoup de pays africains, sur les énergies fossiles. Et en quelque sorte, des
leçons que les Européens, les Occidentaux, donneraient à ces derniers pour leur
interdire qui de faire ici de gaz ou du pétrole. Et donc, il y a un risque très
important d'une régression de notre agenda dans les mois qui viennent.
Alors face à cela, je pense qu'il nous faut réengager, c'est en tout cas le
rôle de la France, d'abord pour aider absolument le Brésil à réussir la COP30 à
Belém. Ce sera sans doute l'une des COP les plus décisives des dernières
années, avec un objectif, évidemment, neutralité carbone. Et à mes yeux,
l'agenda sur lequel on doit mettre le cœur de nos efforts et de nos
investissements, c'est la sortie du charbon le plus vite possible de tous les
grands émergents. Et là-dessus, nous devons le faire sans donner de leçons,
avec beaucoup de respect, mais la stratégie que nous avons avec tous les grands
émergents, en particulier avec les accords que nous avons bâtis ces dernières
années, les fameux JETP, est stratégique, c'est celle qui a le plus d'impact
sur le climat.
Si on veut vraiment transformer les choses, c'est d'accélérer le pic du charbon
de la Chine, mais d'aider le plus vite possible l'Inde, le Vietnam, l'Indonésie
et d'autres à sortir justement du charbon, aider l'Afrique du Sud dans sa
transition et son accélération, etc. Et donc, c'est là-dessus que nous allons
concentrer nos efforts, à la fois diplomatiques et d'investissements.
Il nous faudra aussi continuer d'animer nos One Planet Summit et des
initiatives concrètes d'alliances, et je crois à la force de ces alliances avec
toutes les parties prenantes, au-delà de la COP30 à Belém - ce sera le deuxième
axe d'action. Et donc, nous continuerons d'avoir nos alliances concrètes avec
les financiers, avec les industriels, avec les territoires, et donc d'avoir une
guerre de mouvement pour continuer à scander des résultats concrets sur cet
agenda.
Troisième élément, nous continuerons aussi l'agenda biodiversité, la France l'a
porté ces dernières années. Nous avons, ces derniers mois, su bâtir des crédits
biodiversités qui vont mettre du temps à prospérer. Mais la seule chose qui est
résolument efficace et transformante, c'est d'avoir une approche carbone et
biodiversité. Et donc cet agenda complet, c'est celui que la France portera, là
aussi, dans les enceintes.
Et puis enfin, nous aurons cette année en juin à Nice à accueillir la
Conférence des Nations unies sur l'Océan. Et ce sera un rendez-vous extrêmement
important, là aussi, pour le climat, la biodiversité et la question des océans.
Parce que nos océans sont un puits de carbone déterminant, une réserve de
biodiversité fondamentale, un continent de recherche quasiment à inventer, un
lieu, là aussi, d'opportunités absolument inédit, un espace de conflictualité
très fort. Cette Conférence des Nations unies sera un élément déterminant. Je
demande vraiment la mobilisation de tout le réseau diplomatique pour cette
conférence de Nice. Et nous avons quelques objectifs, on aura l'occasion d'y
revenir dans les prochains mois, mais je veux simplement que vous en ayez en
tête quelques-uns très clairs. On va mettre en place une organisation de
recherche qui sera vraiment le GIEC des océans. Et ça, on en a besoin si on
veut objectiver la chose. Je veux qu'on puisse ratifier le traité sur la haute
mer, dit BBNJ. Ça a été un des succès français des derniers mois. Cet accord a
été bloqué depuis des décennies et je félicite tous ceux qui ont contribué à ce
qu'on le débloque. Mais pour qu'il rentre en vigueur, il faut que 60 pays le
ratifient. Et donc, mettons-nous vraiment en mouvement pour avoir ces 60
ratifications à Nice. C'est un élément vraiment transformant de la régulation
de la haute mer.
Et puis, nous devons essayer de reprendre l'effort qui a échoué à Busan ces
dernières semaines sur le plastique. Et donc essayons d'avoir un traité
international sur le plastique ou au moins, sur la Méditerranée ou Méditerranée
élargie. C'est un enjeu à la hauteur vraiment de nos ambitions. Je ne suis pas
exhaustif sur l'agenda, mais c'était là nos principaux objectifs. Ça, c'est
pour le climat.
Sur santé et alimentation, on sait combien c'est un objectif d'intérêt général.
On a avancé, réinvesti sur les grands fonds multilatéraux, sur l'Organisation
mondiale de la Santé. Nous avons, il y a quelques semaines ensemble, démontré
notre force à Lyon par l'inauguration de l'Académie de l'OMS, qui est vraiment
l'ancrage en matière de formation de recherche en France de l'organisation.
Mais là aussi, nous avons quelques défis en matière de santé et d'alimentation.
Et la voie de la France sera importante pour continuer d'abord à défendre les
crédits, mais à défendre une voie qui est celui d'une recherche libre et
ouverte en matière de santé.
Il y a un risque aujourd'hui très important dans l'agenda international, c'est
celui d'une sortie des États-Unis d'Amérique de l'OMS et, en quelque sorte,
d'une privatisation du débat. Et on le voit d'ailleurs chez certains acteurs
qui commencent à revenir en arrière sur des règles, à brouiller les cartes ;
or, on a besoin face au risque de pandémie, d'avoir une OMS plus forte, et au
lieu de la fragiliser, de tirer les leçons de la pandémie que nous avons vécue,
et d'avoir des mécanismes de détection des crises plus rapides, d'assurer et de
consolider son indépendance face aux pressions diplomatiques qu'elle peut
subir, et de poursuivre son agenda. L'alimentation est jumelle, on le sait, de
la santé. C'est pourquoi, en mars prochain, nous aurons le Sommet Nutrition for
Growth, qui permettra d'obtenir des résultats concrets pour lutter contre la
malnutrition infantile et poursuivre cet agenda. Et là aussi, je n'oublie pas
le nexus indispensable entre climat, biodiversité, alimentation, santé, avec
cette stratégie One Health, que nous avons conçus au cœur de la pandémie et
nous aurons l'occasion d'organiser cette année un sommet en la matière qui
permettra là aussi de remobiliser tous les instruments en la matière ces
dernières années au service de ce multilatéralisme efficace. Et donc il faudra
redoubler d'engagement sur santé et alimentation à un moment donné où cet
agenda peut être fragilisé par la conflictualité sino-américaine et un probable
retrait américain.
Le troisième théâtre de combat, ce sera celui de la réforme de l'architecture
financière internationale. Là-dessus, le risque qui est le nôtre est simple,
c'est une fragmentation du monde dans lequel nous vivons. On est habitués,
depuis la sortie de la deuxième Guerre mondiale, à un monde avec le Fonds
Monétaire International, la Banque mondiale. Celui-ci est progressivement
devenu caduc. Il faut être là aussi lucide parce que ces règles
d'investissement et de représentativité n'ont pas tenu en compte, pris en
compte les grands émergents, et parce qu'il y a une stratégie chinoise de
contournement de cet ordre international. Il y a ensuite une tension qui existe
avec ce double standard qui est nourri par les deux grandes crises, ukrainienne
et proche-orientale, et un narratif qui est utilisé par certains, qui consiste
à dire qu'un Sud global devrait se séparer en quelque sorte de cette
organisation internationale par trop occidentale.
Le défi qui est le nôtre est véritablement de bâtir des règles plus justes,
respectueuses et efficaces, mais de consolider un ordre mondial financier
international. Cette réforme, nous en avons posé les bases au sommet pour le
financement africain en 2021 et au sommet que nous avons fait à l'été 2023 sur
le nouveau financement international. Il a permis de bâtir les 4P, ce pacte de
Paris pour les Peuples de la Planète qui a été rejoint par une soixantaine de
pays à travers le monde. D'abord, je veux qu'on continue cet effort pour qu'on
puisse rejoindre le 4P. Et ensuite, on va scander les prochains mois par des
initiatives concrètes.
Que dit ce pacte de manière très simple ? Premièrement, il ne faut pas avoir à
choisir entre la question du développement des opportunités économiques et la
lutte contre le dérèglement climatique et pour la biodiversité. C'est-à-dire
pas de leçons à donner et on n'a pas à dire aux gens, renoncez à votre
croissance pour le climat dans beaucoup de pays du Sud. Deuxièmement, Le chemin
doit être choisi par chaque pays. Finies les grandes règles où tout le monde
est habillé, si je puis dire, avec le même modèle décidé ou à Bruxelles ou à
Washington ou ailleurs. Stratégie nationale, c'est ce qui préside à nos fameux
JEP ou autres. Troisièmement, choc concessionnel public. Et donc on doit
beaucoup mieux mobiliser nos finances communes, par des réinvestissements pour
les pays qui le peuvent, par la mutualisation et le meilleur travail de nos
banques. C'est ce qu'on a fait avec la finance en commun, qui met en réseau la
mobilisation de l'AFD et de l'ensemble de ses partenaires, à travers le monde,
toutes les banques de développement, les banques multilatérales et les banques
régionales ; et à travers ça, donc, davantage aussi mobiliser le bilan de la
Banque mondiale et du FMI. Et quatrième point, plus d'argent privé, effet de
levier. Ces quatre règles ont commencé d'ailleurs à percoler, puisqu'il y a une
transformation qui est en cours au FMI et à la Banque mondiale. C'est celles
qui nous ont conduit à proposer, puis à réussir, l'émission de droits de tirage
spéciaux au FMI, puis la réallocation de plus de 100 milliards vers les pays
les plus pauvres dans le continent africain, on doit poursuivre cet agenda en
donnant plus de place aux émergents, en changeant la gouvernance, l'ambition,
mais l'agenda 4P est plus valide que jamais.
2025 doit être un agenda où on a plus d'adhésion, et je vous demande dans
chacun de vos pays d’aller chercher les adhésions de pays à celui-ci où on
réalise des transformations conformément aux plans de route, et où on prépare
aussi ce que je veux parachever lors du G7 que la France aura organisé en 2026,
qui est vraiment de mettre en place ce nouvel ordre international. À cet égard,
nous reviendrons plus précisément sur ces investissements dans le cadre du
Conseil présidentiel du Développement, qui se tiendra en mars prochain.
Et puis le dernier point, c'est la défense de la démocratie et de
l'universalisme. Je le disais, un quart de siècle s'est écoulé et a détruit
beaucoup d'illusions. Il y a un quart de siècle, on nous disait que la
démocratie était une construction politique qui n'avait vocation qu'à
s'étendre, que c'était la fin de l'histoire pour certains, et que tout irait de
mieux en mieux. Le réveil a été dur, il n'a pas commencé cette année, mais je
ne voudrais pas que nous soyons, à un quart de siècle après, touchés par le
syndrome inverse. C'est-à-dire que quand j'entends beaucoup, on n'ose plus
quasiment défendre l'État de droit, la démocratie, ce ne serait plus à la mode,
et il y a une espèce de fascination mortifère pour l'international des
réactionnaires. Alors, ils sont très forts, ils ont de l'argent, et il y a une
espèce, en effet, d'accélération réactionnaire, pour citer un article récent
qui est assez bien vu, mais qui met ensemble des grands intérêts financiers
privés. Et au fond, ce qui est le résultat de quelque chose qui est vrai fait
que nos démocraties libérales n'ont pas été assez efficaces face aux défis des
classes moyennes. Ça, c'est vrai. Et je me bats depuis des années pour cela
avec des succès et des échecs. Je suis lucide. Et on doit tous continuer à se
battre. Mais ce n'est pas parce que la démocratie libérale n'est pas assez
efficace face à la question migratoire, face à la question de l'économie, de sa
simplification, face à telle ou telle question, que les démocraties libérales
ou les régimes autoritaires seraient plus efficaces. Et c'est un peu ce qui est
en train de se passer. C'est un peu le récit que certains seraient en train de
construire. Tous ceux qui pensent que, par exemple, fini le changement
climatique : si on veut de l'économie, il faut simplifier, on abandonne. Je
vous le disais, si nous, on arrête le changement climatique, on dégrade notre
balance commerciale. Enfin bon, nous, on ne produit pas de pétrole et de gaz.
Pas bon pour nous du tout, ça.
Ceux qui pensent que l'indépendance des juges, l'indépendance des journalistes,
l'indépendance du monde académique, c'est une entrave à l'efficacité des
gouvernements, faites un test simple. Qui a été le plus efficace pendant les
pandémies ? Les démocraties. C'était très dur, on s'en souvient. Tous les
jours, il y avait des gens pour nous expliquer ce qu'il fallait faire. C'était
très fatigant, je peux témoigner. Mais c'est ça. Il y a des scientifiques
reconnus par leurs pères qui expliquent ce qu'est la science. Il y a des gens
qui viennent contester ce que le Gouvernement fait. Il y a des gens qui le font
devant le juge et parfois, ils gagnent pour revenir sur des trucs que fait le
Gouvernement. Ça s'appelle une démocratie.
La réalité, avec le recul sur les pandémies, c'est que les démocraties ont été
plus efficaces que les régimes autoritaires. Dans les endroits où la science
n'est plus libre, quand on a une pandémie, ça marche moins bien. Dans les
endroits où il n'y a plus de presse libre, quand il y a un gros problème, ça
marche moins bien. Je dis juste ça qui pourrait paraître une évidence, mais
rappelons-le partout et tout le temps. Et donc nous devons bâtir un agenda
volontariste de défense de la démocratie, de l'universalisme, de la séparation
du pouvoir, des valeurs de la démocratie libérale et de ses principes
fondamentaux, égalité entre les femmes et les hommes, protection des minorités
politiques, existence de contre-pouvoirs et d'infrastructures de l'information.
Et ce n'est pas parce que, parfois, nous manquons d'efficacité pour régler les
problèmes, que nous devons renoncer à nos principes. Au contraire, nous devons
être beaucoup plus efficaces en défendant ces principes, parce que c'est bien
pour ça qu'on se bat à la fin et que tout ce que je vous dis depuis tout à
l'heure n'aurait aucun sens. Si, au fond, à la fin, on a envie de ressembler
principiellement à la Russie, pourquoi considérer qu'aujourd'hui, c'est un
ennemi stratégique ? C'est le grand paradoxe de cet international réactionnaire
qui fascine tant de monde quand j'écoute nos ondes. Et en plus, allez les
regarder de près sur l'immigration, sur la Russie, sur les réseaux sociaux.
Est-ce qu'ils pensent la même chose ? Pas tout à fait, pour ne pas dire qu'ils
pensent souvent le contraire.
À cet égard, c'est pourquoi je vous demande d'avoir une diplomatie qui continue
à soutenir la cause des femmes partout dans le monde, avec l'initiative
Marianne, que nous continuerons, mais toutes les actions qui sont menées par le
réseau — soutenir la démocratie avec les initiatives que nous avons pu
conduire, par exemple, en Afrique auprès du professeur Mbembe, l'essor de la
nouvelle génération d'engager pour la démocratie avec les Young leaders
africains et que nous continuerons et démultiplierons, le soutien pour le
partenariat information et démocratie de RSF à l'ONU que nous devons continuer
et amplifier, et nous allons passer à l'échelle européenne et internationale,
les États généraux de l'information qui, en France, donneront lieu à une loi,
mais que nous devons défendre sur le plan international.
En quelque sorte, j'ai une bonne nouvelle pour vous. Tous ces gens, pendant des
années, nous ont dit qu'il y a une pensée unique, c'est affreux. La pensée
unique, c'était le truc des démocrates libéraux. La pensée unique, c'est devenu
la pensée réactionnaire. C'est bien, on va le battre. Il y a un potentiel
énorme. Et là où peut-être, on s'était endormi en pensant que c'était acquis,
on va se réveiller. Mais moi, je ne veux pas de la pensée unique réactionnaire
qui m'explique qu'en quelque sorte, renoncer aux valeurs des démocraties, au
préambule de notre Constitution, à l'égalité entre les femmes et les hommes, ce
serait une bonne chose, une source d'avenir.
Je demande au réseau de continuer d'être engagé auprès de tous les combattants
de la liberté. En Géorgie, auprès de tous ceux qui se sont battus pour une
élection, auprès de cette présidente courageuse et de ces manifestants, et en
nous battant pour que les transparences soient faites, et si la sortie de crise
doit être la réorganisation d'une élection, pour le faire. Au Venezuela, où
nous ne devons pas regarder avec complaisance ou défaitisme la date du 10
janvier comme une évidence, et où nous devons, là aussi, nous battre aux côtés
de ceux qui œuvrent avec un immense courage pour le pluralisme et la
démocratie, leur parler, et, là aussi, nous battre pour que des élections
libres soient réorganisées, et le faire en lien avec tous nos partenaires de la
région. Et nous battre auprès de tous les combattants de la liberté,
professeurs, écrivains, journalistes, quand ils sont emprisonnés, quel que soit
le régime et quels que soient nos intérêts. Nous avons toujours fait cela et
nous continuerons de le faire. Et en disant cela, j'ai une pensée singulière
pour un combattant de la liberté, écrivain, franco-algérien, qui est Boualem Sansal.
Il est détenu de manière totalement arbitraire par les responsables algériens.
L'Algérie, que nous aimons tant, et avec laquelle nous partageons tant
d'enfants et tant d'histoire, entre dans une histoire qui la déshonore, a
empêché un homme gravement malade de se soigner. Et ça n'est pas à la hauteur
de ce qu'elle est. Et nous qui aimons le peuple algérien et son histoire, je
demande instamment à son gouvernement de libérer Boualem Sansal. Oui, la
liberté fait la démocratie. Et donc, nous devons continuer de les défendre
partout, avec respect, parfois en le faisant porte close quand c'est plus
efficace, avec force. Et la liberté, c'est aussi celle que nous continuerons de
défendre pour tous nos compatriotes, à travers le monde, nos otages quand ils
sont détenus, quelles que soient nos entreprises, et je me félicite de la
libération de ceux que nous avons obtenus en fin d'année dernière. Et c'est
aussi pour ça que nous continuerons à nous mobiliser pour la libération de nos
otages détenus aujourd'hui en Iran de manière indigne et inacceptable.
Voilà, mesdames et messieurs, je ne serai pas plus long. Protéger les Français,
assurer notre prospérité, faire notre devoir, en quelque sorte, pour nous
protéger des désordres du monde, telle est la ligne que je vous donne pour
l'année qui s'ouvre, en vous réitérant tous mes vœux. La diplomatie ne vaut que
si elle est l'armure des peuples qu'elle sert. Et vous aurez, faisant ce
travail, à œuvrer pour tous nos compatriotes, d'où qu'ils viennent, où qu'ils
habitent, Et j'ai essayé là à la fois de donner des lignes claires, de vous
donner aussi la scansion de notre agenda pour cette année, et de le faire pour
qu'aussi beaucoup de nos compatriotes aient clairement à l'esprit combien des
enjeux du quotidien sont au cœur de notre action diplomatique et de ce que vous
portez chaque jour. Et donc je veux vous remercier pour cela, pour le combat
que vous menez, pour votre engagement, celle des vôtres à vos côtés et de
l'ensemble de vos équipes, et remercier également l'ensemble des envoyés
spéciaux et tous nos partenaires et les membres du Gouvernement qui, je le
sais, ont aussi à cœur de bâtir cet agenda.
Vive la République et vive la France.
► Gouvernement
[Nota: Ce gouvernement est
dirigé par un centriste, François Bayrou ; nous avons donc décidé de
reprendre les propos de tous les ministres puisqu’ils agissent sous l’autorité
d’un Président de la République et d’un Premier ministre
centristes/centraux ; néanmoins nous avons fait une distinction avec d’un
côté les ministres centristes-centraux et les autres puisqu’il s’agit d’un
gouvernement de coalition du fait que le Président de la République et le
Premier ministre ne disposent pas d’une majorité à l’Assemblée nationale]
●
Ministres centristes/centraux
Elisabeth Borne (ministre d’Etat, ministre de l’Education
nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche)
> Pour le pays, j'espère que, dans les prochains mois, on aura de
la stabilité.
> Un grand merci aux élèves, aux parents et aux
enseignants de l’école Hélène Boucher de Longjumeau, pour votre accueil ce
matin. J'ai rencontré une communauté scolaire pleine d'énergie, de dynamisme et
d'engagement pour faire de l'École un lieu d'apprentissage serein, adapté aux
besoins de tous les élèves. Bonne reprise scolaire à toutes et tous !
> Je ne suis pas Jean-Michel Blanquer, ni Nicole
Belloubet mais je comprends largement les enjeux de l'Éducation nationale. (…)
On peut aussi reprocher à ceux qui sont spécialistes d'être des technocrates.
> [Choc des savoirs] Depuis la rentrée, il y a des
groupes de besoins qui feront l'objet d'une évaluation qui sera rendue au mois
de mars. On accompagne les élèves en fonction de leurs besoins.
> [Projet de suppression de quelque 4.000 postes à
l'Éducation nationale prévu dans le budget 2025]. Ce sont des discussions qu'on
a au sein du gouvernement (...) Je souhaite que mon ministère ait tous les
moyens nécessaires.
Manuel Valls (ministre d’Etat, ministre des Outre-mer)
> [Mayotte] La quasi-totalité de la population dispose d’eau courante.
Plus de 65 % des foyers sont réalimentés en électricité. Et j’ajoute que
la couverture du réseau fixe de communication, et surtout mobile progresse de
jour en jour. Naturellement ce sont des chiffres et des pourcentages qui ne
tiennent pas forcément compte de situations particulières, de villages ou de
maisons plus isolés. Mais les hélicoptères sont opérationnels depuis déjà
plusieurs jours, ce qui permet d’accélérer les distributions alimentaires et en
bouteilles d’eau notamment dans les communes les plus reculées. Tous les moyens
sont mis en œuvre pour que très vite, l’ensemble du territoire soit alimenté en
électricité. Autre signe d’un retour progressif à la normale, les vols
commerciaux de jour sont rétablis depuis le 1er janvier. La situation
s’améliore grâce à des avancées concrètes mais elle reste difficile. Je le
sais.
> [Mayotte] Je ne rentrerai dans aucune polémique. Ce ne
serait pas digne. Nous faisons face à la plus grande catastrophe naturelle que
Mayotte ait jamais connue. C’est peut-être même la catastrophe naturelle la
plus massive que la France ait subie depuis la Seconde Guerre mondiale, et elle
frappe un territoire déjà en grande difficulté. Si Mayotte est bien notre 101ᵉ département,
il se trouve à plus de deux heures d’avion et à quatre jours de bateau de
La Réunion, le territoire français le plus proche. La situation logistique
est par ailleurs d’une complexité inédite : l’aéroport est situé sur
Petite Terre, et il faut ensuite acheminer tout le matériel par barges vers
Grande Terre, avec des infrastructures portuaires lourdement endommagées. Ce
que je retiens surtout c’est le courage des Mahorais et la mobilisation
exceptionnelle de tout le monde
> Qu’il s’agisse du président de la République, du
ministre de l’Intérieur qui était le premier sur place, de François Bayrou
accompagné de plusieurs ministres, tous sont venus pour apporter la solidarité
de la Nation aux Mahorais et des mesures concrètes et urgentes. Pour ma part,
je suis resté deux jours de plus pour parcourir le territoire et prendre toute
la dimension des difficultés.
La colère, l’angoisse, la peur sont des sentiments naturels et légitimes après
un tel traumatisme. Comment pourrait-il en être autrement ? Des dizaines
de morts, des centaines de blessés, des maisons dévastées, des écoles et des
bâtiments publics détruits, des routes coupées, une économie et une agriculture
par terre, une forêt totalement rasée, des quartiers sans eau ni électricité,
la crainte de la faim ou des épidémies… Sur place, j’avais du mal à retenir mon
émotion.
Mais ce que je retiens surtout c’est le courage des Mahorais et la mobilisation
exceptionnelle de tout le monde. L’État a été au rendez-vous avec une intensité
exceptionnelle : la population a été alertée avant le cyclone et des
opérations de secours ont été déclenchées dès la levée de l’alerte violette
lors des premières heures. Je ne laisserai pas dire que l’État n’a pas été au
rendez-vous. La mobilisation de 900 pompiers et de militaires de la
sécurité civile, des policiers et des gendarmes, la mise en place d’un hôpital
de campagne (le plus grand d’Europe) qui a déjà accueilli près de 2 000
patients, des équipes légères qui vont au contact des populations les plus
éloignées illustrent cet engagement total qui ne va pas s’arrêter. Des
centaines d’agents publics, de l’État, des collectivités locales, d’EDF,
travaillent nuit et jour. Dans ces circonstances, il y a évidemment des
carences, tout n’est pas parfait et notre action s’adapte en permanence aux
besoins en lien avec les élus locaux.
> [Mayotte] La vigilance est au maximum sur les risques
épidémiologiques, particulièrement la dengue, le chikungunya et le choléra qui
s’est déjà manifesté à Mayotte il y a quelques mois. Voilà pourquoi les
circuits de l’eau doivent être rétablis. Nous avons fixé l’objectif d’éliminer
les déchets ménagers accumulés depuis le cyclone d’ici la mi-janvier car ils
font courir aussi un risque sanitaire important. Des équipes médicales sont
totalement mobilisées, j’ai pu échanger avec des soignants sur le terrain qui
font un travail difficile pour assurer la continuité des soins.
> [Mayotte] Élisabeth Borne et toutes les équipes sur
place travaillent activement pour une rentrée à partir du 20 janvier. Pour
cela, nous menons un diagnostic extrêmement rigoureux, école par école, pour
identifier les capacités d’accueil, planifier la reprise des cours dans les
meilleures conditions de sécurité possible. Il y a des travaux d’urgence à
effectuer sur les écoles, collèges, lycées. Le nettoyage des locaux et la
réparation des toitures seront lancés dans les prochains jours. Nous aiderons
les communes pour les travaux plus importants. Il y a aussi des besoins en
mobilier et en fournitures scolaires. L’objectif que se donne la ministre,
c’est que 70 % des salles de classe du premier et du second degrés soient
utilisables le plus vite possible. Nous devons mettre les bouchées doubles et
disons clairement les choses, le retour à des conditions d’enseignement
normales ne peut être attendu avant plusieurs mois. (…)
La rentrée scolaire est l’étape clé de la stabilisation de la crise que
traverse Mayotte. Compte tenu de l’indisponibilité de certaines classes il va
falloir s’adapter. Certaines écoles détruites resteront fermées. Je ne doute
pas de la mobilisation des enseignants et je suis certain que nous aurons
beaucoup de volontaires pour nous aider à cette tâche essentielle.
Mais je rappelle que la situation était déjà difficile avant le cyclone. Les
établissements scolaires étaient déjà surchargés par les effets de la
démographie et de l’immigration illégale. La reconstruction de Mayotte doit
mettre l’éducation et la jeunesse au cœur de son projet.
> [Projet de loi concernant Mayotte] C’est une première
étape indispensable. Il doit permettre d’accélérer la reconstruction de Mayotte
en simplifiant les règles dans le domaine de l’urbanisme et de la commande
publique. Certains délais seront divisés par trois. Notre priorité absolue est
que chaque Mahorais ait un toit. La réfection des toitures et leurs
financements par des prêts garantis par l’État ont déjà été annoncés par
François Bayrou il y a quelques jours à Mayotte.
Les Mahorais doivent être libérés de deux fléaux qui les rongent :
l’immigration irrégulière et l’habitat illégal
D’autres dispositifs prévoiront des mesures sociales pour accompagner la
population. Je pense par exemple à l’augmentation de la prise en charge de
l’activité partielle. Le texte prévoit aussi la création d’un établissement
public qui aura en charge le développement et l’aménagement du territoire, le
financement de l’économie, la construction d’équipements publics, la gestion du
foncier, en lien étroit avec les élus etc. Le Parlement ne manquera pas
d’enrichir ce texte. Je rappelle aussi qu’une zone franche économique va être
créée. Et puis, nous présenterons une deuxième loi de programmation ce
printemps, qui aura pour objectif la mise en place du plan annoncé par le
Premier ministre, « Mayotte Debout ». Développements économique et
social, modernisation du territoire, jeunesse, attractivité, immigration et
sécurité en seront les axes essentiels mais il nous faudra encore consulter
beaucoup les élus locaux et les Mahorais.
> [Mayotte] Le Premier ministre a annoncé un recensement
de l’Insee en lien avec les maires pour connaître la réalité des chiffres. Mais
on peut considérer aujourd’hui que près de 50 % de la population insulaire
est étrangère, dont une majorité en situation irrégulière. 77 % de la
population vit sous le seuil de pauvreté et 73 % des jeunes rencontrent
des difficultés de lecture. Le cyclone Chido a non seulement ravagé l’île, mais
il a révélé et aggravé toutes les difficultés que Mayotte connaissait avant.
> [Mayotte] La République doit aux Mahorais qu’à l’enfer
du cyclone ne succède pas le retour aux conditions extrêmement difficiles de
leur vie d’avant. Le visage de Mayotte doit changer. Les Mahorais doivent être
libérés de deux fléaux qui les rongent : l’immigration irrégulière et
l’habitat illégal. Je le répète, nous proposerons des mesures concrètes pour
rendre plus difficile le développement de l’habitat illégal. Soyons lucides, la
refondation de Mayotte exige des mesures fortes pour lutter contre l’immigration
illégale sur ce territoire et soulager la vie quotidienne des Mahorais.
> [Droit du sol à Mayotte] Le Premier ministre a dit que
ce sujet devait être traité. Il faut déjà rétablir les moyens de surveillance
(radars) qui ont été détruits par le cyclone et déployer toutes les capacités
pour lutter contre l’immigration clandestine. Les ministres de l’Intérieur et
de la Défense sont pleinement mobilisés. Il faudra continuer à adapter et
changer les règles en vigueur à Mayotte pour lutter contre les reconnaissances
frauduleuses de paternité, les passeurs qui se livrent à la traite des êtres
humains, ou pour allonger la durée de résidence régulière des parents sur l’accès
des enfants à la nationalité française.
> [Mayotte] Les Mahorais sont profondément attachés à
leur Nation, la nôtre – un vieil élu m’a rappelé que pour lui la France, c’est
la liberté. Ils nous demandent de régler réellement le problème migratoire, il
y va de l’avenir même du territoire. Vous ne vous rendez pas compte des
tensions que cela génère sur l’île. Il y a eu des confrontations, des épisodes
violents encore ces derniers mois. Cette situation est indigne de la
République.
> [Mayotte] Les forces de sécurité ont permis
d’interpeller près de 200 étrangers en situation irrégulière et beaucoup
d’éloignements ont été réalisés. Avant le cyclone, on éloignait 25 000
clandestins par an, il faudra aller beaucoup plus loin. Sans le traitement de
la question migratoire, il n’y a pas d’avenir pour Mayotte.
> En plaçant les outre-mer au rang de ministère d’État,
le Premier ministre et le président de la République ont fait un choix fort.
C’est bien pour répondre à ces urgences. D’abord la Nouvelle-Calédonie, avec
une économie amputée de 15 % de son PIB après les émeutes du printemps
dernier et la nécessité de renouer le dialogue pour trouver le chemin vers un
avenir commun. Je m’y rendrai le plus vite possible. L’autre urgence, qui
touche tous les territoires d’outre-mer, c’est celle de la vie chère. Je prends
ce sujet de justice sociale à bras-le-corps. Des solutions sont possibles et
une proposition de loi, portée par le groupe socialiste à l’Assemblée nationale
et notamment la députée de Martinique, Béatrice Bellay, sera débattue le
23 janvier prochain. Un protocole d’objectifs et de moyens pour lutter
contre la vie chère en Martinique a par ailleurs été signé en octobre dernier.
Nous allons par exemple exonérer de TVA 69 familles de produits. Le coût
des transports, les marges des grands groupes et la vérité des prix doivent
être examinés sans tabous. Mais pour mettre en œuvre toutes ces mesures, nous
avons besoin de l’adoption d’un budget…
Enfin, je n’oublie pas les questions de sécurité ou la lutte contre le
narcotrafic qui rongent de nombreux territoires.
L’instabilité actuelle nous fragilise auprès des élus locaux, comme des acteurs
économiques et sociaux
La tâche est immense, les outre-mer ce n’est pas un ministère comme les autres.
Cinq continents, trois océans, une biodiversité extraordinaire, trois millions
de nos compatriotes y vivent et un million d’Ultramarins habitent dans
l’Hexagone. Je serai leur ministre à 100 %. Je veux agir avec des actes
concrets mais aussi lutter contre un sentiment d’abandon et d’éloignement qui
s’est répandu.
Il y a les urgences, les crises mais aussi les atouts, économiques, culturels
et humains que je veux plus que jamais valoriser.
> Je respecte les parlementaires et les partis. Je serais
à l’écoute de tout le monde. Mais nous vivons une époque dans laquelle le
concept même de démocratie est contesté et la liberté est mise en cause – je
pense notamment au sort que subit Boualem Sansal en Algérie. – Partout dans le
monde, comme en France, les fractures, les divisions et l’instabilité
prédominent. J’estime que lorsqu’on a eu l’honneur de gouverner et que l’on
défend une certaine idée de la responsabilité politique, on ne peut pas refuser
de s’engager de nouveau pour l’intérêt général, pour l’État et pour les
Français.
J’ajoute que l’instabilité actuelle nous fragilise auprès des élus locaux,
comme des acteurs économiques et sociaux. Ils nous disent : « C’est
très bien de vous avoir, mais combien de temps allez-vous rester ? »
Je n’y pense pas à chaque instant bien évidemment, mais j’espère que le sens
des responsabilités s’imposera. Je souhaite nouer avec tous un dialogue
fructueux au Parlement sur les dossiers des outre-mer.
Nous sommes au début d’une semaine qui rappellera, dix ans après, des
événements tragiques qui ont changé la vie des Français et qui ont marqué la
mienne : les attentats de Charlie Hebdo, de Montrouge et de
l’Hypercacher de la Porte de Vincennes à Paris. J’ai en mémoire la formidable
unité nationale qui s’est manifestée à ce moment-là autour des valeurs de la
République. Retrouvons cet esprit, celui de la liberté et de Charlie.
> J’aime le débat mais je ne me laisserai pas entraîner
sur le terrain de la polémique ou du passé. Je ne dévierai pas de la mission
qui m’a été confiée par le Premier ministre. Je ne renoncerai à aucune de mes
valeurs. Nous venons d’évoquer Charlie Hebdo et je n’ignore
rien des campagnes infâmes que je subis depuis longtemps. Beaucoup ne
supportent pas mes prises de position claires sur la laïcité, mon engagement
contre l’antisémitisme et l’islamisme. Les faits m’ont souvent donné raison,
mais je ne veux pas perdre de temps avec ceux qui m’insultent ou me
caricaturent.
Je suis un républicain de gauche, mais avant tout un patriote, j’aime mon pays,
la France. J’ai l’honneur de la servir de nouveau en étant pleinement le
ministre des Outre-Mer, c’est-à-dire, le ministre d’une France qui rayonne
partout dans le monde.
> [Extraits d’une tribune sur Mayotte coécrite avec Bruno
Retailleau et Sébastien Lecornu] Pour
reconstruire durablement le territoire français meurtri par le cyclone Chido,
il est nécessaire de joindre à la mobilisation des pouvoirs publics une lutte
efficace contre l’immigration clandestine et une augmentation significative des
moyens d’action (…)
Dans cette tragédie, les désordres migratoires ont tout aggravé. Les
souffrances de Mayotte n’ont d’ailleurs pas commencé avec cette catastrophe
naturelle : depuis trop longtemps, nos compatriotes mahorais vivent au
quotidien les conséquences désastreuses du chaos migratoire, qu’elles soient
sécuritaires, sanitaires ou sociales. (…)
Ne reproduisons pas les mêmes erreurs, ne laissons plus les Mahorais seuls avec
leur malheur : ces Français, qui sont profondément attachés à leur nation, nous
demandent de régler le problème migratoire. Réglons-le pour leur prouver que
malgré la distance, la République les considère vraiment comme des Français à
part entière.
Jean-Noël Barrot (ministre de l’Europe et des Affaires
étrangères)
> La division nous fragilise et l'instabilité nous affaiblit. Je
rappelle que la guerre est à nos portes, la planète est en ébullition, la Chine
et les États-Unis nous prennent de vitesse, notre démocratie est prise d'assaut.
> Personne n’a intérêt à l’instabilité. Il y a à
l’Assemblée nationale une majorité qui s’ignore pour éviter le blocage. C’est
le rôle du gouvernement de la révéler. Cela suppose de la part des forces
politiques l’esprit de responsabilité et de compromis que la situation impose.
> Nous ne pouvons pas nous permettre le luxe du blocage
du pays. Nous ne pouvons plus attendre pour donner un budget au pays.
> Il existait une majorité pour éviter le blocage et
c'était"le rôle du gouvernement de la révéler. Au contraire, la censure a
montré, parce qu'elle a provoqué une inquiétude profonde et légitime dans le
pays, qu'il fallait désormais que chacun prenne ses responsabilités. Il y a une
majorité pour éviter le blocage, une majorité qui s'ignore et le rôle du
gouvernement est de la révéler
> On s’aperçoit que la censure a des conséquences comme
l'incapacité des collectivités locales à investir en l'absence d'un budget.
> Si je me suis rendu en Syrie, c’est aussi et surtout
pour défendre les intérêts des Français. Pour assurer notre sécurité et
poursuivre notre lutte contre le terrorisme, nous avons besoin d'une Syrie
souveraine, stable et apaisée.
> [Syrie] Il y a quelques semaines, grâce à
l’extraordinaire mobilisation du peuple syrien, un nouvel espoir est né. Un
espoir fragile, mais un espoir réel. La France se tient aux côtés du peuple
syrien pour concrétiser cet espoir.
> [Syrie] Je suis lucide sur le passé d'Ahmad al-Chareh,
des groupes qui ont conduit au renversement du régime tortionnaire de Bachar
al-Assad. Je sais aussi que certains de ces groupes ont combattu al-Qaïda et
Daesh. Dans la Syrie nouvelle qui est en train de se lever, il ne doit y avoir
aucune place pour le terrorisme islamiste. (…)
Nous avons beaucoup insisté dans nos échanges avec lui sur la place des femmes.
Il s’est engagé auprès de nous que le comité préparatoire du dialogue qui va
s’enclencher dans les prochaines semaines inclut en son sein des femmes, et ça
n’était pas gagné à l’avance. C’est l’une des satisfactions que nous avons
obtenues en nous rendant sur place.
> Je rends hommage à Costas Simitis, ancien Premier
ministre de la Grèce, décédé hier. Profondément réformateur et européen, il a
permis l’entrée de la Grèce dans la zone euro en 2001. J’adresse mes
condoléances au peuple grec, ami et allié de la France ainsi qu’à ses proches.
> J’ai des doutes sur la volonté d'Alger de respecter la
feuille de route concernant les relations bilatérales entre la France et
l'Algérie. Nous avons en 2022 (...) rédigé une feuille de route (...), nous
tenons à ce [qu'elle] puisse être suivie. (...) Mais nous observons des
postures, des décisions de la part des autorités algériennes qui nous
permettent de douter de l'intention des Algériens de se tenir à cette feuille
de route. Parce que pour tenir la feuille de route, il faut être deux.
Nous souhaitons entretenir les meilleures relations avec l'Algérie (...) mais
ce n'est pas le cas aujourd'hui.
Le cessez-le-feu au Liban, que la France a initié, […]
montre que la stabilité de la région ne passera pas par la force et la
brutalité mais par le dialogue et la diplomatie.
> La démocratie est un trésor fragile, le débat public
est un trésor fragile. Nous ne pouvons pas accepter que le débat se délocalise
sur des plateformes de réseaux sociaux dont les règles sont fixées par des
milliardaires américains ou chinois, et qui sont instrumentalisées par les
ennemis de la démocratie pour nous fragiliser.
> Je considère que ça n’est jamais une mauvaise idée que
de consulter les Français.
> On ne gouverne pas avec des sondages, on gouverne avec
du courage
Aurore Bergé (ministre déléguée auprès du Premier
ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte
contre les discriminations)
> [Messages antisémites sur les murs de la ville de Vincennes] Ne jamais
rien laisser passer. Aucun acte, aucune parole, aucun geste, aucune
intimidation. L'antisémitisme n'est malheureusement pas résiduel. Nous devons
tous combattre ce fléau. Merci à la Maire de Vincennes pour son action
déterminée. Les Maires me trouveront toujours à leurs côtés.
> En Nouvelle-Calédonie, un féminicide de plus, un drame
de trop dès ce début d'année. À Yaté, une femme a été tuée sous les coups de
couteau de celui qui partageait son quotidien. La douleur s’étend bien au-delà
des rives de l’océan Pacifique. Dans plus d'un féminicide sur deux, un abus
d'alcool, circonstance aggravante, est constaté. Nous ne devons avoir aucun
tabou pour affronter ce fléau. Mes pensées vont à la famille et aux proches de
la victime.
> Je vais relancer les assises de lutte contre
l'antisémitisme. C'est une priorité absolue. Je n'accepte pas que nos
compatriotes juifs aient peur. Je pense notamment aux étudiants. C'est toute la
société qui doit se sentir concernée et agir.
> 10 ans après l’attentat contre Charlie hebdo, le droit
au blasphème et à la caricature reste une part essentielle de notre identité
républicaine. Face au schisme générationnel qui s’installe, nous devons être
d'une fermeté absolue.
> Au 30 novembre 2024, environ 1.500 faits antisémites
ont été recensés en France.
> Attiser la haine antisémite, c'est se mettre en dehors
de l'arc républicain et c'est ce que fait la France insoumise.
> La lutte contre les violences conjugales, c'est d'abord
la responsabilité de l'Etat et c'est aussi celle de toute la société. Les
violences conjugales ne sont pas des affaires privées ou familiales : soyons
tous des voisins vigilants.
> Quand une femme m'interpelle en me disant que son ex
conjoint violent est sorti au bout d'un an de détention alors qu'il avait été
condamné à 4 ans, c'est insupportable. L'exécution des peines, c'est
fondamental. C'est la réparation qu'on doit aux victimes et à la société.
> Quand on investit des candidats sans connaître leur pedigree,
et qu'ils se révèlent avoir tenu des propos antisémites ou racistes, évidemment
je combats le RN. Quand on attise la montée de l'antisémitisme et qu'on place
des cibles dans le dos de nos compatriotes juifs, évidemment je combats LFI.
Astrid
Panosyan-Bouvet (ministre
déléguée auprès de la ministre du Travail, de la Santé, de la Solidarité et des
Familles, chargée du Travail et de l’Emploi)
> Je n’attends rien, ni de La France insoumise, ni du Rassemblement
national. Ils ont leur légitimité", affirme Astrid Panosyan-Bouvet, la
ministre chargée du Travail. "Je n’attends pas de leur part une quelconque
capacité d'être dans une culture de la coalition.
> [Aménagements de la réforme des retraites] Il y a du
grain à moudre sur la pénibilité et les carrières des femmes.
Amélie de Montchalin (ministre délégué auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargée des Comptes publics)
> On veut lutter plus massivement contre la fraude fiscale. Je prendrai
dans les prochaines semaines un plan d'action.
> [Contribution exceptionnelle pour les grandes
entreprises] Cet impôt exceptionnel, il va avoir lieu, on va le mettre en place.
> On vise le plus près de 5% de déficit. (...) La
solution n'est pas de taper sur le pouvoir d'achat des Français, ce n'est pas
des impôts sur les classes moyennes.
> Si on est responsable aujourd'hui, vouloir jouer la
carte de l'immobilisme, le blocage, la rupture avec la vie concrète, c'est être
déconnecté.
> Pas de hausse d’impôts pour les ménages.
Marc Ferracci (ministre délégué auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargé de l’Industrie et de l’Energie)
> La journée se termine à Ambert avec les entreprises de l’association «
Travailler et Vivre en Livradois-Forez ». Ces acteurs locaux montrent
qu’industrie, ruralité et innovation vont de pair. Soutenir ces initiatives,
c’est bâtir une économie plus résiliente et ancrée dans nos territoires.
> Les biotechnologies jouent un rôle central dans la
transition énergétique et sanitaire. À Aubière, j’ai visité BioUpp, un acteur
pionnier dans le développement d’innovations essentielles pour demain. Ces
initiatives locales démontrent que l’avenir de l’industrie passe par les
territoires !
> Reconquérir notre souveraineté sanitaire à long terme
passe par le renforcement des capacités de production de médicaments essentiels
en France et en Europe. C’est tout le sens des projets que l’Etat soutient dans
le cadre du plan France 2030. Il s’agit de donner à nos industriels la capacité
de se battre à armes égales avec leurs concurrents extra-européens.
Juliette Méadel (ministre déléguée auprès du ministre
de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation chargée de la Ville)
> J'avais lancé l'idée d'un impôt Charlie hebdo pour soutenir la liberté
d'expression, mais il n'a pas été voté, hélas.
> Mélenchon essaie de fracturer la République. Il
instrumentalise une forme de désespérance sociale et emboîte le pas d'une
radicalité religieuse. Il complète la démarche de Marine Le Pen.
> Je demande aux préfets de faire un état des lieux de la
situation d'entretien des logements sociaux dans les QPV, pour voir si en
échange de l'aide de 315 millions d'euros, les bailleurs sociaux font bien leur
travail. Sinon, il y aura sanction.
> Ne jamais oublier. Hommage à leur liberté, à leur
courage : les survivants résistent, au nom des principes républicains. Chaque
seconde de leur vie après l’attentat est une lutte contre le souvenir
traumatique. Merci d’être là. Et que renaisse l’esprit Charlie.
> Je suis plus proche du MoDem que des insoumis.
Laurent Saint-Martin (ministre délégué auprès du ministre
de l’Europe et des Affaires étrangères chargé du Commerce extérieur et des
Français de l’étranger)
> Emmanuel Macron a rappelé devant les Ambassadeurs l’importance de
poursuivre nos efforts en matière d’attractivité et de prospérité économique.
Aucune fatalité face aux défis devant nous. La France garde des atouts
structurels importants. Nous continuerons à les valoriser.
> Ceux qui investissent en France, comme lors des
rendez-vous Choose France, montrent leur confiance en notre pays. Pour
maintenir cette attractivité et continuer à attirer des projets, la stabilité
politique est essentielle.
● Autres
ministres
Gérald Darmanin (ministre d’Etat, garde des sceaux, ministre de la Justice)
> L'abrogation du droit du sol à Mayotte, c'est évidemment la bonne voie.
> Les procureurs vont recevoir une circulaire de
politique pénale.
> Face aux narcotrafiquants, tout revoir et faire ce que
nous avons fait contre le terrorisme.
Bruno Retailleau (ministre d’Etat, ministre de
l’Intérieur)
> Nos armées, comme tous les services de l’État, restent pleinement
mobilisées pour nos compatriotes Mahorais. Mais sans fermeté migratoire, nous
reconstruirons Mayotte sur du sable.
Catherine Vautrin (ministre du Travail, de la Santé, des
Solidarités et des Familles)
> Début 2024, le gouvernement a dévoilé sa stratégie en faveur de la
lutte contre la pénurie de médicaments. Pour être efficace, cette stratégie
doit être doublée d’actions ambitieuses en faveur de la réindustrialisation. Le
Gouvernement s’engage donc aujourd’hui avec ambition pour la production de
médicaments en France. C’est un enjeu majeur de souveraineté, qui nous concerne
tous : patients, professionnels de santé, acteurs de la répartition et
industriels.
Eric Lombard (ministre de l’Economie, des Finances et de
la Souveraineté industrielle et numérique)
> Moi je suis pour la justice fiscale, vérifier que chacun paye sa juste
part de l'impôt. (…) Il y a "des convergences possibles avec le PS, le PC
et les écologistes.
> La situation budgétaire est grave. Je souhaite obtenir a
minima un accord de non-censure" pour "que dans les meilleurs délais,
notre pays ait un Budget. Sans un Budget, on ne peut pas engager de nouveaux
projets, de nouvelles politiques.
> Nous avons accumulé, au cours des dernières années,
plus de 3000 milliards d’euros de dette. C’est quelque chose que nous allons
léguer à nos enfants, c’est insupportable. Il est impératif de modifier notre
trajectoire.
> Le gouvernement vise un déficit entre 5 et 5,5 %"
pour 2025 avec un peu plus de souplesse que ce que le gouvernement de Michel
Barnier avait prévu.
> Je suis pour la justice sociale, vérifier que chacun
paye sa juste part de l'impôt. Pas taxer davantage les très riches mais veiller
à ce que leur niveau d'impôts soit homogène à celui que payent les autres
français.
> Il n’y aura pas d’autres hausses d'impôts que celles
qui ont été annoncées.
> Le taux du livret A va baisser, mais l’inflation a
fortement baissé, donc elle permet au patrimoine réel d’augmenter et l'épargne
est protégée.
> La relocalisation de la production des médicaments
essentiels en France et plus généralement en Europe constitue un double enjeu
de souveraineté - industrielle et sanitaire. L’engagement du Gouvernement pour
favoriser l’implantation des sites de l’industrie pharmaceutique sur notre
territoire est entière.
Sébastien Lecornu (ministre des Armées)
> Nos armées, comme tous les services de l’État, restent pleinement
mobilisées pour nos compatriotes Mahorais. Mais sans fermeté migratoire, nous
reconstruirons Mayotte sur du sable..
Annie Genevard (ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté
alimentaire)
> La priorité absolue c'est de doter la France d'un budget y compris
pour les agriculteurs.
> [Aides pour les agriculteurs] Toutes les aides dès lors
que le budget sera voté seront délivrées et seront "rétroactives.
> Je comprends que les agriculteurs restent dans des
situations parfois très difficiles (...) Leur inquiétude est parfaitement
compréhensible.
> La censure était irresponsable : elle a exposé des
pans entiers de l’économie, qui a besoin de stabilité et de visibilité, et en
particulier les agriculteurs, dont les pertes de récoltes et de vendanges puis
la crise sanitaire ont envenimé la crise profonde qui s’est exprimée
début 2024. Pour éviter la catastrophe d’une année encore perdue pour la
concrétisation des engagements pris devant les paysans, il nous a fallu
travailler très vite avec Éric Lombard et Amélie de Montchalin pour essayer
de rattraper les graves conséquences de la censure. Mais l’essentiel de tout
cela ne pourra être concrétisé dans les cours de fermes sans le vote du budget.
Un budget à voter pour préserver les aides prévues avant la
censure
> L’agriculture figure tout en haut de la liste de nos
besoins vitaux qui ne peuvent s’encombrer de calculs partisans. Notre
alimentation et, demain, celle de nos enfants, a besoin des progrès que portent
les projets et propositions de loi dont l’examen a été interrompu. J’espère
leur prospérité parce que notre souveraineté l’exige.
> La continuité de l’État et le respect de la parole
donnée ne se discutent pas. Notre responsabilité est d’honorer les engagements
pris devant la profession. En trois mois, je suis beaucoup allée sur le
terrain, j’ai écouté les paysans et pris la mesure de l’urgence sanitaire,
économique mais aussi morale qui est la leur. J’ai fait de la simplification
une bannière et j’ai mis en œuvre des mesures frappées au coin du bon sens,
comme le contrôle administratif unique. Je veux lever toutes ces petites et
grandes complexités qui empoisonnent la vie des agriculteurs, car ils vivent
dans la peur de ne pas être dans les clous d’une réglementation qu’ils ne
comprennent plus. Comme maire, comme député d’un territoire façonné par
l’agriculture et la forêt, j’ai représenté les agriculteurs, j’ai travaillé
avec eux. Et je veux être la ministre des agriculteurs… mais je suis aussi la
ministre de l’Agriculture! (…)
Les Français aiment leurs agriculteurs, mais il faut aussi qu’ils aiment leur
agriculture. Elle est extraordinaire par sa diversité et par la sécurité
qu’elle garantit. Le prochain Salon de l’agriculture aura « la fierté
française » pour thème ; je l’aime beaucoup parce qu’il dit
tout. Au-delà des urgences, mon travail, c’est aussi de projeter notre
agriculture dans l’avenir. Cela passe par la réhabilitation de l’acte de
production. La moitié de la volaille et des fruits et légumes consommés en
France n’y sont pas produits : on doit réagir à cette attrition, tourner
le dos à la décroissance et reconquérir notre souveraineté ! Il faut
produire, et pour cela accéder aux moyens de production élémentaires, l’eau, la
terre, les traitements quand c’est nécessaire, et faire une guerre sans merci
aux surtranspositions de toute nature. Soyons clairs : nous sommes engagés
dans la réduction des produits phytosanitaires et on ne reviendra pas dessus.
Mais pendant qu’on travaille sur le moyen et long terme, il faut aussi répondre
à l’urgence de filières entières qui n’ont plus de solution et dont la
disparition abîmerait la diversité des productions françaises au profit
d’importations moins-disantes.
> [Agriculteurs] Garantir une digne rémunération est la
mère des batailles. Le revenu, c’est un volume, un prix et des charges.
S’agissant des charges, le gouvernement se bat pour préserver les
400 millions d’euros d’allègements agricoles inscrits au budget avant la
censure. Sur les volumes, il faut donner aux agriculteurs les moyens de s’adapter
au changement climatique par l’accès à l’eau, aux outils de gestion des
risques, à la recherche et à l’innovation. S’agissant du prix, les lois EGalim
ont permis des progrès, elles doivent être complétées au printemps par un
nouveau projet de loi.
> [Mercosur] Je continue de rencontrer mes
homologues : trois jours après mon déplacement en Pologne, le Conseil des
ministres polonais se prononçait contre le Mercosur, c’est encourageant !
On va se battre comme des fous contre ce mauvais accord, à tous les niveaux,
celui du président de la République qui a une parole très claire sur le sujet,
et celui du Premier ministre dont le rôle est d’être notre voix au niveau
européen, sur le Mercosur, mais aussi sur un sujet majeur comme le prochain
budget de la PAC.
> Le Premier ministre recevra les organisations
professionnelles agricoles dans les prochains jours. Et la campagne électorale
commence mardi. Pour la Coordination rurale, il y a bien sûr une organisation
nationale, mais aussi des organisations locales mobilisées pour ce scrutin
départemental. Depuis que je suis dans ce ministère, j’ai toujours cherché à
apaiser. Jusqu’ici, il n’y a pas eu de mouvement de très grande ampleur. J’ai
beaucoup écouté et pris des mesures attendues, quand des propositions de bon sens
m’ont été faites par la profession, comme la FNSEA me les a soumises pour la
simplification par exemple.
« Il faut renouer avec l'espoir pour les jeunes générations
! »
> Je suis une femme de dialogue et je n’exclus personne.
La seule limite, c’est la violence, et je ne peux admettre qu’on s’en prenne
aux biens et aux personnes. Je le dis à toutes les organisations
professionnelles : vous êtes en campagne, je l’entends, vous avez des
difficultés, j’y réponds au mieux. Je leur dis aussi de prendre garde à ne pas
offrir seulement le visage désolé d’une agriculture en perdition : il
faudra aussi renouer avec l’espoir pour les jeunes générations ! Dès qu’on
sera sortis de cette période de crise, car on en sortira, il faudra qu’on se
mette autour de la table et qu’on dessine ensemble l’avenir de l’agriculture
française.
Yannick Neuder (ministre délégué auprès de la ministre du
Travail, de la Santé, de la Solidarité et des Familles, chargé de la Santé et
de l’Accès aux soins)
> Le soutien public à la relocalisation de la production de médicaments
essentiels marque une nouvelle étape majeure pour garantir l’accès des
médicaments à tous nos concitoyens. Elle s’inscrit dans la continuité des
nombreuses actions déjà déployées par le Gouvernement pour lutter contre les
pénuries dans le cadre de la feuille de route triennale visant à garantir la
disponibilité des médicaments pour les Français. Notre engagement sur le sujet
est plein et entier.
► Partis
politiques
● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes
et se considèrent à droite ou à gauche ne sont plus retranscrits]
Gabriel Attal (député, président du
groupe Ensemble pour la république à l’Assemblée nationale)
> Cher Justin Trudeau, au long de nos échanges à Ottawa, à Paris, à
Courseulles-sur-Mer, j’ai pu mesurer à quel point nous avions en partage un
attachement viscéral à la prospérité et à l'amitié entre nos deux pays. La
France et le Canada seront toujours unis et liés, par la langue, le sang versé
pour la Liberté et par toutes nos valeurs communes. Ce lien, tu l’as fait vivre
et tu l’as intensifié. Merci infiniment.
Roland Lescure (député)
> Pour gouverner la France de manière stable, il faut un gouvernement
large qui rassemble, qui extrait le destin du gouvernement des fourche des
extrêmes.
> La victoire de Marine Le Pen en 2027 n'est pas
inéluctable. Ce n'est pas en diabolisant les populistes d'extrême droite qu'on
va les battre.
> Les appels à la démission du président de la République
c'est totalement déplacé.
> Merci Justin Trudeau pour toutes ses années au service
du Canada, et plus largement au service des valeurs de liberté et de progrès.
> Sur la lutte contre le narcotrafic, il faut être sans
aucune limite. C’est ce que font B. Retailleau et G. Darmanin Je suis pour la
légalisation encadrée du cannabis. Pas comme le promeut M. Delogu. Mais de
façon très encadrée par l’Etat, de la production à la commercialisation.
> Je suis inquiet. Nous faisons face à des incertitudes
et les entreprises répondent en levant le pied. Nous devons reprendre une
dynamique d’investissement dans l’avenir et redonner de l’espoir aux Français
qui par détresse et désespoir se tournent vers les extrêmes.
> Le gouvernement de François Bayrou est composé de
personnalités d’expérience. Ils sauront s’adresser aux Français. Nous ne devons
plus dépendre de Marine Le Pen qui déciderait ou pas de maintenir ce
gouvernement en vie.
Sylvain Maillard (député)
> Être étudiant à l’Université ne donne aucun droit de s’exonérer de la
Loi. Les actes antisémites sous couvert de liberté d’opinion sont encore trop
tolérés. Cela doit cesser et des poursuites doivent systématiquement être
engagées. Pour rappel, les actes ou propos antisémites, c’est jusqu’à 1an
d’emprisonnement et 45000 euros d’amende.
Jean-René Cazeneuve (député)
> Le Président Hollande a raison Si les PR devaient démissionner quand
ils perdent des élections intermédiaires, Giscard, Mitterrand, Chirac, Sarkozy,
Hollande auraient dû démissionner. Ni démission, ni dissolution, ni censure,
les Français veulent de la stabilité.
● MoDem
Bruno Millienne (porte-parole)
> L'esprit Je suis Charlie à été abandonné par certains uniquement par
soif de pouvoir et électoralisme. C'est assez déplorable pour ne pas dire plus.
Frédéric Petit (député)
> «La puissance de notre culture est là»: la diplomatie culturelle et
d'influence de la France est solide, comme l'a rappelé le président de la
République ce matin lors de son discours devant nos ambassadeurs. L'influence
de la France dans le monde est préservée et enrichie au quotidien par les
sociétés civiles sur place et l'action du ministère des Affaires étrangères.
Dans des pays en guerre comme dans des pays en paix, elle doit être une
priorité.
► Autres
● Organisations centristes
♦ Renew Europe
(Députés français du groupe centriste au Parlement européen)
Valérie Hayer (députée, présidente)
> L’année qui s’ouvre sera celle du sursaut géopolitique et de la
puissance européenne, faute de quoi elle sera l’année de l’échec collectif.