► Emmanuel Macron (Président de la République)
> [Conférence de presse à
l’issue de la réunion de Paris sur la paix et la sécurité pour l’Ukraine]
En effet, en cette troisième année de la guerre d’agression de la Russie contre
l’Ukraine, nous sommes très clairement à un point de bascule. Les négociations
ont débuté, j'y reviendrai. Elles sont bienvenues. Et je souhaite saluer à la
fois le rôle du président Trump, avec lequel j'ai été en contact permanent ces
dernières semaines, et le courage du président Zelensky, avec lequel il est
aussi de notoriété publique que nous sommes en lien étroit et permanent.
Notre objectif est clair, c'est de gagner la paix. Nous devons pour cela placer
l'Ukraine dans la meilleure position possible pour négocier et nous assurer que
la paix qui sera négociée puisse être solide et durable pour les Ukrainiens et
l'ensemble des Européens. C'était le sens de la réunion de ce jour, dans le
prolongement de l'initiative lancée à Paris le 17 février dernier, qui a été
ensuite poursuivie avec la réunion que nous avons tenue à Londres quelques
semaines plus tard. Alors aujourd'hui, c'est donc tenu cette réunion où 31 pays
étaient rassemblés, aux côtés du secrétaire général de l'OTAN et des
institutions de l'Union européenne. Ces 31 pays forment cette coalition
d'action pour une paix solide et durable. Basée sur le volontariat et la
mobilisation de chacun, nous avons d'abord exprimé une vue commune sur la
situation.
D'abord, notre volonté de rester unis et, au fond, de tout faire pour,
justement, construire cette paix par la force, pour reprendre la formule qui
avait été initialement prise par le Président Trump. Ensuite, nous avons tous
acté du fait que l'Ukraine, il y a quelques jours à Djeddah, avait eu le
courage d'accepter un cessez-le-feu de 30 jours inconditionnel. Et que depuis
cette décision et cette annonce ukrainienne, il n'y a eu aucune réponse russe.
Il y a eu des conditions nouvelles posées pour des cessez-le-feu beaucoup plus
partiels et hypothétiques. Et dans le même temps, chaque jour, des frappes de
plus en plus fortes, s'intensifient.
Dans ce contexte,
notre volonté est de saluer l'effort de paix américain, de continuer à échanger
avec les États-Unis d'Amérique pour porter notre vision des choses et nos
priorités, mais aussi de ne laisser passer aucun des récits ou des
contre-vérités qui sont aujourd'hui poussés par la Russie, comme ces derniers
jours l'ont montré lors des discussions à Riyad sur la question de la mer
Noire, où la Russie, par ses discours et ses communiqués, a en fait
complètement réinventé ce qui s'est passé depuis 3 ans. Néanmoins, nous sommes
tous lucides et nous tirons tous le même constat : il y a une volonté de paix,
il y a des discussions. Y a-t-il des négociations de paix ? C'est assez
difficile de conclure qu'il y aurait des négociations de paix quand ces discussions
parallèles ont conduit à 3 communiqués distincts qui disent 3 choses
différentes. Un communiqué américano-ukrainien, un communiqué américano-russe
et un communiqué russe encore différents du précédent. Ce contexte crée
beaucoup d'incertitudes et nous avons donc la volonté, nous, d'avoir un message
très clair poursuivant l'objectif que je viens d'évoquer.
Le premier message clair, c'est que nous allons continuer de soutenir à court
terme le peuple ukrainien et l'armée ukrainienne. C'est une nécessité pour
pouvoir être dans les meilleures conditions possible pour préparer la paix et
c'est une nécessité pour éviter ce qui est au fond le projet très clair de la
Russie ces derniers jours et ces dernières semaines : faire semblant
d'ouvrir des négociations pour décourager l'adversaire et en même temps
intensifier les attaques, puisque c'est exactement ce qui est en train de se
passer.
À cet égard, les priorités qui ont été identifiées par nos partenaires
ukrainiens en matière d'artillerie, de munitions ou de défense solaire ont
donné lieu à des mobilisations et des annonces ce matin par plusieurs
collègues, pour mobiliser aussi des financements requis. Je veux saluer ici ce
que la Suède, la Norvège, l'Allemagne et plusieurs d'autres ont annoncé ces
derniers jours ou ce matin, d'efforts additionnels auxquels s'ajoutent les 2
milliards d'euros de soutien bilatéral que nous avons, hier, annoncé avec le
président Zelensky et qui est à nouveau un nouvel ensemble d'aide de la France
à l'égard de l'Ukraine et de son armée.
Le soutien en matière de drones, de satellites, de coproductions aussi en
Ukraine ont été identifiées en même temps que de nouveaux programmes de
formation des armées ukrainiennes. Tout cela a donc fait l'objet d'un temps de
discussion où l'unanimité a prévalu et les décisions ont aussi été prises
d'accélérer le décaissement des prêts qui avaient été décidés en G7, le fameux
système ERA, pour permettre en particulier à l'Ukraine de financer encore plus
rapidement les achats en termes d'artillerie qui sont une de ses priorités.
Donc la Commission européenne, et je remercie la présidente, a annoncé cela.
En termes de soutien de court terme à l'Ukraine, nous avons aussi acté de
manière unanime le fait que le temps n'était pas à la levée des sanctions, quelles
qu'elles soient, et il ne saurait y avoir une politique de levée des sanctions
avant que la paix soit clairement établie. Nous avons donc pour intention de
maintenir la pression économique, en particulier sur les flots de fantômes, sur
aussi certaines capacités industrielles. Nous allons continuer à nous mobiliser
sur ce point.
Ensuite, nous avons évoqué la préparation et le suivi du cessez-le-feu, qui est
au fond le deuxième élément clé après le soutien de court terme à l'armée
ukrainienne. Là-dessus, comme vous le savez, nous sommes en train de préparer,
et c'est le cœur même de la proposition ukraino-américaine, un cessez-le-feu
dans les airs, en mer et sur les infrastructures civiles. Là-dessus, il est
important de pouvoir finaliser les moyens de surveiller le respect de ce
cessez-le-feu. Plus largement, il y a beaucoup de discussions qui sont en
cours, éparses, sur la manière ensuite de suivre la situation une fois que la
paix sera signée. Faut-il donner une responsabilité à l'OSCE, ce qui était le cas
entre 2014 et 2022 ? Faut-il qu'il y ait un mandat donné aux Nations unies pour
que des forces de maintien de la paix surveillent, justement, la ligne de
front, en tout cas, entre l’Ukraine libre et des territoires qui seraient
occupés ? Faut-il un système de surveillance ad hoc ? Autant de questions
juridiques, techniques d'une extrême importance, qui ont fait que nous avons
décidé, là, de mandater nos ministres des Affaires étrangères pour faire, dans
les 3 semaines, une proposition très concrète de suivi, justement, d'un
cessez-le-feu de court terme et d'un cessez-le-feu durable, suivi
institutionnel et pratique, qui pourra ensuite être échangé avec nos
partenaires américains.
Ensuite, vient la question des fameuses garanties de sécurité. Une fois la paix
signée, comment s'assurer que l'Ukraine pourra rester libre, stable et ne
subira pas de nouvelles agressions russes ? À ce titre, nous avons tous partagé
le fait qu’on manque de clarté encore sur les conditions de signature et qu'il
y a un manque de clarté sur la nature des engagements américains le jour
d'après. Néanmoins, nous avons acté, je dirais, 3 axes de travail pour,
justement, maintenir cette paix durable et solide une fois un accord de paix
signé.
Le premier élément de la sécurité des Ukrainiens et des Européens, c'est une
armée ukrainienne forte, bien équipée le jour d'après. Et il y a unanimité de
tous les participants aujourd'hui sur ce point. C'est pourquoi, de manière très
concrète, nous avons acté que le premier ministre britannique et moi-même
donnions mandat à nos chefs d'État-major des Armées pour qu'une équipe
franco-britannique puisse être déléguée dans les prochains jours en Ukraine et
puisse travailler de manière très étroite avec nos partenaires ukrainiens, qui
ont acté également ce mécanisme, pour préparer, justement, dans tous les
domaines, le format, ce que sera le format de l'armée ukrainienne de demain.
Quelle armée de terre, quelle capacité maritime, quelle capacité aérienne, quel
format, c'est-à-dire en termes de taille, de nombre de soldats, quels
équipements pour pouvoir répondre à une éventuelle agression russe et dissuader
la Russie d'une telle agression. Ceci permettra ensuite de rentrer dans des
travaux de planification qui permettront de clarifier les contributions de
chaque pays membre de notre coalition pour donner de la visibilité à l'Ukraine
et avoir un plan d'action maintenant très précis.
Le deuxième élément de garantie de sécurité, ce sont les forces de réassurance
que nous pourrions déployer le jour d'après en Ukraine. Ces forces de
réassurance, c'est l'objet de la proposition franco-britannique d'il y a
plusieurs semaines, n'ont pas vocation à être des forces de maintien de la
paix. J'ai répondu hier à l'un de vos collègues pour bien clarifier ce point.
Elles n'ont pas vocation à être des forces présentes sur la ligne de contact.
Elles n'ont pas vocation à être des forces qui se substituent aux armées
ukrainiennes. Mais, ce seraient des forces de quelques États membres présents,
parce qu'il n'y a pas unanimité sur ce point. Certains États n'ont pas la
capacité de le faire, d'autres, le contexte politique qui le leur permet ou
l'accord, mais ce seraient des forces présentes dans certains endroits
stratégiques pré-identifiés avec les Ukrainiens qui signeraient un soutien dans
la durée, une réassurance des Européens et auraient un caractère de dissuasion
à l'égard d'une potentielle agression russe. Ceci sera travaillé par nos chefs
d'État-major dans le cadre de la mission que je viens d'évoquer, ce qui
permettra d'avoir la carte des points qui sont évoqués et un accord aussi sur
le format de ces forces de réassurance. Il est très clair et il a été très
clairement établi que ces forces de réassurance ne sauraient en aucun cas se
substituer ou réduire l'effort qui est collectivement le nôtre sur le flanc est
de l'OTAN. Ça viendrait en plus, et d'ailleurs sur un mode opératoire qui peut
parfois ressembler à ce que nous faisons dans certains de ces pays.
Le troisième axe, en termes de garantie de sécurité, c'est évidemment notre
propre défense. Et je crois qu'il y a une unanimité autour de la table pour
dire que les Européens étaient beaucoup plus unis qu'il y a quelques semaines,
beaucoup plus audacieux et beaucoup plus déterminés, et surtout convaincus,
tous, qu'au fond, ce qui se joue en Ukraine aujourd'hui et dans les semaines à
venir c’est la sécurité des Européens dans la durée. Et donc, fort de cela,
nous avons aussi acté de renforcer notre réponse en termes d'architecture de
sécurité pour notre continent. D'abord en actant justement tout ce qui a été
fait au niveau de l'Union européenne et de chacun des États membres,
c'est-à-dire accroître nos capacités, notre investissement dans nos armées et
nos forces pour dissuader, pour préparer dans la durée la paix du continent,
accroître aussi la coordination entre nos industries de défense et nos armées
pour agir ensemble.
Et puis, nous avons donc acté également d'un travail conjoint pour définir les
demandes et les exigences qui seront les nôtres à l'égard de la Russie pour renforcer
notre sécurité collective, laquelle s'est dégradée ces dernières années,
dégradée par les décisions d'ailleurs des États-Unis d'Amérique et de la
Russie, de sortir du traité FNI, par exemple, mais dégradé aussi par le
déploiement de capacité de missiles ou de forces supplémentaires russes en
Biélorussie, pour ne citer qu'un autre exemple.
Voilà les principales conclusions du sommet qui vient de se tenir. Celui-ci a
aussi conclu un mandat qui nous a été donné par nos collègues. Au fond, ils
nous ont demandé, avec le Premier ministre Starmer, d'assurer ensemble le
copilotage de cette coalition et de pouvoir ensemble coordonner les initiatives
et les comptes rendus pour garder le momentum qui est le nôtre. Donc, avec le
Premier ministre Starmer, nous allons assumer cette responsabilité ensemble de
piloter cette coalition d'action pour une paix solide et durable, ce qui fait
que, dès la semaine prochaine, nos conseillers diplomatiques prendront
plusieurs initiatives et poursuivront les décisions qui ont été prises, de même
que nos chefs d'État-major des armées, ensemble, pour poursuivre sur la base de
la mission et des mandats que je viens d'indiquer.
> [Agression de
Poutine contre l’Ukraine] Aujourd'hui, ces forces de réassurance sont une
proposition franco-britannique. Elle est actée par la Grande-Bretagne et la
France. Elle est souhaitée par l'Ukraine. Et elle est aussi actée par plusieurs
États membres qui ont marqué leur volonté de s'y joindre. Elle ne fait pas
l'unanimité aujourd'hui, et c'est connu. D'ailleurs, nous n'avons pas besoin de
l'unanimité pour ce faire. Et donc, comment nous allons préparer les choses ?
Par la mission qui a été confiée aux deux chefs d'état-major des armées,
britanniques et français. Ils vont bâtir une équipe qui va se rendre et
travailler avec une équipe ukrainienne. Les Ukrainiens vont nous dire
exactement où sont leurs besoins. J'ai eu cette discussion hier avec le président
Zelensky. Ils ont une idée très claire des besoins et des zones critiques où
ils veulent que ces forces de réassurance soient déployées. Donc, ce sont ces
échanges entre militaires qui définiront les lieux, le nombre de forces pour
que ce soit crédible, et les capacités. Rien n'est exclu à date, et nous
regardons le maritime, l'aérien et le terrestre.
Mais on appelle bien force de réassurance et ça ne se substitue pas ni à des
forces qui assureraient du maintien de la paix sur la ligne de contact, ni à
une armée ukrainienne que nous voulons robuste. Ces forces de réassurance,
elles feront partie du paquet qui sera discuté. Et l'armée ukrainienne et les
forces de réassurance, aujourd'hui, la Russie s'y oppose, puisque la Russie a
toujours dit qu'elle ne voulait même pas d'armée ukrainienne. Donc, je vous
rassure, il n'y a pas d'accord de la Russie.
L'idée que nous nous faisons du droit international et que ce n'est pas la
Russie qui va choisir ce qui se passe sur le territoire ukrainien. Donc, c'est
bien acté et nous allons avancer et y travailler. Et donc, il y aura bien une
force de réassurance avec plusieurs pays européens qui se déploieront.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] J'ai demandé au ministre des Affaires étrangères de se rendre en Chine pour échanger d'abord sur les nombreux dossiers bilatéraux, ils sont multiples, et les grandes questions internationales. L'Ukraine fait partie des dossiers prioritaires sur ces grandes questions internationales. Et je souhaite pour ma part que la Chine, en effet, puisse jouer un rôle actif. Et compte tenu de la qualité du dialogue qui est le sien avec la Russie, compte tenu de l'initiative de paix qu'elle avait prise en lien avec le Brésil il y a quelques mois, je souhaite qu'en effet le président Xi puisse avoir un rôle tout à fait actif pour nous aider à bâtir cette paix solide et durable. Et je pense que la Chine n'est plus que légitime pour le faire en tant que membre permanent du Conseil de sécurité et compte tenu des initiatives précédemment prises.
> [Agression de
Poutine contre l’Ukraine] Une bonne partie de ces cessions [de matériels
militaires à l’Ukraine] sont intégrées dans la trajectoire de notre loi de
programmation militaire, qui, justement, parce que nous avons accéléré, et je
rappelle que les deux lois de programmation militaire, qui font partie de notre
architecture financière et de notre trajectoire, ont intégré un programme
inédit de renouvellement de nombre de nos capacités. Ces deux lois, d'ailleurs,
auront doublé le budget de nos armées.
Donc précisément parce que nous avons anticipé, nous n'avons pas attendu ni ces
dernières semaines ni même ces deux dernières années pour faire cet
investissement. Nous avons la possibilité de céder des matériels que nous
utilisions jusqu'à récemment parce que nous sommes en train de les renouveler.
C'est une partie de l'effort du paquet des 2 milliards. D'autre part, nous
avons aussi accéléré la production, ce fameux effort de guerre et l'économie de
guerre des 3 dernières années. Et en accélérant la production, on achète aussi
plus de capacités auprès de nos industriels qu'on cède aux Ukrainiens. Donc cet
effort et ces 2 milliards annoncés hier sont tout à fait soutenables. Ils
seront détaillés par le ministre des Armées auprès des Commissions, à l'Assemblée,
au Sénat et devant l'intégralité des Parlementaires, et cela fait partie de
notre trajectoire.
À côté de cela, nous avons pour nous-mêmes à accélérer et à accroître notre
effort de défense compte tenu de l'accroissement de la menace, ce que j'évoquais
il y a quelques jours auprès des Français. C'est là-dessus qu'un travail est en
cours, mené par le gouvernement, qui a identifié, à ma demande, toutes les
lignes d'effort qui vont nous conduire justement à accroître nos
investissements militaires, pour rendre la nation plus forte et pour tenir la
paix, si je puis dire, sur notre continent et pour notre pays. Et à cet égard,
le Gouvernement prévoit aussi les réformes qui permettront de financer ce
travail. Et donc, c'est dans les prochaines semaines que ce travail sera achevé
sous la supervision du Premier ministre. Et en temps voulu, une fois qu'il sera
terminé, c'est le Premier ministre et les ministres qui vous détailleront tout
cela.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] Sur la question des avoirs russes qui sont gelés. Je veux ici rappeler le cadre juridique international qui est connu et est très clair. En droit international, nous n'avons pas le droit de saisir des avoirs gelés, nous n'avons pas la base juridique pour le faire. Ce que nous avons fait, c'est que ces avoirs gelés, qui sont de l'ordre d'un peu plus de 230 milliards d'euros, dont une bonne partie est détenue dans le système Euroclear, système européen, qui est sous droit belge, la France est actionnaire, d'ailleurs, de ce système. C'est que tous les revenus financiers qui sont dégagés par ces avoirs gelés, ce sont ces revenus qui nous servent à payer l'effort de soutien à l'Ukraine. Et donc, dans les 2 milliards d'euros que je viens d'évoquer et que vous avez mentionnés dans votre première partie de question, il y a une partie qui est financée grâce à notre effort dit ERA, qui était, vous savez, les 50 milliards de financements en G7. Les Européens ont fait 18 milliards de prêts aux Ukrainiens, dont 9 milliards pourront être utilisés sur le militaire, ce qu'on va faire pour payer ce matériel pour partie. Cela est gagé sur les intérêts et les revenus de ces 230 milliards d'euros d'actifs gelés. Donc nous utilisons les actifs gelés parce qu’ils donnent pour payer, permettre justement ces prêts et cet effort de guerre. Maintenant, aujourd'hui, nous n'avons pas le cadre pour les saisir et on ne peut pas tout à la fois prendre les revenus de ces actifs et les saisir. Il faut choisir. Nous, on a pris les revenus et on se conforme au droit international. Par contre, la question va se poser dans le temps de savoir si nous ne devons pas mettre ces 230 milliards d'euros d'actifs au fond dans la question du règlement du conflit. Et parce que la Russie ayant massivement détruit l'Ukraine, il est normal qu'elle contribue aussi, pour partie, à sa réparation sur le plan financier. Mais ça, ça fera partie des discussions, justement, de paix et du jour d'après. Voilà le statut de ces 230 milliards d'euros. Et je pense qu'on a raison d'être rigoureux sur ce point. Et donc en ce moment, nous travaillons vraiment au cadre juridique, à l'avancée de tout cela, en lien très étroit avec la Commission européenne et le gouvernement belge.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] J'ai, au fond, une approche très stoïcienne de la question. Nous ne pouvons décider que pour ce qui dépend de nous. Et donc nous avons décidé pour ce qui dépend de nous, et c'est déjà important. Et nous, on est clair sur ce qu'on va faire à court terme pour l'Ukraine, comment on va préparer le cessez-le-feu, comment on est prêt ensuite à bâtir des garanties de sécurité armées ukrainiennes fortes, force de réassurance et augmentation de notre effort de défense pour nous-mêmes. Ensuite, il faut espérer le meilleur, mais se préparer au pire. Et donc, mon souhait est que les Américains soient engagés à nos côtés, et mon souhait est que les Américains assurent justement un soutien, voire une participation active à tout cela, parce que c'est bon pour leurs alliés européens, c'est bon pour l'OTAN, c'est bon pour nous tous. Mais nous devons nous préparer à une situation où peut-être, ils ne se joindraient pas. Il faut se préparer aux deux cas. Mais on ne peut pas dire : si les Américains ne se joignaient pas, alors on ne ferait rien. Parce que ça signifierait qu'il n'y a pas de paix solide et durable en Europe et pour les Européens sans les Américains. Non. Et donc c'est aussi pour cela que, je vous l'ai dit il y a plusieurs semaines, nous sommes à un moment décisif de l'histoire où il nous faut, pour la première fois depuis très longtemps dans nos discussions, nous préparer à un scénario qui est possible, qui n'est pas celui qu'on souhaite, mais qui est de devoir totalement agir seuls pour nous-mêmes. Ça s'appelle la sortie de l'état de minorité géopolitique. C'est une bonne chose pour l'Europe.
> Les États-Unis sont des alliés fiables, c'est pour ça que je ne ferai pas de commentaire sur les commentaires. Et quand les gens disent des mots un peu rapides dans des émissions de télévision, il ne faut jamais ensuite commenter parce qu'on fait du suraccident. Et donc les États-Unis d'Amérique sont des alliés fiables. Ils sont des alliés qui nous ont beaucoup aidés en Ukraine depuis le début de cette guerre, qui essaient de mener des négociations de paix qui sont utiles. La volonté du président Trump, nous la partageons, et les efforts qu'il mène, nous les saluons. Mais après, nous, nous avons des intérêts qui ne sont forcément pas les mêmes, parce qu'il y a un océan au milieu. Et donc, si à un moment donné, les intérêts américains ne sont pas forcément les nôtres et que les priorités américaines ne sont pas forcément les nôtres, tout en nous respectant, il faut qu'on puisse, nous, défendre nos intérêts, surtout quand nos intérêts s'appellent notre sécurité. Voilà. Et donc ça, ça n'est pas dépendant des décisions d'un tel ou d'un tel, ça doit être notre décision.
> [Agression de
Poutine contre l’Ukraine] Le président Trump, sa priorité, c'est de parachever
les discussions en cours avec la Russie. Et je pense que c'est une très bonne
chose. Et donc, il y a eu un accord important, il y a maintenant 15 jours,
entre les Américains et les Ukrainiens, qui a permis d'établir cette
proposition de cessez-le-feu pour 30 jours, inconditionnelle, dans les airs, en
mer et sur les infrastructures. Et ça, c'est vraiment un acquis du travail des
dernières semaines. Nous avons modestement aidé avec les Britanniques, les
Allemands pour convaincre aussi le président Zelensky, mais c'est très
courageux de la part du président Zelensky et c'est vraiment une réussite de
l'action du président Trump.
Maintenant, le président Trump, c'est normal, il se retourne vers les Russes et
dit, vous êtes l'agresseur, l'agressé est d'accord pour cesser les hostilités
sans condition, vous devez faire pareil. Donc, je pense que le président Trump,
il attend une réponse claire de la Russie. Il a raison. Et nous, on est
derrière lui. Et donc, je pense que s'il a cette réponse claire de : « la
Russie ne vient pas », à juste titre, le président Trump se sentira floué,
trahi. Et donc là, il devra réagir. Mais, je ne me mets pas à sa place.
J'essaie juste de décrire comment les choses vont normalement se passer. Donc
c'est ça, sa priorité du moment. Dans ce contexte, nous, on fait un travail
complémentaire qui est de dire, en parallèle de ces négociations, nous, on
prévoit tout le reste, si je puis dire : continuer d'aider l'Ukraine pour ne
pas qu'il y ait de problèmes à très court terme, en tout cas les aider à
résister, préparer les conditions et l'encadrement d'un cessez-le-feu le jour
où il sera signé, et puis réussir à soutenir l'Ukraine pour que, quand cette
paix soit signée, elle soit vraiment robuste et durable et qu’on dissuade la
Russie de remmener une agression. Donc, c'est un travail complémentaire, et
nous sommes en coordination, et on verra dans les prochaines heures, les
prochains jours, si ça arrive, et je pense que, au fond, le juge de paix, ce
sera la capacité des Américains à obtenir un cessez-le-feu inconditionnel pour
30 jours des Russes. C'est ça. Et si les Russes ne le donnent pas… ça veut dire
qu'ils ne seront pas au rendez-vous, il faudra que les Américains en tirent les
conséquences. Si les Russes le donnent, ce sera une réussite, et on pourra
passer à l'étape d'après.
> [Droits de
douanes imposés par Trump] Je pense que ce n’est pas une bonne idée. Je l'ai
dit au président Trump, et je l'ai redit hier, et je continue à lui dire. Au
moment où, on le voit bien, les marchés aux États-Unis ne considèrent a priori
pas que ce soit une très bonne politique économique, au moment où, à juste
titre, le président Trump demande aux Européens de faire davantage d'efforts
militaires pour assurer eux-mêmes leur sécurité, en disant, c'est à vous de
faire, ce n'est plus à nous de payer pour vous, ce n'est pas le moment de nous
imposer des tarifs. Donc ce n'est pas cohérent. Bon, la deuxième chose, c'est
que ça détruit de la valeur pour tout le monde. Je ne vais pas faire ici de la
théorie économique, mais le commerce international s'est structuré de telle
manière, et en particulier entre les États-Unis d'Amérique et l'Europe, qui
fait que le commerce crée plutôt de la croissance, de l'innovation et du
progrès pour nos deux sociétés.
Mettre des tarifs, c'est casser des chaînes de valeur, c'est, à court terme,
créer un effet inflationniste et plutôt détruire des emplois. Donc ça n'est pas
bon, ni pour l'économie américaine, ni pour l'économie européenne, comme ça
n'est pas bon pour l'économie canadienne ou mexicaine. Et je trouve qu'il y a une
forme de paradoxe, avoir les principaux alliés des États-Unis et être les
premiers taxés. Si la géopolitique du moment, c'est de dire la priorité est de
taxer le Canada, le Mexique et les Européens et de ne pas bouger sur le reste,
je n'ai pas compris alors l'ordre des choses et la géopolitique qui était
suivie.
Donc, je pense que ça n'est pas une bonne idée économique, je pense que ce
n'est pas une bonne idée géopolitique, je pense que ce n'est pas une bonne idée
en termes de moments. Si ça devait advenir, je le regretterais. Et évidemment,
à coup sûr, les Européens se protégeraient en répondant. Et le but d'une
réponse riposte, ce ne sont pas les Européens qui sont agressifs sur le plan
tarifaire, ce serait de trouver un accord pour ensuite démonter tous ces
tarifs. C'est comme ça qu'on fait. Mais enfin, tout ça fait plutôt perdre du
temps et va créer beaucoup d'inquiétude dans de nombreux secteurs. Et donc, on
va aussi veiller de manière très étroite à accompagner avec la Commission
européenne l'ensemble des secteurs économiques qui seront touchés, et apporter
des réponses à l'égard des uns et des autres.
En tout cas, je pense que ce n'est pas une décision qui permet d'améliorer le
progrès et la prospérité dans nos sociétés. Et donc, j'espère que, peut-être
après des annonces qui viendront, le Président Trump les revisitera et pourra
revenir sur cette décision.
> [Condamnation de Boualem Sansal par le régime algérien] Je veux dire tout mon soutien à Monsieur Sansal, à lui et à sa famille. Et je souhaite vivement qu'après ce jugement, il puisse y avoir des décisions claires, je dirais, humaines et humanitaires, par les plus hautes autorités algériennes pour pouvoir lui redonner sa liberté et lui permettre à la fois de redevenir un homme libre et de se soigner parce qu'il combat aussi la maladie. Et je sais pouvoir compter sur, à la fois, le bon sens et l'humanité des autorités algériennes pour prendre une telle décision. En tout cas, je l'espère fortement.
> [Agression de
Poutine contre l’Ukraine] Nos leviers [face à Poutine] sont ceux que nous
activons depuis le début. Aider l'Ukraine à résister et ne pas faiblir, montrer
que nous serons aux côtés de l'Ukraine dans la durée pour prévenir des
nouvelles violations de son territoire et maintenir les sanctions. Et je pense
que c'est pour ça que nous avons eu ce message très clair. Quiconque sera
faible sur les sanctions s'enlève des leviers à l'égard de la Russie pour mener
ensuite une négociation qui serait crédible.
Ensuite, je pense que les Américains ont aussi beaucoup de leviers et
qu'aujourd'hui, ils sont engagés dans une négociation. Mais j'ai confiance dans
le fait que si les Russes venaient à ne pas répondre à la proposition de trente
jours de cessez-le-feu, les Américains ont la possibilité d'accroître les
sanctions, de prendre des sanctions secondaires, de prendre des sanctions
beaucoup plus fortes qui auraient un effet à coup sûr une pression sur la
Russie.
Ensuite, il faudra négocier avec la Russie la suite et se remettre autour de la
table, et nous le ferons, et nous serons autour de la table pour discuter avec
le président Poutine et l'ensemble des équipes qui auront ces mandats de
négociation le jour d'après pour l'Ukraine et pour nous, Européens.
> [Agression de
Poutine contre l’Ukraine] Le Président Zelensky a eu des réponses très claires
et très précises sur les demandes de court terme qui étaient les siennes. Avoir
plus rapidement les financements pour l'effort en termes d'artillerie, avoir du
soutien de défense solaire et de munitions, avoir des capacités de combat dans
des registres critiques, et à la fois avec les annonces de 2 milliards faites
hier, les annonces faites aujourd'hui par plusieurs collègues et l'annonce
faite par la Commission européenne d'accélération en termes de financement, je
crois qu'il a eu ces réponses-là.
Maintenant, je le dis avec beaucoup d'humilité, tout ce que nous faisons et qui
sont des investissements importants de nos Nations dans des contextes - votre
collègue l'a rappelé tout à l'heure - budgétaires, qui sont très tendus dans
nos pays, ne sont que peu de choses par rapport à une Nation et une armée qui,
elle, se bat sur le terrain et perd chaque jour des soldats, et parfois, pour
certains jours, des civils. Et donc, je ne dirai jamais que l'Ukraine a tout ce
qu'il faut pour se défendre, parce que ça n'est pas vrai. Et n'oublions pas que
depuis le début, nous sommes dans un cadre où nous avons décidé de ne pas être
partie prenante de cette guerre. Cette guerre, elle est menée par les soldats
ukrainiens seuls. Nous les équipons, nous les formons, nous les entraînons.
Enfin, ils ont ce courage. Donc j'aurai toujours l'humilité, ici, de rappeler
cela. Et donc ça n'est jamais assez, parce que tant que leur territoire est
occupé et que leurs vies sont perdues, ils doivent se battre, et avec des
pertes qui sont conséquentes.
Maintenant, pour la suite, je pense que le plus vite, le plus précis, et le
plus pragmatique possible. La réunion d'aujourd'hui, ce sommet, a permis de
rendre opérationnel beaucoup de décisions qui faisaient l'objet de discussions
durant ces derniers temps. Maintenant, il faut accélérer. Il faut accélérer les
discussions pour obtenir un cessez-le-feu. C'est ce qui est en train de se
jouer en ce moment en Arabie saoudite. Je remercie une fois encore le Roi et le
Prince héritiers pour leur travail. Et il faut accélérer, nous, notre capacité
à financer, à délivrer des armes et à préparer le schéma d'armée ukrainienne et
le schéma de forces de réassurance. C'est pourquoi, c'est dès les prochains
jours de la mission que j'ai confiée aux deux chefs d'état-major, se déploiera.
Et il nous faut quelques semaines pour cela. Je pense que d'ici 3 à 4 semaines,
on aura sur ces deux questions, le format d'armée ukrainienne et les forces de
réassurance, un schéma d'action assez précis avec les besoins, avec aussi les
contributeurs. Et je pense que ce sera clé pour crédibiliser une paix solide et
durable.
> [Agression de
Poutine contre l’Ukraine] La Roumanie a un rôle très important parce qu'elle
est aux avant-postes depuis le début. Et c'est d'ailleurs pour cela que deux
jours après la guerre d'agression lancée en février 2022, nous avons déployé
des forces françaises, là aussi, forces de réassurance, pour protéger le
territoire roumain parce qu'il est à l’avant-poste.
La Roumanie a joué un rôle extrêmement important depuis le début, parce qu'elle
est sur la mer Noire, parce qu'elle a un rôle structurant sur la question du
Danube et parce qu'elle a été un des acteurs clés des négociations sur la
circulation des céréales. Et donc, je veux ici remercier les gouvernements
successifs et Présidents roumains pour le rôle qui a été celui de la Roumanie à
ce titre. Et donc, dans les actions qui ont été évoquées, à la fois sur la
surveillance des conditions de cessez-le-feu, mais également pour soutenir une
armée ukrainienne solide et durable, la Roumanie a un rôle et aura un rôle tout
à fait important compte tenu de son voisinage et des choix très clairs qu'elle
a toujours fait.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] Le rôle de la France, quant à lui,
est clair depuis le début. Nous sommes un des pays fondateurs de notre Union
européenne. Nous sommes un pays membre permanent du Conseil de sécurité des
Nations unies, doté de l'arme nucléaire, avec un format d'armée complète qui est
aujourd'hui l'armée la plus efficace d'Europe. Ces rôles successifs nous
donnent une responsabilité toute particulière qui est d'une part diplomatique,
d'autre part d'essayer d'avoir un effet d'entraînement sur l'effort militaire
conjoint, et puis d'avoir un effet d'entraînement aussi sur la stratégie
économique qui suit. Et au fond, ce que nous croyons depuis plusieurs années,
c'est que notre Europe a besoin de plus d'indépendance, technologique et
économique, agricole et industrielle et militaire, dans le contexte
géopolitique qui est le sien, et qu’il y ait une forme d'accélération de
l'Histoire qui rend le constat que nous faisions, il y a quelques années,
encore plus vrai, mais du coup les investissements à faire et les
réorganisations à conduire encore plus urgentes.
C’est ce que nous sommes en train de faire. Et donc nous devons être aux
avant-postes sur la question de l'Ukraine et de notre sécurité collective. Mais
nous devons mettre la même intensité dans le travail pour notre compétitivité,
pour notre réindustrialisation, pour notre innovation, notre agriculture et
puis la défense des Européens eux-mêmes.
> Nous respectons
la Turquie, qui est un grand pays et qui a vocation à jouer un rôle important
pour la sécurité et la stabilité de notre continent, en restant fidèle à sa
propre histoire. Et c'est la raison pour laquelle nous avons toujours été
soucieux de garder le dialogue avec Ankara, y compris pour expliquer nos
différends. C'est la raison pour laquelle, et c'est souvent moi qui ai pris
l'initiative, j'ai été régulièrement en contact avec le Président Erdogan ces
derniers mois, y compris lorsque je me suis rendu d'ailleurs à Washington le 24
février dernier pour rencontrer le Président Trump et parler d'Ukraine, j'avais
eu sur le chemin le Président Edogan.
Sur l'Ukraine, vous avez raison de dire que la Turquie a un rôle à jouer,
c'était l'objet de la présence du Vice-Président, parce que la Turquie a une
responsabilité singulière en mer noire, et pour autant qu'elle le souhaite,
elle peut être un acteur qui contribuera à cette paix durable. La Turquie, il
ne faut pas l'oublier, a joué un rôle important pour aider à libérer les
céréales et avoir des réponses très concrètes. Et son rôle en mer noire,
reconnu par les traités et qui est une réalité, lui donne, si elle le souhaite,
une responsabilité particulière pour donner des assurances de sécurité à l'Ukraine
dans cet espace.
Cela étant dit, et puisque j'ai parlé de l'Histoire, je veux souligner que son
histoire est aussi celle de son engagement européen et démocratique, au sein en
particulier du Conseil de l'Europe, auquel elle a adhéré l'année de sa fondation,
en 1949, et avec la fin du Parti unique au début des années 50. Chacun connaît
les vicissitudes de ces 75 années, mais le caractère systématique des
poursuites contre les figures de l'opposition, de la société civile, les
atteintes à la liberté de s'informer et de rassembler. L'arrestation et la mise
en détention du maire d'Istanbul constituent, de manière très claire, des
atteintes et des agressions qu'on ne peut que regretter, au nom précisément de
cette histoire et au nom précisément d'une certaine idée de la Turquie et de
son rapport à l'Europe.
La Turquie a besoin de l'Europe et l'Europe a besoin de la Turquie, mais elle a
besoin d'une Turquie qui assume ses responsabilités au titre de la sécurité
européenne, mais qui continue d'être sur son chemin démocratique en respectant
les engagements auxquels elle a souscrit. Et vous l'avez compris en vous disant
cela, c'est un souhait ardent que je formule.
> Conférence
de presse lors de la rencontre avec Volodymyr Zelensky]
C'est un plaisir et un honneur d'accueillir de nouveau à Paris le président
Volodymyr Zelensky. Merci, cher Volodymyr, d'être là. Et à travers vous, c'est
à toute la nation ukrainienne que la France adresse un message d'amitié et de
soutien qui est clair et sans ambiguïté. Nous sommes et nous resterons
résolument aux côtés de l'Ukraine. Il en va de l'intérêt du continent européen
et de notre sécurité. Depuis plus de 3 ans, l'Ukraine mène un combat qui
dépasse ses seules frontières, c'est le combat de la liberté contre
l'oppression, du droit contre la brutalité. Nous avons en effet changé d'air et
l'agressivité de la Russie ne constitue pas qu'un défi à l'ordre global et à la
stabilité du monde, elle impacte aussi très directement notre sécurité en
Europe. Nous sommes depuis quelques semaines dans une phase décisive pour
parvenir à mettre un terme à la guerre d'agression de la Russie. Je salue ici
l'initiative du président Trump qui vise à aboutir au plus vite à une
diminution, puis à une cessation des hostilités dans un séquençage qui doit
nous aider à parvenir à une paix solide et durable qui garantisse la sécurité
de l'Ukraine et la stabilité sur notre continent. Et ces dernières semaines,
nous avons très régulièrement échangé avec vous, cher Volodymyr, Monsieur le
Président, comme avec le président américain Donald Trump, et avec nombre de
collègues que nous retrouverons d'ailleurs demain sur ce sujet. À Djeddah, le
11 mars dernier, l'Ukraine a clairement exprimé aux États-Unis son accord pour
un cessez-le-feu complet et sans conditions préalables pour une durée de 30
jours, alors même que c'est elle qui est victime de l'agression. Nous attendons
le même engagement de la part de la Russie. Ces derniers jours, les États-Unis
ont échangé, grâce à l'hospitalité de nos amis saoudiens que je tiens à saluer,
avec la Russie et l'Ukraine afin de faire cesser, dans un premier temps, les
frappes sur des infrastructures énergétiques et de travailler à un
cessez-le-feu en mer Noire. Ces mesures peuvent constituer un premier pas vers
un cessez-le-feu plus large, ouvrant la voie à la construction d'une paix qui
garantisse la sécurité de l'Ukraine, même si je constate la volonté aujourd'hui
clairement établie par la Russie de réécrire ou de réinterpréter ce qui aurait
été discuté ou agréé en listant de nouvelles conditions. Loin de prouver
qu'elle veut vraiment la paix, la Russie continue de fait, jour après jour, de
frapper intensément le territoire ukrainien, y compris des cibles civiles. Ces
frappes, nous les condamnons et elles doivent absolument cesser. Au total, là
où vous avez su, Monsieur le président, prendre le risque de la paix, en
proposant et en acceptant ce cessez-le-feu de 30 jours en air, mer et sur les
infrastructures civiles, à date, la Russie n'a apporté aucune réponse solide
et, par ses actes, elle a montré sa volonté de guerre et de continuer
l'agression. Nous avons pris des décisions importantes lors du dernier Conseil
européen, et l'approche de la paix par la force est celle que nous continuons à
poursuivre. Et c'est pourquoi la discussion que nous venons d'avoir, que nous
continuerons tout à l'heure, et le sommet que nous tenons demain pour bâtir
cette paix solide et durable pour l'Ukraine et pour l'Europe, va nous permettre
d'aborder plusieurs points. D'abord et avant toute chose, le soutien immédiat à
l'Ukraine. Nous devons le poursuivre. Il est nécessaire pour continuer la
résistance. Et j'ai pu annoncer aujourd'hui 2 milliards d'euros supplémentaires
de soutien de la France sur le plan militaire à l'Ukraine. La France, depuis le
début, vous le savez, apporte des capacités qui répondent aux besoins
prioritaires des forces armées ukrainiennes. Et nous avons préparé une aide
supplémentaire avec des missiles anti-chars MILAN, des moyens de défense
aérienne, comme des missiles MICA, qui équipent les MIRAGE qui ont été livrés,
ou encore des missiles de défense solaire MISTRAL. Pour tenir sur le front, les
armées ukrainiennes recevront également des blindés VAB, des chars AMX-10 RC,
mais également de nombreuses munitions, dont certaines téléopérées ou des
drones. Et nous avons aussi avancé sur les coopérations en matière satellitaire
ou d'intelligence. Et ce soutien sera complété également par des productions
d'équipements en Ukraine, grâce aux partenariats noués avec nos entreprises de
défense. Ces 2 milliards d'euros de soutien, c'est une part de ce premier volet
et notre volonté demain est de mobiliser tous les partenaires qui seront présents
pour continuer ce soutien immédiat à l'Ukraine. Le deuxième élément de la
discussion portera sur le cessez-le-feu durable, en s'assurant qu'il puisse
être observé et respecté. Ce sera une partie importante des travaux que nous
mènerons demain avec nos collègues européens pour précisément bâtir ce
séquençage, un cessez-le-feu mesurable de court terme, les discussions
politiques et ensuite, et qui pourra être consolidée et pleinement suivie. Le
troisième élément de discussion concernera le format futur de l'armée
ukrainienne. Car la première garantie de sécurité pour l'Ukraine de demain, une
fois la paix signée, ce sera d'avoir un format d'armée crédible qui permette de
dissuader toute nouvelle agression et de résister éventuellement à de nouvelles
attaques de l'armée russe. Et nous aurons l'occasion de revenir en détail
demain sur ce volet. Le quatrième élément, ce seront les forces de garantie
dans le cadre d'un accord de paix, non pas sur la ligne de front, mais en
deuxième rideau, comme une réserve stratégique, si l'on peut dire, pour aider à
dissuader toute nouvelle agression russe, là aussi. Les travaux des chefs
d'État-major ces dernières semaines ont permis de progresser sur la
planification de propositions d'options solides, Ce sera aussi une part de discussion
de demain. Tels seront les 4 éléments qui structureront nos échanges demain et
dont l'objectif, vous le voyez bien, est de permettre à l'Ukraine de maintenir
la situation sur le terrain et de résister à l'agression russe, mais aussi de
construire les éléments crédibles de cette paix durable que nous appelons de
nos voeux, quelle que soit l'évolution des discussions. En tout cas, je veux
ici le redire avec force, la France poursuivra son engagement, elle le fera en
soutien des efforts américains, en concertation avec ses partenaires européens
et alliés, et avec une détermination qui ne faiblira pas. Nous avons toutes ces
dernières semaines, je l'ai dit, échangé en permanence avec le président Zelensky,
j'ai échangé quasiment quotidiennement avec le président Trump aussi, et nous
avons mené un travail très étroit avec nos partenaires britanniques, avec qui
le travail s'est fait main dans la main, et avec aussi nos principaux
partenaires européens, qui seront présents autour de nous demain. Je veux être
très clair ce soir. La Russie ne saurait avoir un droit de regard sur le
soutien que nous apportons et que nous apporterons à l'Ukraine, ni ne saurait
dicter les conditions de cette paix durable, parce qu'il en va de la
souveraineté de l'Ukraine et parce qu'il en va de la sécurité de tous les
Européens. Monsieur le Président, cher Volodymyr, vous recevoir ce soir est à
nouveau pour nous un privilège. Vous incarnez la résistance d'un peuple qui
refuse de plier face à l'inacceptable, face à la force brute ou au fait
accompli. Et cette résistance force le respect de tous les Européens. Elle
force le respect des Françaises et des Français, parce que nous savons aussi
que c'est de notre sécurité dont il s'agit. C'est pourquoi vous pouvez compter
et pourrez compter sur le soutien et l'engagement de la France à vos côtés,
parce que l'Ukraine mérite la paix, et que pour vous avoir vu ici, un soir de
décembre 2019, dans une discussion à l'époque avec le président Poutine et la
chancelière Merkel, j'ai vu combien vous vous battiez pour préserver cette
paix. Je ne laisserai réécrire aucunement l'histoire par certains. Il n'y a
qu'un agresseur, il n'y a qu'un résistant. L'agresseur, c'est la Russie, le
résistant, c'est vous. Et les Européens, comme les Américains, n'ont pas
d'autre choix que celui de leur histoire, du respect du droit international et
du respect de leur propre sécurité. Merci d'être là, et nous serons là aussi.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] Bien, la Russie veut quoi ? Conquérir le maximum de territoires en Ukraine. L'Ukraine veut quoi ? Les libérer ? Notre souhait, c'est qu'une paix solide et durable se fasse. Est-ce que la question territoriale sera intégralement réglée ? Ça fera partie de la discussion, mais elle sera très difficile. Et donc, il y aura immanquablement, à l'issue de cette discussion, une ligne de front avec des territoires occupés. Cette situation, nous la connaissons. Face à cette situation, il faut qu'il y ait un mécanisme qui permette de garantir la non-violation de ce cessez-le-feu. En tout cas, qui permette d'observer les choses. Alors, soit c'est un mécanisme ad hoc, et par les observations satellitaires, on sait dire qui fait quoi. Soit, je vous rappelle, c'est ce qui a prévalu entre 2014 et 2022, ce fut l'OSCE, qui était chargée de regarder les violations. Ça n'est aujourd'hui pas le souhait du président. On parlera en détail demain avec les partenaires, mais ça peut être une option. Ça peut être aussi un mandat des Nations unies qui déploierait à ce moment-là des troupes de maintien de la paix avec une opération ad hoc. Ce n'est pas cela dont on parle quand on parle de garantie de sécurité. Et il faut faire ce distinguo parce que sinon la confusion s'installe à chaque fois. Sur la ligne de front, ce ne seront pas des troupes européennes qui seront déployées. Sur la ligne de front qui sera l'une des résultantes de l'accord de discussion, il y aura les belligérants d'hier des deux côtés, donc il y aura d'un côté les armées russes, de l'autre côté les armées ukrainiennes, et ça fera partie des discussions, dès qu'un cessez-le-feu provisoire sera décidé, ça fera partie des discussions pour une paix durable de savoir quel est le mécanisme potentiellement de maintien de la paix, de suivi ou de surveillance. On en parlera demain. Ce n'est pas à nous de le préempter, c'est à nous d'apporter de la réassurance là-dessus, il y a peut-être un cadre et un soutien si le choix qui est fait par l'Ukraine est celui des Nations unies, mais ça, c'est le cadre d'opérations de maintien de la paix éventuellement et de ce qui se passe sur la ligne de front. Ensuite, pour garantir la sécurité, ce qui n'est pas la même chose que maintenir la paix, pour garantir la sécurité, qui est au fond de se dire si demain la Russie, comme elle l'a fait à chaque fois, je vous rappelle, venait à reprendre une opération dans 3 ans, dans 5 ans, que se passe-t-il ? Qu'est-ce qui fait qu'on ne reproduit pas les erreurs d'hier ? Première chose, le format de l'armée ukrainienne. C'est la première chose. Pourquoi ? Parce que c'est aujourd'hui, de fait, la plus grande armée d'Europe. Et donc, tout le travail qu'on a commencé, qu'on va poursuivre, c'est de se dire : quel est le format d'armée ukrainienne et quelles sont les capacités dans la main de cette armée ukrainienne qui lui permet de dissuader une nouvelle agression russe ou de résister à celle-ci. Et donc là, c'est un travail à la fois militaire, programmation, de formation capacitaire et de soutien dans la durée à cette armée des Européens, parce qu'en quelque sorte, elle est l'avant-garde de notre sécurité collective. Ça, c'est le premier levier de la garantie de sécurité que j'ai bien distinguée d'une opération de maintien de la paix. Et ensuite, ce sur quoi on travaille, pour donner aussi des cartes à nos amis ukrainiens, ce sont d'autres formes de garantie de sécurité en soutien, ces fameuses forces de garantie ou de réassurance. Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que des forces européennes, sur une base, sur des choix nationaux, pourrait être amené, et ça, ça fait partie de la discussion, on donne notre disponibilité. Ça dépend des discussions qu'il y aura, mais c'est une carte à la main du président. Il pourrait être amené à tenir des positions dans la zone de paix en territoire ukrainien. Et donc le but de ces forces armées ne serait ni d'être sur la ligne de front, ni d'être engagés au premier jour face aux forces russes, mais d'être des forces qui dissuadent, là aussi, les Russes de réattaquer et qui, en tenant des villes importantes, des bases stratégiques, marquent un soutien clair de plusieurs gouvernements européens et alliés, permettent d'avoir peut-être des soutiens logistiques ou de la formation sur sol aussi ukrainien et indique très clairement que s'il y avait une agression généralisée à nouveau contre le sol ukrainien, ces armées seraient de fait attaquées. Et ensuite, c'est le cadre d'engagement qui est toujours le nôtre. Nous, nous avons des soldats qui, quand ils s'engagent et sont déployés, sont là pour réagir et répondre aux décisions du chef des armées, et s'ils sont dans une situation de conflit, d'y répondre. Et je ne vois pas pourquoi on se poserait des questions sur l'Ukraine qu'on ne s'est jamais posées ailleurs quand on a été déployé à bien des égards dans un cadre qui est clair. Donc, on n'est pas sur le front, on n'est pas pour aller se battre, mais on est là pour garantir une paix durable. C'est une approche pacifiste. Et les seuls qui déclencheraient, à ce moment-là, un conflit ou une situation belliqueuse, ce seraient les Russes s’ils décidaient une nouvelle fois de lancer une agression. Voilà le cadre strict sur lequel nous sommes en train d'avancer. C'est un texte franco-britannique. Il y a eu tout un travail qui a été fait par les chefs d'État-major à Londres, à Paris, et sur lequel on va poursuivre. Voilà la clarification entre ces différentes missions et ce sur quoi nous serions engagés. En vérité, ce sont des cartes qui sont aussi à la main des Européens et des Ukrainiens dans une négociation qui, à un moment, va arriver.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] Ces derniers jours, on a dit tout et n'importe quoi sur la mer Noire. Ceux qui ont fait de la mer Noire un théâtre de bataille, qui ont fragilisé les routes du commerce international, et en particulier pour alimenter l'Afrique ou ailleurs, ce sont les Russes, les seuls. À plusieurs reprises, nous avons dégagé des chemins de paix, des routes céréalières, avec un engagement que je veux saluer, ces dernières années, de la Turquie, qui a un rôle tout particulier quand il s'agit de la mer Noire, par les traités internationaux. Mais quand j'entends que ce seraient les Européens ou d'autres qui auraient une responsabilité sur ce qui s'est passé en mer Noire, c'est une drôle de façon de réécrire l'histoire. La folie. C'est totalement faux. Maintenant qu'on avance, c'est très bien, ça fait partie de la proposition qui a été agréée par le président Zelensky, cesser le feu en mer, dans les airs, sur les infrastructures civiles. Donc, il faut que les Russes y viennent. Mais c'est un cessez-le-feu temporaire, partielle, qui doit permettre de commencer à discuter une paix durable. Et pour moi, la question des sanctions, elle doit rentrer dans le cadre de ce règlement de la paix durable et solide. Et donc, j'adhère au concept de paix par la force, posé par le président Trump lui-même. Comme il est cohérent, je le connais, la paix par la force, ce n'est pas de commencer par enlever les sanctions avant d'avoir reçu ou vérifié, quoi que ce soit. Je pense que la question des sanctions, elle viendra à un moment donné. Mais pour le moment, je vois un pays qui a été agressé, qui a déjà fait un geste d'accepter un cessez-le-feu sans condition de 30 jours, et de l'autre côté, l'agresseur qui, lui, met des conditions et n'a même pas accepté cela. On ne va pas lever les sanctions, ou alors ça veut dire qu'on part en capilotade. Non, la question des sanctions viendra, mais elle viendra en temps voulu, dans le règlement d'une paix solide et durable, donc c'est beaucoup trop tôt. Je noterais, si la Russie dit demain qu'elle revient aux frontières internationalement reconnues, on respecte les choses, évidemment, les sanctions seront levées. Au fond, les sanctions, ça ne dépend que du choix d'agression de la Russie, et donc ça ne dépend pour les lever que du choix de la Russie à se conformer au droit international.
> [Agression de Poutine contre l’Ukraine] Je pense que l'administration américaine a engagé des discussions et que tout ce qui permet de contribuer à une paix, en condition qu'elle soit, encore une fois, solide et durable, est bon. Moi, j'attends la fin demain de la négociation. Et surtout, nous avons notre rôle à y jouer. C'est tout le travail utile qu'on fait depuis plusieurs semaines. D'abord, par le contact permanent que nous avons avec les Américains pour que les conditions de sécurité, dans la durée, des Ukrainiens, soient prises en compte et que les nôtres aussi soient prises en compte. Et ensuite, pour nous, faire tout notre travail, parce que quoi qu'il arrive, on a… c’est les 4 éléments que je vous ai détaillés et qui seront au cœur des échanges de demain, mais on doit continuer aussi longtemps qu'il n'y a pas de cessez-le-feu à soutenir l'Ukraine dans sa résistance. On doit véritablement travailler chaque détail du cessez-le-feu et de son respect, qu'il soit temporaire et après, quand ce sera la paix durable, et on doit bâtir ces garanties de sécurité. Donc, on est au travail, et il est trop tôt pour répondre à cette question de manière définitive. On est au travail, on est engagés, on fait part de nos exigences et on avance. Et je pense que tout ce qui permet d'aller vers la paix est une bonne chose, donc je ne ferai pas de procès d'intention à qui que ce soit. Pour ce qui est des deux milliards, les ministres pourront les détailler, mais je vous ai déjà donné une partie de capacité. Nous avons des capacités qui sont disponibles dans nos stocks et qui sont encore délivrables et ceci parce que nous avons aussi en permanence des matériaux qu'on rachète à travers notre loi de programmation militaire. C'est exactement ce qu'on a fait, par exemple, avec les MIRAGE. On accélère le renouvellement. Et donc, tout ce qu'on rend disponible, on le propose dans les catégories qui sont utiles à nos partenaires ukrainiens parce que ces 3 dernières années, on a acquis une intimité, on sait ce qui est utile et ce qui marche sur le combat. Et donc on a un premier bloc pour quelques centaines de millions de capacités qui sont en stock, qu'on peut livrer très vite. On a ensuite toutes des capacités, c'est-à-dire des véhicules blindés, c'est-à-dire des missiles, c'est-à-dire des CAESAR, qui sont là, des choses qu'on fait produire par nos industriels et qu'on achète. Et donc ça, ça fait partie de ce mécanisme d'économie de guerre, et donc ça, ce sont des choses qui se livrent. Certaines sont en train d'être prêtes, d'autres vont arriver dans les semaines à venir, et donc on a un calendrier, on priorise selon les besoins. Et puis après, on a des capacités d'observation satellitaires ou autres, qui font partie de cet ensemble. Et puis enfin, on a des coproductions, c'est-à-dire qu'on finance avec cette enveloppe pour partie des co-productions de drones, d'instruments qui sont utiles, et pour accélérer les délais, là aussi, les ministres regardent ça de manière très fine, eh bien de permettre à nos industriels d'aller coproduire avec des partenaires ukrainiens, ce qui permet d'aller parfois beaucoup plus vite, de réduire les coûts et d'être au plus près du théâtre d'opération. Voilà les catégories qu'il y a dans ces deux milliards d'euros qui ont été valorisés.
> Plus de 27 milliards de dollars ont été mobilisés au Sommet Nutrition for Growth de Paris pour lutter contre l'insécurité alimentaire. Un combat pour la paix et pour notre planète que nous devons poursuivre sans relâche.
> Le soutien militaire à l'Ukraine de 2 milliards d'euros supplémentaires a été anticipé et prendra notamment la forme de matériels militaires cédés. Soutenir l’Ukraine c’est renforcer notre sécurité à tous, Européens.
> Président Joseph Aoun, très heureux de vous retrouver à Paris pour votre première visite en tant que Président de la République libanaise. Bienvenue cher ami. Le Liban et la France avancent ensemble, toujours.
> [Discours lors du Sommet Nutrition for Growth de Paris]
(…) Le défi a été
parfaitement posé de la sécurité alimentaire et nutritionnelle. C'est un défi
qui touche en effet un dixième de la population mondiale qui empêche des vies
et tue. C'est un défi qui est aussi au cœur, au fond, de problématiques
croisées. C'est un nexus, le sujet dont on parle aujourd'hui. Et c'est au cœur
de la géopolitique, de l'agriculture, du climat, de la santé, de la pauvreté,
de la lutte contre les inégalités. Et c'est pour ça que c'est un défi si
compliqué à relever. Et c'est aussi pour cela que l'action de ce sommet, je
veux remercier, ici, nos prédécesseurs britanniques et japonais, aient
exactement la méthode pour y répondre. C'est-à-dire que ça ne repose pas sur
les seuls acteurs gouvernementaux.
Mais quand on a un problème aussi compliqué, il faut croiser la compétence des
organisations internationales, des gouvernements, des experts et scientifiques,
des fondations, des entreprises, des ONG, et réussir à bâtir une action utile
sur le terrain. C'est ce que vos prises de parole et vos actions, de parfois
depuis plusieurs décennies, montrent parfaitement. C'est ce que l'Alliance
globale, justement, contre la faim et la pauvreté illustrent de manière
parfaite, comme le 4P que nous avons lancé à Paris, d'ailleurs, avec le
président Lula, là aussi. Alors, en effet, l'insécurité alimentaire est d'abord
accrue par les guerres, les conflits, et nous avons besoin de continuer à nous
mobiliser pour y répondre. C'est exactement ce qui s'est passé avec la guerre
d'agression russe en Ukraine, nous nous en souvenons. Elle a profondément
perturbé la capacité à nourrir une partie de la planète, à fournir les engrais,
à libérer les céréales, et c'est au cœur de l'initiative que nous avions
lancée, dite FARM , un mois, jour pour jour, après le début de la guerre
d'agression, pour répondre à cette crise des céréales et réinvestir plus
globalement sur la sécurité alimentaire. Et je veux ici saluer le travail
extraordinaire du Programme alimentaire mondial pour répondre à cette crise
avec des initiatives emblématiques comme « Grain From Ukraine ». Et dans le
cadre de FARM, nous avons travaillé avec l'Organisation mondiale du commerce,
ce qui nous a permis de débloquer des restrictions d'exportation sur les
denrées du PAM.
L'Union européenne a aussi joué un grand rôle avec les couloirs de solidarité,
laquelle Europe a investi plus de 4,4 milliards d'euros pour l'accès à la
nutrition dans le monde depuis le dernier sommet de Tokyo en 2021. Et nous
avions aussi, avec FARM, identifié la nécessité de mieux mobiliser le secteur
privé, ce qui a été fait, et d'ailleurs, par la fondation CMA-CGM, avec des
solutions innovantes. Certaines ont été évoquées. Total, Balenciaga, Airbus,
Louis Dreyfus, beaucoup du secteur privé, je ne citerai pas tout le monde, ont
évidemment, là aussi, contribué à cet effort. Et donc nous avons vu ce faisant
combien il était nécessaire de répondre à ces défis. Et je veux remercier, en
effet, tous les philanthropes qui ont répondu présent à notre grand appel dans
le cadre de ce Sommet pour la nutrition. Et je ne peux que saluer l'effort
immense, vous venez de l'annoncer, des contributions à hauteur de plus de 1,5
milliard d'euros annoncés par le collectif Stronger Foundations, qui rassemble plus
de trente organisations, dont plusieurs sont ici présentes.
Les conflits créent la
faim, et nous avons cherché à chaque fois à y répondre, mais la faim crée les
conflits. Et s'il faut parfois se réarmer, ce que nous sommes en train de faire
pour essayer de préserver la paix, notre objectif reste et restera toujours la
paix, justement, et donc le combat que nous menons tous ensemble contre la
malnutrition et contre la faim est un combat de paix. Il est complètement
jumeau de ce que nous sommes en train de faire en Europe et ailleurs. Je pense,
ici, aux aléas de production agricole que le changement climatique accentue,
aux problèmes de transport, de stockage, d'accès aux semences et aux engrais
que plusieurs d'entre vous ont évoqués. Et à cet égard, je veux saluer le
travail du Fonds international de développement agricole, cher Alvaro, et je
vous remercie pour cette mobilisation qui, là aussi, a été essentielle ces
dernières années. Je salue aussi nos acteurs publics français de
l'investissement, Proparco et BPI France, qui ont pris ce virage. Ces deux
dernières années, 440 millions d'euros ont été investis par Proparco dans le
secteur agricole en Afrique. Et c'est ce dont nous avons besoin, de bâtir
justement plus de solidarité à travers nos financements publics, de consolider
l'action de nos organisations et, comme vous l'avez d'ailleurs parfaitement
dit, d'utiliser le talent et le savoir-faire de nos entreprises. Nutriset l'a
démontré.
La France, c'est une grande puissance agricole, agroalimentaire, et je salue
ici tous les producteurs qui sont présents : nos agriculteurs, nos grandes
entreprises, nos industries agroalimentaires qui sont là, nos distributeurs,
nos marchés, nos grandes places. Et donc, en mobilisant ces actions, nous avons
aussi une capacité à aider à bâtir à travers le monde, et cette solution qu'on
a cherché à faire dans plusieurs partenariats, c'est-à-dire travailler avec le
FIDA, avec nos entreprises, avec les organisations internationales et le
secteur privé, pour bâtir des capacités à produire, des capacités à de la
logistique, des capacités à stocker, mais aussi de la possibilité, justement,
d'exporter nos savoir-faire et ceux de nos entreprises.
À cet égard, parlant de projets concrets et consolidant ce que vous venez
d'annoncer, je veux dire combien la bataille pour la sécurité alimentaire et la
capacité à servir des repas sains à l'école à tous les enfants de la planète
est essentielle dans ce cadre. C'est ce pari fou que nous avions au moment même
de la pandémie, avec votre prédécesseur, nous avions lancé ce programme pour
garantir un repas par jour à l'école à tous les enfants d'ici 2030. Et je veux
saluer votre mobilisation, la mobilisation du Brésil, de la Finlande et de
plusieurs autres pays dans cette aventure.
Pour ne citer qu'un pays, la France, et vous partager quelques chiffres, la
cantine est un fait, chez nous, de société. 60 % des 13 millions d'élèves
scolarisés déjeunent au moins 4 fois par semaine à la cantine. Et donc, c'est
ce qui nous a conduit à lancer des programmes permettant de garantir à des
enfants de famille défavorisés l'accès à la cantine pour un euro et consolider
l'action de beaucoup de maires, de beaucoup d'établissements, parce que c'est
un élément clé à la fois pour leur croissance, pour leur santé, mais aussi pour
leur capacité à apprendre et à se développer. Alors, quatre ans après sa
création, cette coalition pour l'alimentation scolaire avance à grands pas.
Avec l'appui du Brésil, ce sont plus de cent pays engagés dans cette coalition.
Et j'ai le grand plaisir de confirmer que nous sommes en bonne voie pour
atteindre le pari que nous nous étions fixés pour 2030. Ce, grâce aussi à la
mobilisation formidable de tous ceux parmi vous qui ont souhaité que leur pays
réinvestisse dans leur propre cantine scolaire.
Et je salue aussi la mobilisation de groupes comme Sodexo et d'autres qui sont
particulièrement engagés dans cette action, et salue aussi plusieurs pays qui
ont rejoint cette initiative, pour n'en citer qu'un, l'Indonésie, qui a eu
l'audace de lancer un grand plan d'accès gratuit aux repas scolaires, ciblant
ainsi près de quatre-vingt-cinq millions d'écoliers. Mais c'est aussi grâce à
l'engagement de tous les soutiens de la coalition, notamment les philanthropes,
et la contribution de cent millions de dollars ciblée sur l'alimentation
scolaire annoncée aujourd'hui par la Fondation Rockefeller permettra
d'accélérer grandement nos travaux, et merci d'ajouter des forces à ce pari. De
notre côté, nous allons poursuivre sur cette tendance. Et ce sont plus de 750
millions d'euros d'investissements dans des projets favorisant la nutrition
portée par l'Agence française de développement ou nos programmes d'aide
alimentaire qui viendront consolider tout ce travail. Et donc, nous resterons
là aussi en soutien, évidemment, à la sécurité alimentaire et à ce travail pour
nos enfants.
Et puis, la nutrition, enfin, c'est pouvoir se nourrir aussi avec qualité. Et
c'est là où il y a ce nexus entre nutrition et santé. Alors même que nous
progressons dans la lutte contre la faim, mais que ce combat, vous l'avez
montré, suppose de continuer à mobiliser des solutions, des financements, nous
devons lutter. Et ça, c'est une bataille qui est plus dans beaucoup de pays
développés, mais aussi de beaucoup de pays à revenus intermédiaires et qui
dépendent d'ailleurs des géographies, des habitudes alimentaires. Mais il y a
une épidémie rampante, qui est l'épidémie d'obésité, en particulier, chez nos
enfants et nos adolescents. Et c'est un problème, là aussi, de nutrition et de
santé. L'obésité touche de nombreux pays, dont la France. Elle ne fait que croître,
en particulier, depuis le covid, chez nos adolescents. Et donc, comme nous
l'avions lancé en marge des Jeux olympiques et paralympiques, en nous battant
pour une alimentation plus saine dans le cadre d'une nation sportive, je
souhaite, là aussi, que nous renforcions l’action collective pour permettre
d'améliorer la qualité de notre alimentation. Et c'est quelque chose qui est
faisable pour tous les portemonnaies. Si nous arrivons à nous mobiliser entre
producteurs, industriels, distributeurs, artisans, à respecter des seuils
maximaux en sel, en sucre, en acides gras saturés ou des seuils minimaux en
fibres.
Pour être très concret, c'est ce que nous avons fait, et je veux saluer, par
exemple, l'engagement de nos producteurs de céréales et de nos boulangers. On
avait lancé cette mobilisation il y a quelques années, lors d'une galette des
rois à l’Élysée pour tout vous dire. Eh bien, nos boulangers, mais toute la
filière céréalière l'a fait, entre 2018 et 2023, on a baissé de 25 % la teneur
en sel dans le pain courant. Ça a été un très gros travail pour tout le monde.
Ça ne coûte pas un centime de plus, mais ça améliore la santé de tous ceux qui
mangent ce pain. C'est exactement la même chose qu'on doit faire sur le sucre,
et c'est là aussi, pour continuer à vous motiver dans les actions très
concrètes de tout le secteur privé, c'est par des choses ainsi très, très
concrètes que nous pouvons avancer. Et en vrai, toutes nos sociétés ont un peu
fait le contraire ces dernières décennies en allant beaucoup trop vers la
transformation excessive de l'alimentation.
Il faut parfois transformer les aliments, mais il faut à chaque fois regarder
si on peut transformer moins, et si on peut, par une action collective,
justement, améliorer cette qualité, parce que, je le dis, l'industrie des plats
transformés a aussi créé une société un peu transformée. Et donc, on peut faire
mieux. Et la qualité de notre alimentation, je finirai par-là, c'est finalement
le fruit d'un cycle complet, celui d'une seule santé, parce que notre santé
dépend, en effet, de ce que nous mangeons, et donc de la santé aussi des sols,
des plantes, des animaux. Et on voit combien ce combat pour la nutrition est
jumeau de notre combat pour la santé, mais aussi pour la biodiversité et l'écologie.
Je salue les organismes de recherche qui sont là et qui nous aident partout à
améliorer, justement, la capacité à mieux produire. Et donc, à l'heure où nous
avons des inquiétudes qui émergent et qui sont légitimes sur la pollution de
l'eau, la présence de microplastiques, de perturbateurs endocriniens, notre
devoir est aussi de regarder la question de la nutrition sans tabou et comme
vous l'avez très bien dit, Votre Majesté, sans silo.
C'est fondamental si on veut réussir ce pari. Et donc c'est aussi, dans nos
sociétés, revenir sur parfois des habitudes ou des pratiques de production,
veiller à la qualité des sols, de l'eau pour avoir une bonne qualité de
l'alimentation, et réussir aussi à accompagner dans leur transition agricole et
leur production, ce que vous faites admirablement, des pays en développement,
des pays à revenus intermédiaires pour qu'ils, en quelque sorte, profitent de
ce qu'on a collectivement appris et parfois des erreurs que nous avons commises
pour nous améliorer. Et ce sujet-là, je souhaite que nous puissions le traiter
avec tous les acteurs prêts à s'engager à l'occasion d'un One Health Summit qui
tirera le bilan de ces dernières années et que, dans les prochains mois, nous
organiserons pour, là aussi, remobiliser toute la communauté.
Enfin, je voulais vous dire que le sujet que nous sommes en train d'évoquer,
donc ce nexus, au fond, de l'alimentation qui va de l'agriculture à la santé,
en passant par les questions de logistique, de mobilisation, nous allons
continuer à le porter à l'issue de ce sommet Nutrition for Growth dans le cadre
du G7 que la France présidera l'année prochaine. Et donc, ce que je vous
propose, c'est qu'on ait un segment de suivi de ce sommet d'aujourd'hui,
l'année prochaine, en marge du G7 français, pour continuer à mobiliser tous les
acteurs.
Voilà. Je ne serai pas plus long. Je voudrais simplement conclure en vous
disant que vos engagements, votre présence disent beaucoup, dans ce moment que
nous vivons, d'abord du caractère essentiel de ce sujet de l'alimentation, de
l'insécurité alimentaire et nutritionnelle, de la nécessité de ce combat
croisé, jumeau, partenarial, entre tous les acteurs que vous êtes, ça a été
parfaitement dit, par la dirigeante d'Action contre la faim, mais on a en effet
besoin de réussir à mobiliser toutes les énergies dans un moment où il y a de
l'incertitude sur certains financements. Et au fond, ce que vous avez démontré
par votre présence et vos engagements dit tout : ce sont près de quatre cents
engagements qui ont été pris sur la plateforme, et ce soir, ce seront plus de
27 milliards de dollars qui seront mobilisés autour de ces engagements.
Donc, bravo à vous ! Merci infiniment pour votre énergie, votre mobilisation.
Et nous allons tous ensemble continuer ce combat, ce combat pour la paix, ce
combat pour l'alimentation, ce combat pour notre planète, ce combat pour une
action collective, respectueuse et responsable.
► Gouvernement
[Nota: Ce gouvernement est
dirigé par un centriste, François Bayrou ; nous avons donc décidé de
reprendre les propos de tous les ministres puisqu’ils agissent sous l’autorité
d’un Président de la République et d’un Premier ministre
centristes/centraux ; néanmoins nous avons fait une distinction avec d’un
côté les ministres centristes-centraux et les autres puisqu’il s’agit d’un
gouvernement de coalition du fait que le Président de la République et le
Premier ministre ne disposent pas d’une majorité à l’Assemblée nationale]
●
Ministres centristes/centraux
François Bayrou (Premier ministre)
> Injustifiable condamnation de notre compatriote Boualem Sansal à de la
prison ferme. Une voie digne et humanitaire est à portée. Je renouvelle notre
appel aux autorités algériennes à la considérer et à y répondre favorablement.
Elisabeth Borne (ministre d’Etat, ministre de l’Education
nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche)
> Comme je m’y étais engagée, dès aujourd’hui, les forces de
l’ordre procèdent à des contrôles inopinés de sacs devant certains collèges et
lycées, en lien avec les préfets, les procureurs et les recteurs. Protéger
l’École est une priorité absolue. Nous devons garantir la sécurité de nos
élèves et de nos enseignants.
> L’endométriose est l’affaire de tous. En cette Journée mondiale de lutte contre l’endométriose, faire connaître cette maladie est essentiel. À l’École, grâce au programme EVARS, avec l'appui indispensable des infirmières et infirmiers scolaires, la sensibilisation des jeunes filles va progresser. Et pour mieux traiter cette pathologie encore trop méconnue, l’État est pleinement engagé, avec un cap clair : placer la France aux avant-postes de la recherche et de l’innovation.
Agnès
Pannier-Runacher (ministre de la
Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche)
> Nos émissions de gaz à effet de serre continuent de baisser : -1,8% en
2024. Nous sommes sur la bonne trajectoire ! Mais les secteurs des transports
et du bâtiment sont en retard. Il ne faut pas baisser la garde. Notre politique
de planification écologique nous a permis de baisser 2 fois plus nos émissions
en 7 ans qu’au cours des 27 années précédentes.
> 10 ans après l’accord de Paris, quelques mois avant la COP30, l’Union européenne est et sera là pour défendre la cause climatique. C’est ce que j’ai réaffirmé avec force au Dialogue de Petersberg sur le Climat aujourd’hui à Berlin.
> [Intervention à l’Assemblée sur le Pacte vert européen]
Je n’ai pas un mot à retirer de l’intervention d’Éric Lombard. Je compte sur
lui pour porter cette vision en matière d’investissement dans les discussions à
venir… qui pourraient concerner mon budget.
Merci pour l’organisation de ce débat sur un sujet essentiel : la position
de la France sur le pacte vert européen. Ce débat intervient à un moment
charnière, alors que certains voudraient remettre en cause la trajectoire
ambitieuse que la France a soutenue et que nous avons collectivement définie.
Ce pacte n’est pas un simple exercice théorique : il représente la
contribution concrète de l’Union européenne à la mise en œuvre de l’accord de
Paris. Il a contribué à la réduction, en sept ans, des émissions de 20 %
en France – soit
les deux tiers de la trajectoire –
par rapport à l’année de référence, 1990. Il matérialise un engagement clair : faire de l’Europe le premier continent neutre
en carbone d’ici 2050 – la neutralité
carbone intégrant la
compensation carbone, dont les puits carbone –, en atteignant en 2030 un objectif intermédiaire de réduction de 55 %
des émissions de gaz à effet de serre par rapport à 1990.
Le pacte vert pour l’Europe se
décline au travers d’une stratégie d’ensemble
cohérente, qui couvre tous les
secteurs. C’est l’un des succès de la présidence française de l’Union
européenne de 2022, et l’un des atouts de notre continent pour mener une guerre
économique qui se jouera autour de la transition écologique.
Arrêtons-nous un instant sur ce point. La transition écologique, c’est un enjeu
de souveraineté, un enjeu d’indépendance, comme l’a dit Éric Lombard. Notre
pays est dépendant à 99 % s’agissant des énergies fossiles, et à
99,7 % pour ce qui est des métaux critiques ! Cela nous invite à
produire des énergies décarbonées et à recycler les métaux critiques sur notre
territoire. Nous pouvons y parvenir. Encore faut-il qu’il y ait des incitations
pour les entreprises et des règles du jeu cohérentes.
Au fond, c’est l’objectif du pacte vert. Bien sûr, il n’est pas parfait et on
peut en discuter, mais il fallait poser au préalable ce cadre. Je défends cinq
priorités pour que le pacte vert soit plus efficace.
La première priorité, c’est de donner de la visibilité sur l’après 2030. Il
faut calculer notre empreinte carbone en tenant compte des importations, et ne
pas nous limiter à la réduction des émissions de carbone secteur par secteur.
Sans objectif commun partagé, aucun plan n’est possible. Les entreprises nous
demandent d’avoir de la vision à long terme. Par ailleurs, c’est une obligation
que nous nous sommes engagés à respecter en vue de la COP30, qui se tiendra en
fin d’année au Brésil. Il est important d’entraîner à notre suite les autres
pays du monde.
J’entends çà et là que ce ne serait pas juste que l’Europe soit la seule à
faire des efforts. Je tiens à dire ici qu’il ne faut surtout pas sous-estimer
les autres pays de la planète. Ainsi, la Chine, souvent pointée du doigt,
devrait atteindre cette année son pic d’émissions ; elle est bien en
avance par rapport à son plan sur le déploiement des énergies renouvelables
parce qu’elle a compris que, derrière la transition écologique, une guerre
économique est possible, et qu’elle a fait le choix d’investir systématiquement
dans toutes les filières industrielles.
Au-delà de la réduction des émissions, nous plaidons pour l’introduction d’un objectif
de réduction de l’empreinte carbone. Prenons un exemple : l’ouverture
d’une usine en France, un fait essentiel pour notre réindustrialisation avec, à
la clef, de la création de valeurs et d’emplois sur le territoire, ne peut pas
être considérée comme un recul environnemental. Il faut savoir que cette usine
sera probablement réalisée dans des conditions et avec des produits beaucoup
plus exigeants d’un point de vue environnemental, dans le cadre d’une
législation sociale beaucoup plus protectrice.
Deuxième priorité : la neutralité technologique. J’ai eu l’occasion
d’exprimer ma préoccupation s’agissant d’un nouvel objectif d’énergies
renouvelables pour 2040, tel qu’envisagé dans la lettre de mission révisée du
commissaire Dan Jørgensen. Ce type d’objectif risque de nuire aux quinze États
membres, dont la France, qui produisent ou comptent produire de l’énergie
nucléaire. En France, 95 % de l’électricité est déjà décarbonée et, pour
ce qui est des renouvelables, nous allons au même rythme – nous sommes même très légèrement en avance – que l’Allemagne :
nous atteignons presque 23 %.
Imposer un tel objectif revient à
pénaliser ceux qui ont fait le
choix du nucléaire, une énergie pourtant favorable au climat.
Il est donc essentiel de reconnaître
collectivement que le nucléaire
constitue un bien commun européen
– sans oublier que c’est
aussi parce qu’il s’agit d’une énergie
pilotable. J’espère que l’Alliance européenne du nucléaire, que j’ai lancée en
février 2023 et pour laquelle mon collègue Marc Ferracci est très
mobilisé, nous y aidera.
Troisième objectif : accompagner le pacte vert d’une politique
volontariste en matière industrielle et de recherche et développement. Je ne
reviens pas sur le pacte pour l’industrie propre, qui a été évoqué. Je souhaite
également que l’on soutienne des secteurs clés comme l’automobile ou l’acier.
Je rappelle le travail qui a été fait sur la réglementation Cafe et sur la
voiture électrique : il était important que les producteurs européens,
engagés dans la transition verte, ne se retrouvent pas à subventionner leurs
concurrents, alors même que le marché traverse une passe un peu difficile. Ils
ne peuvent pas subir la double peine et je me réjouis que la Commission nous
ait entendus.
Quatrième priorité : renforcer nos exigences vis-à-vis d’États tiers
souvent moins-disants. Nous devons renforcer la lutte contre la concurrence
déloyale que subissent nos entreprises. Il ne s’agit pas là de faire du
protectionnisme, soyons clairs, mais simplement de faire payer le coût carbone
aux entreprises des pays davantage émetteurs de CO2 et d’être
vigilants sur les produits chimiques incorporés, qui peuvent affecter la santé
de nos concitoyens. Quant au MACF, dont je soutiens le principe, il doit
permettre d’introduire un prix du carbone pour les importations venues de pays
qui n’en appliquent pas. Un tel mécanisme est tout à fait logique.
Enfin, cinquième et dernière priorité : simplifier, mais sans détricoter.
J’ai souvent dit que l’écologie ne devait pas être regardée comme de la
bureaucratie. Les deux n’ont rien à voir. Bien simplifier est une manière de
mieux atteindre nos objectifs. Cela passe notamment par une instruction plus
rapide des dossiers. Si, entre le moment où une entreprise dépose son projet de
production d’hydrogène et celui où elle reçoit la notification du soutien
européen, il s’écoule deux ans et demi, c’est que l’instruction du projet
important d’intérêt européen commun (IPCEI) a été trop lente. Accélérer est une
manière de simplifier.
Simplifier, c’est aussi traiter différemment les entreprises selon que leur
chiffre d’affaires est de 50 millions d’euros, d’un milliard ou de
90 milliards. Elles n’ont rien à voir les unes avec les autres. En 2020,
j’ai exposé la stratégie de la nation pour les entreprises de taille
intermédiaire (ETI). Il faut reconnaître les spécificités de ces entreprises,
créer un statut européen pour les jeunes entreprises innovantes, faciliter les
aides d’État pour la transition énergétique, réduire les indicateurs superflus
et privilégier l’action. J’imagine que notre discussion nous permettra de
multiplier les exemples.
Le pacte vert offre l’occasion de construire une Europe souveraine, compétitive
et décarbonée, mais, pour que nous y parvenions, il doit être réalisé,
rééquilibré et juste. Vous pouvez compter sur moi pour défendre cette vision.
> Parler d’effondrement est très exactement le discours
qu’attendent les ennemis du climat. Il ne faut pas être tétanisé par l’action
et mesurer qu’on a fait, en sept ans, beaucoup plus qu’au cours des vingt
années précédentes, à cause de l’accélération de l’histoire et grâce au pacte
vert.
Je vais donner quelques chiffres, certifiés par des tiers de confiance. La
France a baissé ses émissions de gaz à effet de serre de 20 % en sept ans.
Le taux d’oxydes d’azote (NOx) dans l’air a chuté de moitié dans les deux
principales zones à faibles émissions (ZFE). On peut regarder la moitié du
verre qu’on veut mais, pour ma part, j’insiste sur les solutions qui ont été
mises en place et qui ont un effet positif. Dans le bruit ambiant, ne pas le
reconnaître conduit à une paralysie. Or, sur le terrain, beaucoup de maires et
de présidents d’agglomération me demandent pourquoi nous envisageons de changer
certaines lois, alors qu’ils les ont mises en œuvre et ont passé le cap le plus
difficile. Ils me demandent plutôt de ne rien changer, maintenant que le plus
dur est fait.
J’en viens au plan du SGPE. Il s’incarne dans plusieurs textes : la
stratégie nationale bas-carbone (SNBC), qui doit faire l’objet de dernières
consultations ; la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), pour
laquelle la consultation s’achève ; le plan national d’adaptation au
changement climatique (Pnacc), que j’ai présenté au début du mois ; la
stratégie nationale pour l’alimentation, la nutrition et le climat (Snanc), qui
est en phase de finalisation. Ainsi, le plan du SGPE, qui résulte de la
consolidation du travail interministériel mené depuis près de trois ans,
continue à s’appliquer, conformément à ses bases de départ.
S’agissant des États-Unis, laissons les Américains s’occuper de leur
pays ; je pense que nous n’avons pas à nous en mêler.
En revanche, vous avez raison de souligner qu’il existe au sein du Parlement
européen une grande proximité entre les positions du PSE, des Verts et de Renew
au sujet du pacte vert. Il y aurait un réel intérêt à peser dans la balance
dans ce moment de rééquilibrage politique. Pour ce qui me concerne, je pense
qu’il est nécessaire de répondre à la demande de compétitivité de la part des
entreprises. Cette question me semble parfaitement conciliable avec l’écologie,
nous devons y travailler.
> La Suède a défendu lors de la COP28 l’ambition de
transitioning away from fossil fuels, c’est-à-dire de s’éloigner des
combustibles fossiles. Elle était à la manœuvre avec nous et mon homologue
suédoise chargée de la biodiversité s’est très fortement engagée dans ce sens.
Pourtant, le gouvernement suédois actuel est un gouvernement bien à droite – si ce n’est plus.
En Allemagne, le futur chancelier, Friedrich Merz, a clairement indiqué qu’il maintiendrait l’objectif
de neutralité carbone de l’Allemagne pour 2045, c’est-à-dire avec cinq années
d’avance par rapport à l’objectif européen.
Il a également dit qu’il ne
souhaitait pas stopper la transformation de l’Allemagne et a annoncé un plan
d’investissement massif afin de l’accompagner.
L’Espagne est, elle aussi, extrêmement engagée – et je pourrais poursuivre l’énumération.
Contrairement à ce qu’on peut entendre, la nécessité de lutter contre le dérèglement climatique n’est plus remise en cause. En
revanche, trois questions restent en suspens.
La première est de savoir
comment garantir aux plus modestes qu’ils
ne paieront pas l’addition – faire en sorte que la transition soit juste. La vérité
commande de dire qu’un travail important est réalisé en ce sens, avec le Fonds
social pour le climat, le signal-prix carbone, le soutien aux personnes qui ne
peuvent pas changer de mode de chauffage ou de transport. La deuxième est de
préserver la compétitivité des entreprises face à une concurrence déloyale. La
troisième est de remédier à la très grande complexité de notre réglementation,
qui, il faut le reconnaître, pose aux entreprises des problèmes d’application
concrète. Sur ces trois points, les attentes des gouvernements européens sont
particulièrement fortes.
> La première menace pour le revenu des agriculteurs
aujourd’hui, c’est le réchauffement climatique et l’effondrement de la
biodiversité. Pour s’en convaincre, il suffit de se décentrer et d’en observer
l’impact sur les revenus des agriculteurs hors d’Europe : l’Organisation
des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a publié des
études tendant à montrer que les rendements baissent structurellement dans
certaines aires géographiques du fait du réchauffement climatique et de
l’effondrement de la biodiversité.
En France, le coût des interventions d’urgence dans le budget de l’État depuis
les années 2010 a été multiplié par un facteur situé entre 20 et 50 :
de quelques dizaines de millions d’euros, nous sommes arrivés au-delà du
milliard, atteignant même 2 milliards. L’ampleur des aléas a complètement
changé de proportion, comme en attestent les épisodes de sécheresse, de gel
tardif, de grêles, etc. Parfois très localisés, ces événements peuvent faire
disparaître les fruits du travail d’une année.
Sur la PAC, à ce stade, la question est celle du budget, puisque la discussion
porte sur le cadre de financement pluriannuel. La France défend une conception
très ambitieuse de cette politique, d’autres pays mettent en question
l’opportunité d’y consacrer un budget propre, discussion typique d’un début de
négociation.
Notre vision pour l’agriculture est bien illustrée par le plan Agriculture
climat Méditerranée. Travaillant avec les agriculteurs, nous demandons :
partant d’un scénario de dérèglement climatique entraînant telle et telle
conséquence sur votre territoire – raréfaction
des ressources en eau, élévation des températures et accroissement de la
pression, au sens propre et imagé
du terme –, quelles
productions alimentaires faut-il privilégier
pour tenir compte des nouvelles conditions pédoclimatiques tout en répondant
aux enjeux de souveraineté
alimentaire ? Sachant qu’il ne s’agira probablement pas des mêmes cultures que celles qui sont pratiquées aujourd’hui,
comment parvenir à une équation intrants-revenus qui
fonctionne ?
> Les travaux interministériels que nous avons menés sur
la planification écologique comportent un volet consacré à la planification des
compétences ; ils visent à déterminer quels sont nos besoins en
compétences, filière par filière. Nous l’avons fait de manière particulièrement
précise en ce qui concerne l’industrie du nucléaire, mais nous avons également
lancé des travaux sur l’économie circulaire, sur la transition énergétique et
les énergies renouvelables, ainsi que sur la rénovation thermique. Nous cherchons
ainsi à adapter notre appareil de formation professionnelle, en lien avec la
réforme des lycées professionnels ; l’objectif est de développer ces
nouveaux métiers, qu’il nous faudra promouvoir dans les années qui viennent.
S’agissant de la recherche, je partage là aussi votre avis, il nous faut
renforcer notre effort en la matière. C’est d’ailleurs l’un des enjeux de la
loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030. Une
articulation est par ailleurs nécessaire avec le niveau européen. Sur certains
sujets directement liés à la transition énergétique, nous avons financé des
dispositifs européens de soutien qui lient recherche, développement et
industrialisation, les IPCEI : c’est le cas sur l’hydrogène, sur les
batteries électriques, et sur d’autres sujets plus éloignés de la transition,
qui ont trait par exemple à la santé. Un tel outil peut être très utile, à
condition d’être activé rapidement – je le mentionnais dans mon intervention liminaire, en
disant que nous ne pouvons pas nous contenter d’un système dans lequel il faut
deux ans et demi pour donner une réponse à une entreprise.
Nous avons articulé ces IPCEI européens avec le plan France 2030, afin de
compléter notre engagement dans des domaines tels que la décarbonation, la
transition énergétique, le stockage de carbone ou l’hydrogène, c’est-à-dire sur
toute une série de sujets en lien avec la transformation de notre économie, ce
qui nous permettra de créer les filières vertes susceptibles de soutenir le
pacte vert.
Aurore Bergé (ministre déléguée auprès du Premier
ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte
contre les discriminations)
> [Intervention à l’Assemblée sur l’antisémitisme] Plusieurs sentiments
se mêlent après ce qui s’est passé à Orléans. D’abord de la colère, une immense
colère quand, en pleine rue, un homme, un père, est lâchement attaqué devant
son fils.
De la colère, parce que dans notre pays, l’antisémitisme a déjà fait des
morts : en 2006, Ilan Halimi, kidnappé à cause de préjugés
antisémites ; en 2012, trois élèves et un rabbin enseignant du collège et
lycée Otzar Hatorah à Toulouse ; en 2017, Sarah Halimi ; en 2018, Mireille
Knoll, rescapée de la Shoah et des camps, qui a fini par mourir en France à
cause de l’antisémitisme ; enfin, les victimes d’attentats islamistes,
notamment l’attentat de l’Hyper Cacher dont nous avons commémoré les dix ans.
Cette colère doit nourrir le combat universel contre la haine antisémite, parce
qu’elle a provoqué la mort de certains de nos compatriotes.
Vous l’avez souligné, mais ce qui s’est passé a aussi provoqué de l’espoir.
Pourquoi ? Parce qu’en réponse à l’antisémitisme, il n’y a rien de pire
que l’indifférence. Or il n’y en a pas eu à Orléans : les passants se sont
arrêtés, ont accompagné et soutenu Arié Engelberg et son fils, ont témoigné et
porté plainte, et ont dénoncé l’agression. Il est de notre devoir de créer une
société dans laquelle on se sent responsable de la souffrance de l’autre dans
laquelle, quand bien même l’on n’est pas directement concerné, l’on considère
que l’antisémitisme n’est pas que l’affaire de nos compatriotes juifs, mais de
toute la société.
> [intervention à l’Assemblée lors d’un débat sur la
haine des musulmans] La République est une promesse. Une promesse qui nous
engage, une promesse qui nous lie : celle de la liberté, de l’égalité et
de la fraternité. Une promesse qui nous rappelle à chaque instant que nous ne
sommes pas une juxtaposition de communautés, mais une nation. Une nation de
citoyennes et de citoyens unis par des valeurs et des principes pour lesquels
nous ne devons jamais cesser de nous battre. Nous devons nous battre pour
l’égalité, pour la dignité, pour ce contrat qui est au fondement même de notre
démocratie : que chacun puisse être reconnu et protégé par la République,
quelles que soient ses origines, sa religion et son identité, réelle ou
supposée.
Vous avez fait le choix de débattre d’une réalité qui ne doit pas avoir sa
place dans notre République : la haine envers nos concitoyens de religion
ou de culture musulmane. Certains l’appellent islamophobie.
Je récuse fermement ce terme, parce que son ambiguïté est dangereuse et trop
souvent instrumentalisée, et qu’il ne dit pas ce que nous combattons. Ce que
nous combattons, ce n’est pas ce que la République permet depuis la suppression
du délit de blasphème, à savoir critiquer librement, moquer librement ou
caricaturer librement une religion. En France, certains ont payé de leur vie ce
droit au blasphème et à la caricature. Ce que nous combattons, c’est
l’essentialisation, qui enferme nos concitoyens dans ce qu’on pense qu’ils sont
et qui les limite à leur identité.
La distinction est déterminante : d’un côté, il y a les critiques légales,
dans le cadre des lois de la République ; de l’autre, il y a des actes et
des discours qui, eux, tombent sous le coup de la loi pénale. C’est pourquoi
l’emploi des termes « haine antimusulmans » est celui qui convient à
notre cadre républicain et au combat qu’ensemble nous devons mener avec
détermination – précisément au nom de la promesse républicaine.
En 2024, on a recensé 173 actes antimusulmans, ce qui
correspondait à une baisse de
29 % par rapport à l’année précédente. Cette diminution doit toutefois être mise en regard avec les chiffres publiés il y a quelques
jours par le service statistique du ministère de l’intérieur. Ce dernier a
enregistré 16 000 infractions à caractère raciste, xénophobe et
antireligieux pour l’année 2024, soit une hausse de 11 % par rapport à
l’année dernière. Depuis 2016, ces actes augmentent en moyenne de 8 % par
an. Nous assistons bien à une hausse globale et préoccupante des actes de haine
et de violence, un phénomène que nous ne devons ni minimiser ni relativiser.
Ces chiffres ne reflètent qu’une partie de la réalité : combien de
victimes, par crainte ou par résignation, ne portent pas plainte ? Combien
subissent dans le silence les agressions physiques, les intimidations, les
attaques de lieux de culte ou la haine sur les réseaux sociaux ? Combien
subissent la conséquence de cette haine, à savoir des discriminations au
quotidien ?
En 2019, 31 % de nos compatriotes musulmans déclarant avoir subi une
discrimination l’attribuaient à leur religion, contre 15 % lors de la
précédente enquête, il y a dix ans. Cette hausse est inacceptable ; nous
devons être intransigeants. Nous ne pouvons accepter ni les attaques haineuses,
quelle qu’en soit la forme, ni les discriminations qui reviennent à dire à
certains de nos concitoyens : « Tu ne seras jamais tout à fait des
nôtres ». Nous devons les combattre sans relâche, avec la même
détermination, sans distinction ni hiérarchie. Nous devons les combattre avec
la force de nos convictions et l’engagement indéfectible de celles et ceux qui
refusent que la haine devienne une fatalité.
Être républicain, c’est être acteur. C’est refuser l’indifférence, ce poison
qui gangrène notre société et permet aux injustices de prospérer. Je veux le
dire très clairement : se taire, c’est accepter. Détourner le regard,
c’est encourager. Face à la haine et aux discriminations, nous devons opposer
l’engagement de toute notre société et l’unité de notre République. Si nous
cédons à l’essentialisation, si nous cédons au piège du repli, si nous laissons
s’installer l’idée que seul celui qui souffre dans sa chair peut légitimement
se battre, alors nous avons déjà perdu.
Depuis quand faut-il être victime pour s’indigner ? Depuis quand faut-il
être concerné pour agir ? La lutte contre les haines, les discriminations,
constitue un combat universel et universaliste pour la liberté, l’égalité, la
dignité, la justice, pour la laïcité, pour la République ; un combat qui
exige des moyens, des outils, des décisions, une volonté politique. Nous menons
ainsi une politique déterminée en vue de mieux accompagner les victimes et
sanctionner davantage les auteurs : ces dispositions forment le cœur du
plan national de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les
discriminations liées à l’origine pour 2023-2026, dont j’assure la coordination
et la Dilcrah, sous mon autorité, la mise en œuvre.
S’agissant particulièrement des musulmans, l’État, comme l’a mentionné le
rapporteur, soutient l’association de défense contre les discriminations et les
actes antimusulmans ainsi que la création d’une plateforme de signalement de
ces actes, mesures concrètes, efficaces, indispensables en vue de mieux les
quantifier et d’apporter des réponses appropriées. Il importe d’agir avec
détermination : je souhaite que les travaux parlementaires engagés à ce
sujet, notamment la proposition de loi déposée par Marc Ferracci, puissent
progresser rapidement, car des dispositifs permettant d’établir la preuve de
discriminations ouvriraient la voie à un dialogue exigeant avec les entreprises
et à des mesures correctives, nécessaires si nous voulons agir sur le réel.
Trop souvent, les auteurs de ces discriminations se cachent derrière des
justifications fallacieuses : subjectivité du choix, manque prétendu
d’adéquation aux compétences, critères opaques, insidieux. Écarter un candidat
à l’emploi en raison de son nom ou de son adresse, un locataire en raison de sa
couleur de peau, de son origine réelle ou supposée, fermer une porte pour des
motifs que l’on n’avouera jamais est inacceptable ; cela doit cesser.
La ligne du gouvernement est très claire, ne souffre aucun compromis, toujours
susceptible de devenir compromission, et tient en un mot : intransigeance
– à
l’égard de tout acte de haine,
toute forme de discrimination, mais aussi à l’égard de l’entrisme, du prosélytisme, de l’intégrisme
religieux. Il s’agit là d’un seul et même
combat, dans lequel nous devons faire preuve d’une fermeté
absolue, y compris face aux attaques contre la laïcité. En République, la laïcité est une protection. Elle n’exclut pas :
sur nos terrains de sport, personne n’est interdit, aussi longtemps que chacun
se conforme et se soumet aux lois républicaines. Elle rassemble autour de nos
valeurs universelles. Elle n’est pas négociable, car elle constitue la
condition même de notre liberté, de notre égalité. C’est pourquoi je réaffirme
que le gouvernement ne reculera pas ; jamais la République ne tolérera la
haine.
À celles ou ceux qui mettraient en cause la République et ses lois, je le
rappelle clairement : aucune loi ne vise ni ne stigmatise certains de nos
concitoyens en raison de leur religion. Faire croire le contraire revient à
attiser la haine, à creuser le fossé générationnel qui divise malheureusement
notre pays. La législation française ne distingue aucun culte, aucune religion.
Le racisme hiérarchise ; la loi unifie et rassemble. Je l’affirme avec
gravité, nous ne plierons pas : il s’agit de la République, qui jamais, je
le répète, n’acceptera l’intolérance, les divisions, les discriminations, les
haines. Jamais la France ne deviendra un assemblage de communautés, elle qui ne
reconnaît que la communauté nationale !
> Éradiquer les violences conjugales, c'est être présent sur tous les territoires. Pour former, pour prévenir, pour détecter, pour accompagner. A Pont-Audemer dans l'Eure, je suis fière d'inaugurer le Van Envol : un van itinérant de village en village pour être au plus près des femmes qui en ont besoin.
Astrid
Panosyan-Bouvet (ministre
déléguée auprès de la ministre du Travail, de la Santé, de la Solidarité et des
Familles, chargée du Travail et de l’Emploi)
> La loi civile sera toujours supérieure à la loi religieuse. Je suis
une ligne laïque et républicaine : il faut une loi qui clarifie nos principes.
> Apprenons à faire confiance en la capacité des partenaires sociaux à trouver un compromis pour les retraites. Le diagnostic de la Cour des comptes est là, laissons les partenaires sociaux travailler.
> Les enjeux de la politique de l’emploi, lesquels
résident en premier lieu dans la question du sous-emploi, de la sous-activité
et des jeunes et des travailleurs expérimentés, mais aussi des personnes les
plus éloignées de l’emploi. Depuis 2017, la révolution culturelle de
l’apprentissage a eu un impact considérable sur le taux d’emploi des jeunes. Le
taux d’activité des 55-64 ans a lui aussi augmenté, rien que depuis 2023,
de 2,5 points grâce, en particulier, à la réforme des retraites de Mme Borne.
Cela ne signifie pas qu’il ne faut pas continuer d’avancer sur des questions de
santé et de conditions de travail.
En ce qui concerne les personnes les plus éloignées de l’emploi, j’invite à
prendre connaissance des résultats de l’expérimentation menée dans cinquante
départements qui sont parvenus à faire sortir du RSA 42 % de ses
bénéficiaires.
Nous sommes sur la bonne voie, nous devons donc continuer et je compte sur
votre soutien.
En ce qui concerne les travailleurs et les travailleuses de la propreté et la circulaire,
là aussi l’État est sur le bon chemin et doit poursuivre son action :
64 % des sites ont recours au travail en journée, 83 % au travail en
continu. Je dois rencontrer dès le début du mois d’avril deux députées,
Mmes Gailliard-Minier et Taillé-Polian, qui s’intéressent à ce sujet.
L’État joue son rôle, en particulier les ministères sociaux. C’est une question
d’organisation, de qualité de travail, mais aussi de visibilité pour des
travailleurs et des travailleuses dont l’activité est essentielle.
> Le sous-emploi des travailleurs expérimentés est un
gâchis monumental. Les pistes à suivre pour renforcer leur taux d’activité :
- lutter contre les stéréotypes et valoriser leur expertise
- miser sur la formation continue
- aménager les fins de carrières et anticiper les retraites.
Amélie de Montchalin (ministre délégué auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargée des Comptes publics)
> Nous désendetter, c'est le projet n°1 du Gouvernement à l’heure où
notre souveraineté financière est profondément liée à notre souveraineté
stratégique.
Marc Ferracci (ministre délégué auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargé de l’Industrie et de l’Energie)
> La France et l'Europe avancent ensemble pour le renouveau minier. La
Commission européenne a annoncé les 47 projets de mines et d’usines de
raffinage des minerais stratégiques, dont 9 en France, pour réduire notre
dépendance européenne.
- 4 grands domaines : batterie, semi-conducteurs, énergie, défense.
- 27 milliards d’euros d’investissements globaux.
- 2 milliards d’euros d’aides financières.
Il est important pour la France et l'Europe de s'appuyer sur une production
locale souveraine et résiliente d'un point de vue environnemental. Ensemble,
produisons en Europe pour nos industriels !
> Un territoire, une solution. Une transition, des
résultats. Le Sénat a adopté la proposition de loi permettant la conversion de
la centrale à charbon Émile-Huchet (Moselle) vers le biogaz.
- Une avancée en lien avec les enjeux de transition énergétique des anciens
territoires du charbon
- Une solution concrète pour l’emploi local (500 emplois concernés)
- Objectif : sortir du charbon, sans laisser personne au bord du chemin.
Un projet soutenu par l’État, porté par les élus mosellans et appuyé par
GazelÉnergie.
Étape 1 validée.
Prochaine étape : l’Assemblée nationale, pour poursuivre ce chemin législatif
essentiel à une transition énergétique juste et territorialisée.
Nathalie Delattre (ministre déléguée auprès du ministre
de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique,
chargée du Tourisme)
> Un début d’année prometteur pour le tourisme! Malgré un léger
fléchissement de certains marchés et du flux d’affaires, les perspectives sont
très positives
- Hausse de la clientèle internationale
- Succès de la montagne
- Rebond du tourisme asiatique.
> Ma feuille de route repose sur trois axes majeurs :
rendre notre tourisme plus durable, plus innovant et plus inclusif. Il est
essentiel de valoriser la Destination France dans toute sa richesse et sa
diversité.
Le tourisme est une compétence partagée entre plusieurs niveaux de collectivité
: les régions, les départements, les intercommunalités et les communes. C’est
un travail que l’on doit mener ensemble pour élaborer et déployer une stratégie
commune, adaptée aux particularités de chaque territoire.
Le tourisme est un secteur qui a su montrer à de nombreuses reprises sa force
et sa résilience lors de la crise Covid, avec un accompagnement de l’Etat à
travers le plan de relance Destination France, mais nous devrons y travailler
plus longuement.
Patricia Mirallès (ministre déléguée auprès du ministre
des Armées, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants)
> « Je n’aime pas l’expression devoir de mémoire… Le seul devoir, c’est
d’enseigner et de transmettre. » Simone Veil avait raison. À Lyon, j’ai tenu à
remercier celles et ceux qui s’emploient à faire vivre et cultiver cette
mémoire. Il n’y a pas d’armée moderne sans mémoire. Pas de mémoire sans ceux
qui la portent. Notre jeunesse a besoin de vos histoires, de vos valeurs, de
vos repères. Vous avez un grand rôle à jouer dans la construction du destin qui
sera le sien.
Thani Mohamed Soilihi (ministre délégué auprès du ministre
de l’Europe et des Affaires étrangères chargé de la Francophonie et des Partenariats
internationaux)
> Sommet nutrition: plus de 27 milliards d’euros annoncés au
profit de la sécurité alimentaire, ce qui dépasse le seuil du précédent Sommet
à Tokyo! Ce succès diplomatique exceptionnel annoncé par Emmanuel Macron est la
preuve que la Nutrition est une priorité mondiale largement partagée.
> Protéger les populations les plus vulnérables et œuvrer pour la stabilité internationale est l’honneur de la France.
L’Agence française de développement [AFD] a été créée par le général de Gaulle, qui visait une France forte. Il est surprenant de voir que ceux qui se prévalent d’un discours gaulliste sont aussi capables de s’offusquer des dépenses liées à l’Aide publique au développement [APD]. Je rappelle que l’APD a, par exemple, permis de sauver 7 millions de vies de la tuberculose, du paludisme et du VIH sur les 20 dernières années, notamment grâce à la lutte engagée par la France. Par ailleurs, contrairement à ce que l’on entend, environ 75 % des projets financés par l’AFD bénéficient directement ou indirectement aux entreprises françaises implantées à l’étranger.
Une partie de la classe politique s’inspire, dans une
logique populiste et isolationniste, de la fin de l’USAID pour critiquer ces
dépenses essentielles. Ce n’est pas comparable. L’Agence française de
développement accorde 85 % de prêts et 15 % de dons, tandis que
l’USAID fonctionne entièrement avec des dons. Depuis la fin de l’USAID, il est
estimé que 1,6 million de personnes vont mourir chaque année du VIH.
Veut-on les laisser mourir ? L’indifférence coûte toujours plus cher que
la solidarité. (…)
Une partie de la classe politique confond l’AFD et l’APD. L’AFD est attaquée
notamment sur les questions de pilotage et d’évaluation, alors que les
processus de contrôle sont extrêmement stricts. Chaque année, l’AFD est
auditionnée par le Parlement. Elle tient près de 11 conseils d’administrations
par an, où siègent aussi nos parlementaires. Chaque projet engagé est validé
localement par notre ambassadeur. J’ai présidé récemment un comité de pilotage
de l’APD qui a notamment permis d’accélérer le lancement de la commission
d’évaluation, prévue de longue date mais retardée notamment par les changements
de gouvernement. Son objectif sera d’évaluer plus activement encore la
pertinence de toutes les actions menées actuellement. (…)
C’est dans l’intérêt des Français de poursuivre cette aide qui nous protège et
permet à la France de tenir son rang. La pandémie de Covid-19 nous a rappelé
que les maladies ne s’arrêtent pas à nos frontières. Nous voulons éviter de
futures pandémies en agissant en amont. Ebola, par exemple, aurait pu causer
encore plus de ravages si nous n’avions pas agi. Le climat est aussi un autre
défi auquel nous sommes tous confrontés : les cyclones Chido et Garance
ont durement frappé La Réunion et Mayotte. Personne n’est aujourd’hui épargné
par les phénomènes météorologiques extrêmes. Même en matière de migrations, si
nous ne soutenons pas les États, par exemple dans des domaines tels que la
nutrition, l’agriculture, etc., cela ne fera qu’accroître les déplacements
de populations. C’est ce en quoi l’aide au développement est un atout
indispensable pour la sécurité et la prospérité des Français et pour un monde
moins instable.
> [Aide publique au développement] Je suis choqué par la désinformation de l’extrême droite. C’est du cynisme pur. La France est un pays qui défend des valeurs d’égalité et de solidarité, et elle doit continuer à porter ces valeurs, même en période de difficulté budgétaire. Tous les ministères ont été mis à contribution, dans un esprit de responsabilité. Mais nous n’abandonnons pas pour autant nos combats en matière de solidarité internationale, ce qui fait notre honneur. Plusieurs puissances réactionnaires n’attendent qu’une chose : que la France baisse les bras.
> Le discours du président de la République à Ouagadougou a constitué un tournant dans la façon dont nous construisons nos relations avec les pays du continent africain. Nos relations ne se limitent pas à l’aspect sécuritaire. Nous entretenons des partenariats économiques, agricoles, éducatifs, etc., basés sur un échange gagnant-gagnant. Des pays comme le Kenya, l’Angola, le Nigeria, le Sénégal, la Côte d'Ivoire et Madagascar attendent avec intérêt que la France s’engage davantage dans ces partenariats. Par exemple, au Cameroun, un barrage hydraulique, en grande partie construit par EDF, fournira de l’électricité à 30 % de la population. Cela créera 23 000 emplois.
[Niger, Burkina Faso et Mali ont quitté l’Organisation internationale de la francophonie] Ce n’est pas la France qui a tourné le dos à ces partenaires. Ce sont ces pays qui ont pris la décision de quitter l’Organisation. Ils avaient, après les putschs, été suspendus de l’OIF. Nous respectons leur décision, mais nous ne tournons pas le dos aux populations civiles. Nous continuons nos actions. La Francophonie est-elle toujours un levier d’influence pour la France ? C’est avant tout un levier pour tous les francophones. La Francophonie regroupe plus de 90 États et gouvernements. Lors du dernier sommet, l’OIF a intégré 5 nouveaux membres. Preuve que la Francophonie est toujours attractive. D’ici 30 ans, la population francophone devrait dépasser les 750 millions de personnes, contre 321 millions aujourd’hui.
> Les sénateurs ont adopté hier soir la proposition de loi des Républicains visant à restreindre davantage les conditions d’accès à la nationalité française à Mayotte. Il s’agit d’être mobilisés et rigoureux, notamment tant que le bilan des mesures de 2018 n’a pas été effectué. Ce sujet est essentiel, et il était nécessaire en 2018 face à la problématique migratoire.
[Débat sur l’identité nationale] Je soutiendrai toute forme de réflexion collective sur notre avenir et la manière dont faire société ; dans un monde fragmenté, il est indispensable de promouvoir des valeurs de vivre ensemble et de solidarité. Je viens d’un territoire où la coexistence entre la République et l’Islam a toujours été pacifique. Je suis fier d’être Français, Européen, et issu de Mayotte proche du continent africain. (…) Un débat est toujours sain. Il peut nous permettre de découvrir ce qui nous rassemble plus que ce qui nous divise. Car j’estime que la lutte contre l’archipélisation de la France est essentielle.
> Nous sommes loin de l’immobilisme. Au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, nous agissons chaque jour en faveur de la stabilité internationale, sous l’impulsion du ministre Jean-Noël Barrot. Il y a des avancées concrètes, et les préoccupations internationales obligent la France à agir.
> Les Français attendent des hommes et femmes politiques qu’ils soient responsables, et non qu’ils participent à des débats hystérisés. Mon objectif est de répondre aux préoccupations des Français.
● Autres
ministres
Bruno Retailleau (ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur)
> [Délinquance des mineurs] Je pense qu'aujourd'hui, on a un problème
majeur, je suis bien placé comme ministre de l'Intérieur pour le savoir. Une
grande partie de la délinquance, y compris la délinquance la plus violente, est
le fait de mineurs. Et ces mineurs, malheureusement, ont un sentiment
d'impunité. Pourquoi ont-ils un sentiment d'impunité ? Parce que notre
politique pénale, la loi qui régit, qui encadre la justice des mineurs n'est
plus du tout adaptée. Parce qu'on enferme, en réalité, les mineurs dans un long
parcours de délinquance. La plupart de ceux qui tuent, on se rend compte qu'ils
ont des antécédents judiciaires. 5, 10, 15, 20, 30, qui n'ont jamais été
condamnés à la prison. Donc moi je pense qu'il faut réformer profondément la
justice des mineurs. Un, avec des courtes peines de prison de quelques semaines
dans des établissements différenciés qui sont prévus à cet effet, comme le font
par exemple les Pays-Bas. C'est une semaine, deux semaines, trois semaines,
voilà. Deux, il n'y a pas d'excuse pour ceux qui tuent, ceux qui blessent
grièvement, y compris pour la minorité. Il faut transformer les choses.
C'est-à-dire qu'aujourd'hui, l'excuse de minorité est la règle. Demain, elle
doit devenir l'exception, la comparution immédiate.
> Je veux rappeler un chiffre, deux chiffres, pour les rapprocher, qui sont terrifiants. Nos compatriotes français de confession juive représentent moins de 1% de la population. Et pour autant, ils sont victimes de près de 60% des actes racistes et antireligieux. À 1% d'un côté, près de 60% de l'autre. Donc vous avez un antisémitisme d'atmosphère qui, aujourd'hui, a un double visage. Hier, c'était l'extrême droite, qui est aujourd'hui cet antisémitisme d'extrême droite plutôt résiduel. Ce double visage, c'est l'islamisme. L'islamisme qui, aujourd'hui, je le dis solennellement à votre micro, se comporte comme le fasciste d'hier. Le fascisme, dans la mesure où c'est un catalyseur de haine antisémite. Et puis, il y a un autre visage, l'extrême gauche. L'extrême gauche qui, sous le masque, en réalité, de l'antisionisme, attise les braises de l'antisémitisme, instrumentalise la cause palestinienne, simplement pour draguer un vote communautariste.
> Les islamistes, et notamment les Frères musulmans, avancent à bas bruit. C'est un islamisme à bas bruit, avec un discours très lisse, avec une rhétorique habile où ils reprennent nos concepts, ils retournent, par exemple, l'argument de la liberté contre la démocratie libérale.
Eric Lombard (ministre de l’Economie, des Finances et de
la Souveraineté industrielle et numérique)
> [Intervention à l’Assemblée sur le Pacte vert européen] Je suis très
heureux d’intervenir ce soir avec Agnès Pannier-Runacher pour clarifier nos
intentions pour la transition écologique en Europe, s’agissant notamment du
pacte vert pour l’Europe.
La France a été l’un des principaux soutiens du pacte vert, et le restera. Le
pacte vert propose depuis cinq ans une vision cohérente de la transition,
mobilisant les entreprises et liant décarbonation, économie circulaire,
protection de la nature et de la biodiversité. Soixante-dix textes ont été
publiés et la France a joué un rôle moteur, notamment à travers l’adoption du
paquet Fit for 55, sous la présidence française de l’Union européenne.
Le pacte vert est plus que jamais d’actualité : notre intention, je l’ai
répété lors des questions au gouvernement cet après-midi, est d’avoir une
Europe « zéro net » en 2050. Nous le devons aux générations futures,
qui sinon risquent d’en payer les conséquences.
La température moyenne a dépassé de 1,2 degré en 2019 et de 1,5 degré
en 2024 – l’année la plus chaude jamais enregistrée – la température moyenne de l’ère préindustrielle. Nous
avons tous à l’esprit des drames humains, les incendies de Los Angeles, les
inondations de Valence et le cyclone Chido, qui a dévasté Mayotte. Météo France
a publié la semaine dernière un rapport qui confirme que les phénomènes
extrêmes iront croissant, avec des conséquences toujours plus lourdes sur
l’ensemble de l’économie. Les dernières estimations du réseau des banques
centrales sur le climat montrent qu’un réchauffement mondial atteignant
3 degrés en 2100 diminuera dès 2050 le PIB mondial de quinze points par
rapport à un monde sans changement climatique. Ce qui confirme la phrase d’un
de nos grands économistes : « Le meilleur investissement que nous
puissions faire, c’est l’investissement dans la transformation
écologique. »
Il ne s’agit donc pas de remettre en cause le pacte vert pour l’Europe, mais de
le mettre en œuvre de façon intelligente pour en faire non seulement notre
principal outil écologique, mais un atout de compétitivité et de souveraineté.
Dans le contexte international tourmenté que nous connaissons, doublé de
tensions commerciales et de la concurrence déloyale d’autres juridictions,
c’est même un impératif.
Permettez-moi de relever deux points avant de conclure.
Le premier, c’est l’exigence d’une mise en œuvre pragmatique. La
simplification, c’est aussi un facteur évident de compétitivité et une
condition de bonne appropriation de la mesure par les entreprises – on le voit dans les débats actuels. C’est pourquoi la simplification a été
intégrée dans le pacte vert dès sa conception. Nous allons conserver notre cap
parce que la stabilité est une vertu en économie – les derniers indicateurs sont d’ailleurs un peu plus positifs. Les
acteurs que je rencontre tous les jours sont engagés sincèrement
dans cette transition. Nous allons être
pragmatiques parce que nous apprenons en marchant : les entreprises ne nous demandent pas de renoncer, mais réclament de l’intelligence dans l’application
des dispositifs du pacte vert, conformément
à sa philosophie même.
En ce sens, la Commission européenne, avec notre soutien, a proposé un pacte
pour l’industrie propre – le Clean Industrial Deal, en moins bon français –,
qui complète le pacte vert dans le cadre de la Boussole de la compétitivité,
dans la logique du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières, le MACF. À ce
propos, je rappelle que 70 % des entreprises qui auraient dû déclarer
leurs importations étaient des PME… Nous soutenons la position de la Commission
de fixer dorénavant à 50 tonnes le seuil d’import minimum pour cette
obligation déclarative. Avec cette simplification très importante, 92 %
des importateurs ne seront plus soumis à l’obligation de déclaration, étant
entendu que les 8 % restants représentent 98 % des émissions. On
conserve donc bien le même objectif, tout en simplifiant la vie des PME.
C’est dans le même esprit que nous avons maintenu avec fermeté, face à d’autres
États membres, le cap de 2035 pour l’automobile décarbonée en adaptant à court
terme le règlement Cafe – relatif à
la consommation moyenne des voitures neuves. Il s’agissait de ne pas pénaliser
injustement les constructeurs engagés
dans l’électrification.
J’en viens à mon second point : la sortie
des énergies fossiles demeure absolument impérative. La transition écologique
devient une force pour l’Europe parce qu’elle réduit ses dépendances aux
énergies fossiles. C’est donc un enjeu de durabilité, au sens écologique et
économique du terme – il s’agit
de maintenir sa compétitivité et sa souveraineté. Les importations de produits
fossiles ont coûté à la France 75 milliards
d’euros en 2023 et proviennent à plus de 90 % de pays extra-européens. Le pacte vert représente
pour nous l’occasion de nous
défaire de ces dépendances, d’autant que notre souveraineté énergétique impose
de produire davantage sur notre territoire l’énergie que nous consommons et que
l’énergie décarbonée qui remplacera les énergies fossiles doit être compétitive
et souveraine, issue à la fois du nucléaire et du renouvelable.
À cette fin, la neutralité technologique doit se généraliser en matière
énergétique et le soutien au nucléaire doit se renforcer au niveau européen.
Je vous parle ce soir à la fois comme ministre de l’économie et des finances et
comme citoyen, engagé de longue date dans ces combats. La défense du pacte vert
va continuer à nous mobiliser. Nous souhaitons le faire en avançant, sans
trahir son ambition initiale, parce que c’est un pacte avec nos entreprises,
mais de façon encore plus importante, avec les générations futures.
> Beaucoup de choses se détricotent et notre monde
connaît une crise d’une extrême gravité – c’est une évidence. Une guerre se déroule sur le continent européen, à 2 000 kilomètres de notre territoire. Nombre de pays s’éloignent des principes démocratiques qui fondent notre République. Les États-Unis sont passés sous une présidence, certes issue des urnes, qui tend à abandonner des principes sur
lesquels le pays était un peu
en retard mais progressait malgré
tout – désormais, ils militent pour les forages pétroliers, les énergies
carbonées et prônent un développement qui ne respecte ni les diversités ni
l’inclusion.
Dans ce monde, nous avons deux préoccupations. La première est de conserver la
singularité européenne d’une trajectoire de transformation écologique, de
pousser l’idée d’une communication extra-financière et d’un devoir de vigilance
– pour
permettre aux valeurs que nous chérissons
d’imprégner l’ensemble
de la chaîne de production.
Parallèlement, nous devons
tenir compte de la compétition
encore plus difficile à laquelle les entreprises se livrent. En dialogue avec
elles, nous avons procédé à quelques aménagements. Ces aménagements ne
remettent pas en cause le fond. La CSRD s’applique en France, pour la
phase 1, même si nous voulons réduire le nombre d’indicateurs ; pour
la phase 2, nous souhaitons obtenir une simplification et un délai – c’est le but de la directive omnibus.
Nous souhaitons par ailleurs que la CS3D soit simplifiée. Grâce à une loi que vous connaissez mieux
que personne, monsieur Potier, le devoir de vigilance s’applique déjà dans
notre pays. Il doit s’appliquer à toute l’Europe, moyennant les simplifications
souhaitées par la majorité de nos partenaires. Les principes de responsabilité
civile des entreprises et de devoir de vigilance sont maintenus. Malgré le
basculement que connaît le monde, il me semble que les textes proposés par la
France et soutenus par l’Union européenne défendent ces valeurs, importantes
pour vous, et que nous partageons. J’espère que nous pourrons le démontrer dans
nos prochaines réponses.
> S’agissant du projet de directive omnibus, je voudrais
rappeler notre ambition. Elle est d’avoir en 2050 une économie décarbonée,
inclusive, démocratique, ouverte. Cette ambition reste au cœur de notre projet.
Que s’est-il passé ? À la suite des chocs que nous avons subis récemment,
la concurrence est devenue de plus en plus rude et il y a eu effectivement une
pression renforcée de la part des entreprises. Je signale que la directive
CSRD, déjà appliquée en France pour ce qui est de la phase 1, n’a pas été
transposée par dix-sept États membres. Je le regrette – nous le regrettons –, et cela place nos
entreprises dans une situation de distorsion de concurrence. De ce fait, quand
la demande des entreprises s’est
traduite à l’échelon du Conseil affaires économiques et financières, auquel je participe depuis
trois mois, l’avis majoritaire
a été de se donner du temps. D’où le projet de directive omnibus.
Néanmoins, je le répète, nous n’abandonnons
pas notre ambition. La directive omnibus simplifie la phase 1 et reporte un peu la
phase 2 de la directive CSRD, mais tout en en conservant les principes.
Nous allons adapter le droit français au moyen du projet de loi Ddadue, portant
diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne.
Quant à la directive CS3D, des règles s’appliquent déjà et nous avons obtenu
qu’elles s’appliquent aussi à l’ensemble de l’Union européenne. La
responsabilité civile des dirigeants, qui est un élément essentiel, a fait
l’objet de débats ; l’attitude de la France a permis que cette exigence
soit maintenue. La taxonomie verte demeure, de même que le MACF et toute une
palette de mesures qui participent de la même ambition.
Pour conclure, il est vrai que nous avons dû nous adapter aux divergences dans
la mise en œuvre des textes au sein des différents États membres et à une
concurrence internationale renforcée, mais l’ambition reste la même et nous y
sommes très attachés.
> le meilleur CO2 est celui qui n’est pas
émis. Notre projet, c’est de recourir à des énergies décarbonées et de
privilégier des processus industriels qui n’émettent pas de carbone.
Concernant les émissions, que nous voulons aussi résiduelles que possible, il
est vrai que différents opérateurs expérimentent plusieurs techniques de
stockage. Une grande entreprise française spécialisée dans l’exploitation du
gaz développe la technique que vous avez évoquée : elle consiste à
liquéfier le carbone pour le réinjecter dans les couches profondes d’anciens
champs pétroliers, de façon à atteindre des cavités depuis lesquelles ce CO2
ne risque pas de se diffuser dans l’atmosphère. Au large de la Norvège, il
existe des sols de ce type, où l’on peut réinjecter du CO2 dans
d’anciennes poches vidées de leur pétrole. La France n’ayant jamais été une
grande puissance pétrolière, nous ne disposons pas d’anciens champs pétroliers.
Ces circonstances seules expliquent que nous menions cette expérimentation en
Norvège, dans le respect de la réglementation.
Toutefois, nous ne souhaitons pas que cela devienne l’option prédominante.
Continuer à polluer et traiter ensuite la pollution ne me paraît pas la bonne
solution en matière d’écologie. En revanche, dans une phase de transition où
les émissions de carbone sont encore excessives, il s’agit sans doute d’une
technique intéressante, à condition de disposer de sols ad hoc et de respecter
les règles en vigueur.
Valérie Létard (ministre déléguée auprès du ministre de
l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, chargée du Logement)
> [Intervention à l’Assemblée lors d’un débat sur le logement] Nous
évoquons un sujet majeur pour les Français : le logement. Le logement dans
toutes ses composantes. Il a des effets sur la vie de tous nos concitoyens.
Toutes vos interventions l’ont souligné et le constat est partagé : le
logement est un pilier de nos politiques d’emploi, de santé, de transition
écologique, de solidarité.
Or le secteur du logement est en crise. Là aussi, toutes vos interventions
l’ont rappelé et les constats convergent. Ces circonstances font que l’exercice
auquel je me prête devant vous est complexe. Je suis toutefois convaincue qu’en
matière de logement, il est au moins possible d’arriver à un constat commun et
que nous pouvons avoir une conjonction de bonnes volontés.
Dès mon arrivée, il y a quelques mois, j’ai pris des mesures d’urgence qui
étaient nécessaires, compte tenu de la situation que vous venez tous de
rappeler.
Grâce à la loi de finances, tout d’abord, le prêt à taux zéro a été élargi à
tout le territoire pour le neuf, en plus d’être maintenu pour l’ancien en zone
détendue, ce qui est de nature à favoriser le retour des ménages vers
l’accession à la propriété. Cette extension concernera aussi bien les
appartements que les maisons individuelles, et elle sera effective
définitivement le 1er avril prochain, c’est-à-dire dans une
semaine.
Certains d’entre vous ont évoqué l’augmentation des DMTO. J’ai plaidé, et cela
a effectivement été maintenu dans le budget, pour que les primo-accédants qui
bénéficieront du PTZ, dans l’ancien particulièrement, ne soient pas touchés par
cette augmentation. L’exonération de DMTO sera effective pour les
primo-accédants bénéficiant du prêt à taux zéro.
J’ajoute qu’un décret publié il y a quelques jours va permettre de cumuler le
prêt à taux zéro dans l’ancien avec MaPrimeRénov’ : vous le voyez, un
large panel de solutions est proposé aux ménages modestes primo-accédants, afin
que leur accession à la propriété devienne vraiment possible.
Nous avons également accompagné la production de logements sociaux, qui doit
être l’un des moteurs de la reprise. Le taux du livret A a baissé au 1er février
2025 et nous avons baissé la réduction de loyer de solidarité (RLS) – c’est-à-dire la
ponction qui est faite sur les fonds propres des bailleurs sociaux – pour la première fois depuis 2017. Cela va
permettre de produire 100 000 logements et d’en rénover 130 000,
grâce à l’engagement de
tous les acteurs du logement social, dont je salue les efforts. Ils ont d’ailleurs signé un engagement collectif en ce sens, sous la présidence d’Emmanuelle Cosse et avec tous les présidents de fédérations.
Plusieurs d’entre vous ont évoqué les difficultés que peuvent rencontrer les maires
et ont appelé à encourager et à soutenir les maires bâtisseurs. Je rappelle qu’une prime aux maires bâtisseurs, annoncée et décidée par le
premier ministre, figure effectivement dans le budget, et qu’elle s’élève à 100 millions d’euros.
Une circulaire, qui est en train d’arriver
entre les mains des préfets, va
immédiatement entrer en
application : elle
permettra d’accorder des aides directes
aux maires, qui iront de 1 000 à 5 000 euros par logement, en
fonction de différents indicateurs, notamment le type de logement et le respect
des normes environnementales. C’est tout l’environnement du logement qui sera
pris en compte. Tous les logements seront concernés, mais une bonification sera
accordée pour les logements sociaux.
En complément, il importe de soutenir l’investissement locatif, compte tenu
notamment de la fin programmée du Pinel. Grâce à la loi de finances et au
soutien de nombreux parlementaires, il est désormais possible de donner jusqu’à
100 000 euros à ses enfants et à ses petits-enfants pour qu’ils
achètent un logement neuf ou qu’ils fassent des travaux. Cette mesure, qui est
transitoire, a vocation à dynamiser et à encourager la transmission entre
générations, à favoriser l’investissement des primo-accédants dans le neuf,
mais aussi à proposer du locatif abordable pour ceux qui auraient bénéficié de
cette transmission.
Cette mesure est appelée à laisser la place à un cadre pérenne avec un futur
statut du bailleur privé. L’enjeu est d’encourager l’investissement privé de
nos concitoyens dans la pierre, qui souffre actuellement d’une désaffection. Si
nous avons besoin de soutenir la production de logements sociaux, nous avons
également besoin d’encourager les familles françaises à investir dans la
pierre, afin de proposer une offre locative à nos concitoyens. Ce sont deux
démarches qui, loin de s’opposer, se complètent. Si nous n’activons pas ces
deux leviers, nous ne pourrons pas créer la dynamique qui est nécessaire pour
satisfaire le besoin de logement que partagent toutes les catégories
socioprofessionnelles, des plus modestes aux plus aisés. Il faut que nous
soyons au rendez-vous de la production de logement.
Ce budget a aussi permis de maintenir le parc d’hébergement d’urgence et de
dynamiser le plan Logement d’abord. Dans la mesure où les besoins sont énormes
et ne cessent d’augmenter, les capacités d’accueil du parc d’hébergement
d’urgence seront maintenues à 203 000 places durant l’année 2025,
comme en 2024. Le gouvernement a par ailleurs débloqué 250 millions, afin
d’assurer le financement de l’année 2024. Le plan Logement d’abord, qui
consiste depuis 2018 à orienter les personnes sans-abri ou mal logées le plus
rapidement possible vers le logement, tout en assurant un accompagnement social
adapté à leurs besoins, s’est vu allouer 29 millions supplémentaires en
2025, afin de contribuer à l’objectif de 30 000 créations de places
en intermédiation locative et de 10 000 places en pensions de famille
sur la période 2023-2027. Depuis 2017, ce sont 50 000 personnes sans
domicile qui ont été relogées, dans le cadre de ce dispositif.
Nous avons préservé le soutien à la rénovation énergétique, avec
2 milliards d’euros de l’État pour MaPrimeRénov’. La stabilité des
paramètres des travaux, à laquelle je m’étais engagée, a été sécurisée en
décembre, et je poursuis les efforts pour soutenir la dynamique sur le terrain.
Contrairement à ce qui a pu être dit, la rénovation énergétique, ça marche,
puisque 350 000 logements ont été rénovés, et que cela représente
plusieurs centaines d’euros d’économies de charges pour les propriétaires
occupants et les locataires qui ont bénéficié de ces rénovations. Dire que cela
fonctionne, ce n’est pas nier que la dynamique est complexe et que l’effort
demandé est important. J’ai entendu vos questions relatives au DPE et à
d’autres aspects ; j’y reviendrai en détail lors de nos échanges, mais
j’insiste sur le fait qu’il faut poursuivre nos efforts, au bénéfice de ceux qui
occupent ces logements, et afin que leur pouvoir d’achat ne soit pas affecté.
Enfin, nous avons soutenu le financement de la rénovation urbaine et de
l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), avec un abondement de
50 millions. Une revue des projets est actuellement menée par les équipes
de l’Anru, afin de se projeter dans le futur.
Je suis à l’œuvre pour que ces mesures portent leurs fruits, pour aller plus
loin et pour décliner nos politiques publiques sur le terrain. Loger mieux,
cela passe d’abord par la production de logements. Nous devons nous atteler à
diminuer les coûts de production, par des simplifications en matière
d’urbanisme et de normes de construction. Je pense là aussi aux territoires
ultramarins et insulaires où ces problématiques sont particulièrement
sensibles. J’étais hier à Bruxelles ; je veillerai à ce que les
orientations prises au niveau européen intègrent ces enjeux et que les textes
européens ne soient pas surtransposés, pour maîtriser les coûts.
Pour produire plus de logements, il faut développer l’industrie de la
transformation urbaine. Je serai demain dans les Hauts-de-Seine pour soutenir
la transformation de bureaux vacants en logements, notamment étudiants, en
m’appuyant sur des cas concrets et en prolongeant les travaux législatifs.
Les bailleurs sociaux sont les principaux producteurs. La compression de
l’échelle des salaires rend le logement social de plus en plus important dans
les parcours résidentiels : c’est tout le sens de la baisse du taux du
livret A, de la baisse de la RLS et de la mise en œuvre de la feuille de
route signée avec le secteur. C’est aussi le sens de la production de logements
étudiants, que nous devons dynamiser, après une année 2024 historique, où près
de 10 000 logements sociaux ont été agréés.
Nous ne produirons pas non plus sans les élus locaux. Il faut de la
simplification, notamment pour faciliter la délivrance des autorisations
d’urbanisme et la baisse de l’artificialisation des sols, en lien avec François
Rebsamen, qui suit de près la question du ZAN, que nombre d’entre vous ont
évoquée, car elle est consubstantielle à nos politiques du logement et de
l’aménagement. Je souhaite qu’un maire bâtisseur, un maire qui développe son
territoire, soit un maire qui gagne, parce qu’il donne des solutions à ses habitants.
Loger mieux, cela implique aussi que les logements produits répondent aux
besoins. Il y a des publics auxquels la solidarité nationale doit apporter son
concours, parce que c’est l’un des piliers de notre pacte républicain. C’est le
cas d’abord des personnes sans-abri. Il faut maintenir la dynamique engagée
avec le plan Logement d’abord, lancé par le président de la République en 2018.
Je serai par ailleurs particulièrement attentive au développement de la prise
en charge de l’hébergement des femmes victimes de violence, en leur dédiant
2 000 places supplémentaires.
Loger mieux, cela implique de mobiliser le parc existant, mais aussi de
l’exploiter mieux, c’est-à-dire d’en assurer la rénovation énergétique, en lien
avec Agnès Pannier-Runacher. Au-delà de la stabilité des aides, à laquelle je
me suis engagée, je veux continuer à donner confiance dans la rénovation
énergétique. J’ai lancé, il y a dix jours, un plan pour restaurer la confiance
dans le DPE et nous avons évité, en 2024, 230 millions de fraudes sur plus
de 40 000 dossiers. C’est la preuve que nos systèmes fonctionnent, et
nous allons continuer à les améliorer. Je suis mobilisée pour lutter contre
l’habitat indigne et les marchands de sommeil. Les décrets de la loi adoptée il
y a un an seront tous pris dans trois mois, et nous irons plus loin.
Concernant l’aménagement du territoire, je suis élue d’un territoire très
particulier, dans le bassin minier. Je connais la désindustrialisation,
l’habitat indigne, les centres-villes qui se vident. Je sais combien il importe
de planifier, de soutenir et de financer. Je crois qu’une vision de
l’aménagement du territoire est nécessaire, au niveau local et au niveau
national.
J’aimerais, pour finir, évoquer un sujet qui me tient particulièrement à cœur,
du fait de mon parcours professionnel et politique : celui de la
rénovation urbaine. Je serai très attentive à la mise en œuvre des programmes
Anru. Aujourd’hui, tous les crédits ont été répartis et tous les quartiers sont
en chantier, avec 3 460 opérations livrées, 12 000 en cours et
2,4 milliards de subventions versées. Je veillerai à ce que nous
poursuivions cet effort. L’État y prend sa part en 2025 et nous préparons
activement l’avenir, avec la revue de projets que j’ai évoquée, dont les conclusions
me seront remises à la fin du mois de mai.
Benjamin Haddad (ministre délégué auprès du ministre de
l’Europe et des Affaires étrangères, chargé de l’Europe)
> [Sommet sur l’Ukraine tenu à l’Elysée] Expliquons le but de ce sommet.
Le but de ce sommet, c'est de réaffirmer de façon collective notre soutien à
l'Ukraine. Déjà, notre soutien, là, à court terme, parce que la guerre
continue. Et je vous rappelle que la Russie continue de fermer le dos à la diplomatie,
à des avancées sérieuses dans la négociation. Elle choisit toujours la guerre,
les bombardements sur le terrain. Donc on a eu hier soir, vous avez vu, avec le
Président de la République, de nouvelles annonces de soutien militaire à
l'Ukraine, deux milliards d'euros de matériel, de munitions, de capacités
satellitaires. Il y aura des annonces des pays réunis aujourd'hui. Et après,
effectivement réfléchir, pour mettre d'abord l'Ukraine dans les meilleures
conditions de rapport de force pour aboutir à une négociation, et puis après
réfléchir à des garanties de sécurité pour avoir une paix durable et juste,
pour faire en sorte que le cessez-le-feu qu'il pourrait y avoir demain, ce ne
soit pas juste une parenthèse.
On va parler de toutes les options aujourd'hui pour pouvoir effectivement
garantir la sécurité de l'Ukraine. Je voudrais dire que la première garantie de
sécurité, c'est d'avoir une armée ukrainienne forte ; et donc de voir comment
on peut renforcer l'armée ukrainienne. Et après, réfléchir au rôle que les
Européens et leurs partenaires, des pays comme le Canada par exemple, pourront
jouer pour, effectivement, garantir la sécurité de l'Ukraine, avec, parmi les
options qui ont été discutées, des forces qui ne seraient pas effectivement sur
la ligne de front, mais qui pourraient sécuriser des points d'une Ukraine en
paix. Encore une fois, le but, c'est de dissuader une agression future de la
Russie, de protéger l'Ukraine et de protéger les Européens. Mais d'abord, je le
dis, c'est vraiment de renforcer l'Ukraine pour pouvoir obtenir un
cessez-le-feu, pour la renforcer dans la négociation. (…)
Tout ce qui peut nous amener vers la paix, vers la cessation des hostilités,
nous le soutenons. Et c'est pour ça d'ailleurs que le Président l'a dit. L'approche
de la paix par la force qui est celle que promeut l'administration Trump, on
soutient. Moi, ce que je constate, en revanche, c'est que les Ukrainiens, il y
a déjà plus de 10 jours, à Djeddah, lors d'un des rounds de négociations, ont
dit qu'ils étaient prêts à une trêve totale des combats pendant 30 jours. La
Russie n'a toujours pas répondu. On a eu là, à Riyad, peut-être des avancées
sur les frappes contre les infrastructures énergétiques en Ukraine et une trêve
en mer Noire. Mais on voit que la Russie continue de se perdre dans des manœuvres
dilatoires, à rajouter des conditions, à demander la levée des sanctions. Donc
une fois de plus, on voit que Vladimir Poutine n'a pas une attitude sérieuse
dans ces négociations. Donc nous devons continuer à maintenir et accroître la
pression sur le plan économique comme sur le plan militaire pour pouvoir
obtenir la fin des combats. Mais tout ce qui ira dans le sens de la paix, la
France le soutiendra. (…)
Les Européens sont réunis précisément pour faire entendre leur voix et pour
réaffirmer leur soutien à l'Ukraine dans cette négociation. Encore une fois, le
président Trump dit qu'il veut la paix et qu'il veut la paix par la force. Et
donc, ça veut dire accroître la pression sur la Russie. C'est la Russie qui est
l'agresseur, c'est à la Russie qu'il faut faire comprendre qu'il n'y a pas de
voie militaire.
> Vous voyez bien le rôle moteur que joue la France. Vous voyez bien que les Européens aujourd'hui sont réunis à Paris, que Volodymyr Zelensky était hier à Paris, que nous échangeons régulièrement avec nos homologues européens, ukrainiens, américains. Le président français s'est rendu lui-même dans le Bureau ovale pour échanger avec le président Trump pour faire entendre la voix des Européens. Vous savez, moi, partout où je me rends en Europe, je voyage beaucoup, j'entends la reconnaissance pour le rôle qui est joué par la France, non seulement dans le soutien à l'Ukraine dans la diplomatie, mais aussi dans le renforcement des capacités européennes. Parce que fondamentalement, l'enjeu aujourd'hui, c'est aussi de nous donner les moyens de nous défendre face à la menace que fait peser la Russie contre toutes les démocraties européennes : les ingérences, les sabotages, les déstabilisations, les attaques cyber... Tout le régime de Vladimir Poutine s'est construit dans la révision de l'ordre de sécurité européen issu de la guerre froide, dans la révision des frontières, de la souveraineté de ses voisins. La France appelle au réveil stratégique des Européens. On voit les lignes qui bougent enfin...
> M. Poutine avait dit que la chute de l'URSS était la plus grande catastrophe géopolitique du 20e siècle. Il a envahi la Géorgie, il a envahi l'Ukraine, il lance des attaques et des ingérences sur la Moldavie, sur la Roumanie et il remet fondamentalement en cause les frontières de l'ordre européen.
> Face aux droits de douane américains, l'Europe ripostera de façon ferme et de façon proportionnée. C'était déjà arrivé lors du premier mandat de Donald Trump. On l'avait fait. On le fera à nouveau. On a des mesures, et d'ailleurs on est plus forts qu'à l'époque, parce qu'on a de nouvelles mesures, pour frapper l'économie américaine en retour. Mais je voulais le dire, cette guerre tarifaire, ce protectionnisme, il n'est dans l'intérêt de personne. On voit les conséquences qu'il a aujourd'hui sur l'économie américaine, sur les entreprises américaines. Mais la seule façon de se faire entendre, c'est d'être capable de répondre.
> Dès le 19 mars,
la France a exprimé sa vive préoccupation après l'arrestation puis
l'incarcération du maire de la métropole d'Istanbul, M. Imamoglu, et d'une
centaine d'autres personnalités, dont deux maires de districts d'Istanbul. Et
les manifestations qui ont suivi dans toute la Turquie démontrent bien la
gravité de la situation en cours.
Disons-le clairement : le respect des droits de l'opposition, de la
liberté de manifester, de la liberté d'expression sont des pierres angulaires
de l'Etat de droit. Et vous l'avez rappelé, la France l'a souligné, la Turquie,
étant partie prenante du Conseil de l'Europe, a souscrit de façon libre à ces
engagements en matière de protection de l'Etat de droit. Et naturellement, le
respect de ces engagements aura une incidence sur la suite de notre relation, à
la fois sur le plan bilatéral, mais bien sûr sur la relation avec l'Union
européenne sur le plan multilatéral.
Je rajouterai que nous avons fait passer des consignes de prudence à nos
ressortissants sur place, que nous continuons à suivre la situation avec
attention et que bien sûr, et je le dis dans le contexte du sommet des
partenaires, aussi, qui aura lieu demain à Paris sur l'Ukraine, nous
travaillons avec tous les partenaires et les soutiens de l'Ukraine, y compris
avec la Turquie, à trouver les conditions d'une paix durable et juste et des
garanties de sécurité pérenne pour l'Ukraine.
> La France peut être fière de sa diplomatie. Depuis
l’attaque barbare perpétrée par le Hamas le 7 octobre 2023, elle n’a cessé
d’œuvrer pour faire advenir les conditions d’un cessez-le-feu à Gaza, ainsi
qu’au Liban. Elle a aussi exigé la libération inconditionnelle des otages, pour
lesquels vous n’avez pas eu un mot dans votre question. Elle s’est attachée à
défendre le droit international humanitaire et la protection des civils, tout
en exigeant un cessez-le-feu permanent, afin de retrouver la voie du dialogue
politique, prérequis à la solution à deux États.
La France l’a dit avec clarté : la rupture du cessez-le-feu représente un
retour en arrière dramatique pour les populations civiles, pour toute la
région, et pour la paix.
La France s’est opposée au projet d’annexion de la Cisjordanie et de Gaza et
soutient les efforts des médiateurs égyptiens, américains et qatariens – le président de la République
effectuera d’ailleurs une
visite d’État en Égypte dans les prochains jours. Nous
soutenons aussi les efforts des pays arabes de la région qui réfléchissent au jour d’après, à la
reconstruction et à la
gouvernance de la bande de Gaza. C’est
en ce sens que nous travaillons avec nos partenaires européens.
Mais l’avenir de la bande de
Gaza se fera sans le Hamas, ce groupe terroriste responsable de la mort de
cinquante de nos compatriotes ! La voix de notre pays dans la région a
toujours été une voix indépendante, prônant l’équilibre et appelant à la paix
et au respect du droit international, loin de la soumission et de l’outrance
dont LFI se rend coupable!
► Assemblée
nationale
Yaël Braun-Pivet (présidente)
> En condamnant notre compatriote Boualem Sansal, c’est la liberté
d’expression qu’on enferme. C’est la littérature qu’on menotte. C’est
l’intelligence critique qu’on veut réduire au silence. Nous resterons
pleinement mobilisés pour qu’il retrouve sa liberté — celle qu’aucune
démocratie ne saurait nier à un écrivain.
► Partis
politiques
● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes
et se considèrent à droite ou à gauche ne sont plus retranscrits]
Gabriel Attal (député, secrétaire
général de Renaissance, président du groupe Ensemble pour la république à
l’Assemblée nationale)
> Victime depuis 130 jours déjà de l’arbitraire, la parodie de Justice
continue et notre compatriote Boualem Sansal a été condamné ce matin à 5 ans de
prison. Avec cette condamnation, le régime d’Alger veut faire taire Boualem
Sansal pour toujours. Et à travers ce verdict inique, c’est la liberté qui est
condamnée. Ce sont nos valeurs qui sont attaquées. C’est la France qui est
visée. Nous ne sommes pas dupes et nous ne nous laisserons pas faire. Nous n’abandonnerons
pas. Nous nous battrons jusqu’au bout pour la Justice et donc pour la liberté
de Boualem Sansal.
Amélia Lakrafi (députée)
> [Intervention à l’Assemblée lors d’un débat sur la haine des
musulmans] Ne taisons pas les choses – nombre d’entre
vous ne l’ont d’ailleurs pas fait – : notre pays connaît
une montée de l’intolérance et une réactivation
des tensions dites communautaires, sur fond de crise au Proche-Orient.
C’est ce qu’on appelle traditionnellement « l’importation du conflit israélo-palestinien ».
Le contexte international a bon dos, car ces tensions ne datent pas d’hier.
Elles se concrétisent par des
statistiques qui font froid dans le dos, car elles montrent une explosion des
violences en direction de communautés religieuses ou ethniques.
L’an dernier, plus de 1 500 actes antisémites, plus de 170 actes
antimusulmans et 700 actes antichrétiens ont été enregistrés. Le premier
chiffre est celui qui heurte le plus les esprits, car il concerne une
communauté qui ne représente qu’une infime proportion – 1 % – de
la nation française.
Je ne peux hélas nier le fait
que, dans de nombreux faits divers, les auteurs des violences sont des
musulmans manipulés par ce qu’ils voient sur les réseaux sociaux et à la télévision. Je
pense à l’instrumentalisation de la situation dramatique de personnes qui
vivent à 4 000 kilomètres de chez nous.
D’autres sont influencés par les courants obscurantistes qui sévissent dans
certaines mosquées et sur internet. Il convient de lutter beaucoup plus
fermement contre ces derniers.
Il faut également dénoncer certains courants politiques de gauche, voire
d’extrême gauche – ils se reconnaîtront –, qui jettent de l’huile sur le feu pour des raisons
apparemment électoralistes. Je les
laisse à leurs calculs.
Je constate aussi le flot d’insanités et de haine qui ressurgit à chaque drame
– et
même, à chaque incident –
dans lequel est impliqué un
musulman, à chaque épisode de cette interminable polémique sur le voile et à chaque fois qu’un différend nous oppose à
un pays du sud de la Méditerranée.
Certains partis et médias se font désormais les relais de cette haine, au nom
d’une interprétation excluante de la laïcité. Ils utilisent la triste
augmentation des actes antisémites pour cibler – à mots couverts, mais le message est clair – les Français de confession musulmane.
C’est en particulier le cas d’une certaine droite dure et de l’extrême droite qui, en invoquant des arguments faussement républicains et respectables,
dissimulent ce qui n’est, en réalité, que du racisme.
On fait ainsi aisément l’amalgame
entre musulmans et islamistes, entre Arabes et musulmans, et entre l’islamisme
– voire
l’islam – et le terrorisme.
Bien entendu, ce que nous pouvons appeler la communauté musulmane – même si je ne fais pas de différence entre Français – a également un travail à
accomplir.
Il y a des personnes radicalisées,
c’est vrai. Il y a des
individus et des quartiers qui vivent repliés sur eux-mêmes
et qui nourrissent une haine de la modernité. Il existe des pressions et des pratiques qui empêchent délibérément de nouer du lien avec le reste
de la société.
En effet, il n’y a pas à ce jour d’autorité légitime qui coordonnerait un islam
conforme aux principes de la République. Toutefois, l’immense majorité des
Français musulmans souhaitent avant tout vivre en paix dans leur pays. Ils
souhaitent aussi – et c’est
leur droit – conserver la
liberté de pratiquer leur
culte.
Ils vivent chaque attentat ou drame impliquant un musulman comme un coup de
poing dans le ventre. Le flot de commentaires haineux qui suit, dans certains
médias ou dans la bouche de personnalités politiques, est ressenti comme une
violence supplémentaire. En quelque sorte, c’est la double peine.
En tant que femme musulmane et élue, je ne peux pas rester silencieuse face à
la montée de la stigmatisation des musulmans, qui est alimentée par les
outrances de certains de nos responsables politiques.
Lorsqu’on associe sans nuance l’antisémitisme au monde arabo-musulman et que
l’on identifie des pratiques religieuses banales à des menaces, on ne cible pas
seulement l’islamisme : c’est moi que l’on vise, et avec moi, des millions
de Français stigmatisés.
Ces amalgames ne sont pas seulement des maladresses ; ils ont aussi des
conséquences. De mon point de vue, ils trahissent notre promesse républicaine
d’égalité. Nous devons forger une parole publique qui nous élève, au lieu de
nous diviser.
Joséphine Missoffe (députée)
> [Intervention à l’Assemblée sur la politique familiale]
Vous vous souvenez peut-être de ce refrain qui concluait les plus belles
histoires de notre enfance : « Ils vécurent heureux et eurent
beaucoup d’enfants. »
Cette promesse de l’aube, simple, presque universelle, semble pourtant
s’éloigner, non pas parce que les Français n’en rêvent plus, mais peut-être
parce qu’ils n’en ont plus toujours les moyens ou qu’ils n’ont plus le
sentiment de pouvoir inscrire un tel choix dans leur quotidien.
Le constat démographique est sans appel : la natalité baisse, la population
vieillit, le solde naturel est fragile. Cette réalité n’est pas abstraite. Elle
pèse directement sur la pérennité de notre modèle social, sur notre cohésion et
sur notre avenir.
Derrière ces enjeux, il y a surtout des trajectoires de vie contrariées. Un
espace douloureux s’installe entre le désir d’enfant et la possibilité réelle
de devenir parent. C’est précisément cet écart que notre politique familiale
doit s’attacher à combler.
La réponse de notre mouvement politique repose sur une conviction forte :
une politique familiale efficace ne se limite pas à des prestations, aussi
utiles soient-elles. Elle exige une approche globale à même de sécuriser les
parcours de vie et d’accompagner les modèles familiaux, et ce dès les premières
années.
Depuis 2017, nombreux sont celles et ceux qui ont incarné cette conception au
gouvernement, dans notre assemblée et sur le terrain. Le résultat est la
politique des mille premiers jours de l’enfant, qui entend transformer notre
système de protection maternelle et infantile ; la création du service
public de la petite enfance (SPPE), consacré dans le budget pour 2025, et qui
vise à faire de l’accueil du jeune enfant un véritable droit pour les familles,
et non plus une loterie territoriale ; le doublement du congé
paternité ; la réflexion engagée sur la réforme du congé de naissance,
sans oublier l’expérimentation des crèches à vocation d’insertion
professionnelle ou le service public d’aide alimentaire. Ces outils nous aident
à faire sauter le verrou du choix entre vie professionnelle et vie de famille.
L’éducation d’un enfant est une chose magnifique dont nos concitoyens ne
doivent pas être privés. Mais ceux-ci se sentent écrasés par leur quotidien au
point que la perspective de la parentalité les angoisse. C’est pourquoi nous
devons consolider les principes qui fondent notre politique familiale,
accélérer les réformes en cours et aller plus loin.
Favoriser la préparation à la parentalité implique d’être plus attentifs aux
périodes prénatales et périnatales, ainsi qu’à la santé mentale des parents à
chaque étape de leur parcours. Il faut rendre plus simples et accessibles les
services et les aides de l’État. Face aux exigences de lisibilité formulées par
nos concitoyens, nous ne pouvons plus attendre.
Enfin, la parentalité ne doit devenir ni un luxe ni un privilège. Nous devons
poursuivre nos efforts en faveur de la justice, protéger les familles les plus
précaires et mieux soutenir toutes les familles dans leur diversité.
De même, il faut valoriser les professionnels de la petite enfance, améliorer
leurs conditions de travail, reconnaître leur rôle essentiel et leur donner les
moyens d’accomplir leur mission.
Le comité de filière petite enfance et le plan de formation Ambition enfance
égalité constituent justement un premier pas dans ce sens. Mais il faut
poursuivre l’effort, compte tenu de la crise que traverse ce secteur réellement
incontournable. Je suis convaincue qu’une politique familiale efficace repose
sur une politique vertueuse de la petite enfance.
La mortalité infantile augmente dans notre pays. Elle est même supérieure à la
moyenne de l’Union européenne. Dans ce contexte, pour rassurer les parents,
nous devons renforcer l’action de prévention médico-sociale, que ce soit à
domicile, dans les services de protection maternelle et infantile (PMI), dans
les crèches ou dans les écoles, dès la grossesse et pour tous les enfants.
Notre politique familiale ne doit pas être faite de rattrapage et d’ajustement,
mais fondée sur l’anticipation et la prévention. Pour que la parentalité
redevienne une source d’épanouissement, nous ne pouvons plus la considérer
comme un héritage figé mais comme un levier moderne d’émancipation.
Engageons-nous à offrir à chaque enfant, un avenir, à chaque parent, un soutien
et à chaque famille, la liberté d’exister pleinement.
● MoDem
Perrine Goulet (députée)
> [Intervention à l’Assemblée sur la politique familiale] Je souhaite,
en préambule, saluer l’implication de mes corapporteurs Karine Lebon et
François Ruffin et remercier notre administratrice Camille Vernadat qui nous a
assistés dans l’élaboration du rapport et l’organisation des auditions.
Notre groupe, Les Démocrates, a souhaité proposer ce débat sur les évolutions
nécessaires de notre politique familiale car l’évolution de la natalité nous
préoccupe. D’ailleurs, nous avions déjà abordé ce sujet à l’occasion de la
proposition de loi, défendue par Anne Bergantz et adoptée à l’unanimité en
commission, relative au versement des allocations familiales dès le premier
enfant.
Issue de la seconde guerre mondiale, notre politique familiale est complexe et
ne saurait se résumer à des prestations et à des services. Quand les jeunes
couples indiquent un désir moyen de 2,3 enfants mais qu’ils n’en ont que
1,62, cet écart doit pousser à nous interroger. Nos auditions ont révélé une
tendance mondiale et généralisée à la baisse de la natalité, dont nous devons
tenir compte. C’est sans doute le reflet d’un monde plus individualiste, d’une
crainte de l’avenir – s’agissant
de la situation économique, des
guerres et des défis
climatiques – mais aussi
de l’émancipation salvatrice
des femmes.
D’autres facteurs peuvent néanmoins expliquer le recul de la
natalité, dont nous étions jusqu’à présent préservés. L’un d’eux concerne l’insertion dans la vie active des
jeunes générations. Cette insertion est plus précaire – rares sont les CDI signés en sortie d’étude –, obéit à des désirs différents – voyages, expériences professionnelles multiples – et répond aussi à des
volontés différentes en matière d’épanouissement personnel et professionnel. Bref, il faut
repenser l’accompagnement de
cette insertion qui implique des conséquences
très concrètes : une précarité économique accrue et une vie de couple plus tardive qui retarde d’autant l’arrivée d’un enfant.
La complexité de l’accueil d’un enfant dans de bonnes conditions matérielles est également
un facteur à ne pas négliger. Quand vous vivez dans un
deux-pièces en ville et qu’il faut accueillir un enfant, trouver un logement
adapté pour un budget acceptable peut vite relever du parcours du combattant.
Il nous faut donc inventer un modèle d’habitation plus efficace pour les
familles. De notre capacité à adapter les logements à la taille du foyer
dépendra notre capacité collective à appréhender l’accueil d’un ou de plusieurs
enfants.
Au-delà du désir d’enfant intrinsèque à chacun, nous devons nous interroger sur
le rôle de la société que nous entendons construire. Je l’ai dit en
introduction : limiter la question aux allocations familiales ou aux
places en crèche constituerait une faute intellectuelle qui ne placerait pas le
débat au bon niveau. L’enjeu majeur de notre société est d’accepter la
parentalité et le rôle de la nation est d’accompagner ce nécessaire changement
de société.
Accepter la parentalité, c’est changer de point de vue, notamment chez les
employeurs, qui doivent prendre en compte les contraintes parentales de leurs
salariés, en adaptant par exemple les rythmes de travail, quelle que soit
l’échelle de temps : au cours de la carrière, durant l’occupation d’un
poste, au fil d’une année, d’un mois, d’une semaine ou d’une journée.
C’est également, bien entendu, s’interroger sur les modes de garde. Au-delà du
nombre de places en crèche ou de la capacité d’accueil des assistantes
maternelles, nous devons adapter les conditions de l’accueil : amplitude
horaire, flexibilité, qualité et formation. En l’absence d’une solution
efficace et pérenne, la solution qui s’impose trop souvent est le renoncement
de la mère à une carrière prometteuse. En 2025, et à plus forte raison dans les
années à venir, un enfant ne saurait représenter une contrainte venant peser
sur les choix professionnels de sa mère.
Dès lors, c’est la répartition même de la charge mentale qu’induit l’accueil
d’un enfant qui doit évoluer. Si la maternité incombe biologiquement aux
femmes, il revient également aux hommes de prendre part, de manière plus
équilibrée qu’aujourd’hui, à la vie de la famille, au seul bénéfice des
enfants.
Je ne l’apprendrai pas aux parents présents dans cet hémicycle : un enfant
prend de la place. À nous de lui accorder une place temporelle, pour s’en
occuper, mais aussi une place dans la société en affirmant ses droits – je ne vous surprendrai pas en
reprenant brièvement ici ma
casquette de présidente de la délégation aux droits des enfants –, tout simplement une place dans l’espace public. Combien de fois un parent, voyageant dans le
train avec son nourrisson, a-t-il subi le jugement des autres voyageurs – et je ne vous parle même pas d’un voyage en avion ?
Combien d’enfants se sont-ils
ennuyés dans une salle d’attente austère, surtout depuis le covid et la disparition des jouets ?
La place que nous accordons à l’enfance et donc à la parentalité s’impose à notre
attention. Le congé de
naissance et le congé de
parentalité doivent être repensés, voire réformés, si l’on considère,
comme c’est mon cas, que notre
société peut accompagner les parents dans cette aventure que constitue
l’accueil d’un enfant. Alors, nous aurons fait un pas décisif.
En conclusion, pour accompagner les jeunes parents, nous devons avant tout
accepter les enfants dans notre société – accepter qu’ils
bougent, qu’ils crient, qu’ils prennent du temps et mobilisent
leurs parents par leurs activités.
Comme le disait Nelson Mandela, « rien
ne révèle mieux l’âme d’une société que la façon dont elle traite ses enfants ». À nous de faire de notre pays une société qui accepte,
accueille et encourage ses enfants et leurs parents. Notre avenir en dépend.
► Autres
● Commission européenne
Stéphane Séjourné (Vice-président exécutif à la Prospérité et à la Stratégie
industrielle)
> Merci cher Kiriakos Mitsotakis
pour votre accueil chaleureux à Athènes. L’Europe a besoin de la Grèce. Il a
besoin de ses leaders de l’industrie propre, de ses investissements importants
dans l’approvisionnement en matières premières essentielles et de sa volonté
d’établir un marché unique fort, simple et efficace.
● Organisations centristes
♦ Renew Europe
(Députés français du groupe centriste au Parlement européen)
Valérie Hayer (députée, présidente)
> Main dans la main, la France et l’Europe s’activent pour simplifier la
vie des entreprises et soutenir l’investissement. Ces efforts sont plus
stratégiques que jamais pour renforcer notre industrie de défense.
> Nous devrons dissuader Vladimir Poutine de s’en prendre une nouvelle fois à l’Ukraine ou à tout autre pays sur le sol européen. Cette force de réassurance servirait à éviter un nouveau scénario « accords de Minsk » qui avaient été piétinés par le Kremlin.
> Derrière la paix juste et durable pour l’Ukraine, c’est la sécurité à long terme de notre continent qui est en jeu. Je le vois tous les jours au Parlement européen : l’Europe est unie pour nous protéger.
> Les demandes de la Russie démontrent ce qu’il fallait démontrer : l’Europe a eu raison de poser des sanctions contre l’économie russe. C’est une carte majeure entre les mains des Européens. Nous attendons un cessez-le-feu inconditionnel.
> Enfermer un écrivain pour ses opinions politiques est une atteinte brutale à la liberté d’expression. La condamnation de notre compatriote Boualem Sansal à cinq ans de prison n’est pas digne des valeurs dont toute démocratie doit se prévaloir. Boualem Sansal doit être libéré.
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