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lundi 4 novembre 2024

Présidentielles USA 2024. Une partie de la démocratie est déjà en état de mort clinique


Soyons clairs.

Si les Etats-Unis sont la première et plus grande démocratie, celle-ci a toujours charrié depuis leur création des forces réactionnaires internes qui l’affrontaient, voulaient sa disparition et y sont presque parvenus.

Dès sa naissance, le pays est au prise avec une partie de la population qui refuse la promesse démocratique en particulier avec le refus d’abolir l’esclavage c’est-à-dire de considérer l’ensemble de la population américaine comme faisant partie de la communauté citoyenne.

Car un esclave n’étant évidemment pas un humain libre et un citoyen, n’a donc aucun droit.

C’est d’ailleurs apaiser ces partisans de l’esclavage et éviter une confrontation qui aurait abouti à la dislocation d’une union pas du tout assurée d’être pérenne que son abolition n’est pas décidée mais renvoyée à une date ultérieure qui n’arrivera qu’avec une guerre civile d’une rare violence et dont les vaincus, ses partisans, n’auront de cesse de ne pas accepter sa suppression – et de proposer un contre-modèle à la démocratie des «nordistes» – puisqu’aujourd’hui, encore, des mouvements issus directement de leurs rangs sont ouvertement suprémacistes et prônent la domination blanche avec des idéologies proches du nazisme parfois nazies tout court.

Quant aux amérindiens ou «native americans» dans la terminologique actuelle, ils ne bénéficient guère des bienfaits de la démocratie car ils sont considérés comme des sauvages et maltraités avec des traités sensés leur garantir des terres et des droits qui ne seront jamais respectés et in fine regroupés dans des réserves.

Les juifs furent, de même, ostracisés, avec des interdictions multiples notamment dans l’exercice de certains emplois au début du 20e siècle.

Ainsi, par exemple, ils furent interdits d’exploiter des entreprises dans tout ce qui était le secteur des loisirs et des amusements sauf, parce que personne ne croyait alors qu’elle serait une industrie florissante ayant un avenir, dans le cinéma que l’on considérait comme une mode passagère!

C’est pourquoi les juifs devinrent propriétaires de cinémas, qu’ils se lancèrent dans la production pour les alimenter en films et qu’ils créèrent ce qui allait devenir les plus grands studios du monde.

Les mêmes antisémites qui les avaient exclus du monde du divertissement, les accusèrent alors d’un complot pour diriger le cinéma américain…

Quand ils arrivèrent en masse, les Irlandais puis les Italiens furent considérés comme des sous-humains, de la racaille et des assassins en puissance qui allaient dégénérer la race anglo-saxonne comme sont considérés toujours par les mêmes, les latinos.

Sans parler des catholiques qui étaient une des cibles revendiquées du Ku Klux Klan au même titre que les noirs et les juifs.

Quant aux mouvements anti-démocratiques, ils ont jalonné l’histoire du pays avec, rien que pour le 20e siècle, les ségrégationnistes (rappelons que l’apartheid sud-africain a pris pour modèle les lois racistes «Jim Crow» en vigueur dans le Sud des États-Unis), les pro-nazis qui firent alliance dans les années 1930 et 1940 avec les fondamentalistes chrétiens et bien sûr cette droite radicale avec Barry Goldwater, Richard Nixon et Ronald Reagan, entre autres, qui accoucha, au 21e siècle de George W Bush et de Donald Trump qui s’appuie sur la haine des rednecks envers les habitants des grandes villes de l’Est et de l’Ouest du pays, sur le racisme, sur l’élucubrationisme (complotisme), le tout véhiculé dans un premier temps avant tout dans les méga-églises du pays par des pasteurs conservateurs, richissime (et souvent escrocs) ainsi que dans les communautés évangéliques.

Voilà la réalité historique.

Une réalité que les partisans de la démocratie n’ont pas toujours prise au sérieux et dont ils pensaient qu’elle disparaitrait avec le progrès et le savoir qui permettrait au régime de liberté et d’égalité de s’enraciner profondément, ce qui n’a pas été le cas comme on le constate également dans d’autres démocraties dont la France.

La démocratie n’est donc pas et n’a jamais été plébiscité unanimement par le peuple américain.

Malgré tout, elle a jusqu’à présent réussi à ce sortir des nombreux guet-apens et autres complots ourdis contre elle et à ne pas succomber  sous les coups ces populistes et des extrémistes.

De même, des avancées démocratiques ont eu lieu avec notamment le vote des femmes, les droits civiques et tout un certain nombre de mesures de protection des citoyens.

Pour autant, on a également assisté à des régressions avec, entre autres, la charcutage des circonscriptions électorales, les barrières mises en place par des États pour empêcher certains groupes ethniques ou sociaux de voter, les restrictions pour les femmes dans leurs droits à disposer de leur corps, le droit d’acheter des armes de guerre.

La vague antidémocratique actuelle n’est donc pas une nouveauté.

En revanche, son étendue ainsi que le fait qu’elle se produise au 21e siècle alors que l’on pensait que la démocratie s’était mieux enracinée dans le pays sont d’inquiétantes réalités qui mettent en danger son existence à un niveau rarement atteint.

Ainsi, que le coup d’Etat manqué de Donald Trump en janvier 2021 n’est pas encore abouti à l’incarcération de son initiateur et soit nié par une partie de la population dont la plupart des élus républicains est une des preuves de la fragilisation de la démocratie.

Que les médias traitent un personnage comme Trump de la même manière que des politiques tout à fait honorables alors qu’il insulte et menace ses opposants, ment effrontément sans arrêt, qu’il admire les dictateurs et qu’il a été reconnu coupable pénalement, sans oublier des nombreuses faillites frauduleuses, est une autre indication de la confusion dans laquelle se trouve la démocratie américaine.

Et, le plus important, que près de la moitié de l’électorat puisse voter pour ce personnage est la démonstration ultime qu’une partie de la démocratie américaine est en état de mort clinique.

Une victoire de Kamala Harris ce 5 novembre serait la preuve que la démocratie étasunienne peut encore résister à sa mise à mort programmée par ses adversaires.

Ce serait une grande victoire des valeurs humanistes mais, cependant, cela ne résoudra pas le problème au fond.

Et si l’on peut s’attendre au pire si Trump est élu, il y aura des tentatives de déstabilisation, notamment pour empêcher que le processus démocratique fonctionne, si c’est la candidate démocrate que les électeurs désignent pour s’installer à la Maison Blanche.

Pour éviter sa disparition, la démocratie étasunienne devra d’abord être en mode de résistance avant d’être dans la reconquête, voire dans la conquête tout court, si cela est encore possible de cette moitié d’Amérique qui la rejette.

Alexandre Vatimbella

 

 

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