mercredi 22 mai 2024

Propos centristes. France – Investir dans l’eau / Baisser le déficit public et les impôts en même temps / Nouvelle-Calédonie / Education prioritaire / Intelligence artificielle / Réindustrialisation décarbonée / Loi agriculture / Elections européennes / Cour pénale internationale…


Voici une sélection, ce 22 mai 2024, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France. 

► Emmanuel Macron (Président de la République)
> Nous avons changé la structure de ces dépenses pour privilégier les dépenses d’investissement plutôt que les dépenses courantes, les dépenses préventives plutôt que curatives, et beaucoup baissé les impôts. Et parce que nous avons fait face aux crises en protégeant les Français au moment du Covid et de la guerre en Ukraine. En résumé, nous avons baissé les impôts, investi dans nos services publics et su faire face aux crises. Quelle est la stratégie menée depuis le début, avec cohérence et constance, qui nous a permis de faire cela ? Pour la première fois depuis des décennies, la France a une politique d’offre destinée à remuscler notre appareil productif, une politique stable, et elle n’en a jamais changé depuis sept ans, quelles que soient les crises géopolitiques, la pandémie ou les tensions politiques. Nous n’en avons pas changé, alors qu’il y avait jusqu’ici, et constamment, du yo-yo, ce qui a restauré la crédibilité de la France.
Notre politique a été de baisser le déficit public et les impôts en même temps, en 2018 et en 2019, jusqu’à la crise des gilets jaunes. Politique qui nous a permis de sortir du déficit public excessif et de faire de la consolidation budgétaire sans augmenter les impôts, soit l’inverse de ce qui avait été fait précédemment. Nous avons tenu cette ligne, ce qui fait que, sur le plan de la fiscalité, nous avons un bilan inédit : 60 milliards d’euros d’impôts en moins, 30 sur les ménages, 30 sur les entreprises. Avec une efficacité qui se poursuit puisque aujourd’hui les recettes fiscales sont meilleures avec un impôt sur les sociétés à 25 %, contre 33 % précédemment. Il en est de même pour la fiscalité du capital depuis l’instauration de la flat tax.
Par la suite, nous avons baissé les impôts plus vite que les dépenses, en réponse à la crise des gilets jaunes. Et deux grandes crises sont venues impacter nos finances publiques : le covid19, avec le «quoi qu’il en coûte», où nous avons en effet décidé d’investir massivement en soutien de l’économie et des ménages, comme l’on fait tous les Européens, et la guerre en Ukraine et ses conséquences sur les prix de l’énergie. A l’instar de nos principaux compétiteurs, nous avons accumulé une dette Covid, puis une dette de protection face à la guerre en Ukraine et à l’inflation, avec notamment le bouclier énergie et le soutien aux ménages les plus fragiles, qui ont protégé le pouvoir d’achat des Français. Je défends cette politique. Elle était nécessaire parce que la France est un pays qui, lorsqu’il détruit du capital productif, le répare beaucoup plus lentement que ses voisins.
Cette protection nous a à l’inverse ­permis de repartir rapidement. Et durant toute cette période, les réformes économiques en profondeur ont continué, en particulier en matière de réindustrialisation et de travail, et grâce à ces réformes notre économie croît, ce qui a un impact positif sur les finances publiques. La réforme de l’assurance-chômage de 2019, dont l’évaluation vient de montrer qu’elle était positive et qu’elle avait permis de générer des économies et des emplois, en est une illustration. Celle des retraites, l’année dernière, qui était indispensable et génère en année courante 15 milliards d’euros. Et une nouvelle réforme de l’assurance-chômage, qui sera annoncée dans quelques jours et qui va nous permettre encore de renforcer les incitations au travail dans notre pays. (…)
Que s’est-il passé en fin d’année dernière ? Un ralentissement très fort de notre croissance, parce que les ralentissements allemand puis italien ont impacté l’économie française. Ce qui a conduit à une chute brutale des recettes fiscales. Hormis une dérive des dépenses initialement prévues qui est du fait des collectivités locales, il n’y a pas de dérapage de la dépense de l’Etat, son budget est même plutôt sous-consommé.
Est-ce qu’il fallait changer de politique ? La réponse est non. Constance, cohérence, confiance : on garde le cap, car notre stratégie est la bonne. Nous avons réagi tout de suite par deux séries d’économies, 10 milliards pour l’Etat dès la fin de l’hiver, puis encore 10 milliards comme cela a été annoncé pour absorber ce choc. Nos finances publiques sont plus dégradées qu’avant le covid19, comme tous nos voisins, mais on va garder la même politique avec pour objectif, dans les années qui viennent, de pouvoir reprendre la baisse du déficit, revenir sous les 3 % comme prévu au niveau européen d’ici à 2027 et commencer à réduire la dette. Mais, quand on prend du recul, sur quarante ans, à quoi est dû le problème français des finances publiques ? Deux raisons prin­cipales. Une explosion des politiques sociales, qui représentent près de 60 % de la dépense publique. On y a répondu à côté, en réduisant toujours davantage les dépenses de l’Etat et sur la fonction productive, ce qui a, pour l’Etat, conduit à moins bien payer les fonctionnaires et donc à affaiblir l’école, la justice, la sécurité, la santé. Ensuite, un niveau d’activité et de travail insuffisant avec une désindustrialisation massive, de sorte que la France a été incapable pendant des décennies de réduire son chômage de masse.
Avec les réformes des retraites et de ­l’assurance-chômage, la création de France Travail, la refonte des politiques de formation, du lycée professionnel à la formation professionnelle, la politique de réindustrialisation, l’investissement dans l’innovation, la relance du programme nucléaire d’investissement et l’ensemble des mesures fiscales, l’objectif est de rehausser le taux d’activité et de baisser le taux de ­chômage, tout en réduisant nos politiques de transfert. C’est ça, la bonne politique.

> Je note qu’en 2023, et même au premier trimestre 2024, nous avons continué à créer de l’emploi productif, ce qui déjoue les théories selon lesquelles il faudrait au moins 1 ou 2 % de croissance pour commencer à créer des emplois. Je relève aussi que le taux d’activité continue d’augmenter et a atteint un nouveau record ce mois-ci, ce qui veut dire que notre potentiel économique augmente. Si on avait suivi les règles de fonctionnement classiques de l’économie française des dernières décennies, nous aurions dû, vu le niveau de croissance fin 2023 et début 2024, détruire de l’emploi productif. Or on a continué à en créer. Nous avons transformé le modèle productif du pays, y compris dans l’industrie, et nous avons même mis fin au chômage de masse.
Constance, cohérence, confiance et croissance ! Sur le plan de la croissance, on devrait avoir un deuxième semestre 2024 bien meilleur. L’inflation, par ailleurs, a atterri de manière très rapide, beaucoup plus rapide que par le passé. Cela a été très éprouvant pour les Français, mais nous revenons à des étiages normaux. Et ce, sans entrer en récession contrairement à certains de nos voisins, mais leur ralentissement nous a affectés à la fin de l’année dernière. Sur 2025 et 2026, le taux de croissance devrait être bien meilleur. Nous vivons dans un monde instable, mais je pense qu’entre la pandémie, la guerre et l’inflation nous avons passé le plus dur. On sort de cette période en ayant très bien résisté et surtout montré notre grande constance. Et précisément parce que notre taux d’activité est encore inférieur à celui de nos grands voisins et notre taux de chômage plus élevé, nous avons encore des marges de progrès pour produire et créer plus de richesses. Pourquoi sommes-nous encore cette année – et pour la cinquième fois consécutive – le pays le plus attractif d’Europe pour les investissements étrangers ? Parce que, si vous ne changez pas de cap au gré des crises, les investisseurs se disent : voilà des gens fiables. Ce que la France n’était plus ces dernières décennies. Dès qu’il y avait un coup de grisou politique, on augmentait tout de suite les impôts. Je suis très confiant sur le fait que nous allons dans la bonne direction sur le plan conjoncturel. Et qu’il faut continuer les réformes.
Quel pays en Europe a fait une réforme des retraites l’année dernière dans le contexte ? Aucun. Mais on a fait le bon choix, parce que c’est celui qui produit du résultat dans la durée. Pas seulement sur les finances publiques mais d’abord sur l’activité. C’est aussi pour cela que j’ai voulu qu’on mette tout de suite en place la deuxième étape de la réforme de l’assurance-chômage, qui sera présentée très prochainement par la ministre du Travail. Cette réforme va renforcer l’efficacité de notre système d’indemnisation et les incitations au travail. On agit au bon moment du cycle, parce que c’est lorsque la croissance s’apprête à repartir qu’il faut préparer les conditions du durcissement de l’assurance-chômage. Notre pays indemnisait trop rapidement (c’est-à-dire après une faible durée de cotisation), trop longtemps et parfois trop certains publics, ce qui n’incitait pas à la reprise d’activité. En outre, on ne formait pas assez les demandeurs d’emploi. Parallèlement, la création de France Travail nous a permis de mettre beaucoup plus d’argent dans leur accompagnement, en faveur de la qualification et, en même temps, de déployer une politique d’incitation au retour à l’emploi pour éviter les effets d’aubaine. C’est bon pour l’économie. C’est aussi une mesure sociale, car, comme je l’ai toujours dit, le travail est pour nous un moyen d’intégration et d’émancipation dans la société.
L’effet de nos mesures sur l’apprentissage continue, enfin, de monter. Elles seront complétées par la réforme du lycée professionnel et celle du premier cycle universitaire, qui donnera aux étudiants beaucoup plus de visibilité sur leurs débouchés. Cette stratégie d’ensemble vise à former dans les domaines qui embauchent, à réformer le marché du travail, pour réduire le chômage et accroître le taux d’activité. Elle ne doit pas nous dispenser, en parallèle, de faire des économies. C’est ce que je veux faire en responsabilisant davantage sur les dépenses de santé. En continuant de simplifier les relations avec les collectivités et en gagnant en efficacité au sein de l’Etat, avec plus de numérisation, d’intelligence artificielle et, après le prélèvement à la source, le versement à la source.

> L’objectif est le plein emploi. Je pense que l’on y arrivera dans les prochaines années, même si cela dépend des effets de cycle et des variations entre territoires. Il faut encourager la mobilité entre les régions. En Vendée, en Normandie, en Bretagne, certaines zones sont aujourd’hui à moins de 4 % de chômage. D’autres, comme certains quartiers pauvres de métropoles, ou dans cette France désindustrialisée, sont entre 8 et 10 %. Il ne faut pas croire qu’un salarié de l’automobile qui a subi le choc de la désindustrialisation à Aulnay peut facilement travailler demain à Dunkerque dans une usine de batteries. C’est beaucoup plus courant aux Etats-Unis ou dans d’autres pays européens qui ont cette ­tradition. En France, un ménage qui a emprunté pour acheter son pavillon à côté de son emploi, et qui l’a perdu au moment d’un choc industriel il y a dix ans, a beaucoup plus de mal à bouger, et c’est bien ­normal : il faut donc lever les freins, peu à peu. Cela demande de la persévérance.

> [Réduire de 2 milliards d’euros les impôts des classes moyennes en 2025] Oui, il faut tenir [cet objectif], parce que c’est un accélérateur d’économies. Quand on permet à nos compatriotes qui travaillent de mieux vivre de leur travail, cet argent rendu aux Français est dépensé, consommé. On le retrouve dans l’économie. Il n’est pas mis de côté. Ils l’utilisent pour faire davantage d’activités, accéder à un logement, avoir une vie meilleure. C’est une très bonne chose.
On a mis en place, ces dernières décennies, des politiques sociales – il fallait le faire et il faut le faire – qui ont essayé de compenser la désindustrialisation, mais qui ont coûté de plus en plus cher à la nation. La charge a pesé sur les entreprises et les classes moyennes, et l’écart entre la non-activité et l’activité s’est réduit. Une partie de la France s’est smicardisée, parce que la dynamique du smic, légèrement supérieure à l’inflation, a complètement comprimé la courbe des salaires. Il s’agit d’un vrai problème français : nous sommes sans doute l’un des pays au monde où l’écart entre le salaire minimum et le salaire médian est le plus faible, ce qui fait que l’incitation à progresser dans une carrière ou à se former est très faible. Ce n’est pas du tout une bonne chose. En même temps qu’on remet les gens au travail par notre politique de formation, d’incitation, de réindustrialisation et d’accroissement de l’offre, il faut développer une politique de dynamique salariale. Elle passe, évidemment, par les entreprises. C’est ce que j’ai fait avec l’ouverture de l’intéressement et de la participation – une révolution silencieuse –, qui n’ont jamais autant augmenté que ces dernières années. Dans les branches des entreprises, cette dynamique doit jouer à plein, pour encourager les progressions de carrière et rendre plus d’argent.

> Nous ne sommes pas encore sortis du covid19 et beaucoup de chaînes de production ne tournent pas au même rythme qu’avant la pandémie. La réorganisation de ces chaînes est en train de se faire, mais c’est un élément qui, je dirais, est connexe à la désindustrialisation.
Le deuxième point est lié aux singularités de notre économie. En accroissant le retour à l’emploi, on fait revenir des gens qui ont moins de productivité, c’est un fait. La France était jadis un des pays les plus productifs du monde, parce qu’elle était un de ceux qui avaient le taux d’activité parmi les plus faibles et le chômage le plus important. Autrement dit, comme bien moins de Français travaillaient et qu’ils travaillaient moins longtemps, la production par habitant était bien plus élevée et, à mesure que l’activité augmente et que le chômage baisse, notre productivité se normalise. Statistiquement, plus on va faire revenir vers le travail – dans l’industrie, les services ou l’agriculture – des gens qui étaient loin de l’emploi, plus on aura une productivité dégradée pendant un temps. Ce n’est pas grave, je ne suis pas obsédé par ça.
Troisième élément, je suis très confiant sur l’impact de notre réindustrialisation, qui va augmenter notre productivité, et sur l’apport de l’intelligence artificielle. Les premiers chiffres le montrent : si l’IA est une révolution, c’est d’abord pour la productivité. Nous étions le pays d’Europe le plus hostile à la robotisation. Or, dans un pays où, compte tenu du modèle social, le travail à un certain coût, vous ne pouvez pas réindustrialiser si vous ne robotisez pas. Nous avons rattrapé ce retard en robotisant massivement grâce au plan de relance et au plan France 2030. Nous sommes en train d’accomplir deux virages intellectuel et doctrinal chez les décideurs, mais aussi dans la population : on ne réindustrialise pas s’il n’y a pas une politique incitative fiscale qu’il faut assumer ; et on ne réindustrialise pas si on ne robotise et ne digitalise pas, parce que c’est ainsi qu’on gagne justement de la productivité et qu’on compense une partie du fait que le coût de la main-d’œuvre est plus élevé chez nous que dans les pays à très bas coût.

> Choose France, dont c’était la septième édition, a été un grand succès et, avec 15 milliards ­d’euros d’investissements annoncés et 10 000 emplois créés, a atteint un record. Mais, en parallèle, il existe une véritable politique de réindustrialisation et d’investissement de nos entreprises. Je l’ai rappelé à Versailles : Blue Solutions, une filiale du groupe Bolloré, va construire une grande usine de batteries dans l’Est. Et Sanofi va investir 1 milliard d’euros à Vitry-sur-Seine. Au-delà de ça, je vous annonce que dix nouvelles usines vont sortir de terre dans les prochains mois, partout, de Fos à Bourges. Ce sont des investissements de start-up, de PME et d’ETI françaises. C’est un exemple de la réindustrialisation par l’innovation que nous portons avec France 2030. De l’acier décarboné, des composites, ou encore des moteurs pour satellites qui seront demain produits en France.
Et pour célébrer cette dynamique, mais aussi celle de toutes les ETI et PME de nos territoires, nous allons organiser un sommet Choose France dédié aux entreprises françaises, pour répondre à leurs vœux et pour mieux valoriser ce choix du site productif France par les acteurs français, qu’il s’agisse de PME ou de grands groupes.

> L’Allemagne est sans doute aujourd’hui un des pays européens dont le modèle économique, fait de dépendances multiples à la Russie, à la Chine et aux Etats-Unis, est le plus bousculé. Pourquoi ? Parce que son économie dépendait beaucoup plus que la nôtre d’une énergie bon marché qui venait de Russie : c’est terminé. Son secteur automobile et son hinterland, qui s’étend en Europe de l’Est et centrale, dépendent des chaînes de valeur mondialisées, ils ressortent de la crise Covid affaiblis et doivent se réorienter. Son principal marché à l’export, la Chine, est lui-même en surcapacité. Enfin son ombrelle géopolitique américaine, qui était donnée pour certaine, ne l’est plus. Donc, l’Allemagne repense profondément son modèle, car plusieurs de ses secteurs économiques sont en train de souffrir. La chimie, pour n’en citer qu’un, à cause du coût de l’énergie. Notre devoir est de redoubler d’engagement avec l’Allemagne, pour inventer ensemble ce nouveau modèle et prendre des initiatives audacieuses. Exactement comme nous l’avons fait en 2020, avec la chancelière Merkel, où, quelques mois après le début du Covid, nous avions pris une position, considérée jusque-là comme impensable : un endettement commun. Ce qui nous a permis ensuite de décider ensemble, entre Européens, dès juillet 2020, du plan de relance de 750 milliards d’euros.
J’appelle à un nouveau paradigme économique, à un nouveau modèle de croissance, et c’est là-dessus que je vais essayer de convaincre les Allemands. Quel est-il ? Le continent européen a beaucoup de forces : c’est un des plus gros marchés domestiques – 450 millions d’habitants, donc de consommateurs. Il a des préférences collectives et des valeurs assez homogènes. Il est en train de se réveiller géopolitiquement. Mais il reste un des marchés les plus ouverts du monde, le seul qui respecte encore les règles de l’OMC, alors même que la Chine et les Etats-Unis en sortent. Et il est encore trop fragmenté, avec une politique monétaire et budgétaire commune beaucoup trop faible. Sa politique de financement privé est totalement inopérante et son énergie, non compétitive. En revanche, il a su se doter d’une stratégie sur la décarbonation pertinente, que n’ont pas les autres.
Face à ces avantages et désavantages, nous devons clarifier notre agenda autour de quelques piliers pour bâtir un nouveau paradigme de croissance. Premier pilier : assumer d’être les leaders d’une réindustrialisation décarbonée. Nous avons des points de passage – 2030, 2040, 2050 – pour décarboner que n’ont pas les Américains ni les Chinois. Cela donne une visibilité au marché. A présent, il faut accélérer les investissements publics et privés pour accompagner ce mouvement. En France, nous sommes, avec notamment France 2030, en train de décarboner des ports ou des cimenteries. On crée de l’emploi industriel, tout en baissant nos émissions de CO2. Voilà ce qu’il faut faire au niveau européen. C’est un enjeu de souveraineté pour l’avenir.
Deuxième pilier : une vraie doctrine de sécurité économique. Il faut assumer une politique industrielle avec une préférence européenne, assortie d’achats européens, dans les secteurs clés : notamment les cleantech, la défense et le spatial. Toutes les autres puissances le font. N’essayons pas d’être les premiers d’une classe dont nous finissons par être les seuls élèves. Il est donc temps de sortir de notre naïveté autour de la concurrence ouverte ! La France et l’Allemagne se sont lancées dès 2017 dans l’hydrogène et les batteries. Or, aujourd’hui, les Américains se révèlent plus efficaces, parce qu’avec l’IRA, l’Inflation Reduction Act, ils disposent d’un crédit d’impôt beaucoup plus simple et lisible que chez nous. Il nous faut aussi une politique commune sur les blocs technologiques – le quantique, l’intelligence artificielle, les biotechnologies, les nouvelles énergies – que nous voulons vraiment maintenir ou relocaliser.
Le troisième pilier concerne la politique commerciale. Je le disais, l’Europe est le continent le plus ouvert, mais nous n’avons pas intégré le fait que les deux premières puissances mondiales avaient mis en place des mesures de protectionnisme. Je l’ai pointé dès le début, mais ça n’a pas été assez suivi d’effets : l’IRA est une vraie révolution géopolitique. Soyons lucides : nous devons mieux protéger nos investissements existants et notre marché dans le commerce mondial, car on ne va tout de même pas investir massivement avec l’argent du contribuable dans des nouvelles technologies en recourant à des importations venues de Chine au péril de nos entreprises et de nos emplois. Comment ? Par de la réciprocité. On veut le même niveau de jeu, pour reprendre la formule américaine. La solution, ce sont les fameuses clauses et mesures miroirs : si on demande des efforts à nos producteurs, on doit pouvoir réclamer à ceux qui importent en Europe les mêmes efforts. D’où le soutien que nous apportons aux enquêtes menées par la Commission européenne sur les véhicules électriques chinois. Quand un pays subventionne massivement ses véhicules, il faut des compensations, sinon nous allons subir ses surcapacités.
C’est un vrai test de crédibilité ! Celui que l’Europe a raté sur les panneaux photovoltaïques il y a quinze ou vingt ans, et qui fait qu’on a totalement désindustrialisé ce secteur. Il n’y a pas de décarbonation possible avec la réindustrialisation s’il n’y a pas une politique commerciale qui protège nos intérêts. C’est là un pilier essentiel de cette stratégie, de ce reset économique. Quatrième pilier de ce nouveau paradigme économique : l’approfondissement du marché unique, en visant notamment les trois secteurs qui avaient été écartés de celui-ci (l’énergie, les télécommunications et la finance) et le renforcement de nos investissements en recherche et innovation.
Le cinquième pilier, c’est le choc d’investissement auquel nous faisons face et qui est inédit dans notre histoire. Il s’explique d’abord par le contexte géopolitique : pour nous protéger en tant qu’Européens, notre budget d’armement et d’équipements militaires doit augmenter. C’est une course, et elle se déroule maintenant. Il y a aussi la transition climatique : adapter nos économies et décarboner ne se fera pas uniquement avec de la réglementation. Il faut accompagner les ménages et les industries. On parle là de plusieurs dizaines de milliards d’euros par an pour chaque pays européen. Enfin, la transition numérique. L’IA et le quantique nécessitent également des investissements colossaux. Ces technologies sont de plus en plus capitalistiques, et l’allocation des facteurs de production s’effectue en ce moment.

> L’Europe a une politique monétaire qui n’intègre que l’inflation. Nous devons rouvrir notre politique monétaire et lui faire intégrer des objectifs de croissance, voire de décarbonation. C’est le débat fondamental que j’ai lancé lors de mon discours sur l’Europe à la Sorbonne, le 25 avril. Il faut piloter l’Europe différemment : on ne peut pas rester avec une cible d’inflation définie dans les années 1990 dans un monde structurellement plus inflationniste.
Deuxième élément, nous devons muscler la capacité d’action financière à l’échelle de l’Union. Le budget européen reste beaucoup trop faible à lui seul. Ouvrons un vrai débat pour envisager comment investir en Européens. Jusqu’à présent, la Commission se limite à concéder des flexibilités nationales, via les aides d’Etat. Il s’agit une réponse de court terme, souvent mauvaise, parce qu’elle fragmente le marché et ne donne, en quelque sorte, la capacité à accompagner cette transition qu’à ceux qui ont de gros budgets. Les Français comme les Allemands peuvent s’en sortir. Mais on casse l’Europe en faisant ça ! Il faut donc, au niveau européen, doubler la capacité financière d’action commune. Est-ce que ça passe par un endettement commun ? Par le mécanisme européen de stabilité, inventé en 2012, pendant la crise des dettes souveraines mais sous-utilisé aujourd’hui ? Par davantage de mobilisation de la Banque européenne d’investissement ? Je ne veux pas préempter le débat, mais il faut l’avoir !
Le dernier point concerne le financement privé. Je crois qu’il y a ici une vraie convergence franco-allemande, sur laquelle je voudrais avancer au plus vite. Nous voulons réaliser une véritable union de l’épargne et de l’investissement. Les trois quarts du financement de nos économies privées passent par les banques et les assureurs, là où, aux Etats-Unis et dans le monde anglo-saxon, les trois quarts passent par le marché. C’est beaucoup plus désintermédié. A la sortie de la crise financière de 2008, l’Europe a surrégulé les banques, avec les normes Bâle et Solvabilité. Le monde anglo-saxon, d’où venait la crise, n’applique toujours pas ces règles. Il faut resynchroniser nos agendas. Si les Américains n’appliquent pas ces règles prudentielles, on doit les assouplir pour que nos banques et nos assureurs puissent financer les transitions climatiques et numériques, et remettre de l’argent dans les entreprises, ce qu’elles ne font plus.

> Les Européens ont beaucoup d’épargne, plus que les Américains, parce qu’ils ont des populations riches, et des entreprises riches qui ont une capacité à l’export très forte. C’est cette Europe lotharingienne qui fait du commerce et parvient à accumuler des excédents. Mais, comme l’Europe ne dispose pas d’un vrai marché de capitaux, ces excédents restent concentrés dans certaines géographies ou secteurs, et sont sous-utilisés. L’union des marchés de capitaux ou plutôt l’union de l’épargne et de l’investissement, c’est ce qui va nous permettre de faire fonctionner cette épargne pour l’orienter là où il y a du rendement et de la productivité. Nous avons donc besoin d’une supervision commune, ainsi que d’une harmonisation des règles en matière de faillites. Cette union nous permettra d’allouer plus efficacement l’épargne des Européens vers les secteurs de la transition et de l’innovation. Chaque année, 300 milliards d’euros épargnés par les Européens financent l’économie américaine en actions ou en obligations, c’est une aberration.
Pour soutenir l’innovation, le financement de nos universités et de notre recherche, publique comme privée, est clé. Quand on regarde les trente dernières années, c’est l’absence d’une telle stratégie autour de l’innovation qui explique pourquoi les Européens ont créé deux fois moins de richesse par habitant que les Américains.
L’explication de ce décrochage, c’est que les Américains ont innové beaucoup plus fort et rapidement, parce qu’ils ont mis beaucoup plus d’argent public et privé dans l’innovation et qu’ils l’ont diffusé beaucoup plus vite que nous. Ce décalage s’est accéléré après la crise financière, parce que nous avons davantage pesé sur le financement de notre économie que les Américains.

> L’Europe a surrégulé et elle a sous-investi. Pour autant, TotalEnergies est un groupe qui, lui-même, est en train de se décarboner. Il faut qu’il soit cohérent avec ses propres choix. Il est en passe de devenir un champion du renouvelable, du solaire. Il y aura des investisseurs européens sur cette politique, d’évidence. Ensuite, les Américains eux-mêmes, s’ils sont cohérents, vont durcir leur politique. Il appartient à M. Pouyanné de clarifier son agenda. Je ne peux pas croire qu’il s’éloigne de la France. Premièrement, parce que quiconque a vécu une cotation aux Etats-Unis sait que cette opération est dix fois plus compliquée qu’en France ou en Europe. Quand on observe les marchés sur lesquels opère le groupe, et qu’on connaît les risques de contentieux ­lorsqu’on est coté aux Etats-Unis, je pense que cela se regarde à deux fois. Géopolitiquement, ensuite, être une entreprise française est un avantage incomparable par rapport à une entreprise américaine qui va être prise dans la confrontation avec la Chine. En Afrique, au Proche-Orient ou au Moyen-Orient, être français a beaucoup d’atouts… La France accompagne ceux qui croient en la France, pas les autres. Je pense que Total n’a jamais eu à se plaindre d’être français quand il partait sur ses marchés à l’export. Les salariés de TotalEnergies sont attachés à la France. Je suis convaincu qu’ils marqueront cet attachement et clarifieront ce qui relève de la rumeur, et pas d’autre chose. (…)
La France, si on parle de cotation, est le deuxième marché du monde après les Etats-Unis, le deuxième ! C’est grâce à notre CAC 40. Parce qu’on s’est démené pour et qu’on a bénéficié du post-Brexit, en attirant de grandes banques. Nous avons une vraie profondeur de marché. Tous les acteurs financiers le savent. Je vais me battre dans les prochaines années pour qu’on ait beaucoup de nouvelles capitalisations, qui viendront s’installer dans le pays du fait de son attractivité, de sa politique indépendante et de sa géopolitique singulière. Nous avons une proposition de loi actuellement en discussion au Parlement pour renforcer l’attractivité de la place financière de Paris. C’est l’intérêt de TotalEnergies de rester en France.

> On ne peut pas dire qu’on est pour l’union des marchés de capitaux et l’union bancaire, et dire qu’on va faire, entre Européens, du protectionnisme. Une espèce de bulle médiatique s’est formée, elle est inappropriée. Jamais je n’ai parlé d’un cas spécifique, ce serait très malvenu. Jamais je n’ai nourri ni ne nourrirai quelque spéculation sur quelque groupe français que ce soit. Je parlais de manière générique. Si on dit qu’on est pour l’union bancaire et l’union des marchés de capitaux, on est pour que les acteurs européens s’organisent de manière optimale entre eux. Le reste, c’est la vie des affaires, ça ne me concerne pas. Moi, ce qui me concerne, c’est que le financement de notre économie par les banques et les acteurs de marché, quels qu’ils soient, soit optimum.

> Nous allons mettre en place un grand plan de mobilisation générale sur l’intelligence artificielle, nous donnant la capacité d’être la première place européenne dans ce domaine. Nous allons investir dans les outils et dans les compétences, avec une attention particulière à un accès équitable sur tout le territoire. Sur l’éducation, on va se coordonner avec les recommandations de la commission Ecrans. Il y a un apprentissage à faire, pour nous-mêmes et pour nos enfants. Apprendre à utiliser la technologie quand elle a le pouvoir de nous rendre plus libres, quand elle nous rend plus productifs. Mais aussi à reconnaître la qualité des différentes sources d’information et à poser un regard éclairé, scientifique sur l’information reçue. Apprendre à avoir une vie affective dans un monde qui doit d’abord être un monde humain, et pas d’emblée numérique. Parce que, au plus jeune âge, on n’a pas la capacité d’absorber tout ce que diffuse un écran. Progressivement, en s’ouvrant aux écrans à l’enfance, puis à l’adolescence, on en apprend les usages : coder, naviguer dans cet espace, distinguer les productions humaines de celles de l’IA. C’est la base d’un monde éthique qui permettra de vivre avec l’intelligence artificielle. Dans les prochains mois, nous allons poser un cadre sur le bon usage des écrans et de l’IA. En formant nos maîtres et en adaptant nos programmes à cela.

> Dans un monde idéal, nous aurions des acteurs numériques français ou européens, qui, à eux seuls, nous offriraient les capacités de calcul et de stockage dont nous avons besoin. Dans l’IA, la France est sans doute le pays d’Europe le plus en avance. Pourquoi ? Parce que nous avons des talents, plus que les autres, et des écosystèmes industriels, des start-up qu’on a su encourager, des dispositifs favorables à l’investissement public comme privé. C’est la force de l’école de mathématiques française, de nos data scientists et de ce que nous faisons depuis 2017 pour attirer et former des talents. Nous allons poursuivre. L’objectif ? Doubler les formations d’ici à 2030. Je peux ici vous annoncer que nous allons mettre 400 millions d’euros en plus de ce qui avait déjà été prévu par la stratégie IA de 2018 sur neuf pôles universitaires, de Saclay à Toulouse, en passant par Rennes, Nice et, évidemment, Paris, pour aller beaucoup plus loin, beaucoup plus fort. Voilà la voie pour la formation des talents universitaires.
Ensuite, et Mistral AI en est un parfait exemple, nous avons réussi à être en avance dans les modèles de langage et vu émerger de vrais champions. Si nos entreprises nouent des partenariats à l’international pour avoir une force de frappe mondiale et pour entraîner leurs modèles, c’est une bonne chose. La clé, c’est que l’on consolide un actionnariat européen et qu’on ancre ces partenariats en France. C’est tout le débat qu’on a justement, avec Mistral AI et avec les autres. Il faut conserver un écosystème, ce qui veut dire avoir les investisseurs français ou européens, et une profondeur de marché suffisante. Etre aidant, les accompagner, c’est ce que je ferai bientôt en détaillant les avancées de notre stratégie nationale pour l’intelligence artificielle. Pour autant, il ne faut pas être fermé à ce qu’il y ait des investisseurs américains, ou autres, surtout quand ces derniers leur permettent d’accéder à leur plateforme. L’investissement de Microsoft donne à Mistral une plus grande force de frappe et de capacité à se développer.
Le troisième point, c’est le cloud. Nous voulons un cloud européen, mais je pense que c’est une très bonne chose qu’on ait des acteurs comme Microsoft qui développent une offre de cloud "souverain" sécurisé avec Capgemini et Orange, le cloud Bleu. Il s’agit d’une excellente initiative, qui se fait en suivant nos règles. Elle apporte les capacités de stockage et le savoir-faire de Microsoft. L’intérêt de ce dernier se situe en termes de clientèle et de volume. Le nôtre, c’est d’aller vite et d’amorcer. On a un cadre réglementaire européen indépendant. Et ces modèles sont une étape décisive. Ensuite, nous continuons à appuyer le développement des acteurs totalement français ou européens.

> Sur les capacités de calcul, nous ne sommes pas au niveau, malgré nos investissements. En 2023, les Gafam ont acheté près de 400 000 puces GPU, contre quelques milliers en Europe. D’ici à 2035, il faut essayer de viser 20 % des achats mondiaux. Les capacités de calcul sont aujourd’hui dans la main de grands acteurs anglo-saxons. Les attirer chez nous pour permettre à notre écosystème de les utiliser, c’est une clé. Mais cela se fait selon nos règles, en partenariat. Si nous n’avons pas les capacités de calcul, nous perdrons les start-up, parce qu’elles iront entraîner leurs modèles ailleurs. Il faut avoir l’honnêteté de le dire : nous n’avons pas encore la profondeur de ­marché. En parallèle, on développe des solutions avec des fonds comme celui, par exemple, de MM. Niel, Saadé et Schmidt, qui va nous permettre d’avoir des capacités de calcul françaises. Et là, c’est de l’argent privé. La vérité, c’est que ce ne sont pas nous, acteurs publics, qui allons les développer.
L’IA nécessite une catégorie de semi-conducteurs plus avancés. Avec le Chips Act européen, nous nous sommes concentrés en 2022 sur les semi-conducteurs dont on avait besoin dans les télécoms, l’automobile, etc. La France avait d’ailleurs une vraie force industrielle, dans le bassin de Crolles, avec STMicroelectronics et Soitec. On l’a renforcée, notamment grâce aux Piiec [projets importants d’intérêt européen commun] et grâce au deal avec la société américaine GlobalFoundries à la sortie du Covid. Mais, aujourd’hui, en Europe, nous n’avons pas d’acteurs d’envergure dans les puces sophistiquées de l’IA. Ce sont les Taïwanais et les Américains qui mènent le bal. Notre objectif est d’avoir une sorte de consortium européen pour sécuriser et acheter ces puces sans dépenser trop d’argent dans une concurrence interne. De premiers pas ont été faits vers Intel, avec l’Allemagne, l’Italie et nous. Ces actions doivent encore montrer leurs résultats. Plusieurs fabricants taïwanais étaient présents à Choose France pour échanger sur la production en France de puces sophistiquées. L’hyperdépendance à quelques acteurs est un énorme problème.
Le dernier point, c’est l’énergie. Aujourd’hui, dans l’IA, le goulot d’étranglement, ce sont les capacités de calcul et les puces. Mais, dès demain, ce sera leur financement, parce que les centres de données sont extrêmement gourmands en énergie. Celle-ci doit être compétitive et bas carbone. Et là, la France dispose dans ce domaine d’un formidable avantage : le nucléaire.

> L’Europe a pour priorité les droits de ses citoyens et ce n’est pas négociable. Réguler, oui. Et il faut le faire fortement. Mais réguler de manière neutre à l’égard des acteurs et de leur nationalité, comme nous avons commencé à le faire, en Européens, avec le DMA [Digital Markets Act] et le DSA [Digital Services Act], le premier sur le fonctionnement des acteurs d’un point de vue économique, le second sur le fonctionnement des plateformes du point de vue des contenus. Mais nous n’envisagerions pas de discriminer un acteur en raison de sa nationalité. L’approche est la bonne. Ces régulations permettent aujourd’hui d’appeler les plateformes à leurs responsabilités, de les sanctionner si elles font de l’ingérence, manipulent l’information ou relaient des informations manipulées. Avec le DSA, nous avons un levier très fort.
La question fondamentale au cas ­d’espèce est celle de la protection de nos enfants, tous réseaux confondus. Est-ce que les algorithmes qui poussent les jeunes à passer de plus en plus de temps sur les écrans sont optimaux pour nos ­adolescents ? La réponse est non. Et la même question se pose pour les réseaux sociaux lorsqu’ils génèrent des sentiments de mal-être chez de jeunes filles ou garçons. C’est tout le travail qu’on mène, en plus du DMA et du DSA, avec la commission Ecrans: identifier le bon usage des écrans et des réseaux sociaux pour les enfants et les adolescents.
Je pense que la bonne réponse n’est pas de cibler une plateforme ou un acteur. Il faut construire un bon usage, un ordre public commun. Il en va aussi de notre crédibilité d’Européens, comme place économique stable. Nous, on ne pointe pas du doigt tel ou tel acteur parce qu’il est de telle ou telle nationalité. En revanche, nous défendrons toujours la sécurité de nos enfants, de nos adolescents, de notre démocratie, notre sécurité économique et notre sécurité nationale, quand elles seront en jeu. Mais sans discrimination.

> [Discours en clôture du rassemblement des plus grands talents français de l’IA]
Je tiens à remercier tous nos amis. Merci d'être là quelques jours après le sommet Choose France, quelques jours avant les Jeux Olympiques. Ça démontre votre engagement à la France d'être là, à l'occasion de VivaTech. Je suis heureux de pouvoir vous réunir ici. On vole un peu le départ de VivaTech, qui est un événement auquel nous tenons beaucoup et qui est un succès de ces dernières années, pour vous réunir et dire d'abord toute la fierté, en tout cas, qui est la mienne de vous avoir ici comme talents de l'intelligence artificielle française, européenne et mondiale et puis comme partenaires de cet écosystème français, que vous soyez décideurs publics, investisseurs ou dirigeants de grandes entreprises venant du continent asiatique ou américain. Ces réussites sont importantes pour évidemment le pays, pour le monde et, je crois, beaucoup des sujets qui sont au cœur de nos agendas.
Qu'on parle de santé, d'éducation, de transformation de notre efficacité publique, qu'on parle de climat, ce que l'IA va permettre de faire, permet déjà de faire, est évidemment une révolution fondamentale. Je le dis dans un moment, j'ai eu l'occasion de m'exprimer il y a quelques semaines en parlant de notre Europe, je pense que pour la France et l'Europe, réussir à former, aider à se développer, garder, attirer des talents de l'IA est une bataille absolument essentielle et, je dirais même plus, existentielle pour nous.
D'abord parce que quand on regarde les choses, notre capacité à relever les défis mondiaux, à apporter des solutions à nos compatriotes et aux générations à venir dépend aussi de notre capacité à créer de la richesse. Et quand on regarde les trois dernières décennies, la richesse créée, la valeur ajoutée créée par habitant est deux fois inférieure en Europe par rapport aux US. La principale raison, c'est que les US réussissent à innover beaucoup plus vite, plus fort. Ils ont investi beaucoup plus et ont davantage diffusé cette innovation au reste de l'économie. Je crois que cette bataille de l'IA aujourd'hui, cette compétition est absolument clé à cet égard, parce qu'elle est celle qui nous permettra de justement bousculer les choses.
Ensuite, elle est au cœur de la bataille, évidemment, du travail, on y reviendra, de l'emploi, de la productivité et donc de l'avenir de notre continent. Alors, à ce titre, vous réunir aujourd'hui, ce n'était pas simplement vous dire l'admiration que j'ai pour vous et de vous dire merci d'avoir déjà fait tout ce que vous avez fait, qu'on va continuer. Mais c'était au fond de vous dire comment je voyais ensemble notre capacité à aller un cran plus loin et bâtir justement un modèle français européen pour avancer.
D'abord, tout ça s'appuie sur des résultats qu'on a. Ces dernières années, on a réussi à avoir une politique d'innovation, d'attractivité qui a amélioré nos résultats. On a recommencé à converger, en particulier avec l'Allemagne et nos compétiteurs.
Dans nos universités en investissant davantage, en renforçant les logiques de sites, en poursuivant les rapprochements aussi avec le monde industriel, dans notre recherche, avec une loi de programmation qui a consacré un effort de financement sans précédent et un plan IA dès 2018, qui est arrivé très tôt parmi les générations d'IA, dès la réforme qu'on a lancée il y a maintenant quelques mois pour aller vers des vraies agences de programmes en renforçant l'autonomie des universités, avec aussi un très gros programme de simplification de la vie des chercheurs, qui était demandé par plusieurs chercheurs experts présents dans cette salle.
Avec un écosystème de start-ups qui a été profondément transformé par la FrenchTech, par Bpifrance, par l'ensemble des fonds Business Angels et tous les fonds de croissance aux différentes étapes qu'on a mises en place. C'est assez simple : en dix ans, on a multiplié par dix, ce qui nous met aujourd'hui en leadership européen avec France 2030, cher Bruno, qui, en deux ans et demi, a déjà engagé plus de 30 milliards d'euros pour financer les innovations de rupture, en plus de toutes nos politiques sectorielles. Et puis des initiatives pour mieux mobiliser le financement privé, comme les fonds Tibi 1 et 2 qui ont permis de rediriger une partie de l'argent des investisseurs et des investisseurs institutionnels vers l'innovation, la prise de risque.
Et puis, avec tout ça, on a mis en place une politique fiscale beaucoup plus attractive, qui est stable depuis 7 ans, avec 30 milliards de baisses d'impôts pour les entreprises, le maintien du crédit impôt recherche, une flat tax sur les gains en capitaux, des mécanismes pour que les salariés bénéficient de la valeur créée, amélioration des systèmes de BPCE et autres. Ce qui vraiment peut faire dire, certains étaient en avance de phase, que la France est un paradis pour les créateurs de start-ups et les investisseurs dans les start-ups.
On a continué à moderniser aussi le marché du travail avec des ordonnances, une simplification des règles, un nouveau système qui est concerté en ce moment sur le marché de l'assurance chômage. Puis France Travail, qui est aussi important pour requalifier, et pour attirer les talents étrangers avec ce système FrenchTech Visa qui est, je crois pouvoir le dire, une vraie révolution là aussi en termes d'attractivité et qui est venu compléter tout un tas de réforme. Je ne veux pas être trop long, mais celle de l'apprentissage, celle qu'on est en train de faire du lycée pro, du premier cycle universitaire, etc.
Donc, il y a une cohérence d'une politique macroéconomique sectorielle sur le marché du travail en termes de fiscalité, en termes d'investissement, qui nous a permis véritablement d'être le pays, depuis 5 ans, le plus attractif d'Europe et le plus dynamique en termes de création de start-ups et de financement de la croissance de nos start-ups dans tous les secteurs. Ça a été complété, je le disais, par une stratégie nationale pour l'IA qui a été lancée dès la fin 2017, qui a permis de structurer l'écosystème de recherche national avec l'INRIA, la création de 3 instituts de recherche de pointe en IA, les 3IA, l'arrivée du supercalculateur Jean Zay.
Puis ensuite, on a ciblé la diffusion de l'IA au sein de l'économie en faveur d'une IA frugale et de confiance. Cette stratégie a porté des fruits avec les premières grandes réussites françaises en la matière, avec plusieurs laboratoires de référence installés à Paris, Méta, figure iconique, Alphabet, Cisco, Criteo, DeepMind, Uber et merci à Xavier Niel, Eric Schmidt et Rodolphe Saadé, qui va travailler à l'élaboration de nouveaux modèles de pointe, et puis beaucoup de start-ups qui se sont créées, qui se sont développées, y compris jusqu'à ces derniers mois.
Les résultats se sont accélérés ces 18 derniers mois. Plus de 600 start-ups françaises sont aujourd'hui spécialisées en IA. Nous annonçons dans les jours à venir la liste de 120 start-ups les plus prometteuses en France et plus de la moitié ont une activité dans l'IA. Le monde entier connaît désormais Mistral et demain H, ce qui est aussi un choix qui n'était pas évident il y a encore quelques mois et qui montre que cette révolution se poursuit. Donc, très clairement, la capitale des Lumières est en train de devenir une capitale de l'intelligence artificielle.
On a mis en place, pour accompagner ce travail et aller plus loin, une commission pour l'IA, justement, la Commission de l'intelligence artificielle avec des personnalités du monde académique, du monde de l'entreprise, de tous les secteurs compétents, permettant aussi de penser les usages, etc. Ils nous ont aidés à penser cette révolution technologique et, au fond, ce changement de paradigme qui bouscule en effet notre éducation, notre démocratie, notre administration et tous les secteurs, et essayer de bâtir au fond un même système, si je puis m'exprimer ainsi, de langage, de compréhension, de diffusion. Les travaux inédits de Philippe Aghion indiquent notamment que l'impact de la diffusion de l'IA dans l'économie française pourrait être massif, avec une croissance économique qui pourrait doubler, plus un point par an grâce à l'IA, une hausse du PIB qui doublerait en 10 ans notre industrie et donc des vrais leviers de transformation, très puissants sur le plan économique et de sa diffusion.
Mais très clairement, nous sommes à un moment de rupture très profonde parce que c'est aujourd'hui que le virage est pris ou pas, à la bonne vitesse ou pas. C'est pour ça que la rencontre d'aujourd'hui, tous les travaux que vous avez eus, et tout ce qu'on va faire d'ici au Sommet que la France va accueillir en février prochain est très important.
Au fond, la question qui est posée à la France, à l'Europe, c'est est-ce qu'on décide les investissements, la politique d'accompagnement qui nous permet de revenir complètement dans la compétition internationale et d'être en leadership ? Est-ce que si on se met en situation de penser cette transformation et ce nouveau paradigme avec la bonne exigence ? Parce que je pense que c'est une nécessité de le penser pour ensuite avoir la conversation internationale adaptée et du coup, les transformations qui vont bien et la régulation à la bonne échelle, c’est-à-dire, à mes yeux, mondiale qui va bien.
Donc c'est véritablement un moment de réveil stratégique que nous vivons, qui suppose des choix profonds en termes de recherche, de formation, d'investissement business, mais également de régulation et de diplomatie. C’est cet ensemble sur lequel nous devons avancer. Au fond, c'est autour de ça que je veux axer mon propos et c'est une approche française et européenne, je dirais, de manière native. La bataille pour moi, elle se fera autour de 5 grands domaines : les talents, les infrastructures, les usages, l'investissement et la gouvernance. C'est, au fond, autour de ça qu'il faut qu'on réussisse à prendre les bons virages.
Alors d'abord, les talents. Si la France veut rester une très grande puissance de l'IA au niveau européen, sans doute avec les Britanniques, mais aller encore plus loin, la question des talents est clé. Tous ceux qui sont ici dans des groupes asiatiques ou américains le savent, ô combien, eux qui recrutent tant de talents européens et en particulier français. Je dirais qu'on a une chance de départ, on est plutôt bons dans les disciplines nécessaires pour l'IA. Les très grands mathématiciens data scientist sont des ressources rares, très prisées. La France en forme beaucoup est de très bonne qualité. Bon, il y a une chose qui est sûre, vous êtes nombreux ce soir et on peut souhaiter, à horizon de 10 ans, que vous soyez plus nombreuses.
Mais je dirais qu'en termes de talent, l'un des enjeux qu'on a est clairement de favoriser et d'encourager l'accès des jeunes femmes aux filières du numérique et à tous les métiers qui sont au cœur de l'IA. Le programme TechPourToutes annoncé l'année dernière à VivaTech, est à cet égard un élément clé pour accompagner 10 000 étudiantes d'ici 2027. Mais c'est un travail sur lequel j'ai besoin de vous toutes et vous tous. C'est que très souvent, c'est un problème d'autocensure chez les très jeunes filles, puis après, c'est un problème d'orientation et ensuite c’est un problème d'opportunité. Il faut qu'on règle à chaque étape ça. Et donc je sais qu'il y en a beaucoup qui ne sont pas à convaincre, qui se sont désengagés depuis longtemps. Donc pour moi, c'est une priorité et on doit aller beaucoup plus loin.
Au-delà de cette féminisation qui est juste de se dire 1) ce n'est pas juste, 2) ce n'est pas représentatif, 3) ce n'est pas efficace parce qu'en fait on n'utilise pas juste la moitié de la ressource humaine et du capital d'intelligence de notre société, c'est idiot, avant d'aller chercher des capacités de calcul ailleurs.
Ensuite, quand je regarde les talents, on a une offre de formation qui est trop limitée, sans doute déséquilibrée, avec un monde de techniciens de la donnée et peu ou moins insuffisamment pluridisciplinaire. Donc c'est pour relever ces défis que nous souhaitons avancer avec nos universités, nos écoles, pouvoir former encore plus massivement à l'IA. Ce donc que nous puissions travailler à faire en sorte, suivant d'ailleurs les recommandations de la Commission précitée, on priorise les formations de l'enseignement supérieur à la technologie, l'IA et ses applications puissent être justement enseignées massivement. Très concrètement, ça impose d'utiliser au maximum les nouveaux leviers de contractualisation que nous sommes en train de mettre en place dans le cadre de la réforme de nos universités. Et c'est tout ce que j'annonçais il y a quelques mois, ici même, qu'on est en train de mettre en place et qui sera parachevé d'ici un an.
Je souhaite aussi que chacun des dirigeants d'organisme de recherche, plusieurs sont présents ici, sous l'égide de l'INRIA dans son rôle d'agence de programmes, me propose avant la fin de l'année avec une stratégie d'ici à 2030, des évolutions structurantes et un renforcement concret de la recherche interdisciplinaire s'appuyant sur l'IA. Tous ces domaines doivent accélérer avec l'IA, recruter davantage et faire entrer l'IA dans leur recherche et donc créer plus d'interdisciplinarité intégrant l'IA.
Alors pour accompagner ce mouvement, l'Etat via France 2030 va investir, en plus de ce qui est déjà prévu dans notre stratégie, 400 millions d'euros dans les 9 IA clusters, donc les 9 sites universitaires et de recherche que nous avons. Donc je veux ici féliciter ces 9 IA clusters qui sont confortés dans ce rôle. Concrètement, l'objectif, c'est de faire un peu plus que doubler le nombre de talents en IA que nous allons former. Aujourd'hui, on forme à peu près 40 000 personnes par an. L'objectif, c'est de passer à 100 000 par an, dont 20 000 en formation continue. Ces centres d'excellence de Rennes à Saclay, de Grenoble à Toulouse et 5 autres qui devront s'organiser pour faire émerger une recherche interdisciplinaire, auront ce travail. Et donc on va vraiment faire un gros effort de formation supplémentaire. Là, je compte sur tous les acteurs de l'écosystème pour donner de la visibilité, aider et donner de la visibilité pour la suite.
Ils devront assumer, tous ces sites, des priorités sectorielles de la santé au quantique, s'organiser pour aussi attirer des talents internationaux. En particulier, c'est pour cela que nous allons faire venir les meilleurs et nous lancerons en complément un nouveau programme de chaire à la main de chaque cluster pour inciter les talents déjà reconnus, les meilleurs enseignants, les meilleurs entrepreneurs aussi, qui accepteraient de se remettre à l'enseignement, les attirer, leur permettre d'avoir des semestres ou des années d'enseignement sur ces 9 IA clusters en France. Tout ça doit aller très vite.
En parallèle, on va privilégier aussi ces sites sur l'application des simplifications pour les chercheurs, avec des systèmes de gestionnaire unique, la suppression de la paperasse inutile, la simplification des autorisations de cumul d'activité, l'accélération, l'harmonisation des procédures de financement et la priorisation à l'ANR des sujets IA. Autant d'exemples où en fait, on va appliquer ce qu'on a décidé au cœur de notre stratégie de réforme de la recherche et de la recherche universitaire. Mais on va l'appliquer, si je puis dire, en avance de phase sur tout ce qui touche à l'IA. Pourquoi ? Parce que là, la course de vitesse est encore plus forte et justifie ces mesures de simplification drastiques. Ça, c'est le premier pilier de la stratégie des talents.
Le deuxième, c'est de sécuriser la puissance de calcul et les infrastructures. Là-dessus, on a énormément de défis. Ce n'est pas à vous que je vais le dire. En même temps, si on regarde les choses de manière assez objective, on a des avantages qui sont insuffisamment exploités. Là aussi, je m'explique. Quand on regarde les choses, on a un vrai avantage. Quand on regarde, je parle sous le contrôle des experts que vous êtes, les goulets d'étranglement, très rapidement, ça va être l'énergie bas-carbone, pilotable, en grande quantité. Un pays qui fournit son électricité à 75 % avec du nucléaire, qui sait donner de la visibilité sur une stratégie de production de nouveau nucléaire et de renouvelable, c'est un pays qui a l'énergie parmi la plus décarbonée d'Europe, mais c'est le pays qui a l'énergie la plus décarbonée et la plus pilotable d'Europe, by far. En plus, nous avons décidé de creuser cet avantage parce qu'on aura totalement sorti le thermique de notre stratégie, de notre mix en 2027 et qu'on va massivement augmenter et le renouvelable et donc le nucléaire. Nous avons la capacité, nous, d'accueillir de nouveaux datas centers, de développer les data centers existants et donc d'avoir aussi des capacités de calcul supplémentaires. Ça, je crois, et je le dis pour vous tous, c'est quelque chose qu'il faut — Pardon de cet anglicisme à nouveau — mais pitcher pour la place française et ce sur quoi on mobilise les efforts européens.
Parce que ce qui est en train de devenir le goulet d'étranglement mondial en développement de l'IA, c'est un énorme avantage comparatif de la France. C'est quelque chose qu'en avance de phase, on a un peu pris, la stratégie de Belfort, on l'a lancée en 2022 et je me réserve d'ici à la fin de l'année sur les nouvelles tranches de réacteur qu'on va annoncer de prendre en compte d'ailleurs la nécessité d'aller encore plus loin sur de la production. À côté de ça, on a aujourd'hui un retard en Européens, c'est les capacités de calcul. Je faisais cocorico tout à l'heure en parlant et je les défends nos supercalculateurs, on en défend un nouveau. On aura, au-delà de Jean Zay, annoncée l'année dernière, nous accueillerons le deuxième supercalculateur Exascale EuroHPC qui est le fruit d'un co-investissement européen. Merci Thierry, merci la Commission et français à hauteur de 540 millions d'euros. Donc, on va mettre une deuxième étape. Ça, c'est très important. Et donc on va avoir des capacités publiques fortes, mais elles sont très loin, si on est lucide, des capacités de calcul à l'international. Je veux dire, aussi vrai que je défends la place française, que je nous défends tous, je ne serais pas crédible une seule seconde si je vous disais qu’on est au bon étiage sur ce sujet. On a aujourd’hui 3 % des GPU mondiales déployés, ce n’est pas du tout — au niveau européen — ce n'est pas du tout à la maille de ce qu'on doit faire.
Et donc, pour moi, la course maintenant de vitesse, c'est la capacité à faire plus. Comment ? 1) Avec les infrastructures publiques et ouvertes, celles que j'évoquais, 2) En attirant des grands investisseurs qui peuvent le faire et qui vont nous mettre des capacités de calcul avec des règles d'ouverture à la place, c'est ce qu'on a fait avec Microsoft. On peut aimer ou pas aimer, mais ça nous fait 25 000 CPU. C'est quasiment l'objectif que nous avait fixé la commission pour cette année qui était de 30 000. C'est beaucoup mieux que ce qu'on a aujourd'hui. Puis, 3) Continuer d'avoir une approche avec tous les écosystèmes, et c'est là où les initiatives type Kyutai ou autres vont nous permettre, j'espère, d'aller plus loin, c'est que l'écosystème décide d'en bâtir encore davantage et qu'on monte très vite à l'échelle.
L'objectif que j'essaie de nous fixer en européen, c'est de dire qu'on doit passer d'ici à 2030-2035 à 20 % des GPU mondiaux. C'est faisable, mais c'est une mobilisation public-privé des acteurs européens et de notre capacité d'attractivité pour augmenter, justement, là-dessus. Je pense qu'on peut d'autant plus le faire que nous avons un écosystème d'utilisateurs très fort, vous, et qu'on a des infrastructures d'énergie avec des vrais avantages que j'évoquais. Maintenant, en termes d'infrastructures, on va concentrer l'effort sur la montée en charge de nos GPU et là aussi, comme toujours, en veillant à ce que ce soit au maximum en architecture ouverte et à ce qu'il y ait le moins de biais possible pour l'écosystème pour qu'on puisse permettre à tous et toutes de les utiliser. Mais on a besoin donc de continuer, comme on l'a fait à Choose France la semaine dernière, d'avoir des Amazon, des Microsoft, des Equinix qui investissent en France pour nous aider à monter en la matière et avoir encore plus de coopération internationale.
Le dernier point là-dessus, ce sont les semi-conducteurs. Et là aussi, je vous le dis, je suis tout à fait à votre disposition pour bâtir des stratégies de partenariat avec les acteurs de la place. On a eu une stratégie sur les semi-conducteurs beaucoup plus utilisée dans les télécommunications et l'automobile, sur laquelle on avait une base installée STM, Soitech, qu'on a massivement développée grâce à ce qu'on a fait en franco-allemand et avec la Commission européenne, où on a développé plus de capacités, bâti des nouvelles coopérations avec GlobalFoundries. Mais ce n'est pas le bon niveau, on le sait bien, de semi-conducteurs dont on a besoin pour développer l'IA. Là-dessus, l'Europe est très dépendante d'offres aujourd'hui américaines et asiatiques. Et donc, on a besoin d'attirer ces investissements. Quand on regarde les stratégies qui sont à l'œuvre, ce qui marche très bien, c'est des stratégies dont on a des pays, des acteurs de l'IA, LLM et autres, et des fournisseurs de semi-conducteurs pertinents. On est en train d'avoir des discussions avec plusieurs acteurs américains, taïwanais et autres.
Moi, je suis disponible pour la place, et mes équipes le sont avec les ministres, pour qu'on puisse bâtir des stratégies pertinentes. En tout cas, notre volonté dans les 12-18 mois qui viennent, c'est de finaliser des opérations pour produire en France et en Europe les semi-conducteurs pertinents pour développer l'IA. Et là, c'est vraiment un des éléments de dépendance que nous avons en termes d'infrastructures aujourd'hui.
Dernier point là-dessus, ce sont les modèles originaux de LLM. Quand on regarde donc les choses, le développement des modèles, donc je le disais, nous avons déjà des champions, je les ai évoqués, Mistral, H. Nous devons là aussi accélérer. Et je veux là aussi que nous franchissions un cap en matière de développement de modèles, et en particulier de modèles open-source. Ils sont une force sur laquelle plusieurs sont ici engagés. Mais c'est un enjeu d'autant plus important que seule la présence de champions français sera à même de véritablement intégrer la force de notre écosystème, d'éviter aussi des biais supplémentaires, d'intégrer aussi les subtilités de notre culture, de notre langue, y compris dans ces variétés francophones. Et là-dessus, nous devons être à l'initiative, et c'est un modèle que nous portons et sur lequel nous avons besoin de tenir et d'avancer.
Troisième élément, je l’évoquais : c'est le financement. Financer notre écosystème et les acteurs de la Deep Tech en IA est absolument nécessaire. Et donc, en la matière, nous avons besoin là aussi de faire de nouveaux efforts. Cet investissement massif dans l'intelligence artificielle exige des moyens considérables. On a commencé, mais il y a évidemment, comme toujours, la partie publique et la partie privée. Il y a les politiques de recherche qu'on a évoquées ; France 2030, qui consacre déjà 2 milliards d'euros en plus de ce qu'il y a dans les politiques publiques par ailleurs, et cette part a vocation à doubler avant la fin du programme - donc, l'objectif de France 2030, c'est au moins 4 milliards sur l'IA, au-delà des transdisciplinaires et de l'interdisciplinaire. Mais le cœur de la bataille, c'est de le compléter ensuite par beaucoup plus de financements européens et des financements privés.
Financements européens, je le dis d'un mot - je ne veux pas ici reprendre ce que je disais à la Sorbonne il y a quelques jours : quand on regarde le sujet climat et IA quantique, l'Europe est le continent qui régule le mieux et le plus — donc super, je pense qu'on est à maturité ; il faut mettre en œuvre — mais on est celui qui investit le moins. Ce n'est pas un business model qui peut tenir longtemps ; ça ne peut pas tenir. Et donc, il en est des clean tech comme de l'IA et du quantique. Moi, je pense que c'est une chance d'avoir régulé ; on a donné une guidance au marché, tous les éléments sont là, les rendez-vous. Je ne suis pas pour déréguler ou lâcher le green deal, je vous le dis en toute sincérité, je suis pour le mettre en œuvre avec les bonnes flexibilités. Mais là où on est en retard, c'est qu'on investit beaucoup moins d'argent public au niveau agrégé, c'est-à-dire au niveau européen, sur la transition climatique et sur l'IA et le quantique. Et quand on regarde les choses, pour faire face à ces deux défis, plus le défi sécuritaire qui est le nôtre, il faut doubler le budget européen. Le quantum est assez simple. Et en plus, ce n'est pas du tout impossible parce que c'est exactement ce qu'on a fait face au Covid. Donc, face à un choc externe symétrique, une pandémie, on a su le faire, c'était le plan de relance qu'on a fait en deux mois face au Covid. Il faut juste qu'il y ait un réveil collectif des Européens. Ce qu'on vit, c'est un choc ; c'est un choc technologique hyper accéléré. Et sur les clean tech, l'IA et le quantique, si ce choc technologique, on n'y répond pas par la bonne stratégie d'investissement publique, les facteurs iront s'allouer ailleurs et on sera dépendant de solutions qui iront se déployer en Chine ou aux US. Donc, je pense que c'est un réveil essentiel que d'avoir une stratégie d'investissement européenne qui soit à la bonne échelle.
Et puis, il y a évidemment l'investissement privé, et ceci en France comme en Europe. En France, je disais, on a eu les stratégies des fonds Tibi qu'on a européennisés avec Scale-Up Europe. Et au fond, c'est quoi ? C'est simple : c'est de se dire notre système ne marche pas parce que les règles qu'on impose aux investisseurs institutionnels - que je propose de changer dans la prochaine mandature de la Commission - Solvency et Bâle, elles les détournent de l'investissement en equity, ce qui est absurde. Or, nous, 75 % du financement de nos économies, ce sont les banques et les assurances, et ce qui va avec. Et donc, les fonds Tibi, on a diverti une partie de cet argent avec un mécanisme tout à fait légal, et on a permis de l'injecter. On a environ réinjecté 30 milliards d'euros d'investissement et co-investissement dans l'innovation allant de la santé, Deep Tech et autres. Là, on doit accélérer sur Tibi 2. Tibi 2, on était parti avec un objectif de 10 ; on est à 7 — 7 objectifs confirmés — on n'est qu'à 2,5. Je le dis parce que je ne peux pas dire qu'on doit aller très vite ; on n'est pas au bon rythme et je le dis pour tous les investisseurs institutionnels qui sont dans Tibi 2, je compte sur vous, on n'est pas au bon rythme pour la place française et européenne. Ça doit aller beaucoup plus vite et beaucoup plus fort : on doit d'abord passer de 7 à 10 en commitments, mais on doit surtout aller beaucoup plus vite sur les investissements à faire. Et je le dis alors que je sais que beaucoup d'entre vous sortent d'une période difficile où c'est beaucoup plus compliqué aujourd'hui qu'il y a deux ans de lever des tickets et des tickets au bon niveau.
En complément de Tibi 2, on a un enjeu, on le sait, du financement late stage, essentiel, surtout dans le domaine de l'IA, où les valorisations sont de plus en plus élevées. Et nos acteurs privés là-dessus doivent être en mesure de les accompagner. C'est pourquoi, en plus de Tibi 2, ce que je voulais vous annoncer aujourd'hui, c'est que nous allons lancer un nouveau fonds de fonds très significatif - donc là, c'est bien un fonds de fonds, ce n'est pas un fonds primaire - souscrit à environ 1/4 par l'Etat en se concentrant sur les secteurs les moins bien financés et les plus technologiques liés à l'IA, des puces au cloud en passant par les LLM. Et donc, ce fonds, l'Etat mettra une base de départ : l'engagement, c'est qu'on met au moins ¼ mais l'objectif, c'est que la place puisse le compléter. Mon objectif, c'est qu'on puisse aussi réussir à l'européaniser : c'est pourquoi je proposerai à nos partenaires allemands de se joindre et d'essayer d'en faire au moins un fonds franco-allemand, voire européen. Mais à tout le moins, on ne va pas tarder, on lance dès maintenant en franco-français ce fonds, ce fonds de fonds très significatif sur l'IA. Et un peu comme on l'a fait sur les métaux, les entreprises françaises, voire européennes les plus concernées, pourraient rejoindre cette initiative, en tout cas, je les y invite. Et l'objectif est d'avoir engagé cette dynamique et commencé vraiment les travaux très concrets d'ici à la fin de l'année.
Après, il y a en effet au niveau européen, et l'Europe est au fond le niveau le plus pertinent sur tous ces sujets, on a besoin de ce choc d'investissement aussi privé - public, je l'évoquais avec le budget - et là, le cœur de la bataille, c'est évidemment d'avoir cette union des marchés de capitaux et d'avoir des fonds qui structurent au niveau européen avec la transformation qu’on est en train de faire. Et là, c’est un de mes objectifs pour le Conseil des ministres franco-allemand de la fin du mois, c’est d’avoir une vraie stratégie franco-allemande qui, enfin, bouscule les choses sur l’union des marchés de capitaux et qu’on propose ensemble, eh bien, d’approfondir justement ce marché. Cette union de l’épargne et de l'investissement, c'est la clé ; c'est celle qui va permettre d'avoir des acteurs de taille pertinente en termes de financement de vos entreprises. Et donc, ça veut dire : supervision unique, des systèmes de faillites uniques, une convergence des systèmes fiscaux - et c'est tout le travail que je veux qu'on accélère dans les prochains mois. C'est aussi au niveau européen que nous serons à même de préserver notre diversité, là aussi, linguistique et culturelle, ce qui est l'objet de mise en œuvre de l'Alliance européenne pour les technologies des langues, coordonnée par la France, et que je soutiens là aussi, pour permettre l'émergence des modèles de langues vivantes qui intègrent notre corpus culturel. Ça, c'est en termes d'investissement, c'est une bataille absolument essentielle.
Et puis, enfin, je le disais, le quatrième élément, c'est l'appropriation collective de l'IA, les usages, qui est au moins aussi essentielle. Pourquoi ? Parce qu'au fond, c'est notre capacité à diffuser l'IA dans le reste de l'économie et je le dis avec beaucoup d'ambition, sans fausse naïveté, mais en sachant d'où je parle. Et là, il faut qu'on soit lucide sur nous-mêmes. La France a plus désindustrialisé et moins réussi que d'autres pays il y a 30 ans parce qu'elle a mal emmanché le débat public et le débat des usages sur les robots. Rappelez-vous, il y a 30 ans, dans notre pays, on avait exactement le même débat sur le travail qu'on a aujourd'hui sur l'IA avec le robot. Il y a plein de gens qui me disaient : « Ça va être l'horreur, terrible, affreux, c'est déshumanisant, ça va mettre tout le travail en l'air ». Il y a eu un échec de la diffusion et des usages. Ce qui fait que le résultat, ce n'est pas tellement qu'on a préservé les emplois, c'est qu'on les a supprimés plus vite que les voisins. Parce que tous ceux qui ont robotisé leur économie, parce que ça a été bien intégré, que l'usage a été pensé, ont eu une robotisation au service d'un usage industriel, a permis d'enlever des tâches pénibles mais a maintenu, dans nos pays à coût du travail élevé, de l'emploi industriel - là où nous, nos entreprises, du coup, on était beaucoup plus vite sur des délocalisations vers les pays à bas coût. Ça a été une mauvaise stratégie et c'est une mauvaise stratégie qui s'est faite par des erreurs de choix de politique industrielle, mais au fond aussi un débat collectif qui s'est mal engagé, une forme de défiance de la société à l'égard de l'innovation.
Et il est absolument clé que, aujourd'hui, on ne laisse pas s'engager de cette même manière le débat. Et pour moi, c'est très important parce que ça veut dire que vous qui êtes par définition l'avant-garde, la pointe avancée, j'ai aussi besoin de vous pour que vous nous aidiez à ce que, en quelque sorte, tous les bons débats se fassent au sein de la société de la manière la plus inclusive, la plus partagée, pour ne pas que ce soit des fake news ou des complotistes qui emportent le débat ou le structurent, mais aussi pour qu'on resynchronise les choses à chaque fois que c'est nécessaire. Et on a besoin de l'innovation, de rupture de pointe pour continuer d'être les meilleurs, d'avoir des champions. Mais si on veut bien diffuser l'IA et en tirer tous les bénéfices, eh bien, il faut un bon usage partagé, et donc il faut en quelque sorte un modèle d'IA ouvert, équitable, transparent, ce qui est d'ailleurs proposé par la Commission dans ses recommandations et ce que je souhaite qu'on mette en place.
Pour ce faire, on va d'abord défendre un principe d'accès équitable et massif à l'IA sur tout notre territoire. C'est pourquoi je vais confier au Conseil national du numérique, Virgile, une mission d'acculturation des citoyens à l'IA. Vous y avez beaucoup travaillé - on en a parlé au moment de la restitution des travaux de la commission IA - au travers de l'organisation de cafés IA, de débats démocratiques, de partage de ressources pédagogiques partout sur le territoire. Et là, je souhaite qu’il y ait vraiment une forme de grand débat généralisé qui se mette en place et que vous aurez à structurer et j'appelle tous les réseaux déconcentrés à mettre en place des actions de sensibilisation locales, de valorisation des solutions IA et nous donnerons à ces réseaux les moyens de le faire avec un investissement spécifique en la matière. Et là-dessus, je le dis aussi très clairement, tous les élus qui sont là ont un rôle très particulier à jouer - parlementaires, élus locaux - en la matière parce que ça doit se faire au contact des territoires et de tous ces écosystèmes.
Ensuite, l'appropriation collective de l'IA passe également évidemment par l'école et je souhaite que nous puissions proposer des formations dès la sixième, des tests d'évaluation des compétences numériques qui soient agrémentées d'une brique IA. La plateforme PIX pourra être un de ces outils et en cohérence avec les recommandations de la commission d'experts sur l'impact des écrans sur les enfants, qui vient en parallèle de votre commission. Il s'agit de donner aux élèves les conditions d'une appropriation éclairée de l'IA. Mais on a là aussi à accompagner nos enseignants, les élèves et les familles dans un bon usage des écrans, mais également une capacité à former à l'IA. Ils doivent prendre conscience des enjeux d'éthique, de rapport à la vérité, du caractère aussi potentiellement enfermant de certains algorithmes pour qu'ils soient libres de se servir de cette technologie en ayant conscience de ses limites. L'école doit être le lieu de l'autonomisation. C'est aussi le choix d'un modèle - je reviendrai sur la régulation - mais sauf à tout fermer ou avoir des systèmes de contrôle étatique complets - ce qui est le choix de certains autres - nos démocraties ne pourront pas tout contrôler en totalité. Et donc, la bataille de l'éducation et de l'information, elle est absolument clé, si on veut une IA éthique, transparente, ouverte, loyale. Parce qu'en fait, chaque citoyen doit être bien formé pour pouvoir être un acteur et pas simplement un consommateur et pouvoir aider à réguler.
Après l'école, ce sera le lieu de travail. La massification de la diffusion de l'IA dans les entreprises est cruciale. On est aujourd'hui un peu en retard quand on regarde les chiffres de diffusion qui sont disponibles - et ça aussi, ça va être un des objectifs de pouvoir avoir une vision complète, publique - mais quand on regarde les chiffres, on est plutôt à 4 % ; là, d'autres sont à 10 ou 12 déjà. Et donc, l'augmentation en tout cas de la diffusion de l'IA dans les entreprises est cruciale dans tous les domaines. Et donc, là, le ministre, je souhaite que nous mettions à disposition des entreprises françaises un référentiel des cas d'usage testé et approuvé pour qu'elles aient une vision claire des solutions disponibles, notamment françaises, d'ici la fin de l'année. Et parce que je connais les inquiétudes légitimes sur l'impact de l'IA sur l'emploi et les conditions de travail, parce qu’aussi, nous ne devons pas les craindre, je souhaite que ce sujet puisse faire partie du dialogue social. Beaucoup d'entreprises l'ont entamé et que nous puissions justement accompagner ce travail au niveau des entreprises, des branches et de la nation. Nous allons aussi accompagner les entreprises pionnières pour des usages clés de l'IA en droit, comptabilité, génération, documentation, produits, etc ; l’objectif aussi, qu'elles diffusent ces retours d'expérience, incitent les entreprises similaires à imiter et qu'il puisse y avoir aussi des retours éclairés. L'objectif est que ce soit un sujet de dialogue social, que ce soit un sujet éclairé par la science, par des études objectives ad hoc qui permettront ainsi l'acculturation dans les entreprises, les branches et en interprofessionnel, mais qui aide à accompagner ce changement professionnel qui ne doit pas être du tout naïf, mais qui doit être lucide, éclairé et pas défiant.
Il s'accompagnera évidemment aussi d'un travail de préfiguration des besoins de requalification qui seront les nôtres et ceux de la nation. Et alors même que nous sommes, avec France Travail, en train, et avec plusieurs d'entre vous, de travailler à requalifier plusieurs de nos compatriotes qui sont loin de l'emploi depuis plusieurs années, eh bien, nous avons un travail d'anticipation à faire pour préparer la requalification des secteurs qui seront le plus impactés dans leur quotidien par l'IA. Et je crois que les changements seront d'autant plus acceptables, qu'ils seront préparés, que les personnes seront accompagnées, que des perspectives nouvelles soient dans les mêmes secteurs ou dans d'autres, seront apportées.
L'usage aussi doit se faire au sein de l'État et l'appropriation de l'IA par l'État est un élément clé de notre efficacité publique, du bien-être aussi de nos fonctionnaires et d'une appropriation par tous nos concitoyens. Et je dirais que la question de la confiance est là aussi encore plus essentielle. Il n'y a pas d'appropriation collective de l'IA sans un État exemplaire en la matière. C'est une affaire d'innovation, d'efficacité de la puissance publique, une affaire d'éthique, de bien-être des fonctionnaires également. Alors l'État doit utiliser l'IA pour faciliter la vie des Français ; plusieurs choses ont commencé. Il a été évoqué le modèle Albert - je rassure les uns et les autres, l'idée n'est pas que l'État crée son propre modèle - ce sont des briques en open source qui ont été ici prises, mais que l'État puisse avancer main dans la main.
Et concrètement, je souhaite qu'au moins 4 fonctions essentielles de l'État puissent s'équiper progressivement avec tout l'écosystème, de manière transparente, de l'IA générative. Et on va investir pour cela. L'hôpital, la magistrature, l'éducation nationale et la défense sur laquelle un plan dédié a déjà été présenté. Il y a des solutions spécialisées développées par les entreprises françaises qui pourraient être adoptées rapidement et c'est l'objectif de cette stratégie. Dans la santé, nous avons beaucoup progressé avec, entre autres, le Health Data Hub, les entrepôts de données.
Mais ces données peuvent et doivent maintenant être partagées beaucoup plus largement en acceptant une mutualisation sans réserve entre l'Inserm, programmes de cohorte, hôpitaux et chercheurs. Je me permets de faire ce petit rappel parce que c'est une stratégie à laquelle je crois. Je pense qu'on a bâti un modèle robuste en France, protecteur des données individuelles et justement protection de chacun. Elle est très légitime et j'y tiens beaucoup et c'est vraiment le modèle français. On a un modèle en même temps qui est une force parce qu'il est assez centralisé, mais on a encore dans le domaine de la santé, permettez-moi de dire cela, trop de querelles de chapelles. Et elles créent de la fragmentation dans le partage des données et du coup de l'inefficacité collective. C'est un gâchis collectif d'opportunités. C'est un gâchis d'opportunités pour nous et pour les entreprises et les chercheurs du secteur. Donc, je demande, là, qu'on ouvre entre eux. La loi de simplification prévue à l'été contient des premières avancées en renforçant le mandat de la CNIL.
Mais nous devons dépasser justement ces querelles de chapelles et avoir une politique d'ouverture entre les acteurs légitimes, beaucoup plus opérante. Et ça, nous y veillerons avec les ministres. Dans la justice, c'est l'équipement de l'ensemble de la magistrature d'outils d’IA générative qui pourrait permettre de répondre aux besoins d'investissement, grâce en particulier à des analyses prédictives élaborées, à l'extraction d'informations clés, à l'aide à la rédaction de jugements et là aussi, à des tâches qui sont définies au service des magistrats, des greffiers et du personnel, comme d'ailleurs plusieurs autres pays européens, ont commencé à le faire en avance de phase. Je pense à l'Estonie. Et donc qui permet de dégager du temps utile pour du jugement où les tâches qui sont les plus importantes pour nos magistrats, nos greffiers. Et je veux ici aussi dire, en étant clair, transparent, sur la place que prendra l'IA pour éviter tout débat qui inquiéterait nos compatriotes. Enfin, des cas d'usage générique commun à plusieurs administrations, comptes rendus de réunion, générations de notes, de mail, etc., doivent être déployés sous le pilotage de la direction du numérique de l'Etat.
Au fond, Monsieur le ministre, chaque administration doit expérimenter l'IA et c'est bien notre volonté.
Et l'IA dans l'Etat, c'est aussi l'opportunité d'accélérer et de faire bénéficier nos start-ups françaises de la commande publique. Ce sujet, on le sait, progresse encore trop lentement et je souhaite que chaque administration double la part de ses achats publics consacrés aux start-ups de la tech française d'ici 2027. Les budgets sont prévus. C'est un objectif ambitieux, mais atteignable. Je rappelle que le code des marchés publics intègre des critères d'innovation, des critères qui permettent totalement, dans le cahier des charges, de faire en sorte que des solutions européennes et françaises soient les plus légitimes pour être retenues. Et là aussi, ne soyons pas plus naïfs. Bon courage pour l'un d'entre vous d'être adopté par l'Etat américain ou l'Etat chinois.
Et donc, ce n’est pas du protectionnisme, c'est juste de dire : on fait la même chose que nos grands compétiteurs internationaux, on donne des programmes, des projets, de la perspective à nos start-ups avec une vraie logique d'achats publics. Je propose d'ailleurs d'étendre cette démarche d'achat vers les start-ups françaises d'ici 2027, vers le secteur privé. Et c'est tout le programme « Je choisis la French Tech » pour atteindre plus d'un milliard d'euros d'achats entre 2024 et 2027, et donc que nos grandes entreprises françaises et européennes puissent avoir cette logique. Je veux ici remercier les grands groupes qui sont déjà engagés dans cette dynamique Orange, SNCF, FDJ, ADP, EDF, CMA-CGM et plusieurs autres qui ont déjà adopté cette logique de « Je choisis la FrenchTech » et qui doit nous permettre de donner, en quelque sorte, du potentiel commercial aux start-ups et aux ETI de notre écosystème.
Et puis tout ça va, et je finirai là-dessus, par évidemment la gouvernance. C'était le dernier point auquel je m'étais engagé. En la matière, je vais vous le dire très simplement, pour aller droit au but, la seule bonne gouvernance pour moi est mondiale. Nous avons commencé à avoir un AI Act. Alors, j'ai eu des mots très positifs dans mon discours sur l'AI Act. J'ai un peu du mal à les dire tels qu'ils sont écrits là parce qu’avec les moyens maintenant en usage, il serait trop facile de retrouver le fait que quand c'était en débat au Parlement européen, j'ai plutôt dit que ce n'était pas le bon moment pour le faire. Donc, je ne vais pas devenir un avocat zélé de... Je pense que c'est beaucoup mieux. Et Thierry est là, qui a beaucoup aidé à redresser ce texte, et je l'en remercie, et avec le Gouvernement français. Il y a un travail qui a évité, si je puis dire, le pire. Je pense qu'on a un socle qui est là. Maintenant, il est là. Donc comme il est là, il est bon. Vous voyez comme je suis pragmatique, je suis comme vous. Mais en tout cas, il donne des systèmes de garantie. C'est une bonne chose. Il a envoyé un système qui, à l'époque, était compliqué, c'est qu'on n'était pas les premiers en termes d'innovation et de création de géants, mais très largement les premiers en termes de régulation. Et moi, j'ai toujours une crainte en la matière, c'est qu'en fait, on se presse à réguler des espèces qu'on n'a plus, ce qui marche moins bien aussi. Et donc, je n'ai pas envie de devenir l'espace de consommateur le mieux régulé pour avoir des producteurs de l'autre côté de l'océan ou de l'autre côté de l'Oural.
Là, je pense qu'on a un socle. Il est solide, il a été amélioré dans ces négociations grâce, je crois vraiment pouvoir le dire, à plusieurs de nos parlementaires européens, au Gouvernement français et aux commissaires.
C'est aujourd'hui le texte qui constitue un socle de garantie des droits des citoyens, en particulier contre la désinformation, contre les biais qui étaient induits, donc c'est une bonne chose. Maintenant, la clé, c'est comment on arrive à avoir une vraie régulation. En la matière, je pense qu'il faut éviter absolument la fragmentation de la conversation internationale. Et le danger, c'est qu'au fond, on ait une régulation européenne qui aille beaucoup plus loin toute seule et qu'on ait, au fond, une Europe qui régule beaucoup en étant très en retard sur l'innovation, des États-Unis qui vont être très agressifs en termes d'attractivité et d'innovation et très peu régulatoires, et au fond qui, diront, régulent les acteurs en place, ce qui, au fond, s'est passé sur les plateformes et est toujours valable, et ensuite, un modèle qui régule, enfin qui régule par des choix de gouvernement non démocratiques, si je puis dire, un modèle à la chinoise où on le voit apparaître un peu à la golfique, qui sont des modèles d'IA très statocentrés, avec des objectifs, des préférences collectives qui ne sont pas les nôtres.
Et donc je pense que c'est une très bonne chose d'essayer d'avoir une conversation internationale et d'aller vers une régulation mondiale. Pourquoi ? Parce que je pense que nous, on a quand même des préférences collectives qu'on veut continuer à avoir développées et qui sont d'ailleurs portées dans le cadre de la Commission. Je pense qu'on croit à l'innovation à l'IA, mais on veut pouvoir développer un modèle d'affaires équitable pour toutes les parties prenantes. On veut pouvoir continuer à défendre la propriété intellectuelle, les artistes, les créateurs, les ayants droit. Et on ne veut pas vivre dans un monde où on ne saura pas qui a créé quoi. Je voyais que la polémique faisait jour à Cannes, où les voix des actrices seront quasiment des voix d'IA, et où les scripts des prochains scénarios seront des productions d'IA, et où en quelque sorte tout ce qui était la quintessence d'une sensibilité, d'un goût, sera substitué par de l'IA. Je crois que la créativité est importante. En tout cas, c'est le modèle qu'on défendra. Et je pense que c'est important que les créateurs, les artistes puissent être défendus dans leur propriété intellectuelle. C'est dans la conversation mondiale qu'il faut le défendre. Et je crois que tous les interdits aussi qu'on veut, par exemple la militarisation de l'IA, les limites qu'on veut porter, ça doit faire l'objet d'un dialogue international, parce que si on ne les applique qu'à une géographie, ce sera inopérant.
C'est pourquoi, d'abord, nous allons continuer de mettre en œuvre de manière intelligente l'AI ACT, parce qu'il pose les bases de ce qui nous permet de faire ça. Et c'est dans ce cadre que nous avons lancé deux missions au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique qui visent à faire émerger un modèle d'affaires équitable pour toutes les parties prenantes et les ayants droit. Et je vous invite d'ailleurs à vous saisir du sujet et à contribuer. Et nous allons aussi créer un lieu profondément nouveau, l'Usine IA, qui accueillera un nouveau centre d'évaluation en IA et aura vocation à devenir l'un des plus grands centres d'évaluation mondiaux des modèles d'IA. Et ça, c'est en application de, justement, l'AI Act. Ce centre accueillera une antenne de l'AI Office de la Commission européenne, et plus particulièrement pour fournir une expertise technique en lien avec les surveillances des modèles. Et il se connectera évidemment aux grands réseaux mondiaux d'évaluation des modèles, les AI Safety Institutes britanniques et américains. Et donc l'idée, c'est qu'on applique l'AI ACT, qu'on le fasse intelligemment avec ce que je viens de dire là, qu'on défende notre modèle, qu'on ait une discussion aussi de ces acteurs avec leurs partenaires et qu'on nourrisse ainsi la conversation internationale et l'objectif qui est le nôtre.
Et l'objectif, c'est justement notre Sommet de février 2025, l’AI Action Summit en février 2025, que la France va accueillir le 10 et 11 février 2025 avec des acteurs du monde entier : entreprises, chercheurs, étudiants, innovateurs, institutionnels, Etats - le logo apparaît - organisations internationales, sociétés civiles dans toutes ses composantes. Je remercie beaucoup Anne BOUVEROT qui a accepté d'être l’envoyée spéciale pour ce Sommet et qui, avec les équipes du Quai, justement, notre ambassadeur en numérique, nos différents acteurs, avec toute la plateforme qui a été créée aussi en lien avec le Forum de Paris sur la paix, tous les laboratoires et les académiques qui ont beaucoup contribué, va préparer ces travaux. Et je leur ai demandé de travailler sur la manière dont l'IA peut servir le bien commun, notamment à travers des infrastructures ouvertes, sur son impact sur le marché du travail, sur le modèle économique que nous voulons promouvoir, concurrence, propriété intellectuelle, sur les enjeux de sécurité, et sur la gouvernance mondiale à mettre en place. Et comme je le disais, je la crois la plus mondiale, la plus globale possible. On a le partenariat mondial pour l'intelligence artificielle qui a été décidé en G7, mais qui est logé à l'OCDE, ce qui est une bonne plateforme pour bâtir des solutions internationales. Et l'objectif ensuite, c'est que cette architecture mondiale puisse reposer sur 3 piliers, les 3S qu'on a défendus tout à l'heure au sommet avec les Coréens.
La science, c'est-à-dire que tout ce qu'on va définir là, sur les usages, les opportunités qu'apporte l'IA, toute la conversation mondiale, on dit : on se donne une règle commune, c'est la science qui est la base de la discussion. La science ouverte, académique, reconnue entre pairs. 2) C'est des solutions communes et ouvertes, c'est-à-dire que ce sont des solutions qu'on doit apporter pour pouvoir réguler, corriger. Et donc ces solutions, elles doivent être ouvertes et partagées. Et 3) ce sont des standards. Et donc l'idée, c'est qu'on puisse émerger sur des standards internationaux reconnus par tous dans ces enceintes et qu'on évite d'avoir justement une approche multistandard dans laquelle, sinon, on va se perdre et on va jouer sur, quelque sorte un dumping régulatoire, on sait très bien comment ça va se passer, si le dossier est pris de la sorte. Et donc ce sommet réunira les meilleurs du monde dans l'IA, structurera la discussion de cette manière et je souhaite dès aujourd'hui leur lancer d'ailleurs un grand défi, comme les Américains ont su le faire avec la DARPA, les challenges ou des programmes qui permettent d'attirer les tout meilleurs.
Je souhaite qu'à l'occasion de ce Sommet pour l'action sur l'IA, on ait en quelque sorte aussi un très grand sommet de l'attractivité des talents dans tous les domaines, des projets entrepreneuriaux, et en quelque sorte un Choose France de l'IA à cette occasion, et qu'on ait des lauréats qui soient communiqués et invités lors de ce sommet. Et donc que les meilleurs chercheurs en IA, toutes les start-ups, grands groupes qui veulent conclure pour apporter les meilleures solutions et il y aura tout un cahier des charges qui sera donné, détection des fake news, contenu synthétique, santé, écologie, etc., puissent faire partie de ce concours dont les lauréats seront dévoilés à cette occasion et qui donnera lieu aussi à des investissements exceptionnels du côté public pour accompagner et accélérer les choses. Voilà. Je ne veux pas être plus long, mais c'était, au fond, les axes sur lesquels je voulais dessiner, en quelque sorte, un peu des objectifs de la France et de l'Europe pour aujourd'hui et pour demain : des talents, des infrastructures, de l'investissement, des usages et une gouvernance. Et je crois qu'autour de ça, si on apporte les réponses adaptées, nous avons les capacités à être véritablement, au-delà de ce qu'on est aujourd'hui, l'un des grands pays champions de l'IA d'aujourd'hui et de demain, et d'un IA au service de l'humanité, d'un IA ouvert qui correspond à nos valeurs et nos préférences, et d'être, ce faisant en capacité collectivement, de le faire accepter à notre pays, parce que ce sera au service de nos objectifs, et de structurer la régulation pour la planète car ce sera au service de l'humanité.
Voilà Mesdames et Messieurs. En tout cas, merci d'être là aujourd'hui et merci de ce que vous faites chaque jour dans vos entreprises, vos laboratoires, vos universités, vos organisations parce que vous ne le faites pas simplement au service d'un objectif qui est le vôtre, mais d'une bataille collective qui est sans doute l'une des plus grandes transformations de l'époque contemporaine, et donc l'un des moments les plus intimidants et vertigineux, mais les plus excitants pour nos générations. J'y crois comme vous, j'ai envie qu'on réussisse comme vous, et que la France soit un très grand pays de l'IA et que l'Europe soit un très grand continent de l'IA. Merci à tous. Vive la République ! Et vive la France !

> [Intervention à l’occasion du Sommet sur l’intelligence artificielle de Séoul] Je voulais d’abord remercier le Président Yoon, merci beaucoup cher président, et Rishi Sunak, M. le Premier ministre pour l’organisation de cette réunion et remercier tous les collègues, chefs d’Etat et de gouvernement et les chefs d’entreprises et experts qui ont pris le temps aujourd’hui de cet échange essentiel. Il vient prolonger en effet la dynamique du Sommet de Bletchley Park en novembre dernier et nous permet de raviver les échanges tenus lors de la fondation du Partenariat mondial pour l’intelligence artificielle à l’initiative du Canada en novembre 2018.
Vous l’avez tous dit très clairement et cela ressort très largement des interventions : l’intelligence artificielle n’est pas simplement une révolution économique et technologique – elle porte le potentiel d’un profond changement de paradigme de nos sociétés, c’est-à-dire notre rapport au savoir, notre rapport au travail, notre rapport à l’information et donc à la démocratie, notre rapport à la culture et même au langage. Et rapidement, nous devrons l’adopter au sein de nos entreprises si nous ne voulons pas perdre la bataille de la productivité, mais aussi intégrer les bons et mauvais usages dans nos démocraties.
Pour toutes ces raisons, c’est devenu clairement un enjeu politique et ça peut l’être pour la pire ou la meilleure des raisons, si je puis dire, et c’est pourquoi avoir une conversation internationale intégrée qui permette de donner une place aux leaders technologiques, aux usagers mais aussi aux gouvernants de la planète, me parait essentiel. C’est pourquoi nous avons accepté la responsabilité de prolonger la dynamique initiée par le Royaume-Uni et la Corée, en accueillant en France, les 10 et 11 février 2025, un sommet pour l’action sur l’IA, pour lequel je compte sur votre engagement. 
Nous allons nous mettre au travail dès les prochains jours et mon envoyée spéciale, Anne Bouverot, réunira ce 28 mai nos principaux partenaires en ce sens, pour bâtir, au fond, un agenda autour de notre double responsabilité à l’égard de l’IA et cela correspond à ce qui vient d’être dit - celle à la fois de partager, d’innover et de continuer d’accélérer et celle de protéger face aux mauvais usages et d’intégrer aussi les conséquences directes et indirectes de l’IA.
En premier lieu, donc partager, ouvrir. C’est comment faire en sorte que l’adoption massive de l’intelligence artificielle puisse réaliser la promesse initiale du numérique, qui est l’émancipation individuelle et collective, et donc le progrès, la connaissance et derrière la croissance économique. Pour cela, il faut un agenda d’investissement pour favoriser l’innovation et éviter la concentration - ce faisant, nous renforçons les libertés d’entreprendre, de créer et d’apprendre. Il nous faut aussi encore plus fortement inciter l’innovation en faveur du bien commun et des objectifs de développement durable, qu’il s’agisse d’ailleurs de l’environnement ou de la santé, en bâtissant aussi une architecture pleinement « ouverte » de l’intelligence artificielle, je sais combien certains d’entre vous – et Yoon vient d’y faire référence – y tiennent, et pour travailler à une technologie accessible à tous.
Je ne veux pas ici être plus long mais pour moi le premier volet de notre agenda d’action pour l’IA, c’est en effet comment investir davantage, comment on peut accélérer, l’innovation, la diffusion et comment s’assurer qu’il y ait un socle d’architecture « ouverte » pour permettre le développement possible de nos objectifs principaux. 
En deuxième lieu, notre rôle est clairement de protéger les citoyens des risques qui sont générés par le développement très rapide de l’IA, que les usages les plus risqués soient pleinement empêchés, ce dont il avait été beaucoup question au Royaume-Uni l’an dernier ; c’est le fil directeur du règlement européen sur l’IA adopté en mars dernier. Et très clairement apparaissent des usages impossibles de l’IA, la militarisation de l’IA et autres, cela je crois qu’il faut dès le début l’intégrer. Il faut dès le début avoir une conversation mondiale sur ce sujet si on veut être efficace et donc se dire qu’on a une forme d’ordre public international qui doit éviter certains mauvais usages de base. Et puis, il y a des choses qu’on doit aussi pouvoir intégrer très rapidement et calibrer : la protection de la propriété intellectuelle, la préservation des données de chacun, l’impact environnemental des IA, les conditions de rémunération, la prolifération des attaques cyber et de campagnes de désinformation. Donc, on voit bien que la protection va supposer aussi d’avoir une approche sans doute un peu différente d’une approche classique, c’est-à-dire d’avoir une approche par stress test, par scénario et se mettre d’accord aussi sur un agenda commun.
Pour cela et je finirai par-là, il faut une nouvelle gouvernance internationale de l’intelligence artificielle et je crois que le grand risque, ce serait qu’il y ait des gouvernances régionales et qu’au fond, il y ait une fragmentation de la conversation et des préférences parce qu’elles créeraient une forme de disparité et viendraient obérer nos capacités à investir et innover ensemble et créeraient des préférences collectives différentes, alors même que si on veut être efficace, il faut bâtir un vrai socle international commun. Je crois que cette nouvelle gouvernance internationale dont on a posé les fondements avec ce Partenariat mondial pour l’intelligence artificielle, elle repose autour du triptyque sciences, solutions et standards.  
Sciences d’abord, il faut chercher en permanence à bâtir ensemble un consensus scientifique robuste. Là-dessus, je veux rendre hommage aux travaux confiés au groupe d’experts dirigé par Yoshua Bengio et dont les résultats définitifs arriveront en février prochain mais dont les résultats provisoires ont déjà été rendus et font déjà référence, ce qui permet d’avoir une vue panoramique des risques et des opportunités. Je crois que c’est important que ce soit à chaque fois scientifiquement basé, fondé, qu’éventuellement il puisse y avoir une discussion et des désaccords mais que ce ne soit pas l’objet d’un débat de biais politique. 
Le deuxième élément pour la gouvernance mondiale, c’est de pouvoir unir nos forces pour créer les solutions techniques ouvertes à tous, permettant ainsi d’auditer les modèles, de déterminer les bons standards d’évaluation de risques, d’évaluer leur impact environnemental. Je pense essentiel que nos différents instituts d’évaluation des modèles d’IA puissent partager leurs résultats, notamment avec les pays qui sont autant concernés par les enjeux mais ne sont aujourd’hui pas dotés des mêmes capacités d’analyses. Les entreprises doivent aussi pouvoir contribuer mais je pense que c’est très important d’avoir ces solutions techniques ouvertes à tous sinon, il n’y aura pas véritablement de gouvernance commune.
Et puis enfin, c’est des standards, des normes internationales de l’IA qu’il nous faut bâtir pour avoir des règles communes qui soient pleinement compatibles et qui ne créent pas de distorsion entre les espaces, de surcoût pour les entreprises. C’est aussi pour cela que je crois beaucoup à la capacité qu’on aura d’inclure tous les espaces géographiques et toutes les grandes puissances technologiques et économiques de la planète. Il ne faut pas que cette gouvernance se fasse en excluant tel ou tel, il faut vraiment éviter une fragmentation des cadres réglementaires qui ne profiterait vraiment à personne. 
Voilà, ces trois objectifs pour moi – sciences, solutions, standards – sont au cœur du projet de relance du Partenariat mondial pour l’intelligence artificielle dont, on fait tous partie, aux côtés de grands partenaires comme l’Inde, le Brésil, le Sénégal, une trentaine de pays au total, bientôt rejoints par d’autres. C’est une nouvelle étape qui s’ouvre mais c’est autour de ces principes qu’on va bâtir et donc mener ce travail en vue de février prochain. 
Je crois que j’ai épuisé le temps qui m’était imparti et je ne veux pas être plus long mais l’objectif était vraiment de remercier les collègues et dirigeants d’entreprises, contributeurs qui se sont exprimés aujourd’hui et d’essayer ainsi de donner les principaux objectifs pour le sommet de février prochain.

> À nos para-athlètes français, Nous avons rendez-vous dans 100 jours. Nous serons là ! La France sera là. Pour vous accueillir et vous soutenir. Tout un peuple va vibrer au rythme de vos performances drapées bleu, blanc et rouge. 4 400 athlètes sont attendus : en plus d'être des compétiteurs et des champions, vous serez avec eux des ambassadeurs. Ces Jeux vous apporteront une visibilité sans précédent : deux fois plus d'heures de compétitions diffusées qu'à Tokyo. Ainsi, vous allez montrer au monde vos valeurs. L'esprit d’équipe, le respect, la tolérance, le dépassement de soi. C'est vous. C'est nous tous, la France. Si beaucoup reste à faire sur l’accessibilité, pour le pays, il y aura un avant et un après ces Jeux. L’ensemble des sites olympiques seront adaptés aux handicapés et nos transports en commun auront été transformés : en Île-de-France par exemple, avec 60 gares accessibles, la ligne 14 prolongée, la mise en place d'annonces visuelles pour les malentendants. Il y aura aussi cinq fois plus de taxis accessibles à tous. Le pays sera transformé. Et la vie des personnes qui vivent un handicap, aussi. Aujourd'hui, moins de la moitié pratiquent une activité physique. Rapprochons-les du sport ! Plus de 3 000 clubs sportifs ont été formés pour les accueillir. Tous au sport ! Je compte sur chacun pour s'y mettre et encourager ses proches. À dans 100 jours ! Pour l’Histoire.

> [Message pour le forum mondial de l’eau de Bali]
Mon emploi du temps ne m'a pas permis de faire le voyage jusqu'à Bali, et je regrette ô combien, de ne pas être parmi vous aujourd'hui pour ce dixième Forum mondial de l'eau. Je garde en mémoire la force de ce lieu, sa capacité à inspirer et notre G20. Mais je tenais toutefois à vous passer ce message par vidéo, car je sais à quel point la question de l'eau est désormais vitale partout sur la planète.
Je veux ici remercier le Président Joko Widodo pour son engagement sur le sujet, ainsi que le Conseil mondial de l'eau pour l'organisation de cette nouvelle édition du Forum à Bali.
Aujourd'hui, il n'y a pas de sommet international où l'on ne parle pas de l'accès aux ressources critiques pour nos économies, qu'il s'agisse d'énergie, de minerais, de terres rares, de composants technologiques. Ce Forum nous rappelle que l'eau est la première des ressources critiques. L'or bleu, comme on l'appelle parfois, a toujours été une ressource vitale et hautement symbolique pour l'ensemble des peuples et, l'accès à l'eau, l'un des premiers facteurs d'indépendance et d'interdépendance entre les nations. La coopération transfrontalière pour la gestion de l'eau a donc toujours été un vecteur d'accélération de la paix.
Aujourd'hui, s'ajoute à cela, l'impact profond du changement climatique sur le cycle de l'eau. Partout, l'accès à l'eau devient imprévisible, entre désertification, sécheresse prolongée, inondation soudaine ou fonte des glaciers. Plus de la moitié de la population mondiale affronte déjà des pénuries sévères en eau et de nombreux pays à travers le monde anticipent des situations de stress hydrique intense dans les années à venir, mettant en danger leur économie, leur population, mais aussi parfois la stabilité même de leur voisinage. Dans 9 cas sur 10, l'eau est au centre des enjeux d'adaptation au changement climatique. La communauté internationale doit prendre la mesure de ce défi. Dans un monde qui se réchauffe, nous devons aborder la question de l'eau comme l'un des chantiers les plus fondamentaux des prochaines décennies. Ce chantier est aussi fondamental parce qu'il renverse des habitudes, parfois, bien établies. Soyons clairs, beaucoup de pays dits développés, habitués à une certaine forme d'abondance, devront, dans les prochaines décennies, apprendre des pays du Sud qui sont plus habitués à la rareté de l'eau, changer profondément leur manière de consommer l'eau, de recycler, etc.
La France d'ailleurs n'échappe pas à cet impératif de transformation. J'ai annoncé il y a un an un Plan eau que nous mettons en place, avec nombre de ces petites révolutions ou grandes révolutions. Nous avons investi dans les années 60 dans une politique de l'eau très innovante, autour de la gestion par bassin. Ce modèle français, reconnu à l'international, nous a permis de lutter contre la pollution de l'eau, de garantir sa qualité. 60 ans plus tard, nous avons dû repenser ce modèle avec le Plan eau, publié en mars de l'année dernière, qui vise à tirer toutes les conséquences d'une pression nouvelle sur la quantité d'eau disponible, chose à laquelle nous n'étions pas habitués dans beaucoup d'endroits. Nous sommes en train de démontrer que des solutions existent, des transformations sont en cours, mais il y a toujours des tensions et des inspirations à prendre du monde entier. Mais aujourd'hui, je voudrais surtout dire à quel point, à l'échelle internationale, le chantier de l'eau est une opportunité considérable. C'est une opportunité pour construire la paix — on le voit d'ailleurs du Caucase à l'Asie centrale, en passant par le Proche et Moyen-Orient — mais aussi pour construire la prospérité et nous aider à décarboner nos économies. L'eau est sans doute l'actif le plus précieux dans lequel nous pouvons investir aujourd'hui, si nous souhaitons vraiment construire des économies plus durables, plus prospères, plus autonomes.
Investir dans l'eau, c'est investir dans le développement humain et la santé humaine, nous le savons. C'est aussi investir dans l'énergie décarbonée parce que l'eau est au cœur des modèles de production d'hydrogène, d'énergie renouvelable, d'énergie nucléaire. C'est aussi investir dans la souveraineté de nos modèles agricoles, en les rendant plus robustes et plus autonomes, avec la capacité d'irriguer de manière plus efficace, de produire localement des engrais verts, au lieu de continuer à importer des engrais très carbonés avec des risques de dépendance et des bilans énergétiques et climatiques catastrophiques. Dès aujourd'hui, c'est dans cet état d'esprit optimiste que je vous souhaite le plus grand succès pour cette 10ème édition du Forum mondial de l'eau.
J'en suis convaincu, c'est vous, la Communauté internationale de l'eau, composée de collectivités locales, d'entreprises, d'agences de bassins, d'experts à travers le monde, qui pourra tracer le chemin vers une gouvernance de l'eau plus efficace et plus juste. C'est aussi avec cet esprit résolument optimiste que la France prépare, en lien étroit avec le Kazakhstan, le Président de la Banque mondiale, les Nations unies et de nombreux autres partenaires, le premier Sommet One Planet sur la question de l'eau : le One Water Summit.
Notre ambition sera de construire une grande alliance internationale sur l'eau, qui réunisse Etats, collectivités locales, industries, secteurs privés, associations et ONG pour investir massivement dans la nouvelle économie de l'eau. Nous placerons aussi le sujet de l'eau au cœur de l'agenda du Pacte de Paris pour les Peuples et la Planète, le 4P, lancé en juin dernier en France, avec l'objectif de réconcilier des agendas de lutte contre la pauvreté et de protection de l'environnement. Au fil de ces échéances, vous pourrez compter sur la détermination de la France, pour faire de l'eau une question majeure au cœur de l'agenda international.

 

► Gouvernement
[Nota: dans ce gouvernement, certains membres ne sont pas centristes; nous retranscrivons cependant leurs propos en rapport avec leur fonction parce qu’ils font partie selon nos critères d’une équipe qui suit une politique globalement centriste] 

Gabriel Attal Premier ministre, chargé de la Planification écologique et énergétique
> [Intervention à l’Assemblée à propos de la situation en Nouvelle-Calédonie]
Au nom du Gouvernement, je veux à mon tour rendre hommage aux victimes des violences de ces derniers jours. Les deux gendarmes qui ont perdu la vie portaient l’uniforme de la République et protégeaient les populations et la terre de Nouvelle-Calédonie. Ils s’étaient engagés pour la France et sont morts en la servant. La République ne les oubliera jamais et sera présente, attentive, auprès de leurs familles, de leurs proches et de leurs frères d’armes. La gendarmerie a perdu deux hommes, mais c’est toute la France qui est en deuil. Notre reconnaissance est infinie.
Je veux rappeler que les premières victimes des émeutes et des violences sont les Calédoniens. Quatre personnes ont perdu la vie à l’occasion des émeutes et des pillages. Beaucoup ont été blessés. Au nom du Gouvernement, j’exprime mon soutien aux proches et aux familles des personnes qui ont perdu la vie. Je ne me résoudrai jamais à ce que des jeunes, parfois très peu âgés, perdent la vie dans une spirale de violences.
La Nouvelle-Calédonie est frappée par des violences d’une rare intensité, qui portent le souvenir amer des déchirements sanglants du Caillou il y a quarante ans. Les élus et les responsables politiques calédoniens, qu’ils soient indépendantistes ou non, les ont unanimement condamnées, appelant au retour au calme. Je salue l’esprit de responsabilité qui anime l’ensemble des forces politiques calédoniennes.
Depuis le début de la crise, notre priorité est le retour à l’ordre, préalable au dialogue. Le Président de la République a convoqué à trois reprises un Conseil de défense et de sécurité nationale (CDSN). J’ai moi-même présidé à cinq reprises des cellules de crise interministérielles pour suivre la situation en temps réel et coordonner l’action de l’État. À la demande du Président de la République, l’état d’urgence a été décrété, le couvre-feu maintenu et les rassemblements interdits. Avec le ministre de l’intérieur et des outre-mer et la ministre déléguée chargée des outre-mer, nous suivons l’évolution de la situation jour et nuit.
Ce week-end, un pont aérien a permis le déploiement de 1 000 personnels des forces de sécurité intérieure supplémentaires, venus renforcer les 1 700 effectifs déjà présents sur place. Ces 2 700 policiers et gendarmes accomplissent un travail exceptionnel dans des conditions très difficiles. Je veux, avec vous, rendre hommage à leur courage. Ils ont déjà accompli plusieurs missions périlleuses, notamment en dégageant la route entre Nouméa et l’aéroport – 76 barrages ont été détruits –, et sont appuyés par des militaires, qui les aident à sécuriser l’aéroport, les ports et les bâtiments publics.
Le retour au calme passe aussi par la fermeté à l’égard des auteurs d’exactions. C’est la raison pour laquelle le ministre de la justice a pris une circulaire demandant une réponse pénale ferme face aux pillards et aux émeutiers.
Les violences ont des conséquences très graves sur la vie quotidienne des habitants de Nouvelle-Calédonie. Nous mettons toute notre énergie dans le rétablissement de l’ordre, mais nous sommes également mobilisés pour assurer la continuité de la vie quotidienne des Calédoniens. J’ai réuni une cellule interministérielle de crise spécifique sur le sujet des produits alimentaires et sanitaires acheminés grâce au pont aérien. Par ailleurs, nous travaillons déjà à la reconstruction avec Bruno Le Maire, qui a reçu l’ensemble des acteurs économiques.
Grâce à ces moyens et aux décisions prises sans délai, la situation commence à s’améliorer, mais, nous le savons, elle est encore fragile et notre vigilance reste entière. Nous devons rechercher une solution politique durable et globale pour ce territoire.
Nous ne la trouverons que par le dialogue entre les forces politiques locales.
Le Président de la République décolle ce soir pour la Nouvelle-Calédonie. Il se rend au contact de nos compatriotes et échangera avec l’ensemble des forces vives calédoniennes, les acteurs politiques, bien sûr, mais aussi les acteurs de la société civile, de la jeunesse, de la vie économique et des affaires coutumières. L’objectif est d’être à leurs côtés et de préparer la reconstruction. Le Président de la République entend renouer le fil du dialogue. Les personnalités qui l’accompagnent permettront de réunir les acteurs locaux et d’avancer vers l’accord politique global que nous appelons tous de nos vœux.
Le Président de la République a toujours été clair – je vous renvoie au discours qu’il a prononcé il y a un an en Nouvelle-Calédonie (M. Manuel Bompard s’exclame) : l’avenir du territoire passe par des évolutions institutionnelles, en vertu des résultats des différents référendums, mais, plus globalement, par la recherche d’un chemin du pardon permettant à tous les habitants de vivre en paix. Le Gouvernement est pleinement mobilisé en ce sens.

> [Hommage aux agents pénitentiaires assassinés] Il n’était pas encore 6 heures, ce matin du 14 mai. Le calme de la nuit entourait encore la France, et les premières lueurs s’apprêtaient timidement à franchir l’horizon. Il n’était pas encore 6 heures, ce matin du 14 mai. Mais pour eux, pour vous, femmes et hommes de la communauté pénitentiaire, c’était l’heure du devoir, l’heure de la mission.
Il n’était pas encore 6 heures, ce matin du 14 mai. Mais pour Fabrice, Arnaud, Nicolas, Damien et Arnault, tels des sentinelles de l’aube, la journée commençait. Aucune journée ne ressemble à une autre, quand on choisit la pénitentiaire. Ils le savent et se préparent, comme avant chaque mission, avec la même attention, le même savoir-faire, la même vigilance. Ils ont choisi de servir la République. Choisi de servir la Justice. Et pour eux la journée commence ; comme elle commence, partout en France, au même moment, pour des centaines d’équipes des pôles de rattachement des extractions judiciaires, les PREJ.
Il est 5h30, ce 14 mai, quand le capitaine Fabrice Moello réunit ses hommes et passe en revue, avec eux, les missions du jour. Une extraction. Un détenu à convoyer de la maison d’arrêt d’Évreux jusqu’au tribunal de Rouen, puis revenir jusqu’à la prison. La mission commence. Deux véhicules, trois agents dans l’un, deux dans l’autre, pour fluidifier le trafic et sécuriser le convoi.
En ce matin du 14 mai, alors que les véhiculent avancent dans le demi-jour : que la Normandie semble calme. Que le drame, la violence et la barbarie semblent loin. Et pourtant.
Et pourtant chaque seconde qui passe les rapproche inexorablement du drame et des larmes, des coups de feu, des blessures, de la mort. Le convoi arrive à Rouen. Les auditions se déroulent, s’achèvent.
Nous sommes en milieu de matinée, et le fourgon repart. Il repart sur les routes de Normandie. Il repart vers la tragédie. Les véhicules se suivent, sans jamais perdre le lien, en contact toujours, pour faire face à tous les dangers. La circulation s’encombre, ralentit.
Et puis soudain, à la sortie du péage d’Incarville, l’histoire bascule, avec une brutalité inouïe.
Face aux deux véhicules de l’État, un véhicule, à contre sens, fait bélier. Derrière, une autre voiture referme le piège.
Et puis ce sont des tirs, des tirs incessants, des tirs en rafale.
Ce sont les vitres qui explosent, criblées de balles. Ce sont les tirs qui continuent, non pas seulement pour attaquer, mais pour donner la mort. Ce sont les tirs de riposte des agents. Hommes en noir contre hommes en bleu. Visages cagoulés contre figures de la République.
Brutalité contre Etat de droit.
Violence contre Justice. Le détenu s’évade du fourgon, libéré par les assaillants. Des assaillants qui incendient leur véhicule et disparaissent. 3 minutes. 3 minutes : c’est le temps qu’aura duré cette attaque. 3 minutes, et pourtant une éternité. Nicolas est le premier à se relever, à héler les secours. La balle qui a blessé son oreille a frôlé son crâne, le gilet pare-balle a évité pire.
Pour Damien et Arnault, la vie ne tient qu’à un fil, plus gravement touchés encore par la mitraille des meurtriers. Ils se sont relevés. Et j’ai à cet instant, une pensée émue pour leur souffrance et leur courage. Nous ne les oublierons pas. Nous ne les abandonnerons pas.

Mais alors que le temps semble suspendu. Alors que le vacarme des tirs se tait, laissant place aux cris d’effrois, aux crissements des pneus, aux sirènes de secours, Arnaud Garcia et Fabrice Moello ne se relèvent pas.
Ils ne se relèvent pas, emportés par la folie meurtrière. Emportés par des malfrats, devenus des tueurs. Emportés dans un déchaînement de violence, et un torrent de brutalité. Arnaud Garcia et Fabrice Moello ne se relèveront pas. Et pour leurs familles, pour leurs camarades, jamais plus les matins ne seront les mêmes. Arnaud Garcia avait 34 ans, il allait devenir père. Il vous avait annoncé la bonne nouvelle il y a quinze jours, à vous, ses collègues, autour d’un verre, avec une joie et une fierté qui faisaient rayonner sur son visage un sourire plus large encore que d’habitude.
Il était passé par d’autres postes auparavant, surveillant à Grasse, à Argenton. Et s’il était entré au PREJ, c’est par amour. C’est pour avoir des horaires plus réguliers et pouvoir se consacrer plus facilement à Maryse et leur enfant à naître, dans la maison qu’ils avaient construite ensemble.
Ainsi était Arnaud Garcia : sincère et passionné. Une passion qu’il mettait en toute chose : son métier, bien sûr. Son métier qui était bien plus qu’une profession, mais un engagement, un engagement constant au service de la Justice. La passion de l’uniforme, celle du service de la France, qu’il avait héritées de son père gendarme.
La passion pour la Normandie, pour l’Histoire, pour la Grèce antique, pour la moto. La passion pour le football, bien sûr, lui dont on pensait que le cœur de supporter ne pourrait jamais cesser de vibrer. En sa mémoire, le stade Malherbe à Caen a applaudi à tout rompre, tandis que le RC Lens a respecté une minute de silence. Mais dans le recueillement de ce silence, dans la ferveur de ces applaudissements, il manquait quelqu’un. Quelqu’un qui n’avait jamais manqué un match. Quelqu’un qui connaissait les ressorts de chaque rencontre, les raisons de chaque victoire. Il manquait Arnaud Garcia. Mais je crois que si l’on tend l’oreille, on peut deviner encore dans les tribunes le son de sa voix, tant sa présence semblait éternelle. Fabrice Moello, lui, était arrivé à Caen il y a plus de vingt ans. Et les années ne suffirent pas à faire de ce Breton, un Normand de cœur.
Frêne, Argentan, Caen, ici-même. De promotion en promotion, le voilà au PREJ en 2019, premier surveillant, puis capitaine pénitentiaire.
Il avait cela en lui, cet éthos du chef, qui incitait au courage. Cette humilité, cette maturité qui inspiraient le respect.
Quand il emmenait ses amis courir, il était le « présicoach », celui qui galvanisait le courage et ranimait les forces.
Son épouse Sandrine, ses deux garçons de 21 ans, Eloann et Julian, lui emboîtaient souvent le pas.
De marathons en trails, de la « Barjo » au Raid de l’Archange, il dévorait le sable de la Manche à longues foulées, assoiffé de vitesse, d’endurance, de vie, car rien n’était trop difficile à ses yeux, quand il s’agissait de se dépasser. Cette volonté de fer s’alliait d’une bienveillance perpétuelle, teintée d’un soupçon d’irrévérence et d’humour.
Partir en extraction avec lui, c’était être rassuré, être sécurisé. La force souriante. La force bienveillante. Une force qui faisait de lui un chef respecté, un père aimé. Une force qui inspirait. Cette force, encore aujourd’hui, guide ses collègues et les guidera toujours. Fabrice Moello et Arnaud Garcia avaient en commun une jovialité, un sourire, un bon mot. Ils avaient en commun ce chemin de la Justice, embrassé pleinement, en pleine conscience de sa noblesse et de sa difficulté.
Ils partageaient la conviction que l’autorité et la fermeté sont les garants de la paix civile.
Qu’un pays fort a besoin d’écoles comme de prisons, de Justice.
Ils avaient accepté d’incarner cette autorité de la Nation, déterminés, à être un maillon dans la grande chaîne de la Justice.
À faire vivre cette Justice, sans laquelle la démocratie vacille. Je veux le dire : il n’y a pas de Justice digne de ce nom, si son autorité n’est pas respectée. Pas de Justice, s’il subsiste une once d’impunité. Pas de Justice, si les peines ne sont pas appliquées. Alors la Justice, c’est aussi Fabrice Moello et Arnaud Garcia. C’est Nicolas. C’est Damien. C’est Arnault. Ce sont toutes les femmes et tous les hommes de l’administration pénitentiaire, dont l’engagement est exceptionnel, le dévouement remarquable, la mission essentielle. Grâce à eux, grâce à vous, les peines prennent un sens. Grâce à eux, grâce à vous, le bras de la Justice ne faiblit pas. Grâce à eux, grâce à vous, nos concitoyens savent qu’ils sont protégés. Car tel est votre quotidien, tel est le quotidien des femmes et des hommes de l’administration pénitentiaire : surveiller, sécuriser, accompagner, réinsérer.
Prévoir, prévoir toujours ce qui peut se passer. Agir, agir avec méthode, avec sang-froid, avec discernement. Servir, servir la mission, parfois face aux coups, aux insultes, aux menaces. Parfois, comme mardi dernier, jusqu’à la mort. L’uniforme des femmes et des hommes de la pénitentiaire, c’est celui de la République doublé de celui de la Justice. Alors, pour eux aussi, avec le Président de la République, nous nous engageons et nous nous engagerons encore. Nous nous engageons et nous nous engagerons encore pour qu’ils puissent accomplir leurs missions. Nous nous engageons et nous nous engagerons encore pour une juste reconnaissance de leur statut. Nous nous engageons et nous nous engagerons encore pour leur donner des moyens à la hauteur de leurs besoins. Troisième force de sécurité de notre Nation, les femmes et les hommes de l’administration pénitentiaire veillent sur l’ordre républicain. Et ce matin, je pense à eux. Je pense à tous les membres de l’administration pénitentiaire. Je pense à tous les membres de PREJ, si nombreux aujourd’hui. Je pense aux agents d’établissement, aux surveillants qui exercent leurs métiers de coursives en coursives, ou en surveillance des placements sous bracelet électronique.
Je pense aux membres des services de probation et d’insertion.
Je pense aux agents d’intervention, les ERIS, qui gèrent les crises et interviennent partout où la violence gronde.
Je pense aux équipes cynotechniques, avec leurs chiens de recherche.
Malgré les difficultés, malgré la violence à laquelle vous faites face, malgré l’émergence d’une nouvelle génération de prisonniers, totalement désinhibée : vous savez opposer le règne du droit à celui de la violence. Vous savez faire en sorte que force aille toujours à la loi. Vous savez aussi garder le cœur ouvert aux fragilités, déceler les volontés de revenir sur le droit chemin, fidèle à ce rôle de réinsertion qui vous revient également.
Le 14 mai, l’effroi a touché la France. Le cœur de chaque français s’est serré en apprenant que notre pays avait perdu deux de ses serviteurs. Que trois d’entre eux étaient gravement blessés. Je veux redire ma solidarité, mon soutien à la communauté pénitentiaire mais aussi judiciaire. Une communauté dont l’émotion et la douleur sont indépassables, avec la perte de deux collègues, de deux amis. Avec cette peine qui s’ajoute au deuil de l’agent Grégory Lesecq, mort il y a trois mois durant une intervention de l’ERIS de Lille.
Je veux vous le dire droit dans les yeux : leur mort ne restera pas impunie. L’enquête avance. Elle se poursuivra, aussi longtemps qu’il le faudra. Mais elle aboutira.
Aux criminels lâches et odieux, qui ont accompli ce crime barbare, je veux le dire à nouveau : ne dormez pas tranquilles. Nous vous traquons. Nous vous trouverons. Et nous vous punirons. Le glaive de la Justice ne tremblera pas. Nous vous le devons.
Fabrice Moello, Arnaud Garcia, la France n’oublie pas ses enfants qui, pour elle, ont pris l’uniforme, ceux qui ont fait vivre ses institutions, qui ont fait régner ses valeurs républicaines, jusqu’à en mourir.
Nous honorerons vos mémoires. Nous ferons vivre vos combats. Nous ferons perdurer vos passions. Fabrice Moello sera promu dans le corps de directeur des services pénitentiaires, Arnaud Garcia dans le corps des officiers, au grade de capitaine. Nous serrerons les rangs. Nous prendrons soin de vos familles, de vos enfants. Comme nous prendrons soin de vos camarades blessés. Nous soutiendrons ceux qui reprennent après vous le flambeau que vous avez placé si haut. Et c’est pour vos vies consacrées à la justice, et emportées en son nom, que j’ai l’honneur, ce matin, de vous remettre les insignes de chevalier de la Légion d’honneur.

Vive la République ! Vive la France !

 

Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur et des Outre-mer
> Par trois fois, les Calédoniens ont dit non à l'indépendance. Que faut-il faire d'autre que de constater la voix démocratique ?

> [Attaque de la synagogue de Rouen] Je vous remercie d’avoir salué les policiers et les sapeurs-pompiers qui sont intervenus très rapidement, alors que l’incendiaire de la synagogue était encore sur les lieux. Celui-ci a d’abord agressé les sapeurs-pompiers qui éteignaient le feu et qui ont heureusement permis de limiter les dégâts dans cette magnifique synagogue située en pleine ville de Rouen. Il a ensuite attaqué au couteau les policiers. Un jeune policier adjoint de 24 ans, après les sommations nécessaires, a utilisé son arme, à bon droit, pour neutraliser l’assaillant qui fonçait sur lui avec son couteau et n’était plus qu’à quelques centimètres. Permettez-moi de le remercier et de le féliciter à nouveau ici, après que j’ai fait le déplacement dans votre ville dès lundi pour le décorer immédiatement.
Comme je le dis depuis plus de deux ans et singulièrement depuis l’ignoble attentat terroriste du Hamas du 7 octobre dernier, les Juifs en France sont sous la menace d’actes antisémites particulièrement graves et qui se sont multipliés ; c’est le cas partout dans le monde, mais particulièrement en France.
Parce que nous avons organisé la protection des lieux de culte, la synagogue de Rouen a bénéficié des moyens de l’État pour installer des caméras de vidéoprotection qui nous ont aidés à intervenir ; les patrouilles de sécurité, présentes dès six heures du matin, ont pu circonscrire le feu en quelques secondes et empêcher l’incendiaire de s’en prendre à d’autres personnes dans la rue avec son couteau.
Parce que nous savons que cette menace est extrêmement forte, la police et la gendarmerie sont fortement mobilisées partout en France pour protéger tous nos compatriotes juifs et leurs biens, à commencer par les lieux de culte. La haine du Juif, c’est la haine de la France, c’est la haine de l’autre (M. Meyer Habib applaudit) et, si j’ose dire, c’est la haine de soi-même.

 

Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités
> Il nous faut revenir tout de suite sur certains éléments. En ce qui concerne l’emploi, le gouvernement qui a mis fin au chômage de masse est bien celui dont les membres sont issus de cette majorité ! Depuis 2017, plus de 2 millions de personnes ont retrouvé le chemin de l’emploi ; c’est absolument indéniable.
La réforme de France Travail, qui concerne l’accompagnement, a d’abord été expérimentée dans dix-huit départements. Les premiers résultats ayant été particulièrement intéressants, le Premier ministre a décidé, dès le mois de février dernier, de passer de dix-huit à quarante-sept départements, afin d’apporter immédiatement aux femmes et aux hommes les plus éloignés de l’emploi des réponses : une immersion de quinze heures ou la découverte, dans les entreprises, des métiers vers lesquels ils ou elles souhaitent s’orienter.
Nous devons en effet parler de l’assurance chômage : qu’auriez-vous dit si nous n’en avions pas parlé ! À l’automne dernier, les partenaires sociaux ne sont pas parvenus à un accord : le Gouvernement a accepté de prendre un décret de jointure, qui prend fin le 30 juin prochain. Par conséquent, si nous n’avançons pas sur ce sujet, il n’y aura plus aucune réponse à compter du 1er juillet.
Il nous faut être capables d’œuvrer à une évolution de l’assurance chômage et d’apporter aux Français des réponses ; nous le leur devons et c’est ce que nous faisons. Après huit mois de négociations, les partenaires sociaux ne se sont pas parvenus à se mettre d’accord. Le Gouvernement travaille sur ce sujet, avec deux principaux objectifs : le travail doit être plus rémunérateur ; les Françaises et les Français les plus éloignés de l’emploi doivent être accompagnés.

> Huit mois. C’est le délai qui s’est écoulé entre le début de la discussion sur l’assurance chômage et sa fin ; elle n’a pas été conclusive. Vous le savez très bien, le 8 avril, les partenaires sociaux ont fait part de leur incapacité à trouver un accord. Nous sommes le 21 mai. La question de la responsabilité du Gouvernement se pose. Il doit procéder à une réforme, afin que le 1er juillet – c’est-à-dire, dans six semaines, je souscris à votre décompte calendaire –, les allocations soient versées aux bénéficiaires.
La question est celle du travail avec les partenaires sociaux. C’est la raison pour laquelle nous lançons un nouveau tour de consultations avec eux pour préparer la réforme de l’assurance chômage évoquée par M. le Premier ministre. Vous le savez, elle se fera par décret. Un décret de jointure a été publié. Il est désormais nécessaire de prendre un décret prévoyant les différents éléments. Vous comprendrez que son contenu soit d’abord présenté aux partenaires sociaux. Il fait l’objet des discussions que nous avons avec eux.
Oui, nous parlerons des séniors et des durées d’affiliation. Le sujet qui nous préoccupe est de ramener vers l’emploi tous celles et ceux qui le peuvent, en associant l’information – c’est le meilleur des moyens pour y parvenir – à l’accompagnement de celles et ceux qui ont perdu leur emploi. C’est en maintenant leur employabilité que nous les aiderons à retrouver un emploi.

> l’Europe de la santé s’est révélée vitale et concrète pendant la pandémie. En effet, nous avons commandé et distribué 1,7 milliard de doses de vaccin avant le mois de juin 2022 dans le monde entier, alors qu’une compétition féroce avait lieu. L’OMS – Organisation mondiale de la santé – considère que 1,4 million de vies ont été sauvées sur le continent européen, ce qui est loin d’être neutre. Depuis, l’Europe a su tirer les conséquences de la pandémie, en créant une véritable Europe de la santé, avec une autorité européenne dédiée à la sécurité sanitaire, la constitution de stocks stratégiques de matériels d’urgence, et, enfin, l’élaboration d’un premier plan européen de lutte contre le cancer. Voilà des éléments concrets qui nous permettent de promouvoir un effort de recherche à l’échelle européenne. Nous devons aller plus loin. C’est le sens du discours prononcé par le Président de la République à la Sorbonne. Nous devons renforcer l’autonomie stratégique en matière de production de médicaments, en créant une alliance européenne en matière de relocalisation des médicaments critiques, ainsi qu’il en a été question lors du sommet Choose France 2024. Il faut réviser la législation pharmaceutique européenne et élaborer un plan de lutte contre les maladies rares, qui touchent trois millions de personnes en France et trente millions en Europe. Cela veut dire : renforcer les réseaux européens de recherche, adopter des recommandations européennes et mieux coordonner l’ensemble des travaux. Les familles l’attendent. Avec l’Europe, nous sommes capables de le faire.

> En 2030, le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans surpassera celui des moins de 15 ans. L'élaboration d'une stratégie pour le grand âge n’est plus une option, c’est une obligation. Financement, gouvernance, politique domiciliaire... Le Cese sera saisi pour engager cette grande réflexion sociétale.

> [Santé] mon premier grand chantier est celui des métiers du soin et de l’humain. Nous devons leur permettre de retrouver de l’attractivité et du sens. Je souhaite agir à plusieurs niveaux à travers:
- la construction de parcours de carrière dans chaque bassin de vie ;
- un meilleur pilotage global des rémunérations ;
- la lutte contre la sinistralité en développant de véritables plans de qualité de vie au travail, de prévention des accidents et pour préserver la santé des professionnels de santé ;
- des campagnes de valorisation des métiers de l’humain ;
- la simplification des 13 diplômes du travail social, création d'un socle commun, et meilleure reconnaissance des acquis de l'expérience. Avec ambition et sérieux, mon engagement pour revaloriser ces métiers est total.

 

Nicole Belloubet, ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse
> L’effondrement du prestige du métier de professeur ? La réponse est non. Nous faisons l’inverse en redonnant du sens au métier et en réformant la formation initiale avec un parcours lisible en 5 ans et une fin de scolarité professionnalisante et rémunérée.

> Notre École, c’est 12 millions d’élèves et 59 000 établissements. Et elle réussit ! Je ne nie pas la réalité en disant ça. Il y a des difficultés mais nous devons arrêter cet école-bashing permanent.

> l’objectif de l’éducation nationale est de répondre aux besoins de chacun des élèves en prenant en considération leurs spécificités. C’est la raison pour laquelle nous travaillons à l’individualisation des besoins pour leur apporter des réponses adéquates.
L’éducation prioritaire a, depuis longtemps, fait l’objet d’une attention particulière et bénéficié de moyens importants. Nous avons procédé au dédoublement des classes de CP, de CE1, puis de grande section de maternelle : c’est une avancée réelle. Nous avons déployé dans les écoles de nouveaux personnels d’encadrement et médico-sociaux. Je ne nie pas que des manques subsistent, mais l’objectif de cette politique publique est clair.
L’évolution de la démographie nous impose d’analyser la situation dans l’ensemble des territoires. Je l’ai déjà indiqué à plusieurs députés, nous nous engageons à reprendre la cartographie de l’éducation prioritaire d’ici à la rentrée 2025. Je proposerai des évolutions à la rentrée prochaine afin de mieux adapter la politique d’éducation prioritaire à la démographie et aux besoins des élèves. Notre objectif est leur réussite et c’est pour elle que nous agissons.

 

Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire
> Avec le lancement du Plan national pour améliorer le bien-être des animaux de compagnie, nous prolongeons la dynamique positive initiée par le gouvernement depuis 2020. Cette stratégie interministérielle, en collaboration avec les associations de protection animale et les organisations vétérinaires, vise à :
- Prévenir et lutter contre les abandons d’animaux ;

- Améliorer la gestion de l’errance canine et féline ;
- Prévenir et lutter contre la maltraitance des animaux de compagnie.
Ce plan, articulé autour de 5 grands axes, pose les premiers jalons vers une approche globale consistant à mieux intégrer l’animal de compagnie dans la vie de la société.

> Pourquoi tant de haine de l’extrême gauche contre l’enseignement agricole privé ? Sortez de vos dogmes. Sortez de vos vieux réflexes pavloviens. Pour le bien des élèves de l’enseignement agricole. Pour le maintien d'un équilibre privé et public qui fonctionne bien aujourd'hui.

> Ne cédons pas à la démagogie de ceux qui cherchent des boucs-émissaires dans la crise agricole. Lutte contre le braconnage, préservation de la biodiversité, actions en faveur de l’eau… les missions de l’Office français de la biodiversité sont importantes, et leurs agents font leur travail dans des conditions parfois difficiles. Notamment parce que les règles peuvent leur paraître ubuesques. Simplifier la réglementation, devenue contradictoire ou incompréhensible, c'est aussi l’objet de notre texte de loi.

> Réduire l'usage des produits phytosanitaires est notre objectif. Insecticides, fongicides, herbicides : 150 millions d’euros par an sont dédiés dès cette année à la recherche d'alternatives et à leur déploiement. C’est comme ça, concrètement, que nous trouverons des alternatives, et non par la fixation d'objectifs déconnectés de toute réalité.

 

Sébastien Lecornu, ministre des Armées
> Simplifier les normes, fluidifier les procédures et diversifier les carrières : l’économie de guerre appelle des changements culturels de fond au sein du ministère.

> Nous avons construit avec la Belgique une relation de confiance, et un partenariat stratégique que nous renforçons encore. Avec mon homologue, signature d’une lettre d’intention :
- Élargir le partenariat terrestre CaMo (Capacité Motorisée), à travers l’acquisition par la Belgique de capacités d’artillerie : 28 Caesar et 24 Griffon équipés de mortiers.
- Recréer une filière de petit calibre en France, en partenariat avec l’industrie belge.
- Projet de fusion entre John Cockerill Defense et Arquus pour créer un nouveau champion industriel européen.

 

Stéphane Séjourné, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, secrétaire général de Renaissance
> Face aux instrumentalisations partisanes de l’action de la Cour pénale internationale, j’ai rappelé nos principes :
- Respect de l’indépendance de la justice internationale ;
- Aucune équivalence possible entre le Hamas, un groupe terroriste, et Israël, un état démocratique.

> Rappelons, sans outrance, quatre principes. Le premier, c’est que la France reconnaît l’indépendance de la Cour pénale internationale. C’est un principe de droit qui est peut-être évident pour vous tous, en votre qualité de parlementaire.
Deuxième principe : ces demandes de mandat d’arrêt simultanées ne doivent pas conduire à mettre un signe d’équivalence entre le Hamas et Israël.
D’un côté, il y a un groupe terroriste qui s’est félicité des attentats du 7 octobre, qu’il a revendiqués ; de l’autre, il y a un État démocratique, Israël, qui doit respecter le droit international, dans le cadre de la conduite d’une guerre qu’il n’a pas lui-même déclenchée.
Les juges de la CPI doivent désormais se prononcer sur la délivrance de ces mandats. Ils le feront en toute indépendance.
Le troisième principe, c’est la solidarité de la France envers les Israéliens et les Palestiniens. La France est engagée pour chercher une solution politique. C’est le seul horizon de paix possible et nous travaillons diplomatiquement à cette fin.  
Le quatrième principe, que vous [LFI] avez peut-être oublié, est celui de rigueur. Depuis des mois, vous donnez des leçons de droit et de morale sur cette question.
Si vous avez écouté les propos du procureur, vous avez pu constater qu’il se tenait à très grande distance de la notion de génocide que vous agitez à des fins politiques depuis des mois. Vous devriez vraiment vous inspirer du principe de rigueur.

 

Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques
> Il faut regarder la réalité en face, la fonction publique n'est plus aussi attractive. Et derrière, il y a les services publics de tous les Français. C’est l’objet du projet de loi que je suis en train de construire avec les agents, les employeurs et les organisations syndicales.

> Agents publics hospitaliers. La future réforme de la fonction publique doit permettre de lever les rigidités qu’ils rencontrent et de mieux accompagner leurs parcours et leurs conditions de travail.

> Avec notre stratégie nationale dotée de 1,5 milliards d'euros et consolidée avec France 2030, nous avons un écosystème de recherche et de technologie en IA mondialement reconnu. Dans l'administration, nous poursuivrons la construction d'Albert, l'IA souveraine des services publics, pour simplifier la vie des Français.

 

Sylvie Retailleau, ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche
> Qu’on se le dise : la France est un leader de l’IA. Pour renforcer encore notre expertise, le président Emmanuel Macron vient d’annoncer un financement de 400M€ de France 2030 pour 9 pôles d’excellence en IA. Une action décisive pour nourrir la recherche, la formation et l’innovation sur l’un des enjeux clés de demain.

 

Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’Industrie et de l’Energie
> Se battre contre la fin des voitures thermiques en 2035, c’est accepter qu’elles soient produites ailleurs et donc augmenter nos dépendances. Nous réconcilions l’industrie et l’écologie et donnons un avenir à la France.

 

Sarah El Haïry, ministre déléguée chargée de l’Enfance, de la Jeunesse et des Familles
> Un mode d’accueil de qualité pour chaque enfant doit être un droit, pas une chance. C'est l'ambition que je poursuis avec le service public de la petite enfance.

 

Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de l’Europe
> Face à la multiplication des crises, l’Europe a besoin d’un sursaut. Le président de la République française Emmanuel Macron a proposé une feuille de route pour garantir notre sécurité, notre prospérité et notre liberté. Elle s’adresse à tous les Européens.

> Les démocraties sont pilonnées par la propagande des régimes autoritaires qui veulent en saper les fondations en instillant le virus de la désinformation dans le débat public. Pour y faire face, nous construisons un bouclier démocratique européen.

> Jordan Bardella et ses amis du RN sont des patriotes de pacotille et des déserteurs. Si nous les avions écoutés, la France ne serait plus la France mais un satellite de la Russie.

> Face aux manipulations de l’information qui menacent nos démocraties, nous serons intraitables. Avec nombre de mes homologues européens, nous formulons 21 propositions pour mieux lutter contre la désinformation. L’Europe doit être un bouclier!

> [Conseil européen des Affaires générales] Les réunions d’aujourd’hui seront l’occasion d’exprimer le soutien de la France à la Moldavie et à l’Ukraine dans leur chemin vers l’adhésion à l’Union européenne, comme nous l’avons fait avec mes homologues polonais et allemand, et d’appeler à l’ouverture effective des négociations avant la fin de la présidence belge. Ce sera aussi l’occasion d’adopter le principe de la mobilisation des revenus d’aubaines des actifs russes gelés, au profit du soutien militaire à l’Ukraine.
L’occasion également de soutenir la proposition de la Commission européenne de clôturer la procédure prise à l’encontre de la Pologne au titre de l’article 7. Le peuple polonais a fait un choix clair : celui de la démocratie, de la liberté et de l’État de droit. Cette décision nous rappelle à quel point ce sont des acquis fragiles qu’il convient de préserver en toutes circonstances.
Enfin, nous réaffirmerons, comme nous l’avons fait avec l’Allemagne et la Pologne, notre détermination à lutter activement contre toutes les formes de désinformation, en bâtissant pour l’avenir un bouclier démocratique pour l’Europe qui repose sur trois piliers : la détection, le traitement et l’immunité.
- La détection des contenus de désinformation et des opérations de propagande grâce au soutien à une presse libre et indépendante et au développement d’une expertise, comme celle que le Président de la République a voulu créer en 2021 avec l’agence Viginum.
- Le traitement avec la suppression des comptes et la sanction des auteurs d’opérations de propagande, comme nous le permettent désormais les textes législatifs européens, je pense en particulier au DSA.
- Puis, enfin, le développement d’une immunité collective face à la désinformation grâce au renforcement, dans les États membres, de l’esprit critique, de l’éducation critique aux médias et au développement d’une véritable plateforme européenne d’information.

 

► Assemblée nationale 
Yaël Braun-Pivet (présidente) 
> Depuis une semaine, la Nouvelle-Calédonie traverse une crise d’une exceptionnelle gravité. Le dernier bilan est particulièrement lourd : six morts, dont deux gendarmes, et une centaine de blessés recensés parmi les forces de l’ordre et la population.
En notre nom à tous, je tiens à saluer l’engagement total du Gouvernement, des agents de l’État et des collectivités locales, ainsi que des forces de sécurité et de secours, pour rétablir l’ordre et porter assistance à chacun. Saluons aussi les élus de Nouvelle-Calédonie, qui, unis dans leur diversité, ont tous appelé au calme et condamné les exactions. Je veux souligner enfin la résilience de la population dans cette épreuve. Nous sommes témoins de tous les gestes de solidarité et de partage, des mains tendues si représentatives de ce territoire.
Le texte des accords signés à Matignon le 26 juin 1988 commençait ainsi : « Les populations de Nouvelle-Calédonie ont trop souffert, dans leur dignité collective, dans l’intégrité des personnes et des biens, de plusieurs décennies d’incompréhension et de violence. » L’année dernière, l’Assemblée nationale a honoré la mémoire de Jacques Lafleur et de Jean-Marie Tjibaou en donnant leurs noms à l’une de nos salles. Soyons collectivement à la hauteur de ce qu’ils ont su construire.
Monsieur le Premier ministre, l’Assemblée nationale jouera pleinement son rôle dans la période difficile qui s’est ouverte. Tous les groupes politiques se joignent à moi pour appeler à l’apaisement et pour œuvrer au retour du dialogue et de la paix.
En mémoire de ceux qui ont perdu la vie et en signe de solidarité avec leurs familles, je vous demande de bien vouloir observer une minute de silence.

 

► Autres 
● Organisations centristes 
♦ Renew Europe
(Députés français du groupe centriste au Parlement européen) 
Valérie Hayer (présidente)
> Nous sommes face aux élections les plus importantes de notre Histoire. L’Europe est mortelle, alors prenons les bonnes décisions car nous avons besoin d’Europe pour l’avenir. C'est ça qui se joue le 9 juin.

> Les élections sont le 9 juin, dans trois semaines. Et le 9 juin, c’est un seul jour, un seul tour ! D’ici le 9 juin, je veux montrer aux Français à quel point nous avons besoin d'Europe. Ne vous laissez pas duper par ceux qui vous disent le contraire.

> Les ingérences se multiplient sur notre sol. De la Russie à l’Azerbaïdjan, l’actualité nous le rappelle brutalement. Étoiles juives, mur des Justes, Nouvelle-Calédonie. Nos démocraties ne se laisseront pas déstabiliser face à ces actes inadmissibles. Front uni, en Européens.

> Je suis la seule à avoir voté le Pacte Asile et Migration. Tous ici auraient pu sauver des migrants en mer et réguler les flux irréguliers. Aucun n’a été à la hauteur. Avec ce Pacte, on accueille ceux qui ont vocation à rester et on renvoie les autres.

> Pour financer nos investissements, je veux faire payer ceux qui ne paient pas leur juste part d'impôt. Je propose aussi un livret d'épargne européen pour faire fructifier l’épargne des Européens en leur permettant d’investir dans nos industries stratégiques.

> Certains appellent à un ISF européen. Mais c’est la mauvaise échelle, car les ultrariches iraient alors s’installer à Dubai ou ailleurs. Pour les faire rester en Europe, la taxation des ultrariches doit se faire au niveau international.

> Les règles du jeu international ne sont pas respectées, alors cessons d'être le dindon de la farce mondiale. Je veux que nous soyons au rendez-vous de notre tissu industriel. Faisons revenir nos usines stratégiques chez nous, en France et en Europe.

> Lorsque je suis allée à Kiev, le président Zelensky m’a dit merci pour l’action du Parlement européen. Merci aussi pour l’action et le leadership d'Emmanuel Macron, car le Président de la République a changé les termes du débat sur le conflit en Ukraine.

> Nous sommes dans une course contre la montre. À l’ouest, Donald Trump sera peut-être élu dans six mois. À l’est, Vladimir Poutine menace l’Europe. Alors agissons. Mettons sur pied un fonds de défense européen, triplons nos dépenses pour nous protéger !

> La Russie multiplie les entreprises de déstabilisation de nos démocraties et mène une guerre qui est existentielle pour les Ukrainiens, comme pour le projet européen et notre économie. Les postures de Jordan Bardella sur la question sont insupportables.

> Aujourd’hui, les géants du numérique sont moins taxés que le boulanger du coin. Les choses doivent changer. Voilà un exemple du sens que l’Europe a à mes yeux : comment avancer en commun. Moi, je veux servir les intérêts des Français grâce à l’Europe.

> À Budapest, les juges ne sont plus indépendants, la liberté de la presse est mise à mal, la corruption mine le pays. Au Parlement européen, j’ai donc négocié et fait appliquer une règle simple : pas d’argent européen à ceux qui ne respectent pas nos valeurs.

> Sans conteste, l’Ukraine a un destin européen. Mais elle n’intégrera pas l’Union demain matin car trois conditions s’imposent : qu’elle ne soit plus en guerre, que Kyiv engage des réformes, et que notre Union se réforme elle aussi.

> L’extrême-droite ne dit plus qu’elle veut sortir de l’Europe. Mais mettez bout à bout toutes leurs propositions, et vous aurez sous les yeux leur vrai projet : un Frexit en pièces détachées.

> L’Europe est un levier extraordinaire pour nous imposer ensemble face aux géants du numérique ou à nos concurrents internationaux. Regardez le Royaume-Uni. Aujourd'hui, les Britanniques regrettent le Brexit…

> En renforçant l’Europe, nous renforçons la France. Au Parlement, je me bats tous les jours depuis 5 ans pour nos usines, nos artisans, nos commerçants. La mission que je me suis donnée, c’est de rendre l’Europe plus efficace et plus utile aux Français.

 

 

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