► Emmanuel Macron (Président de la République)
> [Discours à l’occasion de la Fête de l’Europe / Dresde, Allemagne]
(…) Quand François Mitterrand était venu ici quelques semaines après la chute
du Mur, c’était encore la République démocratique allemande. Aujourd'hui, en
tant que premier Président français à s'exprimer devant vous à Dresde depuis la
réunification, je suis donc particulièrement honoré, cela me touche beaucoup.
C'est un honneur pour moi en tant que Français et ami de l'Allemagne, mais
aussi pour moi en tant qu'Européen convaincu.
Et pourtant, et pourtant, que de chemin parcouru depuis tant d’années ensemble
entre l’Allemagne et la France, nous comme Européens. Aujourd’hui, ici
présents, que nous venions de Varsovie ou de Prague, de Weimar ou de Görlitz,
nous sommes tous parties prenantes de ce projet politique unique au monde :
l’Union européenne.
Dresde, ville jumelle de Strasbourg, capitale européenne, est en quelque sorte
la métaphore de ce projet. Ville ravagée par la guerre, dont la Frauenkirche,
cette église bombardée en 1945 puis reconstruite en 2005, dresse vers le ciel
un message d'espoir. Dresde, devenue toute entière phœnix et leçon d'espoir.
Une ville d'histoire qui a su se projeter vers l'avenir et prendre le virage
des temps. Dresde qui a vibré la première à chaque inflexion du siècle : des
mouvements de dissidence en RDA, à l'appel à l'unité allemande lancée par
Helmut Kohl en 1989 devant cette même Frauenkirche alors en
ruine. Dresde et la Saxonie, qui a su prendre le défi du siècle, qui va de l'innovation,
cette Silicon Saxony aujourd'hui inventée. Merci aujourd'hui de nous
accueillir.
Mais si je suis devant vous aujourd'hui, c'est pour vous parler de notre
Europe, de notre avenir, quelques semaines avant le 9 juin, où les citoyens,
partout en Europe, auront à aller voter, se prononcer pour choisir un destin.
Et le faire aujourd'hui parce que je suis profondément convaincu que sans doute
plus que jamais, nous avons à choisir l'avenir de notre continent. Oui, plus
que jamais, parce que l'Europe vit un moment décisif. Et je le disais à la
Sorbonne, il y a quelques semaines, notre Europe peut mourir si elle prend les
mauvaises décisions, parce que le continent européen qui est le nôtre, cette
aventure politique inédite qui est la nôtre, c'est une histoire de paix, de
prospérité et de démocratie.
Et aujourd'hui, en Europe, notre paix, notre prospérité, nos démocraties sont
menacées si nous ne savons pas réagir, si nous ne savons pas prendre les bonnes
décisions ! Et c'est là, oui, où l'Allemagne et la France ensemble, mais tous
les Européens, ont une responsabilité inédite pour nous-mêmes et pour les
générations à venir.
La paix, la paix d'abord ! Frieden ! L'Europe est un
garant de la paix. Pour de nombreux parmi nous, cet argument semblait être
dépassé, cela semblait être un signe du succès de ce que nous avions réussi à
faire. Mais aujourd'hui, il y a à nouveau la guerre en Europe depuis la guerre
d'agression lancée par la Russie contre l'Ukraine. En attaquant l'Ukraine, la
Russie a attaqué les principes de la Charte des Nations Unies ; en
attaquant l'Ukraine, la Russie a décidé de menacer la sécurité de notre
continent tout entier.
Et je le dis, dans un endroit de l’Europe qui a vécu au fond une tout autre
deuxième moitié de 20e siècle que mon pays. Parce que nous avions, en quelque
sorte, abandonné cette partie de l'Europe à un rideau de fer qui soudain tomba,
divisant notre continent en deux. Je parle ici avec beaucoup d'humilité à une
partie de l'Europe qui a connu la domination de l'Union soviétique qui a bâti
son propre chemin ; je parle ici dans une partie de l'Europe, qui a
retrouvé l'unité, l'unité allemande, mais qui nous a, ce faisant, permis de
bâtir, non pas un élargissement de l'Europe, non, mais qui a juste permis à
l'Europe de se retrouver comme elle aurait dû toujours être unie. Je ne parle
pas à l'Est de l'Europe, j'en parle en son centre, en vous parlant ici à
Dresde.
Et oui, je vous le dis, la guerre d'agression menée par la Russie contre
l'Ukraine est évidemment d'abord une guerre qui touche nos amis ukrainiens,
leur souveraineté, leur intégrité territoriale. Et je veux ici saluer leur
courage, la bravoure avec laquelle ils défendent leur sol, leur peuple, depuis
maintenant dix ans et plus encore depuis un peu plus de deux ans. Nous pouvons
ici les applaudir.
Mais se joue en Ukraine notre capacité à être en sécurité en Europe. Quelle
paix, quelle sécurité en Europe si nous laissons la loi du plus fort l'emporter
sur notre continent ? Quelle paix et quelle sécurité en Allemagne, en France,
en Pologne, en Lituanie, en Roumanie, si la loi du plus fort prévaut en Ukraine
? Quelle paix, quelle sécurité si la Charte des Nations Unies est foulée aux
pieds à quelques centaines de kilomètres d'ici ? Aucune.
Alors, je vous le dis, oui, en Ukraine, c'est bien notre sécurité et notre paix
qui se joue. C'est pourquoi je suis si fier que, Européens depuis le premier
jour, nous ayons été unis. Européens depuis le premier jour, nous avons décidé
des sanctions contre la Russie pour empêcher son effort de guerre. Européens,
dès les premiers jours, nous avons décidé de soutenir l'Ukraine. Nous avons
décidé ensemble en Européens de lui ouvrir les bras, celle de la candidature à
l'accession à notre Union. Et ensemble en Européens, aujourd'hui et demain,
nous continuerons aussi longtemps et autant qu'il le faudra pour aider
l'Ukraine à se défendre, à protéger son sol et à défendre notre sécurité.
Mais je le dis ici avec la même force, nous, Européens, nous ne faisons pas la
guerre à la Russie ou au peuple russe. Non ! Mais nous n'acceptons pas la
dérive d'un pouvoir autoritaire, révisionniste, qui a décidé de jouer avec
l'avenir de l'Europe pour bâtir des rêves d'empire, divertir son peuple, nous
ramener dans les pires moments du XXe siècle. Non, nous ne faisons pas la
guerre à la Russie et à son peuple. Nous, Européens, nous voulons la paix, une
paix durable, c'est-à-dire la paix que les Ukrainiens, parce que nous leur
aurons permis de se défendre, auront choisi et négocié, une paix respectueuse
de leur souveraineté, une paix respectueuse du droit international, une paix
choisie et durable. La paix n'est pas la capitulation de l'Ukraine ; la paix
est celle que les Ukrainiens auront choisie.
Et c'est pourquoi nous, Européens, au-delà de l'aide à l'Ukraine, avons
aujourd'hui un défi : bâtir une défense et une sécurité commune. Nous en avons
beaucoup fait ces dernières années, plus qu'on ne croyait, mais ce rêve de
défense et de sécurité était aux prémices de notre Europe.
Et je dois bien avouer, avec beaucoup d'humilité, qu'au mi-temps des années 50,
c'est la France qui l'arrêta. Mais depuis tant de décennies, nous avons en
quelque sorte, nous, Européens, décidé de renvoyer la défense, la sécurité à
chaque pays et parfois de la déléguer à d'autres grandes puissances, nos
alliés, et en particulier nos alliés américains. Et je le dis ici avec une
immense amitié, nous qui allons dans quelques jours recevoir nos alliés
américains sur les plages de Normandie pour fêter les 80 ans du débarquement.
Oui, nous avons eu de la chance d'avoir, durant ces décennies, des alliés comme
les États-Unis d'Amérique pour nous libérer et dans cette période en Ukraine,
pour nous seconder, pour être à nos côtés, pour aider les Ukrainiens avec nous.
Mais nous arrivons à un moment de notre histoire où, au fond, nous avons le
droit, même le devoir, de nous dire : quelle chance nous avons d'avoir ces
alliés ! Mais est-ce raisonnable de leur demander toujours davantage d'efforts
quand, il faut bien le voir aussi, leurs priorités sont parfois ailleurs ?
Nous sommes sur un continent que nous partageons - et la géographie, nous ne la
changerons pas - avec la Russie qui, aujourd'hui, menace notre sécurité et a
agressé l'Ukraine. Mais la Russie sera là demain, après-demain. Et donc, oui,
nous sommes à un moment inédit de notre histoire où nous devons penser notre
défense et notre sécurité par nous-mêmes et pour nous-mêmes, en tant
qu'Européens. C'est-à-dire le faire comme alliés au sein de l'OTAN, le faire
comme membres de l'Union européenne, mais nous dire aussi comme membres de la
Communauté politique européenne : nous avons notre histoire, notre géographie.
Et la vraie réunification de l'Europe sera une Europe qui sait penser son cadre
commun de sécurité et de défense par elle-même et pour elle-même. C'est cela le
défi des années qui viennent.
Et donc il nous faudra, dès les prochains mois, en Européens, redéfinir ce
cadre. Quels sont nos risques ? Quels sont nos adversaires et nos ennemis ?
Quelle est la nature des risques et des menaces ? D'où peuvent-elles venir ? La
Russie ? L'Iran ? D'autres puissances ? Comment tenir notre voisinage ? Comment
bâtir notre sécurité ? Dans quel cadre ? Nous devons bâtir ensemble un nouveau
concept de sécurité commune. Et sur cette base, et sur cette base seulement,
définir les capacités dont nous avons besoin, les projets communs à construire
et les projets individuels, industriels, technologiques et d’innovation à
construire ensemble en Européens.
Et arrêtons, au fond, sur cette question d’être parfois ou totalement
transatlantiques ou totalement nationalistes ; soyons résolument
franco-allemands, soyons résolument européens. Oui, c'est une révolution
copernicienne qu'il nous faudra faire pour réussir à construire ce cadre de
sécurité, de défense et donc de paix commun, le faire en Européens.
Mais ce moment est le bon. Cette époque nouvelle, Monsieur le Président, que
vous avez nommée, est celle qui doit nous permettre de le faire. Les concepts,
la stratégie, les capacités militaires, les armements et les équipements, mais
aussi l'énergie, la technologie, tout ce qui fait une Europe plus indépendante,
plus souveraine, une Europe qui peut se défendre, se tenir elle-même, une
Europe qui peut survivre face à toutes les menaces, c'est cela ce que nous
devons bâtir maintenant. C'est cela l'Europe possible de la paix, de la
sécurité commune.
Le deuxième défi pour nos générations et pour les plus jeunes qui sont là,
c'est la prospérité.
Je le disais, le rêve européen, ça a été celui d'un marché unique où nous avons
d'abord, entre Français, Allemands et d'autres nations de l'Europe, mis en
commun ce par quoi nous nous faisions la guerre, le charbon et l'acier. Puis,
nous avons bâti un marché commun qui a permis une croissance inédite. L'Europe
est un rêve de prospérité qui a permis de bâtir la croissance, mais aussi le
modèle social le plus généreux du monde. C'est ça notre Europe. C'est ce qui
fait sa force, c'est ce qui nous tient ensemble, ce qui a permis de bâtir cette
Europe de la protection, de la culture, de l'avenir, cette Europe de l'Erasmus,
de l'éducation, parce qu'il y a un modèle de prospérité qui a tenu.
Et là aussi, soyons lucides, regardons les trois dernières décennies. Quand on
compare les États-Unis d'Amérique et l'Europe, la valeur ajoutée par habitant
que nous avons créée est deux fois moins importante que celle créée aux
États-Unis d'Amérique, deux fois moins importante. Et donc le risque qui est le
nôtre, est tout simplement que nous ne sachions plus créer notre croissance. Et
sans croissance, plus de modèle social, et dans un continent qui vieillit, qui
a ce modèle-là, c'est la crise assurée. Et c'est la crise de la prospérité
européenne qui nourrit tant d'angoisses, tant de divisions, tant de
déchirements qui parfois fait monter les extrêmes. Et notre Europe qui s’est
tant concentrée sur la compétitivité, qui parfois divise, qui a tant fait mais
qui a aussi été, il faut bien le dire, trop lente à régler la crise financière,
a aujourd'hui un problème de modèle de croissance. Alors oui, je le dis
aujourd'hui à Dresde, notre Europe doit rebâtir ou plutôt bâtir un nouveau
paradigme de croissance pour les générations à venir.
Et ce modèle de croissance, ce n'est pas choisir entre la croissance économique
et la décarbonation ou plutôt le climat - certains voudraient au fond poser
aujourd'hui cette opposition. Non, ce serait une erreur terrible. Et je vous le
dis, ma spécialité, c'est connu pour les Français qui sont là, c'est le « en
même temps ». Et le « en même temps » n'est pas une ambiguïté, ce n'est pas un
mauvais compromis ; c'est le fait de dire qu'il y a des choses parfois
qu'on oppose artificiellement qui, quand on les réconcilie, permettent de bâtir
un chemin de progrès. Eh bien oui, ce nouveau modèle de croissance européen,
c'est un modèle qui assume totalement des investissements massifs dans le
climat et la décarbonation de nos économies. C'est ce qu'il nous faut faire
aujourd'hui, plus vite et plus fort. Nous avons bâti le Green Deal en Europe.
C’est la bonne régulation. Il ne faut pas réguler davantage ou mettre plus de
règles, il faut plutôt simplifier parce que nous avons face à nous les
Américains, les Chinois qui, eux, investissent sans mettre de règles.
Mais nous maintenant, il faut investir beaucoup plus d’argent public et
d’argent privé. L’investir dans la décarbonation de nos économies, dans une
énergie plus propre, renouvelable comme nucléaire, surtout préservation et
efficacité énergétique. Il nous faut investir pour décarboner nos transports,
nos villes, nos habitations. Il nous faut investir pour croître, inventer, ces
technologies vertes qui sont l’avenir de notre continent. Et le faire à un
moment où la Chine et les États-Unis investissent massivement et sont en train
d’attirer ces opportunités à elles - opportunités qui, si nous ne nous
réveillons pas, partiront ailleurs. Donc oui, à un plan d’investissement massif
dans les technologies vertes et l’industrie verte en Europe.
Le deuxième pilier c’est une Europe de l’innovation, de l’intelligence
artificielle.
On a besoin d’investir beaucoup plus dans notre recherche, notre innovation.
Nous sommes encore loin des 3 % de l’agenda de Lisbonne. Je le dis dans un pays
qui est l’un des meilleurs d’Europe, avec beaucoup d’humilité : nous,
Français, nous n’investissions pas assez, nous sommes en train de rattraper et
nous l’avons quasiment fait la part publique, nous n’investissons pas assez
dans notre recherche sur le plan des financements privés. Mais partout en
Europe, nous devons accélérer l’investissement dans la recherche, l’innovation
et en particulier dans l’intelligence artificielle et le quantique. Et je le
dis dans cette Silicone Saxony - nous venons de signer un accord entre le
Commissariat à l’Energie Atomique et votre Fraunhofer - c’est l’un des enjeux
principaux pour notre Europe. La croissance européenne passera par passera par
l'intelligence artificielle, l'innovation, la recherche, des investissements
massifs pour bâtir notre avenir. Alors allons-y avec force et ambition en
européen.
Le troisième axe, c'est une Europe qui doit simplifier ses règles.
La France a du travail à faire et nous devons continuer nos réformes et
croyez-moi, nous n'avons pas arrêté ces sept dernières années. Mais au niveau
européen, nous devons être plus simples, souvent moins bureaucratiques,
davantage accompagner nos entreprises plutôt que de les contraindre par des
règles qui n'existent nulle part ailleurs. Et nous avons une chance, une force,
c'est la taille de notre Europe, ces 450 millions d'Européennes et d'Européens.
Eh bien, nous avons aujourd'hui besoin d'aller plus loin pour notre marché
unique, de le simplifier, de casser les barrières entre ces 27 économies qui
existent dans tant de domaines, et permettre dans les télécommunications,
l'énergie, la finance et tant d'autres, de bâtir enfin un vrai marché européen.
Accélérons sur le marché unique, simplifions l'Europe. C'est la troisième
urgence pour ce modèle de croissance.
Le quatrième pilier, c'est de sortir de la naïveté ; c'est un réveil
stratégique.
L'Europe est le dernier endroit où nous sommes ouverts au reste du monde sans
préférence européenne et sans règle. Allez en Chine, allez aux États-Unis, nous
commerçons, nous voulons développer le commerce mais il y a des préférences
nationales. Alors, je vous le dis, nous avons besoin d'avoir une stratégie
européenne qui bâtisse une préférence européenne en matière de défense, en
matière d'espace, qui bâtisse une stratégie d'achat européen et qui permette
d'avoir des règles commerciales, qui bâtisse des clauses miroirs, c'est-à-dire
une juste concurrence. Pourquoi imposer des règles à nos entreprises et
favoriser les entreprises non européennes en leur permettant d'importer des
choses qui ne respectent pas ces mêmes règles ! Et donc, il faut une Europe qui
se protège mieux sur le plan commercial, sur le plan des règles, une Europe
plus stratégique et moins naïvement ouverte.
Et puis enfin, le cinquième pilier de ce modèle de croissance, c'est
l'investissement.
Nous avons besoin de regarder l'avenir. Et quand je regarde les défis qui sont
devant nous - défense et sécurité, climat, intelligence artificielle - jamais,
à l'échelle d'une génération, nous n'avons eu tant de défis à relever au même
moment. Jamais, à l'échelle d'une génération, nous n'avons eu au fond un tel
mur d'investissement. Si nous voulons le relever, il nous faut beaucoup plus
d'audace. Il faut le faire maintenant, car c'est maintenant que les choix sont
faits, c'est maintenant que nos concurrents stratégiques font ces choix. Et
donc, il nous faut, en Européens et d'abord en franco-allemands, avoir beaucoup
plus d'audace et porter beaucoup plus d'investissements publics communs en
Européens.
Et donc, oui, je vous le dis, aujourd'hui, avec conviction et forte, doublons,
doublons notre budget européen, soit par la taille du budget, soit par des
stratégies d'emprunt commun, soit par des instruments qui existent déjà, deux
fois plus d'investissements publics dans notre Europe ensemble. Et bâtissons ce
marché commun des capitaux, de la finance et de l'investissement pour
multiplier l'investissement privé. Il faut en Europe un choc d'investissement
massif pour relever ce défi !
Et donc, oui, vous l'avez compris, ce modèle de croissance européen nouveau
repose sur ces 5 flèches, ces 5 axes ; mais au fond, c'est une ambition
redoublée. Ne doutons pas, n'ayons pas peur de l'avenir, il y a à inventer un
nouveau modèle de prospérité. C'est maintenant, avec force, avec confiance dans
notre avenir. Alors allons-y ensemble, en Européens.
Et puis, il y a la démocratie, enfin, la démocratie et la liberté.
Alors tout ça nous semblait si évident. Rappelez-vous, après la chute du Mur,
quand l'Europe enfin se réunissait, grâce à votre courage, quand nous nous
retrouvions entre Européens, famille désunie pendant des décennies, la
démocratie et la liberté étaient une évidence. Oui, partout en Europe, cela
allait s'étendre ; ce vent allait souffler, il allait séduire partout, se
répandre à travers le monde. Et regardons-nous aujourd'hui, regardons.
Regardons autour de nous la fascination pour les régimes autoritaires.
Regardons en Europe le moment illibéral que nous vivons, où beaucoup regardent
et se disent, finalement - à quelques kilomètres d'ici, finalement :
prenons l'argent de l'Europe mais oublions l'indépendance des juges. Prenons
l'argent de l'Europe, mais oublions la liberté de la presse. Prenons l'argent
de l'Europe, mais oublions la diversité de la culture. Prenons l'argent de
l'Europe, mais oublions l'autonomie des universités et la liberté académique.
Cette tendance n'est pas une tendance, c'est une réalité en Hongrie ; cela
a été une réalité jusqu'à l'élection formidable en Pologne. Et partout dans nos
démocraties, ces idées prospèrent, poussées par les extrêmes, et en particulier
l'extrême droite. Ce vent mauvais souffle en Europe, c'est une réalité. Alors
réveillons-nous !
Notre Europe n'est pas un supermarché ; notre Europe n'est pas juste un
endroit où on se donne des règles communes. C'est un socle de valeurs, de
culture, de libertés individuelles et politiques. C'est ce sédiment des siècles
qui nous tient. Alors, il nous faut retrouver la force, l'engagement, de le
défendre partout et de le faire dans chaque pays face à ce vent mauvais et aux
extrêmes. Ne soyons plus des habitués, soyons des engagés de l'idée européenne
et de la démocratie.
Face à ce vent mauvais, regardons d'où vient cette colère. Elle vient du
ressentiment de beaucoup qui se sentent en marge du chemin de la
mondialisation, d'un sentiment d'être humiliés par ce qui s'est passé ces
dernières années, de ne pas être compris dans les préoccupations qui sont les
leurs, d'être bousculés dans leur mode de vie, le sentiment d'être les laissés
pour compte d'une Europe qui s'est ouverte au commerce, qui s'est libéralisée,
le sentiment aussi que la culture, les modes de vie auxquels ils ou elles
étaient attachés est bousculée par une Europe qui ne serait que, au fond, un
train d'homogénéisation, de simplification.
Alors face à cela, il nous faut répondre par une Europe du respect, de la
diversité, de la force culturelle. Cette Europe des universités que nous avons
bâtie ces dernières années - 50 universités qui se sont mises en réseau et
continuons, allons plus loin. Une Europe où, grâce à Erasmus, mais démultiplié,
on apprend la culture des uns et des autres, où le Pass culture devient
européen, où le chemin des écrivains passe d'un pays à l'autre, où l'on se
découvre mutuellement, loin des habitudes.
Mais une Europe aussi qui bâtit, en quelque sorte, un humanisme 2.0. Parce que
ce qui nous bouscule dans nos habitudes, dans nos démocraties, c'est le fait
que nous sommes tous passés dans des sociétés où, plusieurs heures par jour,
nous vivons sur des écrans et cela nous a changés. Et nous n'en avons pas pensé
les règles, nous n'avons pas pensé que ça allait nous bousculer, nos
démocraties, nos façons d'être. Et dans ce monde des écrans, nos enfants ne
sont plus formés pareil, ne ressentent plus pareil. Nos jeunes et nous-mêmes,
en quelque sorte, nous n'avons plus la même forge des opinions publiques. Et
donc, dans cette Europe des écrans, il nous faut repenser la protection de nos
enfants et de nos adolescents, un bon usage des écrans, un bon usage de l'apprentissage
du monde par le numérique.
Dans cette Europe des écrans, il nous faut aussi penser la forge de l'opinion
publique. Comment les idées circulent et se forment ? Aujourd'hui, elles
se forment d'une manière simple, et je vais vous le dire : l'émotion négative
vaut beaucoup plus que l'émotion positive, l'émotion négative vaut beaucoup
plus que l'argument. Ce que je suis en train de faire dans l'Europe du
numérique, si nous ne la pensons pas avec un humanisme contemporain, je n'ai
aucune chance de résister. Avec des émotions négatives, j'ai beaucoup plus de
chance d'être ovationné par une foule que par des arguments rationnels. C'est
le risque de l'Europe que nous sommes en train de bâtir. Ce chemin est très
difficile, mais c'est notre devoir.
La deuxième chose, c'est que ces réseaux sociaux, ces écrans, ces plateformes,
l'usage du monde de la formation des idées, du débat démocratique dans lequel
nous vivons, nous enferme dans des bulles cognitives. Vous savez, ce sont ces
groupes dans lesquels nous sommes, ceux qui nous suivent sur nos comptes, et
quel que soit le réseau social, c'est la discussion fermée à laquelle nous nous
sommes habitués. Elle est dangereuse, car ces bulles nous enferment dans des
groupes de gens qui pensent simplement comme nous. C'est l'inverse de l'agora,
de la place publique, qui a fait la démocratie - endroit où nous pouvons penser
de manière différente, mais où nous débattons, où nous controversons. Le monde
numérique dans lequel nous sommes en train d'habiter, c'est celui de groupes
qui se parlent entre eux et se radicalisent et où la tyrannie du plus extrême
est celle qui emporte tout le reste du groupe.
Alors, je vous le dis avec force, le grand risque, c'est que le monde du
numérique, des réseaux sociaux dans lequel nous vivons, qui forgent nos
démocraties, si nous n'en bâtissons pas les règles, si nous ne le faisons pas
humaniste - comme nous l'avons fait à la Renaissance puis aux Lumières - ce
monde-là sera celui de la tyrannie des extrêmes, des pièges identitaires, de la
dislocation de nos démocraties et de notre Europe. Le réveil démocratique
européen, c'est celui d'un humanisme numérique, enfin. (…)
Nos deux pays sont confrontés à des défis majeurs, à des changements qui nous
font peur : le changement climatique, la polarisation de la société, la montée
des extrêmes, le retour de la guerre sur notre continent, les attaques contre
notre démocratie, contre nos valeurs, les changements économiques. Rien ne
semble être comme avant. Nous, Français, nous posons les mêmes questions que
les Allemands. Malgré tous ces changements, il y a une constante : l'amitié
franco-allemande. (…)
C'est ensemble, et seulement ensemble, que nous pourrons relever ces défis.
L'Allemagne peut compter sur la France. La France compte sur l'Allemagne.
L'Europe peut compter sur nous. Nous comptons sur l'Europe !
Permettez-moi, cher Frank-Walter, de vous citer: « la loi fondamentale
n'est pas un bilan, mais une mission. Ce n'est pas un objectif, mais une
boussole ». Je voudrais ajouter quelque chose : notre démocratie, notre
Europe n'est pas un bilan, c'est une mission. L'Europe n'est pas un objectif,
mais une boussole. (…)
Construire l’Europe est une mission permanente. Nous en sommes capables. Mais
surtout, vous en êtes capables, car c’est vous, la nouvelle génération, qui
bâtirez l’Europe de demain. Je compte sur vous, tout comme vous pouvez compter
sur moi.
Je compte sur vous pour choisir une Europe qui fait entendre sa voix
singulière, celle de l’humanisme et de la puissance assumée dans le désordre du
monde, de la solidarité avec les plus vulnérables et du partage des
responsabilités avec nos alliés. Je compte sur vous pour garder ce cap de
l’humanisme, qui fait de notre Europe un continent de civilisation et de paix.
Je compte sur vous pour choisir l’amitié et la coopération, et refuser la
tentation de la division comme de l’hégémonie. Je compte sur vous pour forger
notre avenir. Saisissons cette chance ensemble, appuyés sur l’enchevêtrement de
nos liens, sur la complexité de nos passés, sur la complémentarité de nos
forces.
Bâtissons une Europe puissante, souveraine et humaniste. Conformément à notre
devise : liberté, égalité, fraternité.
Vous pouvez compter sur moi. Je compte sur vous.
Vive l‘Allemagne ! Vive la France ! Vive l’amitié franco-allemande ! Vive
l’Europe !
> [Conférence
de presse conjointe avec Chancelier allemand, Olaf Scholz, lors de la visite
d’Etat]
Au Conseil des ministres
franco-allemand, le 24ᵉ du nom, et dans ce Conseil franco-allemand de défense
et de sécurité, évidemment, le premier enjeu - Monsieur le Chancelier vient de
le rappeler - est celui de l'Ukraine, de la sécurité de notre Europe, de notre
paix. Là-dessus, la position de l'Allemagne et de la France est commune depuis
le début, main dans la main, et notre soutien à l'Ukraine durera aussi
longtemps et aussi intensément que nécessaire.
Nous avons intensifié celui-ci ces derniers mois ensemble et nous avons aussi
bâti des canaux bilatéraux multilatéraux nouveaux pour mettre en œuvre des axes
d'effort que nous avions définis lors de la conférence du 26 février dernier à
Paris. Et je veux d'ailleurs remercier l'Allemagne pour l'action immédiate en
matière de défense aérienne, qui a été coordonnée par vous et qui s'inscrit
pleinement dans cette ligne. Nous sommes en train aussi de compléter et
d'accroître notre soutien et j'aurai l'occasion dans les prochains jours - nous
en avons parlé avec le Chancelier - de revenir sur des capacités additionnelles
et la poursuite de notre aide à l’égard de l’Ukraine.
Au-delà de cela, comme l’a dit le chancelier, nous convergeons pour apporter
une aide financière supplémentaire comme depuis le début. Nous l’avons fait en
Européens en bâtissant des accords pour avoir de nouvelles facilités, de
nouveaux financements européens de soutien à l'Ukraine depuis le début de cette
année, et notre souhait est que nous puissions poursuivre le même effort à
l'échelle du G7. Nos ministres ont commencé le travail et nous travaillerons de
concert pour que d'ici au G7, qui se tiendra à la mi-juin, nous puissions avoir
une initiative commune impliquant tous les pays du G7 afin de renforcer
justement le financement à l'Ukraine, de donner plus de clarté et plus de
profondeur de champ à celui-ci en utilisant différentes techniques qui sont aujourd'hui
sur la table. Nous pouvons y revenir si des questions se posent.
Au-delà de l'Ukraine, c'est évidemment la question du renforcement de notre
sécurité, de notre défense commune en Europe et en Européens qui nous tient à
cœur et c'est ce dont nous allons discuter dans un instant à travers là aussi
des réponses robustes, crédibles et communes. Je pense en particulier à la
défense antimissile pour laquelle nous voulons renforcer notre autonomie, aux
frappes dans la profondeur - le Chancelier vient de l'évoquer - sur lesquelles
nous sommes prêts à lancer une coopération de long terme ensemble.
Autant de sujets sur lesquels, au fond, nous voyons bien que nous avons à bâtir
un cadre commun de défense et de sécurité, définir des concepts communs,
partager nos besoins, définir des capacités communes et renforcer à long terme
la défense européenne, notamment par un soutien accru à la base industrielle et
technologique de défense européenne. C'est ce que nous avons ensemble poussé,
ce qui a été confirmé par la Commission il y a quelques mois dans les
propositions faites. Et l'enjeu est maintenant de réfléchir à des options de
financement innovantes et crédibles sur lesquelles le Conseil européen a prévu
de revenir le 27 et 28 juin prochain, avec justement l’idée que nous puissions
aller davantage en priorité vers les industries et les projets européens.
Notre Conseil à cet égard permettra aussi de faire le point sur nos
coopérations bilatérales en matière d'armement. Je pense aux systèmes de combat
aérien du futur et au système principal de combat terrestre, aux projets
d'avions de combat du futur et de char du futur sur lesquels nos ministres ont
signé, le mois dernier, encore un nouvel accord à Paris qui précise la
répartition des responsabilités industrielles. Tout cela participe de la
construction d'un cadre commun de paix et de sécurité en Europe, avec l'Union
européenne, avec l'OTAN, avec la Communauté politique européenne. Et à cet
égard, la coopération franco-allemande est déterminante.
Au-delà de ce sujet, nous allons pouvoir revenir sur aussi les questions
économiques, financières et de croissance européenne. Au fond, nous sommes
convaincus l'un et l'autre que notre Europe a besoin d'innover, d'avoir encore
plus de croissance et d'être au cœur de l'innovation, qu'il s'agisse des
technologies vertes ou de l'intelligence artificielle.
Pour cela, il nous faut un choc d'investissements au sein de notre Europe - et
nous y reviendrons, ce sera au début de nos échanges dans le Conseil des
ministres franco-allemand - aller vers cette union de l'épargne et de
l'investissement. Depuis plusieurs années, nous en parlions - et je veux
vraiment dire qu'il y a, et c'est pour moi l'un des acquis et l'un des
résultats très importants de ce Conseil des ministres que nous avons traduits
dans un texte commun dans la presse, de manière raccourcie aujourd'hui, et un
texte plus long qui sortira de ce Conseil. La convergence entre nous deux est
inédite à cet égard et je ne doute pas qu'elle entraînera maintenant un
mouvement fort accéléré au sein de toute l'Europe. Elle était nécessaire et
nous y sommes arrivés.
C'est en effet grâce à cela que nous pourrons bâtir, au fond, une véritable
Europe des marchés de capitaux, c'est-à-dire une Europe de l'épargne et du
financement commun. Nous avons aujourd'hui énormément d’épargne dans notre
Europe. Cette épargne ne s’alloue pas aux bons endroits et dans les bons
secteurs, et elle quitte aussi encore trop souvent - environ 300 milliards
d'euros par an - le sol européen pour aller s'investir vers les capitaux
américains. Nous avons donc décidé ensemble d'appeler à la création d'un
produit d'épargne européen - épargne financière, je le disais, massif, 35 000
milliards d'euros - et ce produit d'épargne qui va être fléché sur nos
priorités de long terme, transition verte, intelligence artificielle,
innovation, défense, c'est pour nous un élément de cohérence, d'efficacité,
d'utilisation de cette épargne.
Ensuite, nous souhaitons que la Commission avance rapidement sur la question de
la titrisation, qu'elle fasse des propositions opérationnelles au Conseil dans
les tout prochains mois, là aussi sans tabou, avec les réponses prudentielles
adaptées pour que les acteurs financiers prennent plus de risques dans ces
domaines.
Enfin, nous donnerons mandat à nos ministres des Finances lors de ce CMFA, ce
Conseil des ministres franco-allemand, pardon, pour mettre en œuvre notre
ambition commune en matière de supervision des services financiers, en matière
également d'harmonisation du droit de nos faillites, droit des affaires et
fiscalité, et d'une plus grande convergence en matière fiscale. Nous devons
avoir aussi une réflexion robuste sur la transposition des règles prudentielles
bancaires et assurantielles qui aujourd'hui écartent par trop du risque. Ce
chantier est majeur, il peut paraître technique, il est décisif pour le
financement de nos économies et pour pouvoir mobiliser l'argent privé qui
existe vers nos priorités. Et c'est pour moi véritablement en acte, le couple
franco-allemand, qui montre des résultats concrets par cette décision.
Le second sujet de ce Conseil des ministres sera notre contribution conjointe à
l'agenda stratégique de l'Union européenne pour les 5 ans à venir, et un texte
que nous allons ensemble donc signer et transmettre. Je n'entrerai pas ici dans
le détail, le chancelier a déjà insisté sur plusieurs actes. Mais au fond,
quand on regarde les défis économiques auxquels l'Union européenne fait face,
les pandémies, la compétition croissante, l’Inflation Reduction Act des
États-Unis et la conséquence sur la réallocation des facteurs, évidemment, la
guerre, les grandes transitions que j'évoquais en matière de climat et de
numérique, nous sommes donc face à un impératif qui est de soutenir la
production sur notre sol, innover encore davantage, mobiliser plus d'investissements,
prendre plus de risques pour que l'Europe ne soit pas distancée par les autres
grandes puissances.
Mais au fond, ce nouveau paradigme de croissance et de compétitivité que nous
portons ensemble, c'est produire plus et plus vert, c'est simplifier les règles
- comme vient de le dire à l’instant, Monsieur le Chancelier - massivement,
c'est accélérer la politique industrielle européenne pour devenir leader d'ici
2030 dans les industries et technologies clés comme l'intelligence
artificielle, le quantique, le spatial, la 5G et la 6G, les biotechnologies,
les technologies à zéro émission nette et la chimie ou la mobilité. C'est
gagner la bataille de l'innovation et de la recherche en prenant plus de
risques, c'est définir une politique commerciale capable de défendre nos
intérêts plus équilibrés et c'est stimuler davantage d'investissements publics
et privés, comme nous venons de le dire. C'est, là aussi, à mes yeux, l'un des
résultats importants de ce Conseil.
Et cette stratégie commune que nous défendons est, à mes yeux, un cadre
structurant pour la Commission européenne et nos actions pour les 5 années à
venir, car comme je le rappelais encore hier et ce matin, il y a à cet égard
urgence et le risque est grand pour l'Europe, si nous ne prenions pas les
décisions rapides importantes que nous venons de citer l'un et l'autre, de se
voir distancer par les autres puissances et de perdre notre capacité à bâtir
notre prospérité.
Enfin, je veux avoir un mot pour la situation au Proche-Orient. La situation,
en effet, à Rafah est effroyable et je ne veux pas revenir sur ce que j'ai déjà
dit hier, il faut que les opérations israéliennes cessent à Rafah. Il n'y a
aujourd'hui pas de zone sûre pour les civils palestiniens. La Cour
internationale de justice a appelé Israël à mettre un terme à cette offensive
qui met à risque les populations civiles, déjà déplacées plusieurs fois pour
éviter les combats.
Notre position est claire depuis le premier jour : nous avons condamné avec
fermeté l'attaque terroriste du Hamas le 7 octobre, et le Hamas est responsable
de cette situation. Nous avons reconnu le droit d'Israël à se défendre, mais en
respectant, comme toute démocratie, le droit international, le droit
humanitaire. Nous avons constamment mis au cœur de nos priorités la libération
de nos otages, et je veux à mon tour remercier les puissances médiatrices qui
nous aident à cet égard, et nous réitérons notre soutien à toutes les
initiatives en ce sens. Mais dès le mois d'octobre, nous avons appelé à un
cessez-le-feu car nous voyons bien que la réponse face au terrorisme du Hamas
ne peut pas être une opération terrestre qui continue.
C'est pourquoi nous soutenons la demande algérienne de réunion d'urgence et
nous bâtissons avec l'Algérie, et tous nos partenaires au Conseil de sécurité,
une résolution commune visant, sur le terrain, à répondre à cette urgence
humanitaire mais aussi à apporter des réponses en termes de cessez-le-feu et à
donner un mandat onusien clair sur Gaza.
La sortie, plus largement, et c'est le dernier point important de réponse que
nous apportons depuis le premier jour, ne peut être que politique. Et c'est ce
que je rappelais dans l'échange que j'ai eu avec nos partenaires arabes
vendredi dernier : nous sommes prêts à travailler activement une solution
de paix. Elle est atteignable, avec une volonté politique. Elle passe par un
chemin, celui du jour d'après pour Gaza, plus largement pour un État
palestinien, ce qui suppose beaucoup de réformes, des évolutions, un équilibre
régional, des éléments de sécurité garantis pour Israël. C'est cette réponse
politique d'ensemble qui est aujourd'hui une nécessité.
Monsieur le Chancelier, à mon tour, je veux vous remercier pour la qualité de
nos échanges à l’instant et la richesse de ce Conseil des ministres
franco-allemand, vous remercier pour tout le travail commun et redire ici que,
au-delà de notre amitié commune bâtie à l'aune des crises, je crois pouvoir
dire que les décisions que nous avons prises à la fois face à la guerre en
Ukraine lancée par l'agression russe, mais face à tous les défis des temps qui
sont les nôtres, nous avons constamment pris des décisions communes, je crois,
qui ont permis à l'Europe d'avancer. Et ce que nous faisons à l'égard de ce
Conseil, à l'occasion de ce Conseil des ministres, tant sur le financement de
soutien à l'Ukraine que sur les questions justement de défense, que sur l'Union
des marchés de capitaux ou la compétitivité et la croissance de l'Europe
s'inscrivent dans cette ambition franco-allemande.
Notre amitié est en actes, elle est faite d'une histoire, elle est faite de
liens personnels qui nous unissent, mais aussi de décisions fortes prises au
bon moment. Et je crois que c'est le bon moment de prendre celle que nous
actons aujourd'hui.
> [Crise au Moyen-Orient] L'objectif qui est le nôtre, et
ce sera tout le travail de nos diplomates dans les prochaines heures et les
prochains jours, est d'apporter une réponse complète à la situation, pas
simplement le projet qui avait pu déjà être avancé, mais de le compléter, de
l'enrichir aussi au vu de la dégradation de la situation et de ce qui s'est
passé ces derniers jours et qui est absolument dramatique. Et je le dis parce
que c'est notre devoir à tous égards.
Donc, nous allons compléter ce travail, le poursuivre, et ce sera le travail
des prochains jours, en effet, de convaincre l'ensemble de nos partenaires. Et
j'ai tout à fait confiance dans notre capacité à trouver justement des
décisions et aussi une manière de les exprimer commune avec en particulier nos
partenaires européens, mais de convaincre au-delà, ce qui pourrait bloquer une
résolution indispensable pour la situation à Gaza.
> [Crise au Moyen-Orient] Il n'y a pas pour nous de
doubles standards. Et donc le respect du droit international vaut partout et la
considération que nous avons pour les vies est la même pour toute vie. C'est
d'ailleurs pourquoi il n'y a pas, à nos yeux, non plus d'impunité et que nous
soutenons la justice internationale, son travail partout où elle doit le faire
et où elle le fera.
Au moment où je vous parle, nous considérons que l'action la plus utile est en
effet d'obtenir un cessez-le-feu et un cadre international qui permette tout à
la fois d'assurer la sécurité d'Israël, le respect du droit humanitaire et la
protection des populations à Gaza, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Et on
ne peut pas accepter une situation où est présentée comme irréconciliable, où
en quelque sorte, il faudrait choisir entre la sécurité d'Israël et la
protection des populations civiles à Gaza. C'est impossible.
Et donc nous allons concentrer notre énergie sur la poursuite des actions
humanitaires que nous menons depuis le premier jour : bateaux militaires pour
soigner plus de 1 000 Palestiniennes et Palestiniens et enfants ; livraison de
médicaments, de nourritures ; largage de ceux-ci aussi dans Gaza. Nous allons
le renforcer et le compléter par cette action diplomatique et cette résolution
pour essayer très concrètement d'arrêter les choses et d'obtenir ce
cessez-le-feu que nous demandons depuis octobre.
> [Crise au Moyen-Orient] Pour ce qui est de la
reconnaissance de l'Etat palestinien, je l'ai déjà dit, nous avons toujours
défendu, y compris il y a quelques années, quand plus personne n'en parlait, on
était là pour le défendre, je le rappelle. parfois même dans la région. Nous
avons toujours défendu les deux Etats comme étant la solution politique et en
particulier celle qui permettait de répondre aux droits légitimes des
Palestiniens aspirant à un État. Il n'y a pas de tabou pour la France et je
suis totalement prêt à reconnaître un Etat palestinien.
Mais j'ai toujours dit depuis le début, c'est ce que j'ai encore expliqué
vendredi dernier à l'ensemble des ministres des Affaires étrangères de la
région qui sont venus, avec lesquels nous avons travaillé sur l'initiative
arabe, je considère que cette reconnaissance doit arriver à un moment utile,
c'est-à-dire à un moment où elle s'inscrit dans un processus où les Etats de la
région et Israël se sont engagés et qui permet, sur la base aussi d'une réforme
de l'Autorité palestinienne, de produire un résultat utile. Je ne ferai pas une
reconnaissance d'émotion, si je puis dire. Je pense que face à ce que nous
vivons, cette émotion que nous ressentons parce que, comme vous, je suis
bouleversé par les images que nous voyons, choqué par ce que nous voyons aujourd'hui
à Rafah. Eh bien la réponse, elle doit être politique par la résolution, par
justement l'action et de cessez-le-feu immédiat.
> [Guerre de Poutine contre l’Ukraine] Nous avons un
cadre précis d'action : c'est soutenir l'Ukraine ; faire tout ce qui est
nécessaire et aussi longtemps que nécessaire. Je me suis déjà exprimé à
plusieurs égards et j'aurai l'occasion, lorsque le président Zelensky se rendra
en France à l'occasion donc du D-Day la semaine prochaine, de le recevoir, et à
ce moment-là, de m'exprimer très précisément pour annoncer ce que nous allons
faire. Mais je ne ferais pas de commentaire sur ce qui a été des communications
non coordonnées et malheureuses.
Ensuite, j'ai parlé de paix à plusieurs reprises, parce que je crois que c'est
notre objectif. Et il se trouve que ce matin à Munster on parlait de paix. Je
ne crois pas avoir parlé de négociations. Il se trouve que l'Ukraine a pris
l'initiative avec la Suisse d'organiser une conférence qu'elle a appelé
elle-même de paix. Donc je ne pense pas que ce soit un gros mot y compris pour
les Ukrainiens, mais c'est comme ça qu'ils veulent finir.
J'ai rappelé simplement des choses très simples durant ce voyage. La paix, ce
n'est pas la capitulation de l'Ukraine. Ça c'est un point très important parce
qu’aujourd'hui, il y a des faux-pacifistes en Europe, dans tous nos pays, des
gens qui disent : « nous, on est pour qu'on arrête tout de suite ». D'ailleurs,
si on suit aujourd'hui la voix d'une partie des autorités russes, du Président,
il va à travers le monde en disant : « moi, je suis pour la paix. Ils ont quand
même donné les territoires que j'ai envahis par la force ». Ce n'est pas la
paix, ça. Ce n’est pas notre vision de la paix. Je l'ai dit et rappelé, la paix
ne peut être que durable et donc dans le respect du droit international.
Ensuite, je pense que personne ne croit que la paix reviendra uniquement par
les armes. Et donc nous, nous avons un principe simple, c'est que nous sommes
pour les négociations. Mais le jour où elles seront décidées par les deux
parties, en particulier par les Ukrainiens, et qu'elles se feront dans des
conditions souhaitables et bonnes pour eux, qu'elles ne leur soient pas
imposées ; c'est l'inverse de la capitulation. Ce n'est pas le jour, ce
n'est pas l'heure, vous l'avez très bien dit. Par contre, il faut constamment
parler de paix pour rappeler que nous bâtissons par notre aide à l'Ukraine, les
conditions de la paix. On aide un pays qui est envahi par une puissance
révisionniste impérialiste, à se défendre lui-même pour pouvoir un jour ouvrir
des négociations de paix. Faisant référence aux discussions de ce matin,
j'espère ardemment que ce ne soit pas dans 30 ans.
> [Guerre de Poutine contre l’Ukraine] La France a
toujours le même cadre d'action en Ukraine : nous soutenons l'Ukraine pour
résister et défendre son territoire, et nous ne voulons pas d'escalade. C'est
le même cadre dans lequel nous voulons intervenir.
Ce qui a changé, c'est que la Russie a un peu adapté ses pratiques. Plusieurs
d'entre vous, dont un bon journal du soir en France, a sorti cette carte qui
est très juste, mais qui vous montre que le sol ukrainien, vous voyez, est
attaqué de fait depuis des bases et qui sont en Russie. Alors comment on
explique aux Ukrainiens qu'il va falloir protéger ces villes et au fond tout ce
qu'on voit en ce moment autour de Kharkiv ? Si on leur dit « vous n'avez pas le
droit d'atteindre le point d'où sont tirés les missiles », en fait, on leur dit
« on vous livre des armes, mais vous ne pouvez pas vous défendre. »
Donc nous, on reste exactement dans le même cadre : on pense qu'on doit
leur permettre de neutraliser les sites militaires d'où sont tirés les missiles
et au fond, les sites militaires depuis lesquels l'Ukraine est agressée, mais
on ne doit pas permettre de toucher d'autres cibles en Russie, évidemment des
capacités civiles ou d'autres cibles militaires. Quand c'est depuis des cibles
identifiées en Russie que l'Ukraine est agressée, eh bien, je pense qu'on doit
pouvoir leur permettre de le faire si on veut véritablement retenir notre
objectif. Et je crois pouvoir dire que factuellement, nous ne sommes pas
escalatoires en faisant cela, puisque c'est la Russie qui s'organise de cette
façon.
> [Défense européenne] Sur la question donc d'une défense
et d'un bouclier et d'une défense sol-air et initiative qui a été prise par
l'Allemagne, nous sommes dans une situation stratégique et capacitaire qui est
très différente entre l'Allemagne et la France. Et ceci parce que la France est
une puissance dotée de l'arme nucléaire avec une capacité aérienne et
océanique, ce qui lui donne une capacité de dissuasion et ce qui nous place de
fait dans des positions très différentes au regard des risques auxquels nous
sommes exposés. Et donc, il est légitime que chaque pays en Europe regarde les
risques auxquels il est exposé et cherche à se protéger au mieux et en fonction
à la fois de son histoire et de ses préférences. Et donc, c'est en fonction de
ces différences que nous appréhendons les choses.
Donc, je pense que l'initiative allemande a le mérite de poser cette question
de manière tout à fait pertinente pour tous les pays qui n'ont pas la
dissuasion. Et dans un cadre qui a changé et que je rappelais moi-même - cela
paraît antédiluvien au vu du rythme de l'actualité - mais en 2019, lorsque les
États-Unis, de manière unilatérale, avaient décidé eux-mêmes de sortir du
traité FNI - nous plaçant dans une situation en quelque sorte, nous Européens -
on était exposés à certaines armes détenues par les Russes sans cadre. Donc,
c'est fort de ces différences qu'on n'a pas forcément les mêmes initiatives.
La clé, ce que nous allons ensemble poser lors de ce conseil franco-allemand de
défense et de sécurité - et je pense que c'est à cet égard que, pour moi, le
moment que nous vivons est très structurant - c'est qu’enfin, nous sommes en
train de nous poser les questions les plus fondamentales. Qui est quels sont
nos ennemis aujourd'hui ? Quels sont nos adversaires ? Quelles sont leurs
capacités et les risques qu'ils nous font courir ? Quels sont leurs potentiels
alliés ? Quels sont les risques que nous avons demain ? Et fort de cela en
Européens, indépendamment des alliances que nous avons — et de l'OTAN —
indépendamment de celles-ci et en complément - parce que c'est exactement comme
ça qu'est pensée l'initiative dite Sky Shield - eh bien de bâtir des réponses
stratégiques puis de capacitaires européennes. Et de la défense sol-air à la
question des tirs dans la profondeur, de la manière d'intégrer dans une
stratégie européenne le fait que plusieurs puissances britanniques et français
aient une capacité de dissuasion propre, tout ça est à intégrer dans un cadre
commun de sécurité et de défense. C'est ça que nous sommes en train de bâtir et
que nous allons maintenant structurer.
> [Budget européen] Il nous est déjà arrivé de doubler le
budget européen. Ce que je veux dire par là, c’est qu’on a besoin, je
m'explique, on a besoin d'avoir un financement commun beaucoup plus important
aujourd'hui. Mais si vous regardez les huit dernières années, on a eu sous la
Commission Juncker un plan Juncker qui a été en plus du budget européen et qui
a été un plan massif qui a permis de financer des projets. C'est des prêts,
mais ça a offert une capacité commune de financement. Et au moment du covid19,
sur la base d'un accord franco-allemand, le Chancelier s'en souvient, il était
alors ministre des Finances, nous avons décidé d'abord de lever de l'argent
ensemble et on a permis ce plan de relance européen. Et le plan de relance
européen, je ne crois pas te trahir en disant que tu avais qualifié ce moment
d'hamiltonien. En effet, ça a été un vrai changement de conception du
financement de notre Europe et la réalité, c'est que la magnitude de ce plan,
c'était la même chose que le budget.
Donc, je ne suis pas en train de dire qu'il faut doubler le budget tel
qu'il est conçu aujourd'hui avec les contributions d'États - parce que nous
avons tous nos budgets à bâtir et ce serait absolument impossible. Mais mon
message à Dresde, à la Sorbonne, c'est simplement d'être lucide. Regardez le
mur d'investissement qui est face à nous. Défense et sécurité, cleantech -
parce que les Américains mettent beaucoup d'argent avec l’IRA, plus que nous -
et intelligence artificielle. Si on prend juste ces trois choses-là, c'est à
l'échelle d'Europe, plusieurs dizaines, voire centaines de milliards par an
pendant quelques années. Et en vrai, on ne peut pas laisser simplement les
Etats chacun faire parce que l’on va casser le marché unique si on fait ça et
on ne peut pas le lisser dans le temps parce que l'allocation des facteurs se
fait maintenant, les vrais choix d'investissement massifs pour être dans la
course ou pas se font maintenant. Donc, il faut qu'on ait ce choc.
Sur la partie publique, je pense qu'on peut bâtir et ça va être tout notre
travail, non pas doublement du budget techniquement, en utilisant les mêmes
lignes qu'aujourd'hui, mais avoir une capacité de financement commune en
utilisant les techniques qui ont été les nôtres, soit pendant le Covid, soit
d'ailleurs en étant encore innovant, en utilisant des mécanismes déjà
existants. Je ne veux pas préempter d'instruments, mais on a besoin de
financements communs pour aller plus vite sur ces transitions et nos initiatives
de défense. Ça, ça doit être complété ensuite par des choix nationaux, mais qui
sont limités dans la période.
Et puis, l'autre jambe, ce sont les financements privés. Et c'est aussi
pourquoi ce que nous portons aujourd'hui dans ce Conseil des ministres est très
structurant. C'est que faire l'Union des marchés de capitaux, c'est se donner
la garantie de plusieurs dizaines, voire centaines de milliards par an qui
seront mieux dirigés vers nos priorités et de la prise de risque sur la partie
privée de ces priorités. Et je vous ai dit tout à l'heure les mêmes :
intelligence artificielle, industrie, technologie verte, défense et sécurité.
Ça, c'est une nécessité.
Donc, on a un travail devant nous, mais je pense que c'est réaliste aussi parce
que je m'appuie sur l'expérience des dernières années et ce qu'on a su faire.
> [«Crise» franco-allemande] C'est aussi vieux que le
couple franco-allemand de dire qu'il est en crise. Ça a toujours existé.
Regardez les 70 dernières années. Alors, soit on fait des grandes avancées,
puis 6 mois après, on dit que c'est une crise. L'un propose, l'autre ne répond
pas tout de suite, que ce soit Sky Shield, que ce soit le budget. On dit :
« ah, une crise ». Bah non, c'est un chemin.
Et donc, c'est une maïeutique, l'Europe, et à commencer par le couple
franco-allemand. C'est une permanente traduction de l'un à l'autre, c'est un
cheminement qu'on fait ensemble pour aboutir à un résultat. Le résultat n'est
jamais totalement allemand, ni totalement français, il est franco-allemand. Et
après, il devient européen. Et donc, à ce tarif-là, on sera toujours en crise,
je vous rassure, et l'Europe sera toujours en crise, parce qu'on ne sera jamais
les mêmes. Et c'est une chance. Et je crois que c'est ça la leçon pour moi de
l'amitié franco-allemande et à cet égard, c'est en cela qu'elle est la matrice
de l'aventure européenne. Nous nous mettons toujours d'accord et nous avançons.
Et d'ailleurs, si nous sommes là, c'est que nous avons avancé, survécu aux
crises et bâti l'avenir. Mais sans jamais être les mêmes.
Et c'est ce qui fait des Européens, je crois, un continent unique, en tout cas
depuis ces sept décennies, un peu plus, et ce qui fait de nous aussi un
continent, à mes yeux, plus fort que les autres parce qu'on s'est déjà mis
d'accord avec quelqu'un d'autre - ce qui n'est pas le cas des grandes
puissances solitaires. Et c'est à ce titre, parce que nous avons ces capacités,
qu'on peut toujours aussi avoir un temps d'avance. Je ne vois pas comme un
handicap.
Donc oui, il y a des moments où on ne part pas de la même position, du même
point de vue, et c'est tout à fait légitime. Il y a beaucoup de sujets sur
lesquels nous n'avons pas les mêmes histoires, on n'a pas la même situation
aujourd'hui. Notre devoir, c’est de le surpasser pour bâtir une solution
commune, qui est bonne pour l’un et l’autre et l’intérêt général
franco-allemand, puis européen. Je crois que c’est ce qu’on a su faire et ce
qu’on est en train de faire. C’est à ce titre que l’amitié franco-allemande est
si importante et que je suis extrêmement heureux de ces trois jours de visite
d’Etat et des échanges que nous avons aujourd’hui et au-delà ça, qu’on a tous
les jours, avec, mon ami le Chancelier Olaf Scholz.
► Gouvernement
[Nota: dans ce gouvernement,
certains membres ne sont pas centristes; nous retranscrivons cependant leurs
propos en rapport avec leur fonction parce qu’ils font partie selon nos
critères d’une équipe qui suit une politique globalement centriste]
Gabriel Attal Premier
ministre, chargé de la Planification écologique et énergétique
> [Délinquance des jeunes] Il y a
des faits qui nous interpellent toutes et tous. Il en va ainsi de la dérive
d’une partie de notre jeunesse qui se joue de nos règles et défie l’autorité,
pour qui la violence semble se banaliser, et qui tombe de plus en plus jeune
dans la délinquance.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Les 13 à 17 ans représentent un Français
sur vingt, mais un mis en cause pour coups et blessures sur dix. Cette
proportion est même d’un sur cinq quand il s’agit de trafic de drogue et d’un
sur trois quand il s’agit de vol avec arme. Vous avez donc raison, il faut
frapper un grand coup pour éviter qu’une partie de notre jeunesse ne sombre.
Depuis 2017, nous avons pris la situation en main. Nous avons pris des décisions
fortes, notamment en créant le CJPM. Après l’avoir fait à Viry-Châtillon, je
tiens à saluer une nouvelle fois ce travail déterminant.
Grâce à la majorité et sous l’autorité du Président de la République, cette
réforme a permis de raccourcir les délais de jugement, d’améliorer la prise en
compte de la victime et de renforcer l’efficacité du travail éducatif mené avec
le mineur. C’était une première étape importante, nécessaire et même
essentielle.
Je souhaite aller plus loin, aux côtés du ministre de la justice, de la
ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse et de la ministre déléguée
chargée des familles. Il faut veiller à réagir tôt, pour remettre sur le droit
chemin les jeunes à la dérive ; à réagir vite, pour ne jamais instiller
dans leur esprit le venin de l’impunité ; à réagir fort lorsque cela est
nécessaire, car un sursaut d’autorité s’impose.
À la demande du Président de la République, j’ai lancé une série de
consultations avec les différentes forces politiques. Nous nous sommes donné
huit semaines pour faire des propositions nouvelles. J’ai souhaité faire un
point d’étape à mi-parcours, car nous avons beaucoup avancé. Des mesures sont
déjà entrées en vigueur. Nous avons notamment créé, sur le modèle des travaux
d’intérêt général, les mesures d’intérêt éducatif pour les mineurs de moins de
16 ans, comme je m’y étais engagé lors de ma déclaration de politique
générale. Nous continuerons à renforcer la prévention et l’accompagnement des
mineurs pour éviter qu’ils ne sombrent dans la délinquance.
Nous devons aider les parents, notamment les mères seules, à faire face. C’est
le sens de notre politique de soutien à la parentalité : nous avons
l’objectif d’accompagner 30 % des parents d’ici à 2027, alors que seuls
4 % d’entre eux le sont aujourd’hui.
La prévention, c’est aussi agir à l’école, par l’instauration de contrats entre
les parents et les établissements scolaires, contrats qui donneront des droits,
mais aussi des obligations et des devoirs. La prévention, c’est la capacité à
envoyer un jeune en internat dès qu’on sent qu’il dérive, de manière à le
couper de ses mauvaises fréquentations, de son environnement toxique et à lui
donner un cadre. La prévention, c’est agir contre l’empire des écrans qui
désinhibe, habitue à la violence et constitue une catastrophe sanitaire et
éducative en puissance.
J’ai également annoncé des mesures nouvelles visant à renforcer et à compléter
le code de la justice pénale des mineurs. Pour les jeunes qui s’engagent sur la
voie de la délinquance et commettent une infraction, je suis favorable à un
court séjour – une quinzaine de jours – en foyer.
C’est une première mesure utile et efficace que le taux d’occupation des foyers
permet d’appliquer. Ce système fait ses preuves chez certains de nos voisins,
par exemple aux Pays-Bas.
Actuellement, si deux personnes ayant respectivement 18 ans et demi et
17 ans et demi commettent un délit, la première sera jugée immédiatement,
mais la seconde le sera huit ou neuf mois plus tard. Cela n’est pas normal, et
nous avons pour ambition d’agir plus vite. C’est pourquoi, je le confirme, je
souhaite instaurer une forme de jugement sur le modèle des comparutions
immédiates pour les mineurs de plus de 16 ans.
Enfin, il est incompréhensible que des mineurs de 16 ou 17 ans qui sont
pourtant des délinquants notoires et identifiés bénéficient d’une forme
d’atténuation de peine. Nous devons y remédier en prononçant des peines justes,
adaptées, qui correspondent à la réalité. Plusieurs pistes sont possibles. Le
juge pourrait par exemple écarter l’atténuation de peine pour les plus de
16 ans à titre exceptionnel. Je rappelle que par le passé, en cas de
récidive ou d’agression violente, le juge qui ne retenait pas l’excuse de
minorité n’avait pas à motiver sa décision ; dans le cas d’une double
récidive, il devait même motiver sa décision s’il retenait l’excuse de
minorité. Vous le voyez, des solutions pleinement respectueuses de la
Constitution existent.
Nous nous sommes donné huit semaines pour organiser la concertation ; nous
sommes à mi-chemin. Le travail continue, réunissant les ministres, les
responsables politiques et tous les parlementaires engagés. Le travail
parlementaire permettra de placer le curseur au bon endroit. Nous visons
l’adoption d’un projet de loi d’ici à la fin de l’année.
Ce sursaut d’autorité est nécessaire. Nous avons besoin de chacun.
> Lorsque la colère des agriculteurs a grondé en France
comme partout en Europe, je me suis mobilisé, avec le ministre de
l’agriculture, et j’ai reçu, à de nombreuses reprises, pendant de longues
heures, les représentants des agriculteurs, ce qui a donné lieu à soixante-cinq
engagements clairs, attendus et salués par les principales organisations
agricoles. Avec le Gouvernement, je m’attache à déployer des mesures concrètes
pour répondre aux engagements que nous avons pris envers les agriculteurs.
Dans ce contexte, je salue l’adoption, hier, par l’Assemblée nationale, du
projet de loi d’orientation agricole. Je rappelle que les principaux syndicats
d’agriculteurs avaient appelé à son adoption. Vous avez voté contre, c’est
votre droit, mais vous avez du même coup voté contre la consécration de
l’agriculture comme intérêt général majeur pour notre pays attendue par les
agriculteurs, contre les aides et la simplification en matière d’installation,
contre la modernisation de la formation, contre une nouvelle échelle de
sanctions en cas d’atteintes non intentionnelles à l’environnement, contre la
simplification de la vie quotidienne, que les agriculteurs appellent de leur
vœu, et contre l’accélération des procédures. Aujourd’hui, pour étendre un
bâtiment d’élevage, il faut parfois attendre deux ou trois ans tant les recours
s’empilent. Nous faisons en sorte qu’ils soient limités dans le temps, ce que
tous les agriculteurs et les éleveurs de France demandent ! Vous avez voté
contre. C’est votre choix.
Ce texte épuise-t-il tous les sujets relatifs à l’agriculture ? Évidemment
non, et nous avons toujours été clairs sur ce point. Sur le revenu des
agriculteurs, que vous avez évoqué, le Président de la République s’est engagé
à l’instauration de prix planchers. Je rappelle que deux parlementaires,
Anne-Laure Babault et Alexis Izard, travaillent sur la question et nous
remettront prochainement leurs recommandations, lesquelles donneront lieu à une
proposition de loi.
Les produits phytosanitaires et la suppression du Conseil stratégique pour
l’usage des produits phytosanitaires feront également l’objet d’un texte. Quant
aux enjeux fiscaux et de compétitivité, sur lesquels nous sommes attendus, nous
les aborderons dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, en
complément des mesures que nous avons déjà prises.
Il y a deux visions et deux méthodes : nous considérons que travailler
pour les agriculteurs, c’est avancer sur tous les sujets grâce à différentes
mesures et à des textes de lois ; vous balayez tout ce travail d’un revers
de main. Avec vous, à la fin, les agriculteurs seraient perdants !
> La situation à Rafah est grave. Les images qui nous
parviennent nous heurtent toutes et tous. Depuis le début, la France, par la
voix du Président de la République, a appelé de manière très claire à un
cessez-le-feu et Israël à renoncer à son opération à Rafah.
Il l’a dit publiquement et directement à Benyamin Netanyahou. Cette situation
grave et catastrophique sur le plan humanitaire appelle chacun à ses
responsabilités. Sur un tel sujet, le drapeau français et le drapeau européen
se suffisent à eux-mêmes.
Derrière ces drapeaux, il y a nos valeurs : la liberté des peuples,
l’égalité et la fraternité entre les peuples. Il n’y a pas besoin de brandir un
autre drapeau que celui de la France et celui de l’Europe pour défendre la
paix, la diplomatie et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
C’est au nom de ces valeurs que le Président de la République et le
Gouvernement s’engagent et que, depuis le 7 octobre, ils appellent à la
libération des otages français retenus dans la bande de Gaza.
C’est au nom de ces valeurs que la France a été l’un des premiers pays à
appeler au cessez-le-feu, à défendre les résolutions qui le réclament au
Conseil de sécurité des Nations unies et à larguer des colis d’aide humanitaire
sur la bande de Gaza. Nous en sommes très fiers.
Ce qui permettra d’avancer vers une désescalade, c’est le travail en vue d’une
solution diplomatique, pas la politique spectacle ! Construire la paix,
cela se passe avec nous dans les réunions du Quai d’Orsay, pas avec vous quai
de Valmy à danser autour de DJ sets tout en prétendant être à la hauteur de la
gravité de la situation !
Le Président de la République et le ministre de l’Europe et des affaires
étrangères sont mobilisés, avec l’ensemble de leurs homologues, pour parvenir
une solution politique au bénéfice des Israéliens, des Palestiniens et de la
paix : c’est, le seul combat qui vaille d’être mené !
> La réalité, c’est que le collège actuel ne parvient pas
à réduire les inégalités que l’on constate à l’entrée en sixième. La réalité,
c’est que quand on a dans une même classe des élèves qui ne savent pas lire et
d’autres qui lisent très correctement, on n’arrive à faire progresser personne.
Ce sont les enseignants eux-mêmes qui me l’ont dit, à de très nombreuses
reprises. Ils l’ont d’ailleurs confirmé dans le cadre d’une consultation
numérique, à l’issue de laquelle 250 000 d’entre eux ont jugé que la
constitution de groupes de niveaux était une mesure profondément sociale parce
qu’elle permettra de créer des postes supplémentaires dans les territoires où
les élèves rencontrent le plus de difficultés, notamment dans l’apprentissage
de la lecture, de l’écriture et du calcul. Enfin, on va pouvoir faire
progresser tout le monde ! Ce que je souhaite, c’est relancer l’ascenseur
scolaire. Mon objectif est de faire en sorte que le collège permette à chacun
de progresser, de s’élever, de trouver sa voie, et cela grâce aux moyens que
nous donnons pour accompagner ceux qui en ont le plus besoin.
Nous l’avons déjà fait à l’école primaire avec le dédoublement des classes dans
les réseaux d’éducation prioritaire (REP) et dans les réseaux d’éducation
prioritaire renforcés (REP+). Grâce aux 2 500 postes supplémentaires
créés pour mettre en place les groupes de niveaux, les classes seront presque
dédoublées dans les territoires REP et REP+ pour les cours de français et de
mathématiques. Il y aura plus d’accompagnement, plus d’enseignants auprès des
élèves, pour les faire progresser. Quant aux stages, l’un des grands problèmes
auxquels nous sommes confrontés en France, c’est celui de l’orientation.
Dans les pays qui réussissent mieux que nous en la matière, on applique une
mesure assez simple : l’organisation de stages en milieu professionnel. En
Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas, ils représentent cinq ou six semaines dans
la scolarité d’un élève en voie générale. En France, celui-ci avait jusqu’à
présent un stage d’une semaine en troisième. Oui, j’assume de dire que le
nouveau stage en fin de seconde sera bénéfique pour nos élèves, bénéfique pour
nos entreprises, bénéfique pour nos administrations. Tout le monde est mobilisé
pour garantir aux élèves de trouver un stage. Qu’ils puissent découvrir des
horizons nouveaux, s’interroger sur leur orientation, trouver des idées, en
écarter d’autres : voilà la priorité. Pourquoi s’opposer à cette mesure de
bon sens, qui est dans l’intérêt des jeunes ? Je me battrai toujours pour
un environnement pacifié à l’école, où chacun s’écoute. En vous regardant, je
me rends compte que nous sommes bien les seuls à défendre ce modèle !
> La situation en Nouvelle-Calédonie reste tendue. Nous
le savons, un rien, une étincelle peut suffire pour que les violences
reprennent, encore plus fort. Face aux émeutes meurtrières des dernières
semaines, l’urgence fut – et reste – de rétablir l’ordre. Cela a été
fait grâce à l’engagement exceptionnel des forces de l’ordre – à qui je veux
rendre une nouvelle fois hommage –, grâce aux mesures prises dans le cadre de
l’état d’urgence, grâce à l’envoi de forces de sécurité supplémentaires. Avec
le ministre de l’intérieur et des outre-mer et la ministre déléguée chargée des
outre-mer, nous restons évidemment extrêmement mobilisés et vigilants.
Vous l’avez dit, il ne faut pas attendre pour envisager la suite. Et la suite,
c’est le soutien à l’économie de la Nouvelle-Calédonie, car elle a été très
durement touchée par les émeutes. Conformément aux orientations données par le
Président de la République, la mission dépêchée sur place y travaille, en
liaison avec les services de Bercy et avec les autorités locales. Les services
de l’État, les banques, les assurances, les collectivités territoriales :
tout le monde est mobilisé pour estimer les dégâts, pour mettre en place des
dispositifs ciblés et efficaces et pour que les entreprises concernées soient
dédommagées facilement et rapidement. Un fonds de solidarité va être institué.
La mission précisera les modalités de son utilisation dans les toutes
prochaines semaines. Il pourrait y avoir des exonérations de cotisations
sociales, de l’activité partielle, de l’aide financière pour les secteurs
économiques touchés ou encore un soutien aux collectivités locales.
La suite, c’est aussi la reconstruction. Il faut rebâtir dans les meilleurs
délais les infrastructures les plus sensibles et en profiter pour diversifier
et pour corriger les déséquilibres économiques qui existaient avant la crise.
La suite, c’est encore l’avenir politique et institutionnel de la
Nouvelle-Calédonie. Le Président de la République s’est rendu sur place. Il a
installé une mission composée d’experts aguerris afin d’instaurer le dialogue
et de trouver le chemin d’une solution politique globale. Comme depuis la
première heure, nous voulons donner toutes ses chances au dialogue. C’est
pourquoi nous avons fait le choix de ne pas réunir le Congrès immédiatement
après l’adoption du texte.
L’histoire a montré que malgré les tensions, et même malgré les violences, les
responsables politiques de Nouvelle-Calédonie pouvaient se parler, s’entendre,
se mettre d’accord dans l’intérêt des Néo-Calédoniens – cela, évidemment,
en liaison avec l’État. J’ai la conviction que nous en sommes à nouveau
capables, qu’un dialogue est possible, qu’un accord global est accessible. Sous
l’autorité du Président de la République, mon gouvernement fera tout son
possible pour y parvenir.
> L’accès aux soins est un problème majeur pour tous nos
concitoyens, celui dont on me parle en premier lors de mes déplacements. J’ai
récemment annoncé une série de mesures destinées à libérer du temps médical à
nos médecins, notamment en accélérant les transferts d’actes entre eux et les
autres professions médicales ou paramédicales. Mais la réponse de long terme
consiste bien à former davantage de médecins. Je le dis et je commencerai par
saluer les étudiants en médecine, qui passent en ce moment même les ECOS
– examens cliniques objectifs et structurés : nous les accompagnons
par la pensée et nous serons heureux de pouvoir compter sur eux dans les années
à venir.
Il faut le dire et je le dis, avec une grande humilité : nous payons
aujourd’hui le choix des gouvernements de tous bords politiques qui se sont
succédé depuis des décennies avant l’élection du Président de la République de
ne pas réviser le numerus clausus, ce qu’a fait le Président de la République
dès l’année de son élection, en 2017. Nous formions alors quelque
8 000 médecins par an contre 10 800 cette année, 12 000 en
2025 et 16 000 en 2027 – je m’y suis engagé : après deux
quinquennats d’Emmanuel Macron, nous aurons fait doubler le nombre d’étudiants
en médecine formés dans nos universités. C’est un engagement sans précédent qu’il
faut évidemment accompagner aussi bien en augmentant la capacité d’accueil des
universités qu’en proposant un nombre suffisant de terrains de stage.
L’article 1er de la proposition de loi que vous avez déposée est
d’ailleurs consacré à ce sujet. Il nous faut également accroître l’attractivité
des métiers hospitalo-universitaires. J’ai d’ailleurs demandé à mes ministres,
Sylvie Retailleau et Catherine Vautrin, de mettre en œuvre avant l’été les
engagements qui ont été pris lors des assises hospitalo-universitaires. Il faut
aussi déconcentrer les lieux d’enseignement et de stage : l’augmentation
du nombre d’étudiants permet de créer des lieux de formation et de stage dans
les villes petites et moyennes, notamment dans les cabinets libéraux.
Nous devons aussi nous montrer capables de faire revenir les jeunes Français
partis étudier la médecine à l’étranger, notamment en Europe de l’est – je
sais que vous menez ce combat. Nous souhaitons évidemment qu’ils reviennent
chez nous, au lieu d’aller en Allemagne ou en Suisse. Votre proposition de loi
prévoit des mesures bienvenues, permettant un retour en France à un stade
antérieur des études. Aprés son adoption à l’Assemblée, je souhaite qu’elle
soit inscrite à l’ordre du jour du Sénat pour le plus grand bien de nos
étudiants en médecine, de notre système de santé et donc de tous les Français.
Sur un tel sujet, je suis convaincu que, dépassant les clivages, nous pouvons
avancer, tous ensemble, au service de nos concitoyens.
> La situation des Ehpad doit nous mobiliser toutes et
tous. Comme nos concitoyens, j’ai été choqué par les images et les témoignages
dépeignant les conditions de vie dans certains Ehpad. Les faits rapportés sont
graves car constitutifs d’une rupture du pacte de confiance qui unissait les
établissements aux familles ; graves aussi car tous les personnels
soignants, dont l’immense majorité se démènent et s’engagent, subissent le
poids du soupçon – je veux leur redire ma confiance, mon soutien et celui
de mon gouvernement.
L’enjeu est d’autant plus important que nous devons nous préparer au
vieillissement de la population et aux conséquences de l’allongement de
l’espérance de vie et maintenir le cap en dépit de l’inflation, qui touche
durement le secteur. Avec la ministre Fadila Khattabi, avec tous les membres du
Gouvernement, nous continuerons à nous battre pour répondre aux difficultés des
Ehpad, pour leur donner plus de moyens et pour améliorer l’attractivité des
métiers du grand âge.
La première étape, c’est le rétablissement de la confiance envers ces
établissements. Pour cela, nous menons un vaste plan de contrôle et nous
préservons leur viabilité financière avec le fonds d’urgence de
100 millions d’euros créé l’an dernier et avec les 4 milliards entre
2019 et 2023 que prévoit le Ségur de la santé. Voilà pour le court terme.
Mais je sais comme vous que les problèmes structurels des Ehpad ne se régleront
pas du jour au lendemain. Je pense aux difficultés financières : nous
augmentons la dotation aux Ehpad publics de 5 % en 2024 pour réduire le
déficit et poursuivre les revalorisations salariales. Je pense aux difficultés
qu’ont les plus modestes à trouver un Ehpad : la loi « bien
vieillir » permet de fixer deux tarifs d’hébergement différenciés selon
les revenus. Ces avancées sont heureuses mais, soyons clairs, le travail
continue, en particulier pour améliorer la gouvernance de la politique du grand
âge. Je souhaite à ce titre que le financement de la dépendance par l’État en
lien avec les conseils départementaux soit expérimenté et évalué dans les
vingt-trois départements dont les présidents se sont portés volontaires
– je sais que la Lozère est du nombre,.
Le rapport remis par Éric Woerth tracera d’autres pistes d’évolution auxquelles
je serai particulièrement attentif, s’agissant d’une question majeure, dont
l’importance ne pourra qu’aller croissant dans les années qui viennent. Je sais
pouvoir compter sur l’engagement de toutes et de tous pour avancer aux côtés du
Gouvernement, au bénéfice de nos concitoyens.
> Le chômage français, le chômage de masse, n’est pas une
fatalité. On le voit au niveau national : le taux de chômage a atteint son
niveau le plus bas depuis vingt-cinq ans, et le taux de chômage des jeunes son
niveau le plus bas depuis quarante ans, quant au taux d’emploi, il est à son
niveau le plus haut depuis qu’il est mesuré, grâce aux 2,5 millions
d’emplois qui ont été créés ces six dernières années et aux réformes qui ont
été menées. Si vous ne faites pas confiance au Gouvernement vous pouvez au
moins faire confiance à la Dares – direction de l’animation de la
recherche, des études et des statistiques –, qui a publié une étude, en
février dernier, montrant que nos réformes, notamment celle, conduite en 2019,
de l’assurance chômage, ont amélioré le taux de retour à l’emploi. Voilà la
réalité ! Ce taux de chômage historiquement bas, qui est passé de
9,5 % en 2017 à 7,5 % aujourd’hui, ne tombe pas du ciel ! C’est
le fruit de réformes et j’assume de dire que nous devons poursuivre dans cette
voie. Mais comment procéder ? D’abord, en assumant de promouvoir un modèle
social toujours tourné vers la reprise d’activité. C’est le sens de la réforme
que nous avons annoncée, Catherine Vautrin et moi-même alors qu’il fallait
avoir travaillé six mois sur les vingt-quatre derniers mois pour bénéficier de
l’assurance chômage, il faudra désormais avoir travaillé huit mois sur les
vingt derniers mois, ce qui n’empêche pas notre système de rester l’un des plus
généreux d’Europe.
Notre deuxième objectif, c’est de tout faire pour améliorer le taux d’emploi
des seniors grâce à l’instauration d’une nouvelle mesure, le bonus d’activité
senior. Elle permettra à des seniors qui reprennent un emploi de conserver une
part de leur allocation chômage, afin d’améliorer leur rémunération.
Le troisième objectif, c’est d’impliquer les entreprises dans le recrutement de
seniors. Elles ont évidemment une responsabilité en la matière, mais aussi dans
la lutte contre les contrats courts qui, quand ils sont subis, pénalisent en
premier lieu les salariés.
Nous avons instauré un bonus-malus sur les contrats courts, et lui aussi a
produit des effets. Les études le montrent : le bonus-malus, dans les sept
secteurs économiques où il a été déployé, a contribué à la réduction du nombre
de contrats courts et à l’amélioration de la qualité d’emploi des salariés.
Nous souhaitons le généraliser progressivement, en l’étendant à d’autres
secteurs ; nous allons y travailler, Catherine Vautrin, Bruno
Le Maire, l’ensemble du Gouvernement et moi-même, pour définir à quel rythme
nous allons le faire.
Vous le voyez, notre seul objectif c’est de sortir de la précarité les Français
qui y sont plongés. Le meilleur moyen d’y parvenir – et je pense qu’au
moins là-dessus, nous pouvons nous rejoindre –, c’est de leur permettre de
trouver un emploi ! Nous devons donc tout faire pour que des emplois
soient créés dans notre pays. 2,5 millions d’emplois ont été créés grâce à
notre politique et depuis quatre ans, la France est le pays le plus attractif
pour les investissements étrangers en Europe. Des emplois continuent d’être
créés : il y a eu 50 000 créations d’emplois au premier
trimestre, là où nos voisins, notamment l’Allemagne, sont en récession. Il faut
s’en réjouir ! Une fois que nous avons créé des emplois et que la dynamique
est à l’œuvre, il importe de disposer d’un système d’assurance chômage, d’un
modèle social qui accompagne davantage vers l’activité, qui tend la main, qui
forme, qui aide, pour arriver à la reprise de l’emploi, ce qui devrait être
l’objectif que nous partageons tous.
> Ne soyons pas les Britanniques qui ont pleuré après le Brexit.
> La politique de LFI c'est de découper la France en tranches et d'en presser le jus électoral, et quand il n'y en a plus, de passer à autre chose.
> Si on veut être fort face aux défis migratoires, il faut une Europe capable de s'organiser, de défendre enfin la frontière extérieure de l'UE, comme on vient de l'obtenir.
> La question posée le 9 juin c'est 'est-ce que la France sera le pays qui envoie le plus gros bataillon de députés d'extrême droite au Parlement européen ?
Bruno Le Maire,
ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et
Numérique
> L'inflation elle est derrière nous, l'inflation élevée est derrière
nous, j'avais aussi annoncé que nous serions autour de 2% d'inflation début
2024, nous sommes fin mai 2024 et nous sommes autour de 2% d'inflation. Donc,
le pari a été gagné, la bataille a été gagnée, et surtout, le plus important,
c'est que les salaires commencent à augmenter plus vite que l'inflation, donc
ça améliore le pouvoir d'achat des Français, n'empêche que ça reste très
difficile.
Ça se voit sur certains prix, pas tous, on a en plus des prix à la pompe qui
aujourd'hui sont stables ou en légère diminution, on a quelques produits
alimentaires qui diminuent, mais il n'empêche que vous avez le coût du logement
qui reste très élevé dans beaucoup de zones où c'est tendu, on a encore des
difficultés structurelles à résoudre, mais sur le chiffre-même d'inflation, il
était 5 points au-dessus il y a encore quelques mois, on s'est beaucoup battu
pour le ramener à 2, j'avais pris un engagement, 2% d'inflation mi-2024, nous y
sommes, l'engagement est tenu.
> On a réussi à gagner la bataille contre l'inflation, on a maîtrisé les prix, on a des salaires qui sont plus dynamiques que les prix, tant mieux, on ne va pas non plus se battre pour avoir des salaires qui progressent moins vite que l'inflation. Je ne pense pas que ça fera rebondir l'inflation, ça c'est l'analyse de ceux qu'on appelle les faucons de la Banque centrale européenne, ou de certains faucons des milieux financiers européens qui, dès qu'il y a un frémissement sur les salaires, vous disent c'est terrible, ce n'est pas possible, il faut immédiatement augmenter les taux d'intérêt, je ne partage pas cette analyse. Je pense que le bon équilibre, c'est avoir un niveau d'inflation contenu, on est à 2%, nous avons gagné cette bataille, mais continuer à avoir des salaires qui augmentent plus vite que l'inflation. Si à chaque fois que les salaires augmentent on nous dit c'est tragique, c'est catastrophique, il faut serrer la vis, c'est complètement décourageant pour ceux qui travaillent.
> [Réforme de l’assurance-chômage] Je pense que c'est
cohérent à partir du moment où nous avons décalé l'âge légal de départ à la
retraite de deux ans, d'en tirer les conséquences sur la filière seniors, qui,
je le rappelle, va être maintenue, c'est-à-dire que les seniors, les plus 55
ans, 57 ans maintenant, auront droit à un traitement plus favorable, et c'est
normal parce qu'il faut accompagner, je l'ai dit à de multiples reprises, il
faut accompagner le plus possible les plus de 55 ans, ou de 57 ans, dans
l'emploi, pour qu'ils restent dans l'emploi ou qu'ils retrouvent le plus
rapidement possible un emploi. Mais sur cette réforme de l'assurance chômage,
moi je soutiens pleinement ce qui a été décidé par le Premier ministre, par
Gabriel Attal. Je le réclame depuis des mois, et je dis, je crois maintenant
depuis des années, qu'à modèle social constant on ne pourra pas atteindre le
plein emploi, il faut juste savoir ce que nous voulons collectivement. Est-ce
que nous, Français, nous voulons, comme d'autres grandes nations développées,
avoir 5% de taux de chômage ? On n'y est jamais arrivé depuis plus de 50 ans.
On est aujourd'hui dans la bonne direction, on a le taux d'emploi le plus
élevé, on a créé 2 millions d'emplois, on réindustrialise le pays et on a un
taux de chômage qui est le plus bas depuis 40 ans, si on veut franchir une
étape supplémentaire, c'est-à-dire se dire il n'y a plus du tout de chômage, ni
de masse, ni de chômage résiduel, il reste uniquement quelques poches
d'inactivité ici ou là, eh bien il faut inciter le plus possible nos
compatriotes à reprendre un travail lorsqu'ils l'ont perdu. C'est le sens de
cette réforme de l'assurance chômage. Ça veut dire aussi mieux qualifier, mieux
accompagner, c'est ce qui est prévu avec France Travail, et je pense que c'est
le bon équilibre, avoir une durée d'indemnisation plus courte, un meilleur
accompagnement et le plus grand nombre possible de personnes au travail. (…)
Ça fait des années que, comme ministre de l'Economie, je défends la réforme de
l'assurance chômage, je dis qu'il faut réduire la durée d'indemnisation pour
inciter à reprendre le plus vite possible un travail, donc ça n'a rien à voir
avec les sujets budgétaires. Les sujets budgétaires il faut les traiter avec
sérieux, on a commencé à le faire en 2024, on le fera dans le budget 2025, nous
commençons déjà à y travailler avec toutes les forces politiques, avec le
ministre des Comptes publics, et nous présenterons notre copie en septembre,
mais c'est deux sujets qu'il ne faut pas mélanger, parce que je vois bien que,
dans le fond, c'est une façon de décrédibiliser la réforme de l'assurance
chômage, de dire " ah, c'est une réforme budgétaire, réforme financière
", non, c'est une réforme pour le travail. Si on croit au travail, ce qui
est mon cas, le travail pour tous, le travail pour tous les Français, eh bien
la réforme de l'indemnisation du chômage est une bonne réforme.
> Nous avons fait bouger les lignes en Europe, sur la politique industrielle, sur le soutien à l'industrie, sur la dette en commun. Maintenant, vous avez parfaitement raison, le grand défi c'est quoi ? C'est de nous protéger face aux surcapacités industrielles chinoises. La Chine produit les mêmes produits que les nôtres, les véhicules électriques, des batteries, des pales d'éoliennes, des pompes à chaleur, à un prix 20 à 25% inférieur au notre, parce que c'est largement subventionné et produit dans des conditions environnementales qui sont moins satisfaisantes, moi je suis là pour défendre nos producteurs, pour défendre notre industrie, pour défendre nos ouvriers. Il y a quelques semaines j'étais dans une usine de pompes à chaleur, quand je leur ai dit que nous allions réserver le bonus de 9000 euros sur les pompes à chaleur aux seules pompes à chaleur produites chez eux, non seulement ils étaient contents, mais ils ont dit qu’ils attendaient ça, c'est exactement ce que nous avons proposé aux Allemands, protéger, défendre, notre industrie et nos emplois industriels.
> La Chine n’est pas un ennemi, mais un concurrent, et la concurrence doit être équitable et aujourd'hui elle n'est pas équitable. Regardez les chiffres, le déficit commercial entre l'Europe et la Chine il était de 100 milliards il y a quelques années, il a triplé, 300 milliards, eh bien on ne va pas rester les bras croisés, moi je plaide pour que nous soyons très offensifs et que l'Europe montre les dents. Il y a un proverbe de Mao qui disait lorsque le tigre ne montre pas ses dents, on peut penser qu'il n'en n'a pas, eh bien il est bon que l'Europe montre ses dents.
> ATOS c'est une entreprise de 10 000 salariés, qui a des activités de gestion informatique, que font d'autres entreprises françaises, et puis des activités qui sont très stratégiques parce qu'elles ont trait à la cybersécurité, au super calculateur et aux questions nucléaires. Ça fait des mois que je suis le dossier ATOS. J'ai pris toutes les décisions nécessaires depuis des mois pour l'accompagner avec le comité interministériel aux restructurations, pour apporter un prêt de 500 millions d'euros, pour sécuriser les actifs stratégiques, j'ai pris la décision de marquer mon intention de reprendre le contrôle de toutes les activités stratégiques d'ATOS, le super calculateur, la cybersécurité, et tout ce qui a trait aux activités militaires d'ATOS. Il reste un élément très important, c'est ce qu'on appelle le contrôle commande des centrales nucléaires françaises qui est absolument stratégique, donc il n'est pas question que ce contrôle commande des centrales nucléaires puissent désormais partir je ne sais trop où, elle doit rester sous le contrôle de la puissance publique, et je ferai en sorte que le contrôle commande des centrales nucléaires qui aujourd'hui est dans ATOS, pas encore dans le périmètre que nous avons sécurisé, soit dans le périmètre que nous avons sécurisé, qui restera sous le contrôle de la puissance publique, ça peut être EDF, ou une entreprise proche d'EDF, qui reprenne le contrôle des activités stratégiques, mais j'ai toujours dit que dans ATOS toutes les activités stratégiques resteraient sous le contrôle de la puissance publique, je vous confirme que toutes les activités stratégiques resteront sous le contrôle de la puissance publique, y compris les commandes de contrôle de nos centrales nucléaires.
> [Elections européennes] Il faut surtout se battre pour
avoir le meilleur résultat possible le 9 juin. C'est un scrutin à un seul tour,
je le rappelle parce que beaucoup ne le savent pas, c'est un scrutin qui est
important, comme tous les scrutins, il n'y a pas des scrutins importants, des
scrutins secondaires. Et en troisième lieu le grand enjeu c'est de savoir
comment est-ce que la France se voit, est-ce qu'elle se voit comme une
puissance qui pèse encore en Europe, qui va pouvoir faire bouger les lignes,
comme je l'ai dit, sur l'industrie, sur la politique économique, sur la
fiscalité internationale, ou est-ce que la France se place en retrait, en
défensive, par rapport à l'Union européenne ? Eh bien moi je souhaite une
France à l'offensive, une France acteur et pas spectateur, c'est ça qui se joue
le 9 juin, pour ça on a besoin que notre électorat se mobilise totalement,
beaucoup plus qu'il ne le fait aujourd'hui. (…)
Il faut que notre électorat se réveille, se mobilise, et comprenne que le 9
juin, si notre électorat souhaite que nous continuions à porter une voix
claire, forte, offensive en Europe, on a besoin d'électeurs et on a besoin de
députés, si on ne les a pas pour mener la politique économique que nous
défendons, pour continuer à se battre pour une fiscalité internationale plus
juste, ça va être beaucoup plus compliqué parce que je n'aurai pas les troupes
nécessaires au Parlement. (…)
Le Rassemblement national n'a jamais cru dans l'Union européenne. Enfin,
pardon, c'est une évidence. Il change d'idée comme de chemise. Un jour, il vous
dit «Ce n'est pas l'euro qu'il faut, c'est un panier de monnaie. Et puis
finalement, je reviens à l'euro parce que c'est devenu populaire». Il vous
invente des doubles frontières, auxquelles ne n'ai strictement rien compris,
c'est une idée fumeuse et totalement incompréhensible. Donc ce n'est pas un
parti qui a une cohérence et une colonne vertébrale européenne. Le
Rassemblement national n'a pas de colonne vertébrale. C'est un parti qui est
opportuniste, chacun l'a compris. Maintenant, si ceux qui croient dans la place
de la France en Europe, la capacité à faire bouger concrètement les lignes pour
défendre nos usines, pour défendre nos ouvriers, pour défendre l'innovation,
pour défendre la place de l'Europe dans l'intelligence artificielle, qui va
bouleverser complètement les équilibres géopolitiques, si ceux qui croient en
ça, restent dormir le 9 juin ou partent à la pêche ou partent en week-end, on
est mal barré ! Donc je leur dis à eux aussi : réveillez-vous ! Vous croyez en
l'Europe ? Vous croyez dans une France forte ? Vous croyez dans une France qui
joue un jeu égal en Europe, avec la Chine, avec les Etats-Unis ? Eh bien,
prenez au moins deux minutes, le 9 juin, scrutin à un seul tour, pour aller
voter et nous soutenir. Après, il sera trop tard. (…)
Je crois qu'on motivera nos électeurs en leur disant très simplement : il y a
une majorité qui depuis cinq ans, a totalement fait bouger les lignes en
Europe, et si aujourd'hui vous avez de l'industrie, de nouvelles filières
industrielles, si on innove, si l'Europe peut être un champion d'intelligence
artificielle, c'est parce que la France a pesé en Europe. Vous croyez en ça ?
Vous croyez dans une France qui est debout, qui a une colonne vertébrale, qui a
une cohérence, qui est respectée, qui agit, qui décide ? On a besoin de vos
voix. Et si après vous n'êtes pas contents parce que l'Europe ne fait pas ce
que vous souhaitez, qu'elle ne vous protège pas, qu'elle ne défend pas vos
frontières, qu'elle ne réindustrialise pas, qu'elle ne pèse pas dans la
politique commerciale face à la Chine, vous n'aurez à vous en prendre qu'à
vous, parce que vous n'êtes pas allé voter. (…)
L’Europe, c'est un enjeu très important, c'est pour ça que je me mobilise. Mais quand on ne souhaite pas être député européen, on n'est pas candidat sur la liste aux élections européennes. C'est aussi simple que ça. Moi, vous savez, les petits malins qui vous disent «je vais être candidat, et comme ça je vais gagner en notoriété. Mais ensuite je ne siégerai pas au Parlement européen». Très peu pour moi. Cette politique-là, je la vomis. Moi, j'aime les engagements clairs et fermes. Je suis engagé totalement pour la majorité, totalement aux côtés du président de la République, totalement comme ministre de l'Economie et des Finances. Dieu sait que j'ai du pain sur la planche. Je n'ai pas envie de changer de planche.
Catherine Vautrin,
ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités
> [Assurance-chômage] Je pense que
nous ne regardons pas les comptes de l’Unedic de la même manière. Depuis 2019,
ils présentent en effet des résultats excédentaires qui résultent précisément
des réformes réalisées. Cependant, l’Unedic a toujours une dette de
53 milliards d’euros – nous sommes donc loin de l’équilibre. De plus,
les trois exercices excédentaires consécutifs sont précisément le résultat du
retour à l’emploi d’un grand nombre de personnes, puisque
2 500 000 chômeurs ont effectivement retrouvé le chemin de
l’emploi.
J’entends dire parfois que rien ne prouve
l’influence de la durée d’indemnisation sur retour à l’emploi. Pourtant, les
politiques conduites en Autriche, en Slovénie, au Portugal, en Allemagne et en
Finlande ont toutes apporté la preuve qu’une réduction de la durée potentielle
d’indemnisation se traduit par une baisse de la durée effective du chômage.
L’économiste Thomas Le Barbanchon a d’ailleurs montré, grâce à des analyses
menées entre 2010 et 2012, qu’une réduction de la durée d’indemnisation de
10 % conduit à une baisse de la durée effective du chômage de
3 % : on ne peut donc que constater cette tendance.
Enfin, je répète que nous allons
accompagner les seniors vers un retour à l’emploi rémunérateur qui leur
permettra de conserver leur niveau de revenu. Ce dispositif inédit illustre
notre vision de l’accompagnement des seniors pour leur retour à l’emploi.
Nicole Belloubet,
ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse
> Lutter contre le
harcèlement à l’École. C’est la priorité de nos priorités. Avec Emmanuel et Brigitte Macron, nous mettons
à l’honneur tous les élèves engagés contre ce fléau. Bravo aux lauréats du prix
Non au harcèlement réunis à l’Élysée et aux 157 000 participants !
Marc Fesneau,
ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire
> La compétitivité n'est pas un dogme, c'est une
condition essentielle à la pérennité de notre agriculture. On ne peut pas
prétendre que les agriculteurs vivront mieux de leur travail en étant moins
compétitifs. La France n'est pas une île. Nous devons donc élaborer et voter
une loi pragmatique, pour assurer le renouvellement des générations
d'exploitants sur le terrain.
> La simplification n'est pas un jouet administratif. C'est une nécessité, Pour ne plus permettre qu'une installation soit vouée à l'échec dès l'étape du projet, Pour ne pas décourager les agriculteurs dont le métier est déjà complexe. C'est la condition nécessaire à l'atteinte de l'ensemble des objectifs du projet de loi d'orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations.
> L'intérêt économique agricole n'est pas un intérêt économique comme un autre. Le contexte géopolitique actuel le rappelle, l'enjeu agricole est aussi, et de plus en plus, social, géopolitique et politique. C'est une arme de déstabilisation. En le reconnaissant comme intérêt majeur, nous assurons de le privilégier chaque fois que cela sera nécessaire, dans l'intérêt de la souveraineté du pays et de la capacité nourricière de notre économie.
> Favoriser l’accès de tous à une alimentation saine, durable et à des produits de qualité, ça se prépare sur le terrain. Le Forum de la Restauration publique territoriale est un évènement-clé dans cette démarche. Sa 38ème édition a été un moment privilégié pour échanger et approfondir la réflexion sur les moyens de rendre plus vertueux le circuit de la restauration collective, un débouché essentiel pour nos filières agricoles. Je salue l’Association nationale des directeurs de la restauration collective (Agores) pour l’organisation de cet évènement qui est un modèle de coopération entre les acteurs publics et privés. Par vos retours, conférences et ateliers, vous êtes aussi nos relais pour diffuser les informations et accompagner les acteurs de terrain. Cet évènement doit beaucoup à Christophe Hébert, à qui j'ai remis ce jour les insignes de Chevalier dans l'Ordre national du mérite, en reconnaissance de l'ensemble de ses engagements que je salue. L’Etat assure le déploiement de ces réflexions au sein du conseil national de l’alimentation (CNA) et du conseil national de la restauration collective (CNRC), par l’ensemble des mesures d’accompagnement en faveur d’une alimentation en restauration collective qui privilégie les productions durables et de qualité. Dans ce domaine, la puissance publique continue d’agir et se montrera exemplaire.
> 90 % des cas d’incendie de forêt sont causés par l’homme. La protéger contre les risques d’incendie est primordiale dans un contexte de changement climatique. En 2023 nous avons, par une loi, renforcé la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie. En 2024 nous portons une stratégie nationale de prévention des feux de forêt en complément de la stratégie de renouvellement forestier avec des peuplements adaptés et résistants aux sécheresses. La forêt française est la quatrième surface forestière en Europe. Préservons notre patrimoine.
> La présomption d'innocence est au fondement du droit français. Les agriculteurs doivent y avoir droit, comme tout citoyen, lorsqu'ils mènent des projets utiles à tous. Grâce au projet de loi adopté hier, les peines seront jaugées en fonction de l'intentionnalité, pour ne pas incriminer nos exploitants de façon injuste. Ne confondons pas le droit à l'erreur non intentionnelle, et l'impunité des atteintes à l'environnement.
> Transition et production peuvent se combiner, et il est faux de vouloir les opposer. Un réchauffement de 1 à 4°C, c'est une impasse pour de nombreux agriculteurs. Ceux qui disent aux exploitants que c'est mieux sans aucune norme leur mentent.
> 40 à 50% des agriculteurs pourront partir à la retraite d’ici 2030. C’est 200 000 exploitations. Le projet de loi visait à répondre à ce sujet : le renouvellement des générations. Il visait aussi à répondre à des sujets de crise : Le sens qu’on donne à l’agriculture, La simplification du métier d’agriculteur.
Stéphane Séjourné,
ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, secrétaire général de
Renaissance
> Avec Abdallah Bou Habib, mon
homologue libanais, j’ai tenu à lui rappeler que la France reste aux côtés du Liban. Nous poursuivons nos efforts diplomatiques,
afin d’éviter une nouvelle escalade des combats, dans l’intérêt du Liban et de
la région.
Christophe Béchu,
ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
> Face à l’ampleur du défi climatique, certains
voudraient nous faire croire que le repli nationaliste serait la solution.
C’est faux ! Nous l’affirmons haut et fort : nous avons besoin de l’Europe pour
gagner notre combat contre le réchauffement climatique.
Aurore Bergé, chargée
de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les
Discriminations.
> Quand
les drapeaux européens flottent en Ukraine ou en Géorgie, nous savons l'espoir
que l'Union européenne représente. Nous savons l'influence que la France
conserve et doit conserver.
> [Violences sexistes et sexuelles] Systématiquement on a besoin d'aller plus loin sur les circuits de signalement, de détection, de prévention beaucoup plus efficaces.
> [Le Sénat a adopté la proposition de loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre] Le gouvernement a une position ferme: nous sommes opposés à cette proposition de loi. Un travail sérieux, scientifique est conduit par la HAS. Ce sont ses recommandations qui nous éclaireront. Et nous ne laisserons pas prospérer les discours de haine.
Roland Lescure, ministre
délégué chargé de l’Industrie et de l’Energie
> Allemands et Français, ensemble, nous sommes
déterminés à ce que le Green Deal, que nous avons bâti pendant 5 ans, soit
l’agenda industriel de l’Europe et la boussole de notre économie.
Dominique Faure, ministre
déléguée chargée des Collectivités territoriales et de la Ruralité
> Pour réussir la transition écologique, nous
devons travailler en équipe avec les élus locaux. Ils sont au cœur de la
construction d’un monde plus durable. Grâce au Fonds vert, en 2023 et en 2024,
ce sont 2 milliards € pour financer et accélérer la transition écologique dans
nos territoires. Le Fonds vert, c’est l’écologie du quotidien.
Frédéric Valletoux, ministre
délégué chargé de la Santé et de la Prévention
> [Feuille de route pour la
pédiatrie et la santé de l’enfant] Au terme des travaux, nourris et denses, menés par Adrien Taquet et le
professeur Christèle Gras-Le Guen, qui ont abouti à de nombreuses
propositions, dont quatre-vingts ont été retenues et présentées vendredi
dernier.
Cette feuille de route prévoit une réponse structurelle, pluridisciplinaire et
transversale mais aussi volontariste car telle est l’approche nouvelle que nous
souhaitons avoir s’agissant de la pédiatrie et de l’accompagnement des enfants
en matière de santé.
Concrètement, le volet prévention se traduira, entre autres, parmi les
quatre-vingts mesures, par un dépistage en école maternelle pour tous les
enfants d’ici à 2027, la création d’un nouvel examen obligatoire à 6 ans
– âge auquel on peut repérer certaines pathologies –, l’accès direct
aux orthophonistes et la généralisation du traitement préventif contre la
bronchiolite.
En outre, le rôle de la protection maternelle et infantile sera consolidé
autour d’objectifs de santé publique, avec de nouveaux moyens dédiés. La santé
à l’école, sur laquelle vous m’interrogez, sera également renforcée grâce à
l’introduction d’une certaine souplesse. Ainsi, nous autoriserons les médecins
de l’éducation nationale à exercer en libéral et à l’hôpital afin que l’école
attire davantage de médecins.
Parallèlement, nous améliorerons la prise en charge sanitaire des jeunes en
revalorisant les tarifs de séjour en pédiatrie – ce qui a déjà été permis
par un arbitrage du Premier ministre en début d’année –, en faisant
progresser le taux d’équipement en réanimation néonatale mais aussi en formant
plus de pédiatres, d’orthophonistes et de puéricultrices, ce qui passera par la
reconnaissance de nouvelles compétences, avec par exemple le passage en
pratique avancée des infirmières puéricultrices.
S’agissant de la santé mentale, nous allons refondre le dispositif Mon soutien
psy – comme l’a indiqué le Premier ministre dans sa feuille de
route – afin de l’ouvrir et de le rendre plus facilement accessible aux
jeunes. Toutes ces mesures doivent permettre de donner un nouvel élan à la
pédiatrie et à la prise en charge de nos plus jeunes.
> L’endométriose, en parler pour mieux la détecter. Fier de lancer une campagne pour sensibiliser le plus grand nombre. La santé des femmes, la lutte contre l’endométriose : c’est l’affaire de toutes et tous.
> [Pénurie de médicaments] Les ruptures de stocks sont en augmentation de 30% sur un an. Il faut agir pour relocaliser un certain nombre de production de médicaments dans notre pays.
> Je me félicite des nouvelles relations plus apaisées qui se construisent depuis quelques semaines entre le gouvernement et la médecine libérale.
> [Le Sénat a adopté la
proposition de loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre
dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre] Le
Gouvernement est contre cette proposition de loi. Tout ce que j’ai entendu m’a
confirmé que nous étions dans une approche dogmatique et subjective. Sur les
sujets médicaux, je ne ferai jamais primer la décision politique sans qu’elle
soit éclairée par le débat scientifique.
> [Grève des pharmaciens] Comme pour toute grève, les mots d’ordre de cette
profession accompagnée par le Gouvernement et les questions qu’elle se pose
doivent être entendus. Les discussions entre les pharmaciens et l’assurance
maladie sont ouvertes depuis décembre dernier. De nombreuses réunions – ce
matin encore – étudient l’accompagnement financier de la profession. Les
dernières discussions financières remontaient au printemps 2022, ce qui montre
que cette profession fait l’objet d’un suivi renforcé de la part de l’assurance
maladie sur le seul volet financier. Un chiffre pour éclairer votre
analyse : la rémunération globale des pharmaciens s’est élevée à
7,3 milliards en 2023, soit une augmentation de 20 % depuis 2019.
Leur profession est donc accompagnée sur le plan financier, mais elle
s’interroge sur son rôle et sa place dans le système de santé.
Depuis des années, le Gouvernement et la majorité donnent aux pharmaciens plus
de compétences et de responsabilités. C’est le cas de la vaccination ou de la
possibilité, votée dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité
sociale (PLFSS), de délivrer directement certains antibiotiques – actes
accompagnés financièrement par l’assurance maladie. Dans la même optique, vous
avez évoqué la possibilité de faciliter la vente en ligne des médicaments.
C’est bien sûr une option car les Français le souhaitent, ainsi que les
pharmaciens eux-mêmes qui ont su, à l’occasion de la création du dossier
pharmaceutique, adopter des innovations numériques. Ils sauront faire de même
pour la vente en ligne, mais à leur bénéfice – il n’est pas question
d’ouvrir aux géants du numérique ou à je ne sais quel grand groupe
international la possibilité d’intervenir sur ce marché. (…)
Dans le cadre des négociations en cours, le Gouvernement a d’ores et déjà
proposé aux pharmaciens de revaloriser leurs honoraires de 10 %, les
majorations de garde et de nuit, ainsi que les actes nouveaux – notamment,
les vaccinations. Des propositions tout à fait concrètes sont donc sur la table
pour continuer à accompagner les mutations de cette profession. En quoi
consiste cet accompagnement ? J’ai évoqué il y a un instant la
rémunération : une hausse de 20 % en quatre ans – l’effort est
réel. Par ailleurs, nous formons plus de professionnels et essayons
d’accompagner les jeunes vers cette profession. Votre assemblée a voté l’an
dernier une proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par
l’engagement territorial des professionnels, qui permet de mieux orienter les
étudiants dans les filières de pharmacie.
S’agissant des mutations professionnelles, nous venons d’évoquer la vente en
ligne, mais le Gouvernement est également mobilisé sur le sujet des ruptures de
stocks de certains médicaments. La ministre Catherine Vautrin vient d’annoncer
des dispositions visant à faciliter la gestion des flux et des stocks sur le
marché des médicaments. Enfin, nous donnons régulièrement de nouvelles missions
aux pharmaciens pour les accompagner dans l’évolution de leur métier. Leurs
représentants que je recevrai très prochainement, connaissent et comprennent
ces mutations. Nous allons continuer à travailler avec eux dans ce sens.
Agnès
Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’Agriculture
> Il faut mettre tous les acteurs autour de la
table pour trouver des solutions aux difficultés auxquelles sont confrontés les
agriculteurs en matière de protection des cultures. C’est dans cet esprit que
j'ai lancé le 15 mars dernier le Comité des solutions.
> Le plan Ecophyto 2030 repose sur 3
éléments clés :
- Une ambition intacte : réduire de 50% les usages et les risques liés aux
produits phytosanitaires
- Un financement inédit d'1 milliard d'euros
- Un changement de méthode.
Marina Ferrari, secrétaire
d’Etat chargée du Numérique
> [Intelligence artificielle]
Grâce à la politique conduite depuis
2018, nous occupons aujourd’hui une position de leader en Europe continentale.
Concernant le volet formation et
sur le plan que nous souhaitons lancer en la matière. Le rapport de la Commission de l’intelligence
artificielle a mis cette question en exergue. On peut y lire qu’elle constitue
un préalable si nous souhaitons que la France s’empare de l’intelligence
artificielle, notamment générative.
La formation à l’intelligence artificielle commence dès le collège, avec la
formation initiale. Nous avons déjà procédé à la refonte des programmes de technologie et d’EMI, l’éducation aux médias
et à l’information, relatifs à ce sujet.
Deuxièmement, une sensibilisation à ces questions sera proposée dès la classe
de troisième, notamment avec le déploiement du test Pix (plateforme
d’évaluation et de certification des compétences numériques) – je tiens à
saluer le travail de Nicole Belloubet en la matière.
S’agissant de l’université, vous l’avez rappelé, le Président de la République
a évoqué, dans ses annonces, les neuf pôles d’excellence qui bénéficieront d’un
renfort budgétaire de 400 millions d’euros afin de développer de nouvelles
chaires pour continuer à soutenir l’enseignement supérieur et la recherche mais
également pour attirer de nouveaux talents sur notre territoire.
Enfin, la formation professionnelle continue représente un point essentiel pour
que toutes nos entreprises, de la PME jusqu’aux grands groupes, se saisissent
de cette nouvelle technologie. Cela passe tout d’abord par l’’incitation au
développement de formations – les organisations professionnelles y
travaillent en étroite collaboration avec nos services. Par ailleurs, nous
soutenons les appels à manifestation d’intérêt « compétences et métiers
d’avenir » avec une enveloppe de 200 millions. Je tiens également à
saluer le rôle des acteurs privés, plusieurs écoles s’étant déjà saisies de
cette thématique.
La diffusion au sein de la société tout entière constitue aussi bien sûr un
enjeu crucial car l’IA représente un vecteur d’inclusion très important. Je
souhaite ainsi qu’avec les collectivités nous engagions une réflexion sur la
montée en compétences de nos conseillers numériques sur la question de
l’intelligence artificielle.
Hervé Berville, secrétaire
d’Etat chargé de la Mer et de la Biodiversité
> [Projet de loi autorisant la ratification de l’accord se rapportant à
la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et portant sur la
conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des
zones ne relevant pas de la juridiction nationale]
Il y a cinquante ans, le commandant
Cousteau nous alertait en ces termes : « Pour la majeure partie de
l’histoire, l’homme a dû combattre la nature pour survivre ; dans ce
siècle, il commence à comprendre que, pour survivre, il doit la protéger. »
Protéger l’océan, préserver les écosystèmes qui sont à la base de la vie sur
Terre, léguer une planète vivable aux générations futures, telle est, au fond,
l’ambition du projet de loi que j’ai l’honneur de vous présenter au nom du
Gouvernement.
Nous dépendons tous de l’océan. Nous lui devons la moitié de l’air que nous
respirons. Nous lui devons notre sécurité alimentaire, car il permet de nourrir
plus de 3 milliards de personnes. Nous lui devons enfin la régulation du
climat, car il absorbe un tiers du dioxyde de carbone que nous émettons, ce qui
nous permet aussi de continuer à respirer. Vous l’avez compris, la haute mer
est la pièce centrale du puzzle environnemental, donc de notre capacité
collective à répondre à la triple crise du climat, de la biodiversité et des
pollutions.
L’accord se rapportant à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer
et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité
biologique des zones ne relevant pas de la juridiction nationale – que je
désignerai ensuite par son petit nom, traité BBNJ, pour Biodiversity Beyond
National Jurisdiction – était en négociation aux Nations unies depuis près
de vingt ans. S’il a pu y être adopté par consensus le 19 juin dernier,
nous le devons à l’impulsion politique donnée par le Président de la
République, Emmanuel Macron, lors du One Ocean Summit en 2022. Nous le devons à
l’action diplomatique résolue et déterminante de la France et de l’Union
européenne, ainsi qu’à la mobilisation parlementaire et citoyenne.
Le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Stéphane Séjourné, et
moi-même nous sommes battus pour faire de ce traité une priorité de notre
diplomatie environnementale, car il contient des avancées décisives :
premièrement, la création d’aires marines protégées (AMP) dans les eaux
internationales ; deuxièmement, l’obligation de réaliser des évaluations
d’impact environnemental pour toute nouvelle activité dans ces zones ;
troisièmement, la création d’un système de partage juste et équitable des
bénéfices issus de l’utilisation des ressources génétiques marines. La force de
cet accord réside aussi dans son caractère universel et juridiquement
contraignant.
En énonçant ces trois avancées, j’ai bien conscience que cela paraît désormais
une évidence pour tout le monde, mais je peux vous assurer que rien n’était
acquis d’avance. Tous ceux qui suivaient les discussions à ce sujet le voyaient
bien, tant les parlementaires nationaux et européens – je pense notamment
à Catherine Chabaud – que les acteurs de la société civile – je pense
notamment à des ONG telles que Tara ou la Fondation de la mer. En effet, ces
avancées sont intervenues dans un contexte géopolitique international
particulièrement tendu, notamment à compter de l’invasion russe en Ukraine, et
à un moment où la compétition stratégique entre les États-Unis et la Chine
s’intensifiait.
En août 2022, lorsque je me suis rendu pour la première fois à New York
pour participer aux négociations, rien n’était acquis ; peu d’observateurs
considéraient qu’il était possible de conclure un accord dans les deux, trois
ou quatre années qui allaient suivre. Si l’issue des négociations a été
constructive et positive, c’est parce que, grâce à la mobilisation de notre
corps diplomatique – dont je salue l’action –, du couple franco-allemand
et des ONG, nous avons su démontrer que cet accord destiné à protéger la haute
mer était fondamental pour la lutte contre le changement climatique et pour
notre capacité à préserver la biodiversité dans son ensemble.
Dans ce contexte compliqué, nous avons pour la première fois réussi à obtenir
un texte relatif aux questions environnementales qui prévoit que les décisions
seront prises à la majorité qualifiée, plutôt que par consensus. Très
concrètement, cela signifie qu’aucun État ne pourra plus désormais, à lui seul,
bloquer une décision. Tout cela est le fruit, je l’ai dit, de nombreuses heures
de discussion, jour et nuit. Pour la faire avancer, je me suis rendu trois fois
à New York, notamment avec mon homologue allemande Steffi Lemke. Nous nous
sommes efforcés en particulier de démontrer l’urgence qui s’attachait, dans le
contexte qui était le nôtre, à la mise en œuvre du Cadre mondial de la
biodiversité de Kunming-Montréal, adopté en décembre 2022, qui vise à protéger
30 % des terres et 30 % des mers.
Je tiens à remercier très chaleureusement les équipes de la direction des
affaires juridiques du ministère de l’Europe et des affaires étrangères et
celles du ministère de la transition écologique. Grâce à notre action
conjointe, notamment au lancement de la Coalition de la haute ambition pour le
traité BBNJ, composée de cinquante-deux États, nous avons su dépasser les
clivages traditionnels entre le Nord et le Sud, entre les pays dits développés
et les pays en développement. Nous avons joué un rôle moteur en proposant des
voies de compromis entre souveraineté économique et priorité environnementale,
afin de mobiliser tous les États, côtiers ou non.
Le Président de la République, je l’ai dit, avait fait de l’océan l’un des
piliers de la diplomatie environnementale. Dès lors, dans toutes nos relations
bilatérales, nous avons fait de l’aboutissement du traité BBNJ une priorité.
J’en donne deux exemples. Lors de sa visite d’État aux États-Unis, le Président
de la République a fait de la protection des océans l’un des enjeux forts de la
diplomatie bilatérale environnementale. Plus récemment, nous avons signé avec
la Chine une feuille de route intitulée « De Kunming-Montréal à
Nice », qui place la protection des océans, autrement dit de 50 % de
la planète, au cœur de la relation bilatérale.
Cette mobilisation bilatérale, européenne, multilatérale et citoyenne avait un
objectif clair : préserver l’océan face aux pressions qui le menacent, à
savoir le dérèglement climatique – sachant que l’océan régule à 90 %
l’excès de chaleur dans l’atmosphère –, la dégradation de la biodiversité
marine – celle-ci constitue un véritable continent caché, encore largement
méconnu et sous-estimé – et toutes les formes de pollution. Il s’agissait
de nous donner les moyens de prévenir juridiquement les pollutions chimiques
industrielles et plastiques dans les eaux internationales.
Face à toutes ces menaces, l’accord nous fournit, enfin, des réponses
opérationnelles. Pour le moment, il faut le dire, la haute mer n’est ni
suffisamment régulée ni réellement protégée. Grâce au texte dont vous vous
apprêtez à autoriser la ratification, toute entreprise qui souhaitera opérer
dans les eaux internationales devra se soumettre à des évaluations d’impact
menées par l’État dont elle dépend. Nous pourrons ainsi prévenir toute forme de
pollution ou de dommage aux écosystèmes marins, en appliquant strictement le
principe pollueur-payeur.
De la même manière, nous allons pouvoir créer de premières AMP en haute mer, en
prenant en considération des critères tels que la santé des écosystèmes, les
routes migratoires des cétacés ou encore la préservation des ressources
halieutiques. Sur ce point, la science est formelle : les AMP constituent
l’un des outils les plus efficaces dont nous disposons pour permettre à l’océan
et à ses écosystèmes de se régénérer, d’accroître leur résilience, de continuer
à nous nourrir et de jouer le rôle crucial de régulateur du climat. C’est la
raison pour laquelle nous devons, comme le prévoit le texte du traité, nous
fixer une ambition forte en la matière et examiner, territoire par territoire,
quelles sont les activités menées et quelles dispositions nous devons prendre
pour renforcer la protection de ces zones, tant dans les eaux internationales
que dans les eaux nationales.
Le dernier volet de l’accord concerne les ressources génétiques marines. Dans
les profondeurs de l’océan, notamment dans les abysses, se trouvent, vous le
savez, des molécules essentielles à la recherche de traitements contre des
pathologies telles que le cancer du cerveau ou la maladie d’Alzheimer, ainsi
qu’au développement de vaccins à ARN messager. Or, à ce stade, moins de
20 % des fonds marins et seulement 3 % des grands fonds marins ont
été explorés ou sont connus. L’exploration, l’accès et le partage des bénéfices
sont d’une importance capitale pour la découverte médicale et pharmaceutique,
pour nos industries, pour la souveraineté et, surtout, pour le progrès de
l’humanité.
Après le marathon des négociations, qui a duré quelque vingt ans, et le sprint
lancé par le Président de la République à l’occasion du One Ocean Summit, nous
voici engagés dans un autre sprint, celui des ratifications. Tout le travail
que nous avons réalisé ensemble – avec vous, parlementaires, avec les ONG,
avec les collectivités locales, avec les peuples autochtones – n’aura
aucune portée ni aucun sens si nous n’atteignons pas les soixante ratifications
nécessaires à la mise en œuvre du traité BBNJ. À ce jour, quatre-vingt-dix
pays, dont l’ensemble des États membres de l’Union européenne, l’ont signé. La
France a d’ailleurs été l’un des premiers à le faire : dès le premier jour
de la cérémonie de signature ouverte aux Nations unies, Catherine Colonna et
moi-même nous sommes rendus à New York pour y apposer la signature du
Gouvernement de la République française.
Cinq États l’ont déjà ratifié : les Palaos, le Chili – dont je salue
l’ambassadeur, présent dans les tribunes –, le Bélize, les Seychelles et
Monaco. Le Parlement européen a récemment approuvé sa ratification à une très
large majorité, ouvrant la voie à un vote similaire des États membres. Grâce à
ce projet de loi, la France, grande puissance maritime, pourrait ainsi devenir
le premier pays de l’UE à ratifier cet accord.
Deuxième espace maritime au monde, grande nation océanique et scientifique,
présente du Pacifique aux Caraïbes en passant par l’Océan indien, porteuse
d’une forte ambition scientifique et d’une volonté de coopération avec les pays
voisins, la France est investie de responsabilités en la matière. Guidée par
cet esprit de responsabilité et par la conscience aiguë de l’importance des
océans, bien commun de l’humanité, elle agit et prend de l’avance, avant même
l’entrée en vigueur de la convention.
Ainsi, nous avons déjà initié des travaux de recherche scientifique pour
cartographier, avec les pays voisins, les zones de haute mer à classer
prioritairement en AMP. Nous sommes prêts à déployer notre flotte de satellites
pour assurer leur surveillance efficace car le contrôle de la protection de ces
AMP constitue la mère des batailles. Par ailleurs, j’ai annoncé la création
d’une coalition pour les AMP en haute mer réunissant les États, les
scientifiques et la société civile afin de progresser sur les aspects techniques,
scientifiques et financiers de ces zones protégées ainsi que sur leur
gouvernance. Enfin, nous avons déjà alloué 41,5 millions d’euros à
France 2030 pour lancer un vaste programme de collecte, de séquençage et
de partage des ressources marines génétiques dans les eaux françaises.
Pour transformer ces ambitions de protection, de coopération et d’innovation en
réalité, notre objectif est d’acter la mise en œuvre du traité BBNJ à Nice,
lors de la conférence des Nations unies pour l’océan (Unoc) de 2025.
Nous portons ce combat pour la ratification du BBNJ dans toutes les enceintes
européennes ou multilatérales. Ainsi, lors de la réunion de l’assemblée des
Nations unies pour l’environnement (Anue), qui s’est tenue à Nairobi en mars
dernier et à laquelle j’étais présent, et lors du G7 environnement à Turin où
Christophe Béchu s’est rendu fin avril, nous avons encouragé les autres pays à
signer le traité BBNJ.
La France a également conclu un partenariat historique avec le Programme des
Nations unies pour l’environnement (Pnue) sur l’apport de la science dans les
politiques publiques. Il a pour objet de nous accompagner à créer un indicateur
de la santé des océans mais également de nous aider à convaincre un maximum de
pays de ratifier le traité BBNJ.
Nous sommes mobilisés – avec vous – pour rassembler ces processus
multilatéraux dans la perspective du sommet des Nations unies pour les océans
et pour mettre en cohérence tous ces objectifs, tels celui de protéger
30 % des zones marines. Cet objectif ne pourra être atteint si le traité
BBNJ, qui s’appliquera à 70 % des océans, n’entre pas en vigueur.
Nous ne serons ni crédibles ni efficaces si nous ne signons pas le traité
mondial de lutte contre la pollution plastique qui sera discuté en fin d’année
à Pusan.
Nous serons encore moins crédibles si la sortie des énergies fossiles,
nécessaire pour lutter contre le dérèglement climatique qui constitue la plus
grande menace pour les océans, n’est pas placée au cœur de nos préoccupations.
Le sommet à venir de la COP en Azerbaïdjan sera fondamental pour acter des
avancées sur ce sujet.
Nous ne pourrons protéger la haute mer et 30 % des océans si nous
n’obtenons pas la formation d’une coalition de pays prêts à signer un moratoire
sur l’exploitation minière des fonds marins. La position de la France est très
claire : alors que l’exploitation de ces fonds pourrait générer des
retombées financières importantes, nous y avons renoncé car elle représente une
grave menace pour la préservation des fonds marins et pourrait entraîner des dommages
irréversibles pour nos écosystèmes marins.
La France va poursuivre cette dynamique motrice sur les sujets de la surpêche,
de l’exploitation minière des fonds marins, de la pollution plastique et de la
protection de la haute mer.
Je conclus en vous remerciant pour votre engagement sans faille en faveur de la
protection des océans et de la haute mer.
Je veux tout particulièrement remercier Jimmy Pahun de s’être fortement
mobilisé, avec de nombreux parlementaires, dans une démarche transpartisane. Je
remercie également Éléonore Caroit. Elle a fait preuve de diplomatie
parlementaire, complémentaire de la diplomatie gouvernementale, pour faire
grossir la coalition contre l’exploitation minière des fonds marins. Je tiens
également à saluer les efforts remarquables déployés par Mme la
rapporteure Mereana Reid Arbelot, dont les travaux ont enrichi nos réflexions
sur la mise en œuvre du traité BBNJ. Enfin, je salue l’adoption à l’unanimité
de la proposition de résolution pour la conservation et l’utilisation durable
de l’océan, défendue par Maina Sage en novembre 2021 dans cette noble
assemblée.
Ce projet de loi de ratification a bénéficié d’une adoption à l’unanimité en
commission la semaine dernière ; je vous encourage à l’adopter, avec la
plus large majorité possible, dans l’espoir que la voix de votre assemblée
résonne dans tous les Parlements européens et étrangers pour protéger l’océan,
berceau de l’humanité.
► Partis
politiques
● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes
et se considèrent de droite ou de gauche ne sont pas retranscrits]
Sylvain Maillard (président du groupe à
l’Assemblée nationale)
> Notre majorité n’a jamais établi d’inégalité
entre les morts ou les peuples. Nous n’avons jamais hésité à pleurer les
assassinés du 7 octobre – parmi lesquels plusieurs victimes françaises. Tout en
s’indignant des frappes meurtrières survenues avant-hier sur Rafah et des
nombreux civils tués. Cette voie d’équilibre est la seule qui puisse conduire à
l’objectif que nous devons tous partager : la paix et la prospérité pour les
peuples israélien et palestinien. (…)
Ce n’est pas le peuple palestinien que les députés LFI défendent mais leur
stratégie du chaos qu’ils mettent en place en France. Les députés de la France
Insoumise ne respectent ni la loi, ni le règlement de l’Assemblée nationale.
Ils tentent d'importer le conflit jusque dans l’hémicycle à leur profit.
Benjamin Haddad
(porte-parole du groupe à l’Assemblée nationale)
> Plan de relance,
défense, réindustralisation: avec Emmanuel Macron, l’Europe parle français. Voter pour le RN c’est
affaiblir la France en Europe.
> Il y a quelques mois, la France
Insoumise votait contre le pavoisement du drapeau français et européen.
Aujourd’hui elle brandit un drapeau étranger [palestinien] pour attiser le
chaos et la haine dans notre pays. (…)
LFI c’est la stratégie du chaos permanent, cautionné par Glucksmann et le PS.
Les socialistes n’ont pas voté les sanctions cette semaine. Combien de temps
vont-ils soutenir ces pompiers pyromanes ?
> La création d’un État
palestinien doit être l’aboutissement d’un processus politique. La France a
toujours soutenu la solution à deux États, mais sans le Hamas qui prône la
destruction d’Israël. (…)
Une reconnaissance unilatérale de l’Etat palestinien sans processus politique
serait une victoire donnée au Hamas et au 7 octobre. Oui à une solution
négociée à deux États, la souveraineté pour les Palestiniens et la sécurité
pour les Israéliens.
Pieyre-Alexandre
Anglade (député)
> Ce qui se joue en Ukraine aujourd’hui
c’est la paix, la liberté et la prospérité de notre continent européen.
Maud Bregeon
(députée)
> Le travail n’est pas un gros mot. Favoriser
l’emploi est au cœur de notre ADN politique et constitue le premier levier
contre la précarité. C’est dans ce cap que s’inscrit la réforme de l’assurance
chômage, sur la base d’un constat lucide, pour tendre vers le plein emploi.
> Nous avons plus que jamais besoin d’Europe aujourd’hui, parce que l’Europe protège la France. Voilà pourquoi nous mettrons toutes nos forces dans la bataille, jusqu’au 9 juin, en parlant des projets et de leurs impacts sur la vie des français plutôt qu’en commentant des sondages.
● MoDem
Maud Gatel (Secrétaire générale)
> L’effectivité de l’accès aux soins palliatifs
dans notre pays passe par une augmentation très importante des moyens
financiers mais également le développement d’une véritable culture palliative.
C’est l’engagement de la stratégie décennale.
> Par l’instrumentalisation de l’Assemblée et de la cause qu’ils prétendent défendre la démocratie a - une nouvelle fois - été abîmée. Mais LFI est tres fière de son coup. Lamentable.
> Au nom du groupe d’amitié France-Ukraine, nous avons reçu une délégation de Parlement ukrainien pour poursuivre nos échanges sur le soutien de la France à l’Ukraine : soutien humanitaire et militaire, coopération renforcée et gel des avoirs : tous les leviers doivent être activés.
Bruno Millienne
(député)
> Le CETA, négocié par les LR et par les
socialistes, voté par les LR et les socialistes au Parlement européen serait
aujourd'hui un mauvais accord ? Qu'ils sortent de leurs postures politiciennes !
> Pour comprendre la supercherie
du programme du RN.
Deux hypothèses : soit ils mentent en n'annonçant pas clairement qu'ils
souhaitent le Frexit vers lequel conduit leurs propositions, soit ils mentent
en sachant très bien que leur programme est irréalisable.
Un constat : quelle que soit l'hypothèse retenue, ils prennent leurs électeurs
pour des imbéciles...
Jimmy Pahun
(député)
> [Projet de loi autorisant la ratification de l’accord se rapportant à
la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et portant sur la
conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des
zones ne relevant pas de la juridiction nationale]
La négociation du traité BBNJ aura été
une « longue route », pour reprendre le titre du livre dans lequel
Bernard Moitessier raconte son tour du monde en solitaire et le temps long des
circumnavigations – à cette différence près que le BBNJ n’est pas une
aventure solitaire mais collective.
Cette aventure a débuté il y a vingt ans lorsque les États membres de l’ONU se
sont interrogés sur la nécessité de compléter la convention de Montego Bay sur
le droit de mer, afin de mieux prendre en compte les enjeux de protection des
écosystèmes marins liés à la progression des activités humaines en haute mer.
Alors que la convention de Montego Bay s’attache à lutter contre les pollutions
aux hydrocarbures, l’accord BBNJ prend en compte l’ensemble des défis et des
menaces pesant sur cet espace situé hors de toute juridiction nationale, à 200
milles des côtes : pêche illégale, surpêche, exploration – et
peut-être demain exploitation – des fonds marins, transport maritime...
Le BBNJ permettra de traiter tous ces enjeux dans une même enceinte, non pas
pour se substituer aux instruments juridiques existants, régionaux – comme
les organisations de pêche – ou sectoriels – telles l’Organisation
maritime internationale (OMI) et l’Autorité internationale des fonds marins
(AIFM) – mais pour coordonner leurs actions au bénéfice de la
biodiversité.
Le BBNJ devrait ainsi mettre fin à l’extrême fragmentation du cadre juridique
applicable à la haute mer et aux grands fonds. L’accord s’appuie sur quatre
piliers : le partage juste et équitable des avantages tirés de l’utilisation des
ressources génétiques marines, la création d’outils de gestion par zone –
y compris les AMP –, l’obligation d’études d’impact pour les activités
humaines et, en dernier lieu, le renforcement des capacités et le transfert de
technologies marines au profit des pays en développement.
Premier pilier : l’accord organise le partage juste et équitable des
avantages monétaires et non monétaires, c’est-à-dire principalement le
transfert de savoirs et de compétences, qui découlent de l’utilisation des
ressources génétiques marines. Si ce sujet est éminemment technique et sans
doute moins médiatique que celui des AMP, il a cependant constitué le c?ur des
négociations.
En effet, certains organismes marins possèdent des caractéristiques uniques qui
pourraient déboucher demain sur des innovations significatives et des avantages
commerciaux réels pour de multiples filières. Toutefois, faute de moyens
suffisants, la plupart des pays en développement ne participent pas à ces
efforts de recherche et n’en tirent aucun bénéfice.
En second lieu, l’accord ouvre la possibilité de créer des outils de gestion
par zone, y compris des AMP en haute mer. Celles-ci existaient uniquement dans
le cadre d’accords régionaux n’engageant que les États parties. L’accord innove
par la mise en place d’un nouvel outil de gestion de ces zones à la majorité
qualifiée pour éviter les blocages, s’éloignant ainsi de la pratique en vigueur
dans les institutions onusiennes. En contrepartie, les États disposeront d’un
droit d’objection à la condition cependant qu’ils le justifient.
En haute mer comme dans les zones économiques exclusives (ZEE), je souhaite la
création d’aires marines sous protection stricte ou intégrale, excluant par
principe toute activité extractive. Selon la communauté scientifique
internationale, seul ce niveau de protection est à même de protéger ou
restaurer les écosystèmes marins. Il s’agit non de mettre la mer sous cloche
mais de garantir un niveau de protection optimale des zones les plus fragiles.
En France, nous nous sommes fixé l’objectif de 10 % d’aires protégées de
ce type. Elles favorisent une abondance nouvelle des ressources dont
bénéficient en premier lieu les pêcheurs ainsi que le démontrent les premières
expérimentations réalisées dans notre pays ou à l’étranger.
Il incombera aux États, lors des futures conférences des parties, de définir
les processus de création de ces AMP en haute mer. Tout reste à construire à
partir de l’outil dont nous disposons maintenant. Les COP devront aussi
préciser comment contrôler le respect de ces aires éloignées de tout.
Assurément, l’outil satellitaire y jouera un rôle prépondérant.
Troisièmement, l’accord introduit l’obligation pour les États parties de
réaliser une étude d’impact chaque fois qu’une activité engagée sous leur
juridiction ayant une incidence en haute mer ou menée directement en haute mer,
est susceptible d’entraîner une modification importante et néfaste du milieu
marin. Le grand intérêt de cette disposition tient au fait qu’elle prend en
compte l’impact cumulé et écosystémique de telles activités.
Enfin, le traité BBNJ prévoit le transfert de technologies marines, notamment
des États développés vers les États en développement, dans le but de faire
progresser et de mieux partager les connaissances sur la conservation et
l’utilisation durable des zones ne relevant pas de juridictions nationales.
Vous le voyez l’accord est ambitieux. Il est historique. Il est le fruit de nos
efforts collectifs. Je veux, à ce propos, rendre un hommage appuyé aux
personnels des ministères et de la Commission européenne, qui ont été, pendant
des années, les chevilles ouvrières de la négociation et le porte-voix de nos
ambitions. Je n’oublie pas l’important travail de conviction et de mobilisation
réalisé par les ONG et la communauté scientifique en vue d’obtenir l’accord
ayant le plus d’envergure possible. Que toutes et tous soient assurés de la
gratitude de notre assemblée pour leur contribution à la réussite de cet
accord.
Vingt années de diplomatie, vingt années de labeur ! En ce jour, « il
faut imaginer Sisyphe heureux », heureux de participer à la quête du bien
commun et de voir ses efforts récompensés mais toujours soucieux de poursuivre
le travail engagé et plein d’espoir quant aux réalisations rendues possibles
par cet accord historique.
L’enjeu immédiat est celui de la ratification du traité BBNJ par soixante des
pays qui en sont signataires. Il pourra alors entrer en vigueur et nous
commencerons à négocier le fonctionnement précis de ses mécanismes.
La Convention de Montego Bay est entrée en vigueur douze ans après sa
signature : c’est un délai que nous ne pouvons plus nous permettre
aujourd’hui. L’océan, régulateur du climat, puits de carbone, n’y survivrait
pas. Acidification, réchauffement, désoxygénation, eutrophisation, montée des
eaux, pollution plastique, disparition de la biodiversité, dégradation des
écosystèmes : l’urgence est réelle et les défis sont immenses.
En engageant le processus de ratification du BBNJ, la France s’inscrit dans le
mouvement engagé par les Palaos, le Chili, les Seychelles, le Bélize et Monaco,
dont je salue l’engagement pour la protection de l’océan. Je remercie Son
Excellence l’ambassadeur du Chili de sa présence en tribune.
Il nous faut maintenant accélérer ce mouvement pour espérer atteindre le nombre
souhaité de ratifications pour l’Unoc qui se tiendra en juin 2025 à Nice. Notre
diplomatie, et notamment notre formidable ambassadeur aux pôles et aux enjeux
maritimes, y travaille. En votant ce texte à l’unanimité, nous nous montrerons
dignes de l’identité et de l’ambition maritimes de la France et nous
appellerons les autres États à entreprendre eux-mêmes la ratification du BBNJ.
En 2021, l’Assemblée avait adopté à l’unanimité la résolution appelant à un
accord ambitieux, présentée avec notre ancienne collègue de Polynésie française
Maina Sage. Cette cause avait aussi bénéficié du soutien sincère et
bienveillant de Marielle de Sarnez, alors présidente de la commission des affaires
étrangères, et de Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale. Nous
répondions au souci des diplomates et des ONG qui regrettaient le manque de
visibilité médiatique et de soutien politique d’une négociation pourtant
fondamentale pour l’avenir de l’océan et la planète. Je sais que ce souci était
partagé par notre collègue Delphine Batho lorsqu’elle était ministre de
l’écologie sous une autre majorité.
Je remarque que la protection de l’océan fédère par-delà les appartenances
partisanes. Nous y sommes tous sensibles et c’est notre honneur de savoir nous
rassembler pour le défendre – notre honneur à tous ou presque puisque les
députés européens du RN, le candidat Jordan Bardella en tête, ont très
récemment voté contre la ratification du BBNJ au Parlement européen.
L’impulsion politique de très haut niveau
attendue par les ONG et les négociateurs est venue du Président de la
République. Le ministre Hervé Berville l’a évoqué : le One Ocean Summit de
Brest, organisé en février 2022, dans la dernière ligne droite de la
négociation, a été déterminant pour aboutir à cet accord ambitieux. Monsieur le
ministre, le dossier est maintenant entre vos mains. Merci de porter, avec
autant de conviction et d’engagement, la voix de la France et celle des océans.
Je suis heureux d’appartenir à une majorité qui a fait de la mer une de ses
priorités. Diminution effective de nos émissions de gaz à effet de serre, lutte
contre la pollution plastique, soutien à la décarbonation du transport
maritime, financement de la recherche océanographique, interdiction de
l’exploitation des hydrocarbures en mer ou encore recherche d’un moratoire sur
l’exploitation minière des fonds marins : voilà quelques-uns des grands
chantiers que nous avons menés depuis 2017.
S’agissant de toutes ces questions, il nous faut rester vigilants et renforcer
notre action autant que nécessaire. Je pense, notamment, à la lutte contre la
pollution plastique, sur la base du rapport d’évaluation de la loi Agec sur
l’économie circulaire, présenté ce matin en commission du développement
durable. Il reste aussi des dossiers qu’il nous faut prendre à bras-le-corps
comme la pêche, dont on attend une révolution au bénéfice tant des pêcheurs que
des écosystèmes marins.
La route est encore longue et sa destination incertaine mais, lorsque le doute
nous gagne, il faut relire Bernard Moitessier : « Ciels limpides, couchers
de soleil couleur de sang, couleur de vie, sur une mer qui étincelle de
puissance et de lumière, et vous donne toute sa force, toute sa volonté. Alors
on sait pourquoi on continue, pourquoi on ira jusqu’au bout. » (
● Parti radical
> Grève des pharmaciens et pénurie
des médicaments : le Parti Radical défend une souveraineté sanitaire
européenne]
Une grève « massive » des
pharmaciens se déroule ce jeudi, avec, parmi leurs difficultés
soulevées, la pénurie de médicaments. Selon l’agence nationale de sécurité du
médicament (ANSM), les pénuries se sont aggravées en 2023 avec +30,9% de
ruptures signalées.
Parmi les propositions dans son Manifeste
européen publié en décembre 2023, le Parti radical prône une souveraineté sanitaire européenne. La crise du Covid a
révélé que la production de trop nombreux médicaments de première intention
avait été externalisée hors d’Europe. Ces difficultés d’approvisionnements ne
se résorbant pas, le Parti radical
propose d’intervenir au niveau européen pour rétablir notre souveraineté
sanitaire, avec :
Une politique européenne cohérente et
harmonisée en matière de santé;
- La relocalisation de la production de
médicaments sur le sol européen ;
- Le soutien à l’Alliance Européenne des
Médicaments Critiques pour sécuriser la disponibilité de ceux-ci en Europe.
Dès septembre 2023, l’eurodéputée radicale Catherine Amalric,
rapporteure pour le groupe Renew, a pris en charge, pour les 102 députés
du groupe présidé par Valérie Hayer, la révision de la législation pharmaceutique européenne dans l’ambition,
notamment, de garantir une plus grande harmonisation du marché intérieur des
médicaments, d’accélérer le processus d’approbation des médicaments,
d’introduire de nouveaux mécanismes pour lutter contre les pénuries de
médicaments et de permettre l’extension des achats groupés.
Ce nouveau paquet pharmaceutique européen
négocié par l’eurodéputée radicale Catherine Amalric a été voté en séance plénière le 10 avril.
Pour elle : « L’adoption du paquet pharmaceutique est une grande
victoire pour la santé européenne. Il permettra à tous les Européens
d’avoir un accès équitable à des médicaments, sûrs et durables, tout en
permettant la relocalisation de la production de médicaments en Europe et en
encourageant la recherche et l’innovation. »
Laurent Hénart, Président du Parti Radical, conclut :
« La pénurie de médicaments qui touche les pharmacies françaises montre
comment l’Europe peut concrètement apporter des solutions. Nous avons besoin
d’Europe pour renforcer notre souveraineté et protéger la santé de nos
concitoyens. »
Joël Giraud (député)
> Pour nos
agriculteurs.
Le projet de loi Agriculture, vient d’être adopté en première lecture à l’Assemblée. Je félicite et remercie
mes collègues députés qui en faisant le choix d'un travail exigeant et
constructif ont permis d’aboutir à cette première étape pour la loi. Vient maintenant au Sénat de sauvegarder ce que nous avons
acquis pour les agriculteurs:
- Inclure
l'agriculture dans la liste des intérêts fondamentaux de notre Nation dans l'objectif de préserver
notre souveraineté alimentaire
- Garantir le
renouvellement des générations : 50% des agriculteurs en activité seront en retraite
d'ici 2030 ;
- Offrir un
accompagnement personnalisé à chaque nouvel agriculteur ou agriculteur quittant la
profession via la création du réseau «France services agriculture»
- Simplifier,
simplifier, simplifier : accélération des recours contentieux, simplification
et unification du régime des haies...
Le travail
continue !
► Autres
● Organisations centristes
♦ Renew Europe
(Députés français du groupe centriste au Parlement européen)
Valérie Hayer (présidente)
> On ne peut que constater l'hypocrisie du
Rassemblement national sur l'enjeu migratoire. Leur opposition au Pacte Asile
et Migration en est un exemple frappant. Fondamentalement, ils ne veulent pas
résoudre ce défi : c'est leur carburant électoral.
> Notre famille politique regarde chaque accord commercial au cas par cas. Certains sont mauvais, et c’est grâce à nous que le Parlement n’a pas soutenu l’accord avec le Mercosur. D’autres servent nos intérêts, comme le CETA qui est un bon accord. Cessons les postures !
> Il est hors de question qu'au lendemain des élections, je me mette à la table des négociations avec les groupes ID et ECR. Pas avec des groupes politiques qui incluent des gens qui piétinent l'état de droit et nos valeurs.
> Les images de Rafah sont insoutenables. Il y a urgence à aboutir à un cessez-le-feu immédiat, à la libération immédiate des otages et à une solution politique à deux États pour aboutir à la paix.
> Soutenir l'Europe, c'est combattre l'extrême-droite. Ils ne disent plus qu'ils veulent un Frexit, mais c'est bien leur projet. Lisez leur programme, il ne dit rien d’autre. Or, il existe un risque demain que tout soit bloqué par cette minorité d'extrême-droite au Parlement !
> La transition écologique ne peut pas se faire en laissant des Français, des Européens sur le bord du chemin. Je m’y refuse. Notre enjeu pour le climat, c’est donc désormais la mise en œuvre financée. C'est le sens du Fonds social pour le climat et du plan de relance européen !
Nathalie
Loiseau
> Pauvre Marine Le Pen. C’était bien
la peine qu’elle aille à Madrid annoncer une« grande alliance
d’extrême-droite » en Europe. Ses hôtes l’ont écoutée et lui répondent que
ce sera « très difficile ». Tous les 5 ans, M Le Pen essaie et
échoue. En Europe aussi.
> Rien ne doit minorer l’horreur de ce que vivent les civils palestiniens. Tout doit être fait pour que les combats cessent et que les otages soient libérés. Ce que montre LCI, c’est que le Hamas tient en otage tous les habitants de Gaza. Cela n’exonère pas la responsabilité d’Israël.
> Une fois encore, le peuple géorgien manifeste contre les coups de boutoir de la Russie et fonde ses espoirs dans l’Europe. Allons-nous faire exactement le contraire le 9 juin ? J’espère que non.
Bernard Guetta
> Les gens qui veulent importer le conflit
israélo-palestinien en France, c'est une chose affreuse. Il faut pousser à la
paix et la solution à deux États.
> Il ne faut pas être pro-israélien ou pro-palestinien, il faut être pro-paix.
> Il faudra que la France reconnaisse la Palestine mais pas seule. Ce faisant, les pays européens affirmeront leur adhésion à la solution à deux États.
> L'exacerbation des nationalismes, c'est l'échec de l'UE (...) et c'est la guerre.
> Emmanuel Macron a raison d'autoriser Kiev à frapper les sites militaires russes avec des missiles livrés par la France. (…) Matin, midi et soir, la Russie bombarde l’Ukraine, et les ukrainiens ne pourraient pas toucher des cibles en Russie ? C’est aberrant!
> Poutine ne gagnera pas la guerre, mais s'il la gagnait, il restaurerait les frontières de l'empire des tsars.
> Je souhaitais que nous fassions une BBC à la française. Mais quand je vois l’évolution des échiquiers politiques, je me dis que la dispersion des antennes est une protection pour la liberté de la presse.
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