Il aurait pu, il aurait du être Président de la république.
Non pas pour lui mais pour le bien de la France.
Jacques Delors qui vient de disparaître à l’âge de 98 ans aura marqué la politique française en étant celui qui pouvait réconcilier l’idéal et le concret, la rigueur – mot qu’il défendait – et l’audace, la compétence et le cœur.
Il était le représentant emblématique avant l’heure de ce que l’on appelle aujourd’hui l’axe central, cet espace politique allant des libéraux de droite réformistes aux sociaux-démocrates en passant par les libéraux sociaux centristes.
Si, en 1995, fort des bons sondages, il s’était présenté à l’élection présidentielle, il aurait eu de grandes chances d’être élu et la France des grandes chances d’avoir un président d’une qualité exceptionnelle.
Mais il a refusé de candidater parce qu’il estimait qu’élu, il n’aurait pas une majorité à l’Assemblée nationale pour entamer ce qu’il considérait comme les réformes indispensables au pays.
Et Jacques Delors était un homme d’honneur et de responsabilité.
Le pouvoir ne l’intéressait que s’il y avait la possibilité de l’utiliser pour le bien commun, une leçon que nombre de ceux qui ont occupé le fauteuil élyséen devraient méditer là où ils sont aujourd’hui…
Mais si la France n’a pas eu le grand président qui aurait pu changer son destin, l’Europe a eu son grand président, en l’occurrence de la Commission européenne qu’il dirigea pendant dix ans après qu’il fut mis sur la touche par Mitterrand qui voyait en faire son premier ministre en 1984 mais qui refusa le demande de Delors d’être en même temps ministre de l’économie et des finances pour pouvoir redresser le pays après les premières années catastrophiques du retour de la Gauche aux affaires en 1981.
L’Union européenne est devenue, sous la direction de Jacques Delors, une vraie actrice de la communauté internationale et une vraie composante politique qui a changé la vie des Européens avec l’instauration du grand marché unique mais aussi d’autres réalisations secondaires mais néanmoins importantes comme Erasmus.
La dernière partie de la vie de Jacques Delors est à l’image de l’homme intègre et sans compromission qu’il fut quand il était aux affaires.
Si on lui demandait souvent ses conseils – sauf en France! – il ne fut pas utilisé comme il aurait pu l’être, comme il aurait du l’être dans ce début de troisième millénaire où sa voix et ses idées auraient été précieuses.
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