Il parait que le Centre est sorti renforcé des dernières élections sénatoriales et, dans le même temps, il parait que la majorité présidentielle a subi un échec à ces mêmes élections en rappelant que celle-ci est essentiellement… centriste!
Comment dès lors les commentateurs peuvent à la fois dire que le Centre a gagné et a perdu?!
Comment pouvoir affirmer que la majorité sénatoriale est une alliance entre la Droite et le Centre alors que cette majorité est en opposition à la majorité présidentielle qui est essentiellement centriste?!
Tout simplement parce que la plupart des centristes du Sénat sont tout sauf… centristes.
Explications pour ceux qui n’y comprennent rien de cet enfumage qui dure depuis l’élection d’Emmanuel Macron et même avant.
Au Sénat, les centristes sont regroupés dans plusieurs groupes: le groupe UC (Union centriste, 56 membres), le groupe RDPI (Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, 18 membres) ou le groupe RDSE (Rassemblement démocratique et social européen, 16 membres).
Qu’est-ce que cette UC qui réunit le plus de sénateurs?
Théoriquement un groupe qui est sensé réunir des centristes (d’où son nom) venant de plusieurs formations politiques qui se réclament du Centrisme et plus particulièrement des élus de l’UDI et du MoDem.
L’UDI est dans l’opposition alors que le MoDem est dans la majorité.
Premier anachronisme.
Mais se dire du Centre ne veut pas dire que l’on en est…
Car, l’UDI, parti créé en 2012 par Jean-Louis Borloo pour incarner une alliance des libéraux de droite et des centristes est devenue, au fil du temps et de la présidence de Jean-Christophe Lagarde puis d’Hervé Marseille, une formation avant tout opportuniste, qui ne se dit plus centriste mais une formation qui se revendique faussement «de droite et du centre», comme le faisait autrefois l’UMP et que LR continue parfois à affirmer, ce qui lui permet de ratisser large et surtout de brouiller les pistes.
Pour montrer son opportunisme, il suffit de voir comment son slogan évolue au fil de ses intérêts électoraux.
Ainsi, l’UDI se présentait au début comme le parti des «démocrates et indépendants» puis jusqu’à récemment encore comme le parti «du centre et de la droite de progrès» puis, désormais, comme «de centre-droit» et cela en un peu plus de dix ans d’existence…
Au départ, il s’agissait de concurrencer à la fois LR et le MoDem pour être dominant à droite et au centre.
Ensuite, il s’agissait de se raccrocher au train LR pour continuer à avoir des élus (l’UDI a besoin d’alliances électorales pour avoir des députés et des sénateurs).
Désormais, entre deux élections générales, il s’agit, comme d’habitude, de jouer sur tous les tableaux, opposition et majorité pour aller là où le vent de la victoire peut souffler…
Mais si cette formation pouvait être située au centre-droit jusque dans les années 2016-2017, ce n’est plus le cas aujourd’hui.
Le positionnement politique de l’UDI est clairement à droite et plus au centre, ni même au centre-droit comme son slogan l’affirme.
Cette évolution, avant tout politicienne, a été voulue par son ancien président Jean-Christophe Lagarde – opposant déterminé à Macron parce qu’il ne l’a pas nommé ministre – et par son actuel, Hervé Marseille, un fidèle de Lagarde.
Le plus perturbant n’est pourtant pas cet opportunisme de l’UDI mais le fait que depuis 2007 et le scission de l’UDF puis surtout, depuis 2017 et l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la république, c’est que le MoDem demeure associé à l’UDI dans un même groupe qui est donc, à la fois, un groupe de la majorité et de l’opposition!
Et il ne s’agit même pas d’être une sorte de «passerelle» entre deux visions du Centre mais juste d’un regroupement qui permet de faire nombre et d’avoir quelques avantages au Sénat.
François Bayrou a toujours refusé que le MoDem quitte l’UC même quand un groupe centriste en soutien à Emmanuel Macron a été créé, le RDPI, ce qui est incompréhensible d’autant qu’une haine tenace existait entre lui et le président d’alors de l’UDI, Lagarde.
Depuis qu’Hervé Marseille a succédé à ce dernier, les relations sont moins tendues mais le positionnement politique, lui, n’a pas changé.
Marseille s’est moult fois réjouit que l’UC fasse partie de la majorité sénatoriale avec LR alors même que ce groupe a des membres du MoDem qui font partie de la majorité présidentielle mais que, bizarrement, on les entend peu contredire ces propos.
Quoiqu’il en soit, in fine, on ne peut pas dire que les centristes se sont renforcés lors des dernières élections sénatoriales.
En revanche, ce que l’on peut souhaiter, c’est, enfin, une clarification nécessaire et salutaire car il y a une chose que l’on ne peut pas être: dans la majorité et dans l’opposition à la fois.
Même l’opportunisme politicien du plus bas étage ne peut y parvenir.
Nicolas Levé et Alexandre Vatimbella
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