Engouement extraordinaire de la population, taux d’audience battus, déplacement du chef de l’Etat, grands quotidiens nationaux faisant leurs Unes avec le résultat de la finale et y consacrant plusieurs pages, voilà quelques-uns des à-côtés de la Coupe du monde de football 2022 qui vient de se terminer au Qatar avec la défaite de l’équipe de France face à celle d’Argentine.
On pourrait y voir le triomphe du football, sport planétaire et populaire même dans les pays qui ont d’autres sports nationaux qui y priment comme les Etats-Unis ou l’Inde, ce que n’ont pas manqué d’affirmer encore et encore les commentateurs.
Mais si le football-spectacle est bien le gagnant sans équivoque de cette grande messe médiatico-sportive, le football en tant que sport n’en est-il pas le grand perdant?
Le fait même de s’interroger peut paraître complètement inapproprié et contraire à la réalité de ces foules vénérant ces dieux du stade qui les régalent de leur talent en jonglant si brillamment avec un ballon rond qu’ils doivent propulser dans une cage rectangulaire pour l’emporter dans des matchs parfois épiques où le sang et le sueur le dispute au talent et à la volonté.
Et pourtant, comme pour les Jeux olympiques de l’Antiquité, comme pour les jeux romains, le sport ne semble qu’être devenu un moyen et non une finalité.
Un moyen pour la politique, pour la finance, pour l’économie, pour les idéologies, pour toutes sortes d’intérêts nationaux ou privés qui relèguent la pratique physique au rang anecdotique.
Un sport qui suscite une telle ferveur et brasse autant d’argent, qui peut discréditer des dirigeants ou, au contraire, leur donner une aura (le président argentin, par exemple, ne s’est pas déplacé au Qatar pour ne pas être accusé, en cas de défaite, de porter la poisse à l’équipe nationale!), n’est plus, de toute façon, tout à fait un sport.
En témoigne les supporteurs d’un soir ou d’un événement qui viennent avant tout faire la fête sans même connaître pour certains les règles du jeu.
Mais si cela n’est guère problématique – le sport et le festif se mariant très bien – ce n’est pas le cas pour tous les enjeux et les intérêts qui gravitent autour du football.
Qu’Emmanuel Macron soit un vrai fan de football, personne n’en doute, à l’inverse d’un Jacques Chirac –président en 1998 lors de la première victoire de la France dans une coupe du monde qui plus est se disputait sur le territoire national – qui se fichait complètement du ballon rond, ne connaissant ni les règles, ni les joueurs et qui instrumentalisa avec gourmandise l’engouement populaire pour l’équipe menée par Zidane en sa faveur.
Mais fallait-il que le président actuel nous gratifie d’un tel show?
A sa décharge, son absence d’emphase et d’émotion lui aurait sans doute été reprochée comme peut l’être sa ferveur affichée…
Cependant s’il est rare – mais pas impossible – que l’on se fasse la guerre ou que l’on se brouille entre Etats à la suite d’un match de football, la récupération politique est évidente.
Sans parler de tout cet argent qui coule à flots et dont on ne voit souvent qu’une face, celle des salaires gigantesques de beaucoup de joueurs et des contrats mirobolants dont bénéficient certaines stars à l’image de Messi ou Mbappé alors que si ceux-ci touchent autant grâce à leur talent, c'est bien que d’autres en gagnent beaucoup plus en coulisse…
L’industrie du sport et la finance qui y est accolée brassent grâce au football des sommes encore plus considérables et parfois des profits qui eux sont véritablement indécents (les footballeurs ne faisant que bénéficier de cette instrumentalisation du ballon rond).
Alors, oui, il y a eu du sport dans les stades du Qatar, pays au régime peu recommandables par ailleurs, mais beaucoup trop de choses aussi qui n’ont rien avoir avec le football dont la défaite n’est pas la première et sans doute pas la dernière.
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