Voici une sélection, ce 18 février 2022, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France.
► Emmanuel Macron (Président de la
République)
> [Ukraine et bombardement du pays par les séparatistes russes du
Donbass] La situation dans le Donbass est très préoccupante ces dernières
heures. Il y a déjà eu apparemment plusieurs victimes et je veux avoir une
pensée pour les personnes et les familles qui ont été touchées. Et de manière
très claire, il y a des actes qui se sont multipliés. Ces actes contreviennent
aux accords qui ont été pris, au cessez-le-feu respecté jusqu’à alors et pour
lequel l’ensemble des parties prenantes avaient réitérées leur adhésion.
> [Ukraine] J’appelle à la cessation des actes militaire qui se sont multipliés dans l’Est de l'Ukraine où la pression militaire russe ne faiblit pas.
> [Ukraine] J'entends Vladimir Poutine (...) mais il est bon que les actes soient conformes aux déclarations. Il n’y a pas de preuve des désengagements russes à ce stade.
> [Mali et départ des soldats français] Nous avons annoncé la réarticulation du dispositif et il s'appliquera en bon ordre afin d'assurer la sécurité de la mission des Nations unies et de toutes les forces déployées au Mali. Je ne transigerai pas une seconde sur leur sécurité [à la suite de la demande de la junte au pouvoir d’un «retrait immédiat»]
> [Mali] Que se serait-il passé en 2013 si la France n’avait pas fait le choix d’intervenir ? Vous auriez à coup sûr un effondrement de l’Etat malien. Ensuite (…) les militaires [français] ont obtenu de nombreux succès.
> [Mali] La France est intervenue au Mali, premièrement, pour lutter contre le terrorisme. Deuxièmement, à la demande d’un Etat souverain et des Etats de la région. C’est cette deuxième condition qui change aujourd’hui. La victoire face au terrorisme n’est pas possible si elle n’est pas portée par l’Etat malien lui-même. Et pourquoi nous décidons aujourd’hui de partir ? Parce que la junte qui est en responsabilité au Mali n’en fait plus sa priorité.
> [Mali] Jamais l’intervention d’une armée extérieure ou d’un extérieur dans la lutte contre le terrorisme ne peut se substituer à ce qui est le devoir de l’Etat souverain. Nous pouvons venir en aide, appuyer, éviter le pire, c’est ce que nous avons fait. C’est pour cela que je pense que nous avons réussi quant à cette mission. Mais le rôle de la France n’est pas de se substituer aux Etats de la région, quels qu’ils soient, et où que soit la région.
> [Mali] Nous jetons donc là les bases d’un engagement renouvelé, qui permettra aux Européens, à la France, de continuer à jouer leur rôle d’appui et de soutien d’entraînement en amont de partenaires.
> [Mali] C’est ce modèle de partenariat respectueux et équilibré que nous allons consacrer et étendre à d’autres domaines dans le cadre du Sommet Union africaine -Union européenne, qui s’ouvrira dans quelques heures à Bruxelles.
> [Propos liminaires à la conférence de presse sur le
terrorisme au Sahel]
Nous avons réuni, hier soir à Paris, l’ensemble des partenaires africains,
européens, canadien, impliqués à nos côtés dans la lutte contre le terrorisme
au Sahel. Cette concertation a été précédée par d’intenses échanges depuis
plusieurs mois, tant au niveau politique qu’opérationnel. Et, elle a débouché
sur des décisions importantes dont je souhaite ici aussi vous rendre compte.
À l’heure où d’autres menaces stratégiques pèsent sur la sécurité du continent
européen et mobilisent à juste titre nos attentions diplomatiques, il était
tout d’abord important d’adresser un message de continuité sur notre engagement
dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. L’Europe est un partenaire de
confiance, qui s’engage dans la durée aux côtés de ses alliés pour face à des
menaces qui s’inscrivent dans un temps long et elle est aux cotés de la CEDEAO,
de l’Union africaine, du G5 Sahel.
La menace à laquelle les pays du Sahel et de la région sont confrontés a un
nom, Al Qaida et Daech. Ces deux organisations terroristes ont choisi de faire
de l’Afrique, et du Sahel en particulier – maintenant de manière croissante du
Golfe de Guinée – une priorité de leur stratégie d’expansion. Elles
investissent et instrumentalisent pour cela des causes locales pour mieux
poursuivre un agenda global et régional.
Cela justifie que nous restions engagés dans la durée dans cette région et nous
sommes bien placés, ayant affronté ces organisations sur notre propre
territoire et dans d’autres géographies, pour savoir que cela implique de la
constance et de la ténacité. Depuis 2013, et la décision courageuse du
Président François Hollande d’intervenir au Mali, à la demande des autorités
maliennes et des autorités de la région, la France a joué un rôle fédérateur de
cette mobilisation internationale en faveur du Sahel où ce sont désormais près
de 25 000 hommes qui sont déployés au titre des différentes missions
internationales.
Les décisions que nous avons prises au sommet de Pau en janvier 2020 puis à
Ndjamena en février 2021 ont permis d’amplifier encore cette dynamique et
d’agir désormais dans le cadre d’une coalition pour le Sahel. Nous
continuerons, c’est ce que j’ai dit hier à mes interlocuteurs, à assurer ce
rôle fédérateur et, là où une dimension militaire est nécessaire, le rôle de
nation cadre.
Au-delà du maintien de notre engagement, ces échanges ont aussi dégagé un
consensus pour faire évoluer les modalités de notre action au Sahel, ceci dans
quatre directions.
La première, en impliquant et en appuyant davantage les pays voisins de la
bande sahélienne, à savoir les pays du Golfe de Guinée. Comme l’ont démontré
les attaques menées il y a quelques jours dans le nord du Bénin, ces États sont
de plus en plus exposés à des tentatives d’implantation des groupes terroristes
sur leur territoire.
Si le G5 Sahel demeure une enceinte incontournable pour coordonner les efforts
à l’échelle de la bande sahélienne, l’initiative d’Accra, qui rassemble le
Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo, le Bénin, doit aussi devenir
un cadre de référence. Non pas pour créer de nouvelles structures régionales,
mais pour veiller à ce que chaque État fasse sa part des efforts et reçoive des
partenaires le soutien bilatéral dont il a besoin. Les groupes terroristes se
jouent de la porosité des frontières et une coordination transfrontalière est
indispensable pour contrer cette stratégie. C’est tout le sens d’un
renforcement de la coordination entre les pays de la région et c’est pourquoi :
G5 Sahel, initiative d’Accra, plus largement la CEDEAO et tous les pays qui
étaient impliqués, ceux que je viens de citer, ainsi que le Sénégal, sont clefs
dans cette lutte contre le terrorisme.
La seconde évolution sur laquelle nous nous sommes accordés est de mettre
davantage les populations civiles au cœur de notre stratégie de lutte contre
les groupes terroristes. Les populations sahéliennes, sont la première cible
des exactions d’Al Qaida et de Daech. Elles ne peuvent pas pour autant être
réduites à un rôle de victimes.
Elles sont aussi le premier rempart contre ces groupes, à condition que, par un
«sursaut civil», nous soyons davantage à leurs côtés, pas seulement par le
prisme trop étroit de la sécurité.
L’Alliance pour le Sahel, lancée en 2017, a justement pour objectif d’appuyer
les populations mais aussi, sans s’y substituer, les volontés locales. Elle
réunit à ce jour plus de 25 partenaires, dont bientôt les États-Unis, 22
milliards d’engagements financiers ont été pris dans ce cadre et plusieurs
milliers de projets.
Je souhaite que cette Alliance, et c’est l’orientation que nous avons
collectivement retenue, soit l’outil pour accélérer ce changement de paradigme
: déployer d’abord des programmes civils et sociaux, selon les besoins exprimés
par les acteurs régionaux, qui viendront prévenir l’expansion des groupes
terroristes et consolider les stratégies des autorités nationales. Ce n’est
qu’en complément de cet effort préalable qu’une action militaire peut,
lorsqu’elle est nécessaire, produire son efficacité.
Troisième élément en cohérence avec cette orientation : nous nous sommes
accordés sur l’impératif de faire évoluer les modalités de notre présence
militaire.
Au Sahel comme dans le Golfe de Guinée, les attentes de nos partenaires ont
évolué. La sensibilité des opinions publiques des pays de la région a, elle
aussi, changé.
Nous devons en tirer les conséquences et accélérer la transformation que nous
avions engagée au sommet de Pau, en janvier 2020, puis accélérée, il y a un an,
à l’issue du sommet de Ndjamena. Notre empreinte doit se réduire, comme nous
l’avons fait au nord du Mali en fermant trois de nos emprises à Kidal, Tessalit
et Tombouctou. Il s’agit de nous recentrer, sur demande de nos partenaires, là
où notre contribution est attendue, toujours en soutien et encore davantage
intégrée, comme nous le sommes au Niger, avec les forces armées de la
région.
Nous définirons, dans les semaines et mois qui viennent, l’appui que nous
apporterons à chacun des pays de la région, sur la base des besoins qu’ils
auront exprimés. Cet appui pourra inclure de l’aide en matière de formation et
d’entraînement, de la fourniture d’équipement, voire un appui à leurs
opérations contre le terrorisme.
Enfin, et c’est le quatrième axe, nous nous sommes rejoints sur une évidence :
nous ne pouvons pas rester engagés militairement au côté d’autorités de fait
dont nous ne partageons ni la stratégie, ni les objectifs cachés. C’est la
situation à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui au Mali.
La lutte contre le terrorisme ne peut pas tout justifier. Elle ne doit pas,
sous prétexte d’être une priorité absolue, se transformer en exercice de
conservation indéfinie du pouvoir. Elle ne peut pas non plus justifier une
escalade de la violence par le recours à des mercenaires dont les exactions
sont documentées en République Centrafricaine et dont l’exercice de la force
n’est encadré par aucune règle ni par aucune convention.
Dans ces conditions, la France et ses partenaires engagés dans des missions de
lutte contre le terrorisme, à savoir les États participants à la task force
Takuba, ont pris la décision de retirer leur présence militaire au Mali. Ce
retrait se traduira par la fermeture des emprises de Gossi, de Menaka et de
Gao. Il sera effectué de manière ordonnée avec les forces armées maliennes et
avec la mission des Nations unies au Mali. Durant cette période, nous
maintiendrons nos missions de soutien au profit de la MINUSMA.
S’agissant de l’engagement de nos partenaires européens, il sera maintenu et
s’intègrera dans la réarticulation de ce dispositif. Avec l’accord des
autorités nigériennes, des éléments européens seront repositionnés aux côtés
des forces armées nigériennes dans la région frontalière du Mali.
Enfin, notre engagement aux côtés des populations maliennes sera préservé au
travers des programmes de l’Alliance pour le Sahel, sous réserve que ces
programmes ne puissent être détournés pour financer des activités de mercenaire
ou le terrorisme lui-même.
Au final, au travers de ces évolutions, nous accélérons un mouvement collectif
qui avait déjà été amorcé au sommet de Pau puis à Ndjamena.
Le modèle d’intervention que nous avons bâti et mené depuis 2013 a permis
d’obtenir des résultats considérables. La France et ses partenaires ont infligé
à Al Qaida et Daech des défaites qui ont changé la nature et la capacité de
projection de ces deux organisations. Ces résultats ont été obtenus dans le
cadre d’une fraternité d’armes nouée dans la libération de la France et
cinquante ans plus tard dans la libération du Mali. La France n’en oublie aucun
épisode. Elle n’oublie aucun de ses 53 soldats, aucun de ses blessés et de
leurs familles qui se sont sacrifiés pour cette cause et pour nos deux pays, et
en m’adressant à vous ce matin, j’ai une pensée pour l’ensemble de nos soldats
tombés au Sahel ; pour la liberté ; pour l’ensemble de nos blessés et pour
leurs familles. De même que j’ai une pensée pour les six Français qui ont perdu
la vie au Niger en août 2020 fauchés, avec leurs accompagnateurs nigériens,
alors qu’ils étaient venus s’engager, avec l’organisation Acted.
Au moment où nos adversaires se réinventent et modifient leurs stratégies,
l’erreur aurait été de demeurer statique ou de nous égarer dans des combats qui
ne relèvent pas de la lutte contre les organisations terroristes.
Nous jetons là les bases d’un engagement renouvelé qui permettra aux Européens
et à la France de continuer à jouer leur rôle d’appui, de soutien,
d’entraînement, en un mot, de partenaire.
> [Discours sur la stratégie spatiale européenne / Toulouse]
Nous avons placé la présidence française sous le signe de la souveraineté
européenne. Faire en sorte en quelque sorte dans tous les domaines que notre
union se donne les moyens de définir sa propre politique en coopérant avec qui
elle choisit mais sans dépendre des choix des autres. Voilà notre ambition. Je
crois que le monde dans lequel nous vivons nous conforte chaque jour davantage
dans cette conviction - elle pouvait sembler théorique à quelques-uns il y a
encore quelques mois. S’il fallait des démonstrations, nous les avons eues. Et
si nous voulons concrétiser cet objectif de souveraineté, un passage obligé
indispensable, souveraineté des souverainetés, est bien l’espace.
Sans maîtrise de l’espace, en effet, pas de souveraineté technologique. L’accès
à Internet, la navigation par satellite, tout cela dépend en grande partie de
l’espace. Sans maîtrise de l’espace, pas de souveraineté industrielle et
économique au-delà des dizaines de milliers d’emplois, 32 000 emplois directs
pour la France seulement qui sont concernés donc par le secteur, le spatial
oriente tout un écosystème de recherche, d’innovation et d’industrie. Sans
maîtrise de l’espace, pas d’avancée scientifique ni de connaissance fine des
grands enjeux environnementaux et climatiques. Sans maîtrise de l’espace, pas
de souveraineté stratégique et militaire. La maîtrise des réseaux de
communication, des échanges de données, l’observation des mouvements des
différentes armées sur la planète, le spatial est devenu aussi un des nouveaux
lieux des conflictualités contemporaines. Sans maîtrise de l'espace, il
n’existe pas au fond de puissance complète capable tout à la fois de maîtriser
pleinement son destin et de conquérir de nouvelles frontières. Pour toutes ces
raisons, l'espace est une priorité de la présidence française mais aussi car la
France est, de manière concomitante, co-Présidente du Conseil de l'Agence
spatiale européenne avec le Portugal.
Alors, notre Europe, en matière justement spatiale, dispose d'atouts
considérables qui en font une puissance spatiale de premier plan ; vous en êtes
pour beaucoup dans cette salle les acteurs directs.
Nos programmes opérationnels sont parmi les plus performants du monde :
Copernicus qui assure la collecte et l'analyse des données d'observation de la
Terre, Galileo, avec 22 satellites utilisés sur 2 milliards d'appareils, qui
permet gratuitement un accès à son positionnement de manière plus précise que
GPS. Ce sont là deux succès majeurs, pour n'en citer que deux, devenus
indispensables à notre quotidien. Avec Ariane, plus de 110 lancements réussis,
Vega, nous disposons également d'une autonomie d'accès à l'espace. Ariane reste
le lanceur le plus fiable du monde et nous avons eu une nouvelle preuve avec le
lancement impeccable du télescope James WEBB en fin d'année dernière. Nous nous
appuyons plus largement sur une base industrielle solide, avec notamment des
acteurs européens dans le domaine des satellites - ADS, DAS, OHB - venant des
principales nations industrielles du secteur et qui sont des leaders mondiaux
sur leurs marchés, et tout un tissu d'acteurs émergents très dynamiques et
prometteurs, qu'il s'agisse de PME ou d’ETI qui se sont consolidées depuis des
années ou de ces start-up, ce qu'on appelle aujourd'hui le new space, qui sont
en train d'émerger. Et donc nous avons, nous, Européens, véritablement une
force industrielle, toutes les tailles d'entreprises, tous les âges, si je puis
dire, et la nécessité aussi de bâtir des coopérations entre nos grands acteurs
installés, solides, et ces acteurs du new space partout dans nos pays. Nous
continuons également d'incarner l'avant-garde des missions d'exploration, que
ce soit avec Philae vers la comète Tchouri, ExoMars, Persévérance sur Mars et
je veux ici remercier l'ensemble des grands centres de recherche, qu'il
s'agisse du CNES, du CNRS, du CEA mais aussi le DLR, l’ASI pour citer
l'Allemagne et l'Italie, entre autres, et toutes les agences et universités
européennes de premier plan qui prennent leur part de ce rêve européen. Nous
pouvons également compter sur des visages mondialement connus. Je pense à
Samantha Cristoforetti, Matthias Maurer, Thomas Pesquet et 40 ans après le
premier vol habité de Jean-Loup Chrétien, je me réjouis de voir que l'appel de
l'ESA pour les jeunes astronautes rencontre un succès extrêmement fort, avec
plus de 22 000 candidatures et près de 40 % de femmes retenues ; c’était
l’objectif poursuivi, et je me souviens très bien de l’ambition que Thomas Pesquet
lui-même, en étant un de ses ambassadeurs voulait promouvoir, qui est une vraie
transformation aussi, voilà, de ces visages et cette nouvelle génération.
Et donc toutes ces réussites sont bien là, tangibles. C'est le fruit de
décennies de recherches, d'investissements de nos nations, de construction
d'une coopération européenne et d'une excellence scientifique, de recherches
fondamentales et appliquées, d'excellence industrielle et qui irrigue tous nos
territoires. Ici, nous le savons ô combien, mais beaucoup des territoires
européens que j'évoquais au travers des quelques industriels ou organismes de
recherche mentionnés vivent aussi à travers ces emplois. Néanmoins, ces
réussites ne doivent pas nous interdire de faire preuve de lucidité, ce qui est
la condition pour embrasser l'avenir. L'Europe a aussi manqué ces dernières
années, certains tournants stratégiques, notamment dans les lanceurs, en
sous-estimant des émergences très rapides de certains de nos concurrents. La
concurrence, en effet, est de plus en plus vive entre puissances : États-Unis,
Chine, Russie devancent ainsi l'Europe en termes de nombre de lancements,
tandis que d'autres, comme le Japon, l'Inde, l'Iran, la Corée du Sud, se sont
engagés avec beaucoup de force dans la course. Et pour certaines, cités à
l’instant, sont en train de réinvestir aussi massivement. Nous avons sans doute
sous-estimé l'émergence météoritique d'acteurs privés qui ont su, en quelques
années, mobiliser des moyens massifs et effectuer de véritables percées, y
compris en termes de positionnement technologique qu'il y a 5 à 10 ans, nous
croyions nous-mêmes impossible. SpaceX, Blue Origin ne sont hélas pas
européens. Et ils ont fait des paris et ils ont su marier, ce qui est un modèle
d'ailleurs dont nous devons nous inspirer, des moyens publics importants, des
agences et des organismes de recherche publics et la vélocité d'acteurs privés
émergeants. Nous avons pris du retard dans la course à l'armement spatial.
Songez qu'il existe des satellites espions qui peuvent chercher à interagir,
par exemple, avec nos propres satellites, et d'autres puissances développent
des technologies qui leur permettront d'aborder les objets en orbite. Tout ça
n'est pas de la science-fiction, ça se passe aujourd'hui et il y a des
investissements massifs faits par certains de nos concurrents. Et si l'Europe
est très largement absente de cette nouvelle donne, si notre industrie est
aujourd'hui concurrencée sur notre sol même, c'est pour une raison simple :
c'est que nous n'avons pas suffisamment assumé, il y a quelques années, notre
aventure spatiale et nous ne nous sommes pas accordés parfois sur une vision
commune au fond, parce que nous n'avons pas suffisamment cru en nous. Et je
pense qu'il faut tirer les conséquences de ces années où nous avons laissé
certains de nos concurrents aller plus vite. Ils ont investi davantage, ils ont
fait des paris technologiques plus osés et surtout, ils ont mis des moyens plus
importants parce qu'ils ont bénéficié de nos divisions.
Je suis sûr d'une chose : quand les Européens savent se regrouper, harmoniser
leurs vues, faire des choix de recherche technologique et industrielle de
rupture audacieux, alors, ils sont à l'avant-garde. Et donc ce que je viens de
décrire avec beaucoup de lucidité n'est pas une fatalité, c'est ce que nous
allons rattraper par les choix que nous sommes en train de faire aujourd'hui.
Parce que si notre industrie est aujourd'hui attaquée, disputée par de nouveaux
acteurs qui ne sont plus sur le sol européen, et si nous restions en quelque
sorte inertes, nous sortirions de l'histoire. Mais le choix que nous sommes en
train de faire collectivement est à l'inverse : agir en urgence, porter pour ne
pas nous faire imposer des solutions par d'autres, une vision européenne de la
conquête spatiale et donc acter des choix clairs, structurants, avec des
réactions massives de court terme, mais avec aussi le sens du temps long, comme
nous avons d’ailleurs su le faire ces dernières années en matière de batteries,
d'hydrogène ou encore d'électronique avec le récent Chips Act. Et je le dis ici
pour nous conforter. Je me souviens encore, vous savez, il y a 5 ans,
presque jour pour jour, nos grands industriels dans l'automobile me disaient :
« Nous ne faisons pas les batteries en Europe. N'allez pas trop vite sur
l'électrique. Les batteries électriques, ce n'est pas l'Europe, la Chine et la
Corée ». Nous avons conjuré cette fatalité parce que nous avons agi en européen,
on a bâti des alliances ; pour la seule France, il y a 3 grands projets. On
nous expliquait, il y a encore quelques mois, que sur les semi-conducteurs,
l’Europe était en train de sortir de la course. Nous nous sommes mobilisés,
réunifiés, nous avons investi et nous sommes en train de construire les projets
qui vont nous permettre de rattraper ce retard. Je crois très profondément que
sur le spatial, nous avons une situation qui est, d’abord, avec les points
forts que j’ai évoqués, mais des faiblesses relatives, il y a la situation
récente, nous avons largement les moyens de les compenser, si nous savons agir
sur la même mode. Voilà l’objet à mes yeux de la réunion de ce jour qui se
fonde notamment sur les travaux de l'Union et du commissaire Thierry Breton. Et
je veux l'en remercier, car en particulier, les travaux sortis hier et qui ont
donné lieu, je le sais, à des discussions fructueuses ce matin entre les
ministres étaient importants, ainsi que l'engagement de l’ESA et de son
directeur général Josef Aschbacher. Et donc, merci à vous pour ces travaux.
Alors, la première chose, pour moi, le premier axe que nous devons poursuivre,
c'est assurer notre compétitivité et notre souveraineté scientifique et
industrielle. Pour ça, la première condition de la compétitivité et de la
souveraineté spatiale, ce sont les lanceurs. C'est la base de tout, c'est ce
qui permet d'accéder au rang de puissance spatiale. Nous, Européens, devons
bâtir de grands projets de lanceurs. Nous avons déjà fait beaucoup. La conférence
ministérielle de Séville a permis de confirmer le programme Ariane 6. Il y aura
donc une Ariane 6 avec de vraies perspectives commerciales. Et l'accord, à
l’ESA, signé cet été ainsi que les accords bilatéraux ont permis de sécuriser
cet avenir en assurant leur charge par une visibilité sur les lancements
prévus. Il est plus que jamais nécessaire d'appliquer une préférence européenne
pour le lancement de satellites institutionnels comme le font nos concurrents.
Et là, je le dis très clairement : il n'y a pas de politique industrielle et de
recherche, si l'Europe est la seule puissance naïve, c'est-à-dire la seule
puissance qui n'impliquerait pas un principe de préférence pour elle-même. Les
Chinois le font, les Américains le font, ne le faisons pas de manière
systématique ! Tout cela est ce qui va nous permettre de donner un plan de
charge qui nous permet : de rentabiliser nos modèles, de donner de la
visibilité, de continuer à innover. Et au fond, quand on a du plan de charge
grâce au lancement institutionnels et commerciaux, d'abord, plus on se donne du
plan de charge avec nos lancements institutionnels, plus on est compétitif sur
le commercial, plus on gagne sur le commercial, plus on peut rentabiliser le
produit et bâtir notre compétitivité de demain et plus on évite de compenser
notre propre naïveté par des financements publics qui, historiquement — ce que
nous avons trop souvent fait — cela n'est cependant pas suffisant. L'Europe
doit prendre pleinement le virage des mini et micro-lanceurs réutilisables. Il
nous faut en effet développer nos investissements publics et privés dans les
technologies de rupture, comme on commençait à le faire certains Etats. Nous
avons commencé à le faire en France avec France 2030, plusieurs projets qui se
lancent, par exemple, à Vernon ou à Reims. Il y a en Allemagne, en Italie, en
Espagne, des projets très structurants qui se lancent aussi sur ces sujets et
chez beaucoup d'autres collègues européens. Il nous faut continuer à aller de
l'avant, pas en cherchant à rattraper notre retard, mais en pensant à l'étape
d'après, en visant la frontière technologique. D'abord dans une logique de
compétition entre projets et avec comme objectif ultime de coopérer entre
Etats membres avec l'alliance des lanceurs que porte Thierry Breton.
Seconde condition de la compétitivité et souveraineté spatiale, ce sont les
constellations. Ce sujet est encore peu connu du grand public, mais — je
reconnais plusieurs visages — il est largement connu pour une bonne partie
d'entre vous. En effet, les constellations sont au coeur des travaux de
beaucoup de nos industriels, de nos organismes de recherche et elles seront au
coeur de nos existences, de nos vies de demain. Pourquoi ? Parce que réseaux et
objets militaires, connectés, services de secours, véhicules autonomes,
transport maritime, téléconsultation, téléchirurgie, lutte contre la fracture
numérique, tout ce qui fait déjà notre quotidien, une bonne partie de nos
combats suppose ces infrastructures et les constellations. L'Europe doit
prendre sa part dans la révolution des constellations. C'est une question de
souveraineté et d'efficacité. Qui peut imaginer, parce que nous n'aurions pas
une constellation européenne, de fait, nous décidions de déléguer la maîtrise
des données de circulation ou la maîtrise des données de santé des Européens à
d'autres puissances. En tout cas à des acteurs qui, étant non-européens, ne
peuvent pas être régulés par le droit européen. Et donc, nous serions mis par
le développement des objets connectés, de tous les usages que je viens
d’évoquer dans des situations où face à la demande légitime de nos industriels,
de nos compatriotes, nous serions en train de développer ces usages mais les
infrastructures spatiales, elles, seraient maîtrisées par d’autres acteurs et
donc régulées par d’autres normes, d’autres espaces. Démocratiquement et pas
simplement industriellement, nous serions face véritablement à une situation
inacceptable. C’est aussi une question de prospérité économique dans le secteur
de la construction de ces constellations où des acteurs comme Iridium Next,
Globalstar, Telesat, OneWeb, O3b etc. ont des savoir-faire de premier ordre. Et
les autres puissances se sont déjà engagées dans des développements massifs de
constellations, qu'il s'agisse de constellations civiles, OneWeb, Kuiper, pour
n'en citer que deux, ou militaires aux Etats-Unis, notamment.
Et donc, il nous revient à nous, Européens, de prendre, sur ce sujet des
constellations, notre destin en main. Et il y a urgence. En effet, le nombre de
constellations de télécommunications pouvant être déployées est réduit. Moins
d'une dizaine, sans doute. Nous devons donc, sans attendre, unir les forces des
Etats membres, regrouper les différentes initiatives en germe pour avancer. La
Commission européenne, grâce à l'engagement du Commissaire, vient de présenter
une proposition ambitieuse pour concrétiser une constellation européenne de
connectivité. Plus d'une dizaine de consortiums ont répondu à son appel
d'offres. Il faut désormais transformer l'essai et mobiliser toute la filière
européenne, qu'il s'agisse des nouveaux entrants comme des acteurs en place. En
innovant, car chacun pressent que les ruptures technologiques dans ce domaine
sont à portée de main, en utilisant l'achat direct de services pour encourager
le passage à l'échelle, pour faire en sorte que les nouveaux acteurs du domaine
soient européens et en clarifiant rapidement nos besoins et nos priorités pour
cette aventure. La France, je le dis très clairement, sera au rendez-vous de
cette révolution. D'abord en mettant à disposition de l'Union l'actif précieux
que représentent les assignations prioritaires de fréquences dont elle dispose.
Ensuite, en se lançant elle-même dans sa part d'investissement et dans les
prochains jours dans le cadre de France 2030, deux appels pour mobiliser les
acteurs, porteront justement des projets innovants en la matière. L'un sur les
services en orbite et l'un sur les projets de constellation de rupture,
par exemple pour soutenir des projets comme ceux de LoftOrbital, qui permet de
complètement révolutionner les services en orbite dont une large partie est
portée ici même d'ailleurs à Toulouse, ou E-Space, qui est véritablement un
projet totalement transformant en termes de constellations de ruptures et bien
d'autres encore. Je n'en cite que deux. Ce sujet des constellations européennes
est une véritable révolution, mais c'est un devoir pour nous pour les raisons
de souveraineté et les raisons économiques que j'évoquais.
Mais c'est aussi un projet géopolitique pour notre Europe, car nous allons
offrir à nos compatriotes et à nos industries des solutions de connectivité
complètement souveraine avec des développements économiques et parce que ce
faisant, nous allons aussi bâtir une alliance Nord-Sud en termes de
connectivité. Et je sais que vous en avez débattu ce matin et je vous remercie
d'ailleurs des choix faits. Mais permettre d'offrir à l'Afrique la possibilité
de déployer sa connectivité dans une alliance totalement nouvelle entre
l'Europe et l'Afrique, permettre de déployer des projets pour nos pôles en
matière de recherche et d'observation est une véritable révolution géopolitique
et de recherche que le projet de constellation européenne offrira. Voilà pour
les grands axes, pour notre compétitivité, notre souveraineté scientifique et
industrielle.
Deuxième grand pilier pour moi de l'action spatiale que nous devons conduire,
c'est celui de la puissance et la part militaire qui existe derrière ce sujet
de l'espace. L'espace, en effet, est aussi l'expression de la stratégie des puissances
et nous devons regarder en face cette réalité. En effet, au-delà des stratégies
économiques et industrielles, c'est le lieu de déploiement de stratégie
militaire, de puissance et de nouvelle conflictualité. La France est l'une des
seules grandes puissances à s'être pleinement engagée dans ce domaine. Avec
notre stratégie spatiale de défense qui acte plus de 5 milliards d’euros
d’investissement jusqu’en 2025 nous avons ajouté aux missions classiques
d’observation, de télécommunication et d’écoute, une véritable capacité
d’action dans l’espace exo-atmosphérique. L’Armée de l’air et désormais de
l’espace, a été dotée d’un grand commandement de l’espace, basé ici-même,
Toulouse, auprès duquel j'étais il y a quelques mois, à l'instar des armées de
nos grands alliés européens. Au niveau international, l'installation à Toulouse
du Centre d'excellence de l'OTAN, pour le spatial, permettra la coopération
entre États membres alliés et les travaux sur la boussole stratégique dont
l'élaboration se poursuit devraient permettre de progresser sur la voie d'une
stratégie militaire européenne spatiale. Il nous faut en effet parachever des
éléments de doctrine claire, qui nous permettront d'avoir le cadre nous
autorisant la meilleure réactivité possible. Car nous l'avons encore vu il y a
quelques mois, l'agressivité et peut-être les sujets de conflits ou les
provocations se multiplieront, et il nous faut donc définir les éléments de
doctrine claire qui permettront la plus grande réactivité de celles et ceux qui
ont à prendre les décisions opérationnelles et des marges de manoeuvre qui
conviennent. Notre ambition en la matière est sans agressivité, mais sans
naïveté, de nous doter d'une vision sur la protection et la résilience de nos
infrastructures spatiales et sur la manière de riposter avec l'ensemble de nos
alliés, à des agressions sur nos capacités. Cela passe par des investissements
européens en matériel, en innovation, en recherche. Il s'agit justement de
saisir toutes les opportunités offertes là aussi par le new space. Ils seront
mis à l'honneur au cours de notre exercice de défense spatial AsterX 2022, qui
aura lieu ici-même dans quelques semaines.
Mais l'enjeu, et c'est le troisième pilier pour moi, de cette aventure et de
cette vision en matière spatiale qu'il nous faut avoir, l'enjeu est aussi de
faire de l'espace un lieu de protection d'un bien commun par la promotion de
standards de régulation. A ce titre, la gestion du trafic spatial figure parmi
nos priorités. Dans la continuité du projet EU SST qui regroupe 7 pays
européens, nous définirons un modèle européen de la gestion du trafic spatial
qui sera notre base de négociation d'un accord de niveau international. Nous
voulons, comme nous l'avons fait dans d'autres domaines, que l'Europe sache
bâtir un cadre de régulation, qu'elle pense pour elle-même et qu'elle bâtisse
un référentiel de régulation qui puisse ensuite être partagé par les autres
puissances, voire progressivement s'imposer comme nous l'avons fait, par
exemple, dans le numérique. Ainsi pourrons-nous faire en sorte que les attaques
ne se dissimulent plus, comme c'est le cas actuellement, derrière des prétextes
de collision et de dysfonctionnements. L'Espace, en effet, ne peut pas être une
zone de non-droit. Nous avons trop d'intérêts en jeu sur le plan économique,
sur le plan souverain de la continuité du fonctionnement de beaucoup de nos
services publics ou sur le plan militaire. L'Espace est un bien commun de
l'humanité qui, pour continuer à l'être, doit être sorti des seules logiques de
marché et de puissance et être régulé. Or, aujourd'hui, ça n'est pas le cas.
Nous sommes dans une logique de faits où s'imposent parfois, les provocations,
les actes unilatéraux, en tout cas, les choix faits par certains et en quelque
sorte, nous les subissons et réagissons. Il nous faut donc construire ce cadre
de régulation. Nous allons faire une proposition européenne, puis essayer de la
bâtir au niveau international. Et je veux saluer l'engagement de beaucoup
d’académiques, d'organisations non gouvernementales en la matière, par exemple,
l'initiative Net Zero Space qui s'inscrit exactement dans cette logique et
cette dynamique et qu'il nous faut soutenir et dont il nous faut nous inspirer.
Là aussi en France, avec France 2030, nous présenterons dans les prochains jours
des appels à projets pour soutenir les projets de surveillance de l'espace et
contribuer à ce travail.
Puis, enfin, le quatrième et dernier axe que je souhaitais ici vous présenter
et partager avec vous, c'est notre espace, l'aventure spatiale et par
excellence et doit rester par excellence, un projet fondamental de recherche et
d'exploration scientifique. L'espace est un levier majeur par lui-même, pour la
recherche fondamentale et appliquée et pour les nombreuses applications qu'il
permet de développer, en particulier, le défi du climat que je mentionnais tout
à l’heure. Peu de nos concitoyens le savent, mais la maîtrise de l’espace
peut-être un levier décisif pour mesurer, et ainsi tenter de baisser les
émissions de gaz à effet de serre. Non seulement parce qu’elles permettent de
mieux connaître l’état de la biosphère, en mesurant par des capteurs l’état des
océans, des glaces, des eaux douces, des couches de l’atmosphère mais ensuite
parce qu'elles permettent de suivre l’évolution du grand réchauffement. Le
programme Copernicus met ainsi à disposition du monde pas moins de 420
PetaBytes de données d'observation de la Terre, qui permettent de cartographier
en temps réel l'évolution des températures, ou de la ressource en eau. L'espace
peut être aussi un outil de vérification, pour la tenue par les États de leur
engagement de la baisse des émissions. C'est même l'un des moyens les plus sûrs
pour le faire. C'est ainsi, grâce à Copernicus, et avec l'entreprise Kayrros et
ses partenaires, que nous avons pu détecter des émissions de gaz à effet de
serre que d'autres puissances ne souhaitaient pas révéler. Et donc, nous avons,
par l'innovation, par la recherche spatiale, la possibilité de beaucoup mieux
suivre, mesurer, et avoir les mécanismes de responsabilité et de contrôle de
toute notre politique de lutte contre le dérèglement climatique, dont vous
connaissez évidemment, ici, les uns et les autres, l'importance vitale
pour notre planète. Voilà le type de projets que l'ESA a vocation à accélérer,
qui proviennent d'ailleurs des acteurs publics ou des acteurs privés.
Mais au-delà du climat, le spatial charrie aussi une part de rêve. Ce qu'une
puissance projette dans l'espace dit un peu de ce qu'elle est, de son rapport
au monde. Et je pense qu'il nous faut aussi, dans ces temps où nous luttons à
juste titre contre les fanatismes, les égoïsmes assumés que nous avons vocation
à rêver de manière rationnelle, éclairée avec nos compatriotes, et de savoir
investir sur ces parts de rêve qui, aussi, nous permettent d'améliorer la
connaissance du monde comme de l'univers. Pour nous, européens, le modèle
spatial viable est celui-là. Celui qui assume sa part de rêve, mais de manière
ouverte, académique, cette part d'enseignement libre et de recherche libre. Et
je le dis ici aussi avec beaucoup de force, pour nous, européens, le modèle
spatial viable n'est pas celui de l'exploitation, n'est pas celui de
l'augmentation du nombre de touristes spatiaux pour des milliers, voire des
millions de dollars, pas plus que le seul horizon n'est l'exploitation minière
de la lune. Nous, européens, cultivons en effet une certaine idée de l'espace
comme un regard décentrant sur le monde et sur la condition humaine, comme un
bien commun qui doit être utile à tous. Nous, européens, croyons davantage à
l'exploration, à la connaissance, et donc à des vols habités de long terme
plutôt qu'à la marchandisation de l'espace. La fin de la coopération
internationale dans le cadre de l’ISS après 2030, doit ainsi nous conduire à
proposer, à côté des Etats-Unis et de la Chine, notre modèle propre, et c'est
là aussi le bon moment pour nous poser cette question. Nous devons continuer de
financer de grands programmes de recherche fondamentale, de recherche
appliquée, et au même titre que je disais que notre espace, bien commun, devait
être régulé dans ses usages, il nous faut continuer d'investir dans sa
recherche, sa compréhension, de continuer à former les meilleurs esprits, de
continuer à avoir les plus grands prix Nobel qui s'investissent dans ce
domaine, d’avoir notre jeunesse qui s'y intéresse, pour toutes ces formes de
recherche et d'application, et de développer ce modèle qui nous permet d'être
là aujourd'hui. L'ESA a déjà identifié des pistes en matière de science
spatiale et de vols habités. Et je veux ici vous en remercier. Et je propose
que nous puissions accompagner cet élan, en travaillant dans le cadre que l’ESA
définira d'ici l'été prochain, pour formuler des propositions sur nos ambitions
européennes en matière d'exploration, de vols habités, pouvoir éclairer les
décisions stratégiques que nous aurons ensuite à prendre. Et il nous faut à
chaque fois, évidemment, mesurer l'utilité sociale, savoir donner nos priorités
chiffrées. Et en vue de la ministérielle de novembre 2022, préparer des choix
que nous devrons faire. En nous posant des questions qui ont un caractère
quelque peu vertigineux, et qui doivent être éclairées par les meilleurs
esprits du domaine, mais aussi, je crois, être éclairées par des responsables
politiques, des chercheurs en éthique pour que nous puissions procéder aux
arbitrages qu’il convient. Quelle doit être la part respective des vols habités
et robotisés, notamment pour le vol à destination de la Lune ou de Mars ? Si la
piste de lanceurs lourds est ambitieuse mais coûteuse, est-ce que le
développement de capacités robotiques peut être une piste à explorer, notamment
car les retombées vers les activités terrestres durables comme la santé, le
numérique ou l’énergie peuvent être aussi très nombreuses ? Visons-nous la
Lune, où les Chinois retourneront prochainement, puis Mars, que visent les
Américains ? Il nous faut là aussi anticiper un positionnement européen pour
une première mission internationale humaine vers Mars prochainement à la
fin de la prochaine décennie. Visons-nous des coopérations, à la lumière de
l’ISS, ou l’autonomie stratégique en la matière ? Ce sont là quelques
questions. Quand je disais qu’elles sont vertigineuses, ce n’est pas simplement
en faisant référence à ce qu’on peut s’imaginer, si tant est que ce soit imaginable,
des projets qu’il y a derrière, des aventures humaines et scientifiques qu’ils
recouvrent, mais parce que ce sont des questions véritablement fondamentales
qui nous engageront pour des décennies. En fonction des réponses apportées, des
projets pourront se construire. Nous devrons alors nous donner les moyens des
ambitions que nous définirons ensemble, avec, là aussi, une approche ouverte
sur les ruptures technologiques en mobilisant toute la filière, et là aussi
avec une logique d'achat de services et de développement itératif pour
mobiliser efficacement tous les acteurs privés. Avec un premier retour à la
mi-année et en perspective à l'automne prochain la conférence ministérielle de
l'ESA qui se tiendra à Paris et doit nous permettre de concrétiser cette
vision, nous voyons combien sur tous ces sujets fondamentaux l'agenda spatial
est chargé.
Voilà quelques-unes des réflexions, des pistes de travail et
d'action que je voulais partager avec vous aujourd'hui. Vous le voyez, nous
sommes en la matière à un moment décisif pour notre Europe, compte tenu de
l'accélération technologique et industrielle, compte tenu aussi des choix
fondamentaux, civilisationnels qui sont faits à l'égard de l'espace. Et au fond
décider de nous retirer, décider de ne plus nous investir, c'est décider de
fait de laisser des grandes puissances, des grandes multinationales privées le
faire à notre place et choisir un autre modèle. Et donc il nous faut assumer de
soutenir massivement nos grandes universités, nos grands organismes de
recherche, de poursuivre des grands programmes avec nos industriels historiques
et de nouveaux acteurs, et de bâtir cette stratégie spatiale européenne clef
pour notre souveraineté.
Un des pères de notre civilisation, Platon, disait que « l'astronomie oblige
l’âme à regarder vers le haut ». Et en nous engageant dans l'aventure spatiale,
nous défendons plus encore qu'une souveraineté, plus encore qu'une prospérité.
Nous défendons une vision du monde. Voilà pourquoi il était important pour moi
d'être présent parmi vous à Toulouse aujourd'hui, ville coeur de l'aérospatiale
qui héberge déjà le coeur de l'aventure européenne dans le domaine
aéronautique, mais surtout parce que je sais combien les travaux en cours de la
Commission, l'engagement de l'ESA et le travail des ministres de notre Europe
ici-même ces jours-ci et dans les mois qui viennent, seront déterminants pour
notre avenir.
> Le moment est de savoir si nous, Européens, bâtissons une nouvelle alliance, unique, conscients que la réussite ne peut être que commune. S'il y a un échec du continent africain, le premier à en pâtir sera le continent européen. Alors bâtissons !
> [Covid19 et coopération avec l’Afrique] Avec le transfert de technologie et la production de doses de vaccins en Afrique, le combat que nous menons aujourd’hui ensemble face à la pandémie est aussi un combat pour demain, dans la durée, pour l’accès de tous les continents aux vaccins, pour la souveraineté sanitaire.
> [Covid19 et coopération avec l’Afrique] L'Europe est le continent qui a le plus donné et exporté de vaccins vers l'Afrique. Maintenant, nous allons œuvrer au développement d'une autonomie sur le continent africain.
► Gouvernement
[Nota: dans ce gouvernement, certains membres ne sont pas centristes; nous
retranscrivons cependant leurs propos en rapport avec leur fonction parce
qu’ils font partie selon nos critères d’une équipe qui suit une politique
globalement centriste]
> [Communiqué conjoint avec Annalena Baerbock, ministre fédérale allemande des Affaires étrangères sur la situation dans le Donbass et aux frontières de l’Ukraine]
La multiplication des violations du cessez-le-feu le long de la ligne de contact ces derniers jours est très préoccupante. Nous condamnons l’usage d’armes lourdes et le bombardement aveugle de zones civiles, qui constituent des violations claires des accords de Minsk.
Nous avons pris note de l’annonce des dirigeants des « Républiques populaires » autoproclamées de Donetsk et de Louhansk d’une évacuation des habitants de la région vers la Russie, soi-disant à titre de précaution en anticipation d’une possible attaque ukrainienne. Nous ne voyons aucun fondement à ces allégations et nous appelons la Russie à utiliser son influence sur les républiques autoproclamées pour inciter à la retenue et contribuer à la désescalade.
Nous craignons que des incidents montés de toute pièce soit manipulés et pris comme prétextes pour une escalade militaire.
Nous saluons la tentative du Représentant spécial de l’OSCE de réunir une session extraordinaire du Groupe de contact trilatéral aujourd’hui afin de réduire les tensions et de calmer la situation. Nous regrettons que les représentants de facto des républiques autoproclamées aient refusé de participer à cette réunion.
Nous réitérons notre forte préoccupation concernant le renforcement massif du dispositif militaire russe en Ukraine et autour de l’Ukraine, et nous appelons la Russie à contribuer à la désescalade par un retrait significatif de forces militaires de la proximité des frontières de l’Ukraine.
> [Iran] Nous arrivons à l'heure de vérité. Ce n'est pas une question de semaines, mais de jours. Nous avons trouvé une convergence avec les autres pays, l'accord est à portée de mains. Ou bien les Iraniens déclenchent une crise grave, ou bien ils acceptent.
Barbara Pompili
(ministre de la Transition écologique)
> A l’échelle nationale, 1 km sur 5 de notre
littoral est confronté au recul du trait de côte. Face à cette menace, la loi Climat et résilience crée des
outils nouveaux pour adapter nos territoires.
> D'ici 2100, 50 000 logements pourraient disparaître à cause du recul du trait de côte. Nous devons repenser l'aménagement des territoires littoraux. C'est ce que prévoit la loi Climat et résilience avec une cartographie des risques et de nouveaux pouvoirs d’urbanisme pour les élus.
> Le charbon a vocation à être définitivement remplacé par des énergies décarbonées. Pour accélérer cette transition, nous lançons un appel à manifestation d’intérêts pour développer des substituts issus de biomasse.
> La France doit extraire du lithium sur son territoire
Jean-Michel Blanquer
(ministre de l'Education nationale, de la Jeunesse et des Sports)
> Relever le niveau en mathématique de la
maternelle à la terminale. C’est la stratégie suivie depuis 2017 avec la mise
en œuvre du plan Villani-Torossian. Avec de premiers résultats quant au niveau
des élèves et quant à la poursuite d’études scientifiques.
> Nous avons un rebond du niveau de mathématiques à l’école primaire. C’est le cas aussi au lycée. Mais il faut faire toujours plus pour l’excellence et la mixité. C’est pourquoi j'ai installé un comité de consultation sur les mathématiques.
> Investir plus pour la réussite de tous les élèves. En mesurant mieux la qualité des politiques publiques ainsi menées. Ce travail doit être mené à l'échelle internationale. Nous l’avons rappelé en conclusion du séminaire de l'OCDE et dans la suite des travaux de la présidence française de l’UE.
Bruno Le Maire
(ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance)
> Le taux de chômage a baissé à 7,4% fin 2021. Au
plus bas depuis 2008. C'est une grande victoire française contre la
résignation. Notre politique économique porte ses fruits. Contrairement à ce
que disent les Cassandre, l’économie française se porte bien.
> L’État participera à la recapitalisation d’EDF à hauteur de plus de 2 milliards € pour soutenir l’entreprise et ses salariés et investir dans de nouveaux sites de production nucléaire et renouvelable. Nous voulons qu’EDF reste un grand service public français.
> Plus d’un million d’emplois
créés depuis 2017. Taux d'emploi le plus élevé depuis 50 ans. Nombre record
d'apprentis. Baisse des impôts de plus de 50 milliards € dont la suppression de
la taxe d'habitation. Faillites des entreprises au plus bas. Créations
d'entreprises au plus haut.
Plus de 37 milliards € pour l'activité partielle pendant la crise sanitaire et
plus de 15 milliards € depuis le début de la crise énergétique pour soutenir le
pouvoir d'achat des Français.
7% de croissance en 2021, une des plus fortes de la zone euro. Niveau de richesse d'avant-crise retrouvé avant les autres grands pays européens. Sans le "quoi qu'il en coûte", nous aurions 10 points de dette en plus et une vague de faillites et de chômeurs.
Oui, Emmanuel Macron a un bon bilan économique. Notre politique économique doit être poursuivie. C'est pour cela que je souhaite qu'il soit réélu président de TOUS les Français.
Florence Parly
(ministre des Armées)
> [Invasion de l'Ukraine] On ne sait pas si cette
décision a été prise ou pas. Il faut vraiment rester extrêmement prudent, ne
pas être naïf. Les négociations doivent se poursuivre jusqu'au dernier souffle
pour préserver la paix.
> [Ukraine] Le risque de guerre existe. Tous les éléments ont été mis en place petit à petit pour permette - si la décision en était prise par le président Poutine, d'intervenir militairement.
> [L'armée française quitte le Mali] Nous n'avions plus la capacité de pouvoir mener les missions que l'État malien lui-même nous avait demandé de remplir lorsqu'en 2013, il a appelé la France à son secours.
> La menace djihadiste, bien sûr, continue d'exister et c'est pour cela qu'avec nos partenaires, nous sommes déterminés à poursuivre ce combat contre le terrorisme.
> [Crainte d'une l'expansion des djihadistes vers le Golfe de Guinée] Ces mouvements terroristes sont en train de se répandre vers le Sud. Ils sont en train d'atteindre la frontière nord de la Côte d'Ivoire, du Bénin, du Togo, potentiellement du Ghana.
Elisabeth Borne (ministre du Travail, de l'Emploi et de l'Insertion)
> Le taux de chômage est au plus bas depuis 2008. Celui des jeunes est au plus bas depuis près de 40 ans ! Les réformes menées et les décisions prises pendant la crise ont porté leurs fruits !
> Nous avons un taux de chômage qui est au plus bas depuis près de 15 ans. C'est le résultat des réformes qui ont été menées depuis le début du quinquennat et des mesures prises pendant la crise. C'est une excellente nouvelle pour les Français.
> Les entreprises qui font des bénéfices doivent entendre les revendications des salariés sur les salaires et partager les richesses créées. Pour cela, elles peuvent se saisir de la prime Macron jusqu'au 31 mars. Près de 4M de salariés en ont bénéficié en 2021.
> [Pouvoir d'achat] Le gouvernement est mobilisé depuis le début du quinquennat (...). Le SMIC a été revalorisé deux fois ces derniers mois. Mon sujet c'est que les branches professionnelles revalorisent aussi leurs grilles salariales.
> J'assume totalement d'avoir lancé le plan 1jeune1solution dès l'été 2020: quand on écoute la Cour des Comptes, on aurait pu passer un an à préparer un plan en regardant le chômage des jeunes exploser.
Eric Dupond-Moretti (Garde des Sceaux, ministre de la Justice)
> Oui, il faut encore embaucher des magistrats. Et la prochaine promotion de l’école de la magistrature sera la plus importante de l’histoire.
> [Justice de proximité] Je dirais que la justice va plus vite, qu’elle travaille mieux, qu’elle est plus proche des Français.
> [Loi sur le changement de nom] C’est une loi proche de nos compatriotes. On pourra une fois dans sa vie changer de nom. C’est une loi de liberté, d’égalité, de simplification.
Olivier Véran (ministre des Solidarités et de la Santé)
> Si à la mi-mars l’hôpital est en état de fonctionnement normal et que la circulation du virus est faible, la levée du port du masque et du pass vaccinal pourra être engagée.
> Dès le 1er avril, les personnels de la filière socio-éducative seront revalorisés de 183€ nets par mois ! Le gouvernement est pleinement engagé auprès des départements pour la reconnaissance de ces métiers. C'est ensemble que nous engageons une transformation profonde du secteur pour que ces professionnels puissent enfin conjuguer leur engagement avec des conditions de travail et des perspectives d’évolution à la hauteur du service qu’ils rendent aux plus démunis de nos concitoyens.
Amélie de Montchalin (ministre de la Transformation et de la fonction publique)
> Demain, mon objectif, c'est qu'à partir du moment où la loi donne un droit à nos concitoyens, ils doivent y avoir droit automatiquement ou doivent en être informés sans que l'administration leur demande sans cesse des justificatifs qu'elle a déjà.
> Chaque public doit savoir où l'État s'est organisé pour accueillir les usagers inconditionnellement sur tout le territoire.
> Notre vision des services publics, c’est l’efficacité, la proximité et l’humain. Nous n’avons pas choisi le «tout numérique», qui n’est pas adapté aux réalités de notre pays. Nous avons choisi le «tous publics», selon les choix et les contraintes de chaque Français.
> Ils prennent soin des vulnérables, de nos aînés, assurent la protection de l’enfance. Nous voulons rendre les métiers de l'accompagnement social plus attractifs, parce qu’ils sont essentiels. Dès cette année, comme les soignants, nous les revalorisons de 183€ net par mois.
> Mon rôle républicain de ministre de la fonction publique, c'est de combattre les outrances de campagne sur les agents publics. Valérie Pécresse n'ose même plus tenir son discours de mépris, tant il a déplu aux Français. La gauche, elle, continue dans le clientélisme.
Elisabeth Moreno (ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances)
> «La France est une histoire d’amour et d’adhésion.» Le Président de la République a fait du renforcement des liens avec les diasporas une priorité. Traits d'union entre deux rives, entre deux cultures, elles sont une chance pour repenser le lien entre la France et l'Afrique.
Franck Riester
(ministre chargé du commerce extérieur et de l'attractivité)
> Un an jour pour jour après la publication de la
nouvelle stratégie de politique commerciale, l'Union européenne rappelle que
tous les partenaires doivent respecter les mêmes règles. Une nouvelle action
concrète pour mettre fin à la naïveté.
Emmanuelle Wargon
(ministre chargée du Logement)
> Je suis favorable à l’encadrement des loyers,
on a d'ailleurs accepté de le rouvrir, il y a des collectivités nouvelles qui
vont y rentrer.
> Une annonce importante aujourd’hui : les travailleurs sociaux et les soignants mobilisés chaque jour pour l’hébergement et l’accompagnement des personnes SDF bénéficieront de l’extension du Ségur. Une juste reconnaissance de leur engagement, au service des plus démunis.
> Un million de personnes qui ont décidé d’engager des travaux chez eux et qui ont demandé MaPrimeRenov.
> [Hausse du gaz dans l'habitat collectif] Le gouvernement s'engage à couvrir les copropriétaires dans les copropriétés et les locataires dans les HLM. Les annonces seront faites dans les prochains jours.
> Notre bilan social parle pour nous : la gauche républicaine, européenne, réformiste et sociale, la gauche qui n'a jamais renoncé à gouverner ni à ses valeurs, elle est dans la majorité présidentielle.
► Haut-commissariat au Plan
François Bayrou (Commissaire, président du
Mouvement démocrate)
> Convenons que la candidature d’Emmanuel Macron n’est un secret pour personne. Mais l’exercice
de la fonction comme la situation internationale exigent un engagement qui ne
soit pas à éclipses. Qui peut dire que, pour autant, le débat politique
n’existe pas? Ce débat est patent, il est ouvert et il est violent. Les
critiques sont virulentes et constantes et chaque candidat déploie ses
propositions, parfois si déraisonnables qu’on a du mal à les prendre au
sérieux. Si tout cela tombe à plat, c’est parce que les Français lisent très
bien la situation. Qui peut voir des gestes électoraux dans ce qui se passe en
Ukraine? Dans les entretiens avec Poutine? Dans la gestion de l’Union
européenne face à de telles crises? Mais que les impatients en soient
persuadés, le temps des affrontements directs viendra.
> D’habitude, les oppositions sont audibles. Cette fois, elles ne le sont pas, parce que les citoyens les perçoivent divisées et décalées, sans réelle crédibilité.
> Il est des moments où l’Histoire frappe à la porte, et juge ceux qui en ont la charge. La conférence de presse du président de la République et de Vladimir Poutine, c’était un évènement d’une telle charge dramatique et historique qu’il restera dans les annales. C’était le choc de deux caractères porteurs l’un et l’autre d’un destin pour leur pays et leur civilisation. Emmanuel Macron portait la conception européenne des choses avec une solidité et une franchise incroyables tout en veillant à toujours laisser à son homologue russe une porte pour sortir du piège. Et tout cela après un dialogue de 6 heures en tête-à-tête sans conseiller. Il y aura un avant et un après cet épisode. Et une question s’imposait à tous les esprits: imaginait-on un autre des candidats à sa place?
> Le point de bascule de cette élection c’est l’appréciation par les Français du leadership du président de la République. En matière internationale, ils l’ont sous les yeux. Si le retrait des troupes russes stationnées à la frontière ukrainienne se vérifiait, ça aurait évidemment une valeur. Et en matière de lutte contre l’épidémie, la majorité des Français lui fait crédit de son action. En matière d’emploi, de croissance, de défense du revenu, les résultats acquis sont tels que partout dans le monde on cite la France en exemple. Tout cela, qui est majeur, n’échappe à personne.
> Une alliance, quand elle est crédible et authentique, apporte un élan. Mais on ne vote pas pour des alliés: la seule chose déterminante, c’est le regard des citoyens sur celle ou celui à qui ils doivent confier la barre du navire, le cap et la méthode.
> Emmanuel Macron était un homme très jeune en 2017. Il avait de précieuses intuitions mais il n’avait pas cette intimité avec notre pays, cette expérience des crises qu’il traverse. Il s’est découvert et il a approfondi ses intuitions, qui deviennent maintenant de profondes convictions.
> La grande question de la campagne c’est la défiance généralisée dans notre société: sur l’éducation, sur la démocratie, sur l’État, sur les médias, sur les scientifiques, au total, sur toute autorité, depuis trente ans, la confiance est sapée. Notre production nationale a été fragilisée et le contrat social en est menacé. Tous ces échecs depuis trente ans ont créé dans notre société une multiplication des sécessions. Le retour des questions de religion et de race, les assauts idéologiques venus des États-Unis sur la constante réécriture de l’histoire aggravent la situation et conduisent perpétuellement à une assignation à résidence dans son origine, son genre. Le rêve de certains milieux, c’est une guerre civile larvée de tous les instants, tous contre tous, qui empêche de se considérer comme compatriotes et comme concitoyens. Le président doit donc incarner l’élan vital retrouvé du pays.
> Il est absolument légitime de vouloir transmettre son identité sans être menacé à chaque instant de la voir disparaître. L’identité française, c’est une langue, une manière de vivre, des us et des coutumes, une culture et une convivialité civique. Il est juste qu’un pays veuille se perpétuer dans son être. Mais cette identité ne peut pas se construire dans l’affrontement avec le voisin, le proche, qui partage votre banc d’usine ou d’école. Cela, c’est le contraire de l’idéal français.
> La société française a en elle des ressources pour conjurer ces risques. Les Français ne se laisseront pas entraîner dans ces excès.
> [«Grand remplacement»] Sous ce vocabulaire, il y a un combat idéologique. Une partie de la société française se sent déstabilisée quand elle est confrontée à des manières d’être, à des interpellations, à des vêtements, à des comportements qui ne correspondent pas à leur patrimoine. De là à participer à une guerre civile, non, ça ne se fera pas. Nul part dans le monde depuis qu’il existe, nulle part et jamais la guerre civile n’a apporté quelque chose de bon. L’extrémisme n’a jamais apporté rien de bon. Ni la radicalité absolue. Ça ne sert qu’à faire monter la tension et l’exaspération avant de conduire à des impasses mortifères.
> Aujourd’hui, il y a une différence majeure: nous avons accès à de la dette à 0% d’intérêt, quand ce n’est pas à intérêt négatif. Or une dette change de nature quand elle permet et soutient une croissance positive. La question du moment, c’est donc la reconquête de la production agricole, industrielle, intellectuelle. C’est cela la nécessaire stratégie nationale.
> Il y a beaucoup d’irresponsables qui jacassent. Nous étions dans un moment de guerre, il était donc justifié d’accepter une dette de guerre. Quant à l’épargne des Français, c’est une vraie chance si l’on sait retrouver la confiance. Nous devons inventer les mécanismes qui convaincront les Français d’investir leur épargne dans la reconquête de la production. Je crois qu’on peut y parvenir.
> Je crois que nous sommes menacés d’une catastrophe démocratique. Si un ou plusieurs des candidats principaux étaient écartés de l’élection par manque de signatures, le tsunami serait terriblement dangereux. C’est cela qui menace. Pour moi, tous les candidats principaux doivent pouvoir participer à l’élection. Les maires en sont les garants. J’ai proposé une démarche, notredemocratie.fr, qui propose à des élus de garantir la démocratie en permettant à un candidat qui n’est pas de leur bord de se présenter. Plusieurs dizaines, presque une centaine ont répondu. Huit jours avant la clôture de la collecte, nous verrons où en sont les candidats.
> La Ve République ce n’est pas le marchandage, c’est l’adhésion qui suppose la confiance. Tout manquement est interdit.
> La construction du Centre, c’est le combat de ma vie. Notre famille politique est soudée, cohérente et respectée. Elle sera parmi les piliers principaux de la forme politique nouvelle que nous devons inventer. Cela n’est pas remplaçable.
> Le président de la République a une capacité de leadership très importante. S’il est élu, il gouvernera en plénitude pendant cinq années. Quant à ceux qui croient qu’il s’apprêterait dans cinq ans à disparaître de la scène, à mon sens, ils manquent quelque peu d’intuition. Celui qui, dans cet océan de difficultés, s’est trouvé en charge du destin de son pays, celui-là ne s’en détourne pas à 48 ans.