mercredi 5 octobre 2022

Propos centristes. France – CNR: consultation des Français / Refondation de l’école et du système de santé / Guerre de Poutine contre l’Ukraine / Protection des enfants / Violences faites aux femmes / Laïcité à l’école / Transition écologique / Prix de l’énergie…

Voici une sélection, ce 5 octobre 2022, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France.

Emmanuel Macron (Président de la République)
> [Déclaration à l'occasion du lancement de la grande consultation numérique du Conseil national de la refondation]
Mes chers compatriotes, si je m’adresse à vous aujourd’hui, c’est pour vous parler de cette nouvelle méthode que nous souhaitons mettre en place pour bâtir ensemble, pour notre pays, à la fois plus de consensus, un cadre de pensée d’action commun et aussi des solutions concrètes pour chacune et chacun d’entre nous. 
Durant les 5 dernières années, nous avons changé beaucoup de choses dans la vie du pays. Évidemment par des textes de lois, par des décrets, par de l'action publique, de l'action collective. Je veux ici à nouveau remercier nos parlementaires, les services de l'Etat, nos élus qui n'ont cessé de contribuer à cette transformation, en plus de la gestion des crises. 
Nous avons aussi collectivement innové d'un point de vue démocratique avec le grand débat qui, alors même que nous vivions une crise sociale sans précédent, a permis d'aller à votre rencontre, grâce à nos maires partout sur le territoire, et de dégager des propositions très concrètes qui nous ont permis de changer les choses. C'est grâce au grand débat que nous avons changés l'impôt sur le revenu, créé plus de 2.000 Maisons France services pour recréer des services publics sur le territoire, que nous allons recréer des sous-préfectures, je l'annoncerai dans les prochains jours, que nous avons remis de la force d'action publique partout sur le terrain, que nous avons décidé de rouvrir des petites lignes de chemin de fer, que nous avons aussi décidé, et bien des choses très concrètes, par exemple pour les familles monoparentales, c'est-à-dire souvent ces femmes seules qui élèvent leurs enfants et qui ont en plus à essayer de retrouver un travail ou à bien vivre de leur travail, par là aussi, des mesures fiscales et d'accompagnement très concrètes. 
Nous avons ensuite bâti, c'était une des conclusions du grand débat, cette Convention citoyenne sur le climat qui nous a permis, non seulement ce travail démocratique inédit, de faire avancer le débat public en matière de lutte contre le réchauffement climatique et pour la biodiversité, mais aussi d'arriver à un texte de loi inédit qui, grâce au travail aussi de nos parlementaires et de nos administrations, est en train de nous permettre d'améliorer très concrètement les choses. Accélérer la rénovation thermique des bâtiments, l'amélioration de nos moyens de déplacement pour sortir progressivement du carbone, un meilleur respect de la biodiversité en protégeant contre l'artificialisation des sols ou en luttant contre l’usage unique du plastique, qui va nous permettre de tenir nos objectifs et termes de réduction de nos émissions de CO2 et de protection de la biodiversité. 
Mais on a tous conscience que les choses ne vont pas assez loin, qu’il y a dans notre démocratie quelque chose qui au fond n’est pas totalement abouti. Je le formulerai en des termes simples. D'abord, le débat public, et nous l'avons vu lors des dernières élections, continue de se faire autour de divergences très profondes qui ne sont pas simplement des divergences d'idées mais parfois, nous n'avons pas même pas la même vision de la nature, des problèmes et des faits.
La deuxième chose c'est que, je le sens à travers les courriers, les déplacements, ce que vous me dites, il y a une volonté d'être associé, mais pas simplement au moment des élections, pas simplement dans des temps de délibérations, mais de participer à la prise de décision, d'être vous-mêmes des acteurs de ce qu'est l'action publique, et de dire que le citoyen n'est pas quelqu'un à qui on va imposer des décisions, à qui on va même proposer des solutions sans être pleinement associé à la réponse. 
Cette méthode différente, c'est celle que j'ai voulu porter en campagne avec ce fameux «avec vous». C'est celle que j'ai voulu installer dès les premiers jours de ce mandat et qui est au cœur du Conseil national de la refondation. Ce Conseil national de la refondation, au niveau national, c'est ce que j'ai lancé il y a quelques semaines à Marcoussis avec la Première ministre et plusieurs ministres, réuni le Gouvernement, les forces syndicales, patronales, les forces politiques, évidemment, l'ensemble des représentants de nos territoires et donc des associations d'élus, mais également les forces vives de la société et donc toutes celles et ceux qui représentent le monde associatif, nos ONG et les différentes causes qu'ils portent, en plus, évidemment, des présidentes et présidents des chambres qui sont prévues par la Constitution et du Plan qui a vocation, là aussi, à mobiliser l'expertise dans la nation. 
Cette première réunion, qui sera suivie d'autres, a pour vocation à se dire : quels sont les faits? Quelle est la situation du pays sur le plan économique, social, en termes de climat, de biodiversité, d'inégalités? Et de bâtir du consensus, d'essayer de définir sur quoi les uns et les autres sont d'accord et pas d'accord, mais d'essayer d'éviter les désaccords sur des faits qui sont incontestables. Ensuite, nous sommes en train de définir des chantiers nationaux, les grands éléments sur lesquels nous avons la conviction qu'il faut, là aussi, avec toutes les parties prenantes que je viens de citer, pouvoir construire des stratégies nationales sur les grands sujets que sont les inégalités, que sont au fond, j’allais dire, les grands sujets de transition. 
La transition productive et celle du modèle social. La transition climatique, c’est-à-dire la réponse au réchauffement climatique et à la biodiversité. La transition démographique, c’est-à-dire le vieillissement de la population et les réponses qu'il importe. La transition numérique, avec les changements de comportement, d'organisation de notre production, les inégalités qu'ils suscitent. La transition du travail, qui est un peu le fruit de tout cela. 
Tous ces grands sujets de transition, on doit les penser dans le temps long, bâtir des stratégies nationales, et réussir à créer de la coopération entre les acteurs. 
Ce que je vous propose aujourd'hui, c'est de pouvoir changer les choses ensemble : sur ces grands sujets, j'ai besoin que vous puissiez aussi prendre part au travail du Conseil national de la refondation. Avec vous, qui portez des idées de changement, qui imaginez des projets pour nos territoires, qui avez des idées très concrètes, de pouvoir nous en faire part en les mettant en commun, sur www.conseil-refondation.fr .
Rendez-vous dès maintenant sur cette plateforme. Choisissez les sujets qui vous tiennent à cœur : l'écologie, l'école, la santé, la démographie, le vieillissement, le travail… et participez pour contribuer à ce travail de conception, pour apporter vos contributions plus personnelles, plus approfondies, pour lever aussi de nouvelles questions. 
Nous aider à bâtir dans le cadre de ce Conseil national de la refondation, thématique par thématique, les projets, les travaux, nous inspirer d'expériences locales, le faire en direct et en toute transparence pour nous dire où sont vos réflexions, quelles sont vos contributions, quels sont les premiers changements, les premières innovations, et nous faire partager les choses pour que nous puissions avancer sur ces grands sujets.
À côté de cette participation sur notre plateforme : www.conseil-refondation.fr, qui sera lancée dès aujourd'hui et pour laquelle je compte sur vous, je voulais aussi vous dire qu'il y aura dès les prochains jours deux immenses chantiers nationaux qui seront lancés partout sur le terrain et de manière très concrète. Et là, ce n'est pas de la consultation, ce n'est pas du débat, c'est de l'action. 
Sur l'école et sur la santé, nous allons lancer un travail de refondation. Notre école et notre santé où nous allons demander, partout sur le territoire où les gens sont volontaires, pas d'obligation, de pouvoir se saisir de la question, des questions clés qui se posent de manière très concrète. 
Au niveau de chaque établissement scolaire qui le souhaite, de pouvoir mettre autour de la table, sur le modèle de ce que nous avons fait avec «Marseille en grand», les enseignants et enseignantes, les directrices et directeurs d'établissement, les parents d'élèves, les élèves lorsqu'ils ont l'âge, le monde associatif en charge du périscolaire, les élus et toutes celles et ceux qui ont vocation à participer à l'éducation de nos enfants dans le temps scolaire ou périscolaire. Se mettre autour de la table pour bien cibler les objectifs, les difficultés auxquelles ils sont confrontés et les objectifs qu'ils se donnent, et de pouvoir construire dans les semaines et mois qui viennent, une feuille de route. 
L'administration sera au service de ce travail de refondation. Les rectorats, les équipes de l'administration centrale seront là, comme je l'ai expliqué aux recteurs, pour vous appuyer, vous donner en quelque sorte la boîte à outils, les instruments, vous aider à inventer les bonnes réponses pédagogiques. 
Il y a des établissements où on n'arrive pas à bien enseigner les mathématiques : il faut qu'on vous permette d'avoir le laboratoire qui convient, les méthodes qui s’adaptent, peut-être échanger avec d'autres collègues. Il y a d'autres endroits, c'est le temps périscolaire qui pose un problème, parce que les enfants sont trop livrés à eux-mêmes, parce qu'on n'arrive pas à bien organiser l'accompagnement ou les devoirs qui sont faits à la maison. Comment mieux coopérer entre l'Education nationale, les bonnes associations? Comment permettre de donner des perspectives aux parents? Il y a d'autres endroits, d'autres niveaux où la clé sera. À chaque territoire, en plus évidemment de ce qui est le cadre national, des objectifs, des problématiques. Donc il faut des réponses différenciées et il faut permettre à nos enseignants pouvoir le faire, c’est pour ça que j’ai décidé d’un nouveau pacte avec les enseignants, on va les accompagner, mais aussi d’un fonds d’innovations pédagogiques qui permettra très vite, de libérer de l’argent pour accompagner ces innovations pédagogiques. 
On commence dès maintenant et sur les premières demandes de propositions du terrain, école par école ; dès le début d'année prochaine il y aura des réponses concrètes et des choses qui changeront. À tel endroit, une salle qui sera ouverte, à tel autre peut-être un poste d’accompagnant qui sera créé, du temps qui sera libéré pour tel enseignant… c'est du changement à l'échelle humaine, à l'échelle de vos vies, en temps réel, avec des financements qui sont prévus. 
Pour la santé, c’est la même démarche que nous allons lancer dès octobre. Nous connaissons tous le problème des urgences qui débordent, un hôpital qui souffre et des déserts médicaux. On a mis beaucoup de moyens, on continuera de le faire dans les textes financiers qui arrivent. Mais au-delà de tout cela, la réponse est au plus près du terrain. Nos professionnels de santé, qu'ils soient soignants, paramédicaux, nos associations, nos élus, nos associations aussi de patients : tous ont la même volonté. Les réponses, là aussi, doivent être différenciées sur le terrain. Il y a certains de nos territoires où, pour répondre à la problématique, il faut parfois avoir simplement deux semestres d'étudiants, peut-être, du chef-lieu voisin ou de la capitale régionale pour venir combler un manque à d'autres, il faudra trouver les moyens de convaincre peut-être des professionnels de santé de reprendre des gardes. Dans d'autres, il faudra retrouver une autre organisation entre l'hôpital et les libéraux qui sont là. Il n'y a pas une réponse au niveau national. Il y en a en fait des milliers, autant que de bassins de vie. 
Ce que nous allons organiser, là aussi partout où les acteurs le veulent et ils sont prêts, ce sont ces projets, notre santé, ou bassin de vie par bassin de vie, on va permettre aux hospitaliers d'aller avec les libéraux, avec les associations de praticiens, avec les Samu, avec déjà les fameux collectifs de libéraux qui sont organisés – CPTS comme on le dit techniquement – permettre aux acteurs de télémédecine, aux associations d’usagers, évidemment aux pharmaciennes et pharmaciens, aux infirmiers, infirmières, aux kinésithérapeutes, aux psychologues, aux psychiatres, à toutes celles et ceux qui font notre santé, de se mettre autour d’une table et de faire pendant les premières semaines le même bilan, au fond de la situation, un constat partagé, et de voir où sont de manière très précise les points qui changeraient leur vie. 
Là aussi, de mettre nos agences régionales de santé, notre ministère de la Santé au service de cette expression des besoins sur le territoire, et de pouvoir apporter des réponses très différenciées. Parfois, on le sait très bien, en changeant de toutes petites choses on change des vies. Nous allons accompagner ce mouvement d’un formidable mouvement de transformation dans nos hôpitaux, en permettant de redonner le pouvoir au niveau du service et en redonnant le pouvoir, si je puis dire, en tout cas plus de responsabilité aux soignants. 
Cette révolution, ces révolutions de l’école et de la santé, je ne les ferai qu’avec vous quand vous êtes concernés. Là aussi, je m’exprime au-delà de la consultation de la plateforme, aux enseignants, aux parents d’élèves, aux associations, à nos médecins, nos infirmiers, à nos pharmaciens, à nos usagers : participez partout sur le territoire à ces grands travaux de refondation. Là, ce ne sont pas des débats, ce sont des refondations profondes. 
Dès la mi-octobre, nous lançons «Notre école et notre santé» dans le cadre du Conseil national de la refondation. «Notre école et notre santé», c’est le «avec vous» mis en œuvre. Nous tous, nous allons les refaire. Je compte donc sur vous, avec beaucoup d’enthousiasme, de conviction, de force : participez à la plateforme, aidez-moi à transformer le pays. 
Aidons-nous à trouver de manière intelligente, tous ensemble, les bonnes solutions, loin des postures, des conservatismes, loin des débats qui sont parfois caricaturaux, mais en considérant tous que nous avons notre part d’idées à prendre, d’initiatives, de changements très locaux. Nous pouvons changer les vies si nous décidons de le faire. C’est le choix que j’ai fait, je serai à vos côtés pour le faire, envers et contre tous les blocages. Vive la République et vive la France !

 

Gouvernement
[Nota: dans ce gouvernement, certains membres ne sont pas centristes; nous retranscrivons cependant leurs propos en rapport avec leur fonction parce qu’ils font partie selon nos critères d’une équipe qui suit une politique globalement centriste]

Elisabeth Borne (Première ministre)
> [Déclaration du Gouvernement relative à la guerre en Ukraine et aux conséquences pour la France]
Il y a un peu plus de sept mois, par une attaque illégale, brutale, meurtrière, la Russie a tenté d’envahir l’Ukraine. Beaucoup alors pensaient que le pays ne tiendrait pas et que la puissance russe l’emporterait rapidement. Sept mois plus tard, les combats durent toujours. L’Ukraine progresse et la Russie se retranche dans le cynisme, la menace et le chantage.
Mesdames et messieurs les députés, cette guerre n’est pas seulement un conflit entre deux pays : c’est tout l’ordre mondial d’après-guerre qui est remis en cause. La Russie a menti à la face du monde, violé les lois internationales, et agite aujourd’hui la menace suprême. L’Europe n’est plus une terre de paix et les armes y font à nouveau des morts, des blessés, des déplacés. Certaines nations montrent qu’elles sont prêtes à tout dans leur quête de puissance et, si nous laissons faire, le nouvel ordre mondial qui s’ouvrira sera celui de la loi du plus fort.
Cette guerre, c’est une lutte pour nos valeurs. Vendredi dernier, Vladimir Poutine l’a lui-même reconnu: c’est notre modèle démocratique qu’il attaque, ce sont les droits de l’homme qu’il remet en cause. Poutine n’accepte pas de voir la démocratie s’imposer peu à peu à ses frontières; alors, il veut intimider et écraser ceux qui y aspirent. Le message du Kremlin est clair: gare à ceux qui voudraient s’émanciper de son joug, gare à tous ceux qui croient en autre chose que l’hégémonie russe.
Alors quand la liberté et la démocratie sont sous les bombes, nous n’avons pas le droit de faiblir, pas le droit de louvoyer. La France et l’Europe doivent être au rendez-vous. Cette guerre, c’est une leçon de solidarité. L’agression violente et délibérée d’un État contre un autre, en violation de toutes les règles internationales et de ses responsabilités particulières de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, est seule responsable de cette guerre et de ses conséquences.
Dans notre réponse face à la Russie, nous devons être solidaires: solidaires des Ukrainiens qui risquent leur vie pour leur liberté; solidaires, car pour être forts et efficaces, nous devons avancer unis avec l’Europe, avec tous ceux qui partagent nos valeurs.
Le Président de la République l’a dit, ce conflit engage notre responsabilité à tous. C’est un membre de la famille européenne qui est agressé, ce sont nos valeurs qui sont attaquées. C’est notre détermination face au nouvel impérialisme russe qui est éprouvée. Ce conflit dure et durera ; ses conséquences sont concrètes et perceptibles dans toute l’Europe et dans notre pays.
Aussi, comme je m’y étais engagée, je reviens aujourd’hui devant vous, sept mois après le premier débat sur la guerre en Ukraine dans cet hémicycle, pour un débat sur le fondement de l’article 50-1 de notre Constitution.
Avant toute chose, je voulais avoir un mot pour le peuple ukrainien. Les Ukrainiens répondent à l’assaut russe depuis sept mois. Ils subissent les tirs, les bombes, comptent des blessés, des morts et ont tout perdu pour certains, mais ils n’ont jamais renoncé, jamais baissé la tête. Leur courage est exemplaire. Leur résistance, leur héroïsme même, forcent le respect.

Avec le président Zelensky, avec le Premier ministre Denys Chmygal, avec les forces ukrainiennes, le peuple ukrainien combat pour sa liberté et je veux, avec vous, leur rendre hommage et devant vous, monsieur l’ambassadeur, leur dire notre indéfectible soutien.

Mesdames et messieurs les députés, je commencerai en faisant un point sur la situation opérationnelle. L’agression russe était illégale sur le plan du droit international et les méthodes employées par la Russie sur le terrain le sont également.
Chaque jour, avec le plus grand cynisme, la Russie repousse les frontières de la barbarie, elle fait usage des armes sans discernement, en ciblant les civils, en visant des écoles, des hôpitaux, des centres commerciaux, des convois humanitaires. Dans les territoires occupés, on assiste à des transferts forcés de populations, enfants compris. Leur libération s’accompagne de la découverte de nouvelles atrocités, comme à Boutcha en avril ou à Izioum plus récemment. Ces images nous indignent, nous choquent, nous révoltent. Elles témoignent de la réalité des opérations russes et de ce que risque le peuple ukrainien. Ce sont autant de violations des lois de la guerre, autant d’actes qui justifient d’agir, autant de monstruosités dont la Russie devra répondre.
On note par ailleurs sur le front la présence de Wagner, société de mercenaires qui prend ses ordres directement du Kremlin, société qui emploie aujourd’hui des criminels russes pour venir combattre sur le front, société dont les méthodes sont bien connues, comme en témoignent ses exactions documentées en République centrafricaine et au Mali.
Enfin, les frappes sur la centrale nucléaire d’Ukraine du Sud et l’occupation militaire de la centrale de Zaporijjia par les Russes font courir des risques inconsidérés à l’Ukraine, à l’Europe et à la Russie elle-même.
Nous sommes extrêmement préoccupés par la situation à Zaporijjia. L’arrivée sur place d’une mission de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) est une première étape. Nous disposons désormais d’informations en temps réel sur la situation et le risque nucléaire. Cependant, l’information n’exclut pas le danger. C’est pourquoi nous soutenons la proposition du directeur général de l’AIEA d’arrêt des tirs et de retrait du matériel militaire de la zone : notre objectif, c’est la démilitarisation.
Nous sommes déterminés à ce que les crimes commis par la Russie soient documentés, jugés et punis, condition essentielle pour le retour d’une paix durable. Nous voulons y prendre part : nous avons décidé d’une contribution exceptionnelle à la Cour pénale internationale et avons fait don d’un laboratoire ADN mobile à l’Ukraine. Des experts de la gendarmerie nationale ont également été dépêchés sur place pour collecter des preuves. L’ambassade de France, qui n’a jamais fermé depuis le 24 février, est pleinement mobilisée afin de faciliter ce travail essentiel.
Au-delà des lignes de front, la Russie agit sur tous les champs : je pense aux cyberattaques ou encore à la multiplication des fausses informations. Au moment où nous parlons, la Russie brandit la menace d’utiliser toutes les armes à sa disposition. N’ayons aucun doute : elle est susceptible d’aller plus loin dans l’illégalité et l’escalade.
Néanmoins, malgré les méthodes inacceptables de la Russie, l’Ukraine tient bon. Elle est parvenue à arrêter les forces russes dans les oblasts de Donetsk et de Louhansk et elle a entamé une contre-offensive qui obtient des résultats. Elle a effectué plusieurs percées dans les régions de Kharkiv et de Lyman et des avancées plus lentes, mais notables, au sud de la région de Kherson. Ces résultats militaires montrent que le courage des forces ukrainiennes et la livraison de matériels militaires occidentaux produisent leurs effets sur le terrain. En reprenant l’initiative sur le front, en bousculant les Russes et en provoquant leur repli, les soldats ukrainiens ont enregistré de véritables succès militaires, qui doivent désormais être consolidés.
Il ne fait aucun doute que le dispositif russe est fragilisé. La mascarade des référendums truqués organisés dans certaines régions de l’est de l’Ukraine prouve que la Russie se rend compte de sa propre fragilité et cherche à donner un vernis démocratique à son offensive. Le Président de la République l’a rappelé : nous ne reconnaîtrons évidemment pas les résultats de ces prétendus référendums, ni l’annexion illégale de Vladimir Poutine. Ce n’est rien d’autre qu’une nouvelle provocation.
L’appel à la mobilisation partielle lancé par Vladimir Poutine est un double aveu de faiblesse : une faiblesse militaire inattendue, mais aussi une faiblesse interne, alors que la mobilisation entraîne des contestations et des départs massifs vers l’étranger.
Mais ne nous méprenons pas : il est bien trop tôt pour espérer la fin des combats. La mobilisation russe permettra d’envoyer de nouveaux soldats sur le front. La Russie est déterminée et prête à tout: les combats dureront. Pourtant, l’issue du conflit ne doit pas être militaire, mais bien diplomatique.
En attendant que soient réunies les conditions d’une sortie du conflit, notre devoir est d’aider l’Ukraine autant que possible, sans entrer en guerre avec la Russie. Dès le début du conflit, le Président de la République, s’adressant aux Français, avait prévenu : cette guerre aura des conséquences durables, dont nous n’avons pas fini de mesurer l’ampleur.
Pourtant, avec nos voisins européens, avec les alliés, nous n’avons pas hésité. Laisser faire la Russie eût été accepter un ordre mondial brutalisé, dans lequel tous les moyens sont bons et toutes les exactions possibles. L’histoire nous a appris ce qu’il en coûtait de détourner le regard en croyant se protéger.
Ne rien faire aurait montré à la Russie qu’elle pouvait aller plus loin encore et prolonger sa volonté d’impérialisme. Ne rien faire aurait été perçu comme un blanc-seing donné à toutes les nations qui veulent affirmer leur puissance et nous mettre devant le fait accompli. Ne rien faire aurait planté les germes de nouveaux conflits qui nous auraient menacés plus directement encore.

Défendre nos valeurs, ce n’est pas un idéal romantique: c’est prouver que la démocratie n’est pas faible, c’est défendre un modèle qui nous protège, c’est affirmer que nous croyons en un monde de paix et de stabilité.
C’est pourquoi, depuis le début du conflit, avec les alliés et les autres nations européennes, nous avons multiplié les livraisons de matériels militaires à l’Ukraine. Nous l’assumons, car nous devons lui donner les moyens de se défendre face à l’invasion. Dès la fin du mois de février, notre pays a fourni aux forces armées ukrainiennes des missiles antichars, des missiles antiaériens, des équipements de protection et de l’armement léger. Dans un second temps, nous avons livré des systèmes plus lourds et plus complexes : des véhicules légers, des blindés et surtout des systèmes d’artillerie Caesar avec leurs munitions. Nous poursuivons cet effort : nous avons formé les soldats ukrainiens et des cessions de carburants sont en cours.
Nous continuons à agir en Européens. Nous soutenons le lancement d’une mission d’assistance militaire de l’Union européenne dont la création a été entérinée cet été, et nous y contribuerons dès qu’elle sera effective.
Au-delà de l’Ukraine, nous agissons en allié fiable et crédible. Dès les premiers jours du conflit, à la demande du Président de la République, nous avons renforcé notre dispositif sur le flanc est de l’Otan, dans le cadre des missions de réassurance de l’Alliance. Régulièrement, nos avions de combat surveillent et protègent l’espace aérien de l’est de l’Europe. Nous avons pris la tête de la mission de l’Otan en Roumanie en tant que nation cadre. Et, de la Baltique à la mer Noire, nous sommes présents d’un bout à l’autre du flanc est.
La Russie pensait trouver l’Otan faible et divisée, elle l’a ressoudée. Moscou sait désormais que les alliés sont unis, prêts, et ce qu’il lui en coûterait si elle prolongeait ses volontés guerrières.
Notre soutien militaire n’est qu’un des aspects de notre action. Dès les premiers jours de la guerre, avec l’Union européenne, nous avons pris des sanctions fortes. Là encore, alors que Vladimir Poutine pensait diviser l’Europe, cette dernière a fait face et montré son unité et sa détermination face à la crise. Je dirais même plus : bien malgré lui, le président Poutine a renforcé l’Europe.
Le premier paquet de sanctions a été adopté en moins de vingt-quatre heures. Sept paquets ont été votés jusqu’à présent et le huitième est en cours de négociation. Notre objectif est le même depuis le début : rendre le coût de la guerre insupportable pour la Russie et frapper durement son économie afin de l’empêcher de financer son offensive.
Nous avons pris des sanctions massives et de tous ordres : financières, afin de limiter les capacités de financement de l’État russe et des entreprises ; bancaires, avec l’exclusion de nombreuses banques russes du système Swift ; commerciales, avec des restrictions à l’importation et à l’exportation ; des sanctions contre la désinformation russe, en empêchant la diffusion de la chaîne Russia Today et de l’agence Sputnik dans l’Union européenne ; des sanctions politiques, enfin, contre les dirigeants, les oligarques et les propagandistes. Avec le huitième paquet sur la table, près de 1 300 personnes seront directement concernées par des gels d’avoirs ou des interdictions de voyage en Europe.
Les Russes misaient sur notre peur et notre division. L’Union européenne a montré qu’elle était forte et savait réagir. L’Europe n’a pas reculé devant les décisions courageuses, telles que l’embargo sur les importations de charbon, de pétrole brut et de produits raffinés russes.
Ces sanctions, n’en déplaisent à ceux qui masquent leur fascination pour l’impérialisme russe par un prétendu patriotisme, fonctionnent! L’économie russe s’est considérablement rétractée, avec une chute de 6 % de son PIB cette année. L’inflation russe a explosé. La Russie a perdu l’accès à des matériels de haute technologie nécessaires pour moderniser le pays et assurer sa croissance.
Moscou tente pour l’instant de maintenir l’illusion grâce aux prix élevés de l’énergie. Mais les faits sont là. La propagande russe ne doit pas nous berner: l’économie russe est à l’asphyxie. Par son obstination, Vladimir Poutine hypothèque l’avenir de son pays. Il jette des millions de citoyens russes dans la pauvreté, car c’est bien son peuple qui, le premier, ressent l’effondrement de l’économie russe et pâtit de sa volonté guerrière.
Les sanctions perdureront tant que Poutine s’évertuera dans la spirale du conflit et de la confrontation. Abandonner les sanctions, ce serait abandonner l’Ukraine, renoncer à nos valeurs et nous soumettre à la Russie. Mais la France, le patriotisme, ce n’est ni l’abandon, ni le renoncement, ni la soumission.

Mesdames et messieurs les députés, la fourniture de matériels militaires et les sanctions sont les deux piliers de notre soutien à l’Ukraine dans sa riposte face à la Russie. Mais notre accompagnement ne s’arrête pas là. Nous apportons à l’Ukraine un soutien humanitaire : plus de 200 millions d’euros ont été mobilisés et 2 500 tonnes de matériels livrées. Ce soutien est à l’œuvre dans tous les domaines ; il se déploie sur place et dans les pays frontaliers ; il est coordonné avec nos partenaires, avec les ONG et les organisations internationales. Il se poursuit en ce moment même, puisqu’un quatrième convoi humanitaire a quitté Marseille par bateau la semaine dernière.
Nous nous sommes également organisés pour accueillir les réfugiés. Plus de 100 000 Ukrainiens ont été accueillis et près de 19 000 enfants ont été scolarisés. Cela s’est fait rapidement, efficacement et dignement. Cela a été possible, une fois encore, grâce à la réaction exemplaire de l’Europe. Dès le 3 mars, l’Union s’est accordée pour que les réfugiés ukrainiens bénéficient de la protection temporaire, c’est-à-dire de l’accueil, de l’accès à l’éducation, à la santé, à l’emploi ou encore à l’hébergement. C’était une première. Il s’agit d’un acte décisif, dont bénéficient aujourd’hui en Europe plus de 4 millions d’Ukrainiens.
Je veux saluer ici toutes celles et tous ceux qui participent à cet élan de solidarité remarquable envers l’Ukraine depuis sept mois. Je pense à nos ONG et à nos entreprises. Je veux également rendre hommage à toutes les collectivités qui se mobilisent, organisent la solidarité et permettent l’accueil et la scolarisation des réfugiés ukrainiens : je les en remercie. Leur engagement est précieux et déterminant. Je pense enfin à tous les Français qui se sont engagés et que nous devons soutenir. C’est pourquoi je vous confirme la mise en place, à partir de fin novembre, d’une aide à destination de nos compatriotes qui accueillent des déplacés ukrainiens chez eux.
Notre soutien à l’Ukraine est également diplomatique. Elle fait pleinement partie de la famille européenne. Lors du Conseil européen de juin, le statut de pays candidat à l’adhésion lui a été accordé à l’unanimité. Il s’agit d’une décision historique, que nous avons jugée indispensable dans le contexte de profond changement géopolitique qui affecte notre continent. Le chemin de l’adhésion sera long et exigeant. Il n’y aura pas de procédure accélérée ou de critères au rabais : ce ne serait dans l’intérêt de personne, ni de l’Union européenne ni de l’Ukraine. Cette dernière le sait. Mais je veux saluer ici l’action des autorités ukrainiennes, qui ont entamé, malgré la période, la mise en œuvre des recommandations de la Commission.
Sans préjudice de ce processus d’adhésion, la communauté politique européenne, proposée par le Président de la République, tiendra sa première réunion jeudi prochain à Prague. Elle permettra à ses membres, dont l’Ukraine, de renforcer leur ancrage européen et de bénéficier de coopérations concrètes dans les domaines des infrastructures, de la sécurité, de l’énergie ou bien encore en matière de mobilité.
Soutenir l’Ukraine, c’est enfin penser sa reconstruction. On évalue les besoins du pays en la matière à près de 350 milliards d’euros. Il s’agit d’un défi colossal et collectif. La France y prendra sa part. À court terme, nous nous sommes engagés à concentrer nos efforts sur la reconstruction de la région de Tchernihiv, dans le nord du pays, suivant en cela le mécanisme de parrainage proposé par le président Zelensky. Les Européens sont engagés. Après la conférence de Lugano cet été, une conférence sur la reconstruction sera organisée le 25 octobre prochain en Allemagne. De son côté, la France organisera dans les prochains mois, à Paris, avec les autorités ukrainiennes, une conférence économique en vue de mobiliser les entreprises françaises.
Nous soutenons enfin les initiatives de la Commission européenne pour accompagner et organiser le financement de la reconstruction de l’Ukraine.
Nous le savons tous : les conséquences de cette guerre dépassent largement les frontières de l’Ukraine. Aussi, depuis février, le Gouvernement agit sans relâche pour limiter l’impact du conflit sur notre pays. Le premier enjeu est énergétique. Du fait de la reprise post-covid19, et avant même le début de la guerre, les prix de l’énergie avaient considérablement augmenté. Le conflit et l’arrêt quasi total des livraisons de gaz russe vers l’Europe ont entraîné des tensions d’approvisionnement et une nouvelle hausse des prix.
Je veux ici rappeler les choses fermement. N’inversons pas les rôles : c’est la Russie qui a lancé cette guerre. C’est elle qui nous pousse à agir. C’est elle, encore, qui choisit de faire du gaz un objet de chantage. Ces derniers jours, des explosions ont été constatées sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2. Tout indique qu’un acte de sabotage grave et irresponsable a été commis. Je ne tirerai pas de conclusions ici : une enquête internationale indépendante doit être conduite. Avec l’Union européenne, nous répondrons de manière ferme et unie à cette attaque contre des infrastructures énergétiques européennes.
Quoi qu’il en soit, nous sommes prêts à affronter l’hiver qui s’annonce. Nous avons anticipé la situation : ainsi, nous avons porté nos stocks de gaz au maximum, au niveau national comme au niveau européen ; nous avons augmenté les capacités d’importation de nos terminaux méthaniers, et nous avons diversifié notre approvisionnement. Cet été, le Président de la République a annoncé un plan de sobriété. Si chacun prend sa part, nous traverserons les mois à venir sans risque de coupure. Nous y parviendrons aussi grâce à la solidarité européenne : nous livrerons du gaz à nos partenaires, qui nous livreront de l’électricité en retour.
Arrêter la solidarité, ce serait prendre le risque de manquer d’électricité.

Une fois de plus, le simplisme et les propos d’estrade nous mènent dans l’impasse. Protéger les Français, c’est aussi limiter l’impact de l’inflation sur leur pouvoir d’achat. Très tôt, nous avons pris des mesures extrêmement fortes, les plus protectrices d’Europe. Le bouclier tarifaire a bloqué les prix du gaz et limité la hausse des prix de l’électricité – sans cela, les prix auraient explosé, comme en Belgique, en Allemagne ou au Royaume-Uni. Il y a deux semaines, j’ai annoncé le maintien du bouclier tarifaire à compter de début 2023 : alors que les prix auraient dû plus que doubler, leur hausse sera limitée à 15 %. Cela représente une économie moyenne de 175 euros par mois pour les Français qui se chauffent au gaz, et de 160 euros par mois pour ceux qui utilisent l’électricité. Cette mesure est efficace. Elle s’accompagne d’un chèque énergie exceptionnel de 100 ou 200 euros pour les 12 millions de foyers les plus modestes, soit 40 % des foyers français.
Nous devons aussi protéger toutes les entreprises et les collectivités face à la hausse des prix, notamment de l’électricité. Nous avançons au niveau européen pour traiter le problème à la racine. Lors du Conseil Énergie de vendredi dernier, nous avons progressé vers la mise en œuvre d’un plafond du prix du gaz et vers l’extension à toute l’Europe du mécanisme ibérique, qui a permis de ramener les prix de l’électricité à des niveaux deux à trois fois plus faibles que dans le reste de l’Europe. En parallèle, nous travaillons pour protéger les entreprises et les collectivités face à la flambée des prix de l’énergie. Le Gouvernement présentera prochainement des dispositions en ce sens.
En complément, nous continuons à renforcer et à simplifier l’aide destinée aux entreprises les plus en difficulté. Notre objectif est de limiter au maximum les baisses d’activité, voire les fermetures d’usines.

Au-delà des réponses d’urgence, cette guerre nous montre la nécessité de conquérir rapidement notre souveraineté énergétique et de sortir de notre dépendance aux énergies fossiles. Nous y parviendrons par une stratégie ambitieuse en matière de nucléaire et de renouvelable – nous aurons l’occasion d’en discuter plus longuement lors du débat sur la politique énergétique que j’ai proposé de tenir devant le Parlement.
Protéger, c’est aussi agir pour les agriculteurs et l’alimentation. L’Ukraine et la Russie sont parmi les principaux producteurs de céréales et d’oléagineux. La guerre a eu pour effet de rompre certaines chaînes de production et d’augmenter les prix des céréales et des engrais. Dès le mois de mars, des mesures ont été prises, avec l’appui de l’Union européenne, pour protéger les agriculteurs et les consommateurs. Une enveloppe d’aides de près de 500 millions d’euros a été débloquée. Des mesures spécifiques ont également été prises, au niveau européen comme au niveau français, en faveur des secteurs les plus touchés, en particulier l’élevage. Par ailleurs, une plus grande part des aides directes de la politique agricole commune (PAC) seront versées en avance aux agriculteurs.
Nous agissons également, en Français et en Européens, pour faciliter l’acheminement des exportations agricoles ukrainiennes. Avec l’aide de la Commission européenne, nous avons créé des corridors de solidarité, notamment via la Roumanie. Grâce à cette action, 14 millions de tonnes de céréales ukrainiennes ont pu sortir du pays – et, contrairement aux affirmations mensongères de Moscou, parmi les céréales exportées vers l’Europe, 70 % ont ensuite été envoyées vers l’Afrique ou l’Asie. Là encore, ce conflit nous montre l’importance de bâtir une souveraineté alimentaire française et européenne. Nous y œuvrerons notamment grâce aux investissements de France 2030 et à la future loi d’orientation et d’avenir pour l’agriculture.
Cette guerre, enfin, fait planer une menace grave sur la sécurité alimentaire de nombreux pays en développement. Une crise alimentaire mondiale est possible. Aussi le Président de la République a-t-il été à l’origine de l’initiative internationale Farm – Food and Agricultural Resilience Mission –, qui organise la solidarité vis-à-vis des pays les plus menacés.

Protéger les Français, c’est aussi tirer tous les enseignements stratégiques de la crise. Ce conflit montre une fois de plus l’importance du multilatéralisme : nous sommes forts quand nous avançons unis, entre Européens, entre alliés, entre nations qui aspirent à la paix et à la sécurité internationale. La guerre a prouvé la nécessité de la souveraineté et de l’autonomie stratégique européennes. L’Union européenne s’est construite autour de l’idée de paix et de la défense de valeurs : l’État de droit, le pluralisme, les droits de l’homme. C’est ce modèle qui est attaqué par Vladimir Poutine ; c’est ce modèle que nous devons défendre ensemble.
Ces derniers mois, sous la présidence française du Conseil européen, ont été l’occasion d’avancées historiques. La facilité européenne pour la paix a été utilisée pour aider directement un pays attaqué à se défendre – c’est une véritable révolution copernicienne pour l’Europe. Nous avons acté notre volonté de muscler les investissements européens en matière de défense, en adoptant la Boussole stratégique en mars dernier. Toujours en mars, lors du sommet de Versailles, nous nous sommes engagés collectivement à lutter contre nos dépendances stratégiques, à commencer par celle qui concerne l’énergie. Désormais, nous ne sommes plus isolés quand nous parlons de souveraineté européenne : c’est une ambition largement partagée dans l’Union. Ce conflit a marqué le réveil géopolitique de l’Europe. Nous savons désormais qu’il nous faut peser pour faire valoir nos valeurs et notre modèle.
Enfin, la guerre justifie les choix que nous avons réalisés lors de la précédente loi de programmation militaire. Nous devons maintenir des capacités opérationnelles fortes, afin d’être prêts à agir dans tous les milieux et à faire face au retour de la guerre de haute intensité. C’est l’objet de la revue nationale stratégique demandée par le Président de la République, et sur laquelle s’appuiera la prochaine loi de programmation militaire. Cette revue stratégique sera partagée avec vous mi-octobre, et je souhaite que le Parlement soit associé aux travaux d’élaboration de la loi de programmation militaire.
Cette guerre dure, mais elle aura un lendemain – et dans ce monde, l’Ukraine sera debout et maîtresse de son territoire. La Russie aussi sera présente. Elle est et reste une puissance majeure. Elle sera toujours notre voisin demain : nous ne pouvons l’ignorer. L’avenir s’écrira autour d’une table de négociation, et non pas sur un champ de bataille.
C’est pourquoi le Président de la République a choisi de maintenir des échanges avec le président russe. Ces négociations devront se tenir, en permettant à l’Ukraine de faire pleinement entendre sa voix. Aussi l’heure est-elle au soutien de la contre-offensive de cette dernière. Nous appuierons l’Ukraine, jusqu’à ce que ses dirigeants estiment le moment des négociations venu.
La nouvelle session parlementaire s’ouvre par ce débat : cela s’imposait. Avec la guerre en Ukraine, beaucoup de nos certitudes ont été ébranlées, beaucoup d’urgences se sont fait jour, et beaucoup de transitions doivent être accélérées. Cette guerre nous a rappelé que la démocratie était fragile, et qu’il ne fallait jamais cesser de la défendre. Elle nous a prouvé, une fois de plus, que l’unité et la solidarité européennes étaient des armes puissantes pour peser dans les équilibres internationaux et protéger nos concitoyens. Elle a confirmé qu’il était urgent de reconquérir notre souveraineté énergétique, industrielle et alimentaire. Nous ne faiblirons pas, ni face à l’agresseur russe, ni pour protéger les Français, ni pour préparer l’avenir de notre pays. La guerre en Ukraine va durer, mais nous sommes prêts. La résistance du peuple ukrainien nous oblige ; nous serons au rendez-vous ; nous serons à la hauteur. (…)
La guerre en Ukraine a bousculé le monde. Elle nous pousse à accélérer des transitions majeures et elle a des conséquences dont nous n’avons pas fini de mesurer les effets.
Des divergences subsistent entre nous ; c’est le principe même de la démocratie. C’est pourquoi ce débat, à l’ouverture de la session ordinaire, était important. Je veux saluer l’esprit de responsabilité qui s’est manifesté sur la majorité des bancs de cette assemblée. Je reconnais votre volonté de faire valoir des idées plutôt que d’agiter des polémiques. La situation en Ukraine est grave : nous devions être à la hauteur.
Je souhaite également saluer le large consensus qui se dégage de nos débats. Nous condamnons tous l’agression russe ; elle est illégale, brutale, violente ; elle enfreint toutes les règles internationales. La Russie est prête à toutes les méthodes, tous les chantages. Elle est seule responsable de cette situation. Nous ne pouvons pas l’accepter. Nous soutenons collectivement l’Ukraine dans sa résistance, nous partageons un immense respect pour les autorités, les forces et le peuple ukrainiens. Nous débattons des meilleures manières d’accompagner l’Ukraine, mais nous nous accordons sur la nécessité de l’aider.
Bien sûr, je regrette que certains n’expriment qu’un soutien rhétorique qui n’aboutirait à exercer aucune pression sur la Russie. Ce discours semble même renvoyer dos à dos l’Ukraine et la Russie.

Je m’étonne également que d’autres parlent de guerre sociale alors que la France est le pays qui a le mieux protégé sa population des effets de la guerre, comme elle l’a fait face au covid19.

> L’explosion des prix de l’énergie, c’est avant tout la conséquence de l’agression de l’Ukraine par la Russie. Les prix s’envolent parce que la Russie a décidé de réduire considérablement l’approvisionnement en gaz de l’Europe. Cette hausse est renforcée par la faible disponibilité de notre parc nucléaire.  Face à cela, notre stratégie est globale et cohérente : elle vise à protéger les Français et à préparer l’avenir.  Protéger les Français, c’est d’abord faire en sorte que nous puissions passer l’hiver sans coupures. C’est ce que nous faisons en ayant anticipé cette situation dès l’été en portant nos stocks de gaz au niveau maximal, en diversifiant nos approvisionnements, en augmentant les capacités de nos terminaux méthaniers. C’est ce que nous faisons avec le plan « sobriété ». Nous présenterons ce plan dans les prochains jours et il mobilise l’État, les collectivités, les entreprises et nos concitoyens. Et c’est enfin ce que nous ferons grâce à la solidarité européenne : nous livrerons du gaz à nos voisins qui nous livreront en retour de l’électricité. C’est à l’échelle européenne que nous assurerons notre sécurité d’approvisionnement et que nous pourrons maîtriser les prix de l’énergie. Car protéger les Français, c’est aussi agir contre la hausse des prix. C’est le but des boucliers tarifaires sur le gaz et l’électricité qui empêchent les prix de doubler ; c’est la mesure la plus protectrice qui ait été prise en Europe – cela mérite d’être rappelé.
Mais bien sûr, nous agissons pour tous les Français, y compris ceux qui se chauffent au fioul et sont souvent les plus précaires. Le Parlement a voté cet été une enveloppe de 230 millions d’euros, destinée à aider ceux qui sont en train de remplir leur cuve, et je vous confirme que ces Français recevront bien une aide dans les prochaines semaines ; ils bénéficieront en outre d’un chèque énergie exceptionnel pour affronter la hausse des prix. Au total, les Français les plus modestes pourront bénéficier d’une aide allant jusqu’à 400 euros pour payer leur facture de fioul. Je le précise, nous protégeons tous les Français face à cette situation d’urgence, mais nous préparons aussi l’avenir. L’avenir, c’est une société décarbonée; c’est notre souveraineté énergétique.
Grâce à MaPrimeRénov’, nous accompagnons les Français qui changent leur chaudière à fioul ; plus largement, pour assurer notre souveraineté énergétique, nous tablons sur le nucléaire  et sur les énergies renouvelables. Votre assemblée est saisie d’un projet de loi relatif à l’accélération de la production d’énergies renouvelables et vous serez prochainement saisis d’un autre projet de loi visant à accélérer les projets d’énergie nucléaire.

> Il y a vingt ans, jour pour jour, une femme de 17 ans, Sohane Benziane, était brûlée vive. Elle est devenue l’un des plus tragiques symboles des violences faites aux femmes. Je veux avoir une pensée pour elle, pour sa famille, pour toutes les femmes victimes de violences.

L’égalité entre les femmes et les hommes est la grande cause des quinquennats d’Emmanuel Macron. Nous avons agi dans tous les domaines.  Nous avons agi aussi avec force contre toutes les formes de violences sexistes et sexuelles. Avec le Grenelle des violences conjugales, nous avons obtenu de nombreuses avancées. Pour que la parole se libère et que chaque victime puisse être prise en charge, nous avons étendu les horaires du numéro d’appel 39-19, ouvert une plateforme de signalement en ligne, favorisé la prise de plaintes et lancé la création d’un fichier des mis en cause. Les actions qui ont été engagées depuis 2017.  Pour le traitement des plaintes et mieux protéger les victimes, nous avons formé près de 160 000 policiers et gendarmes, déployé des téléphones grave danger et des bracelets anti-rapprochement. Mais tant qu’il y aura des coups, nous continuerons : 10 000 places d’hébergement seront ouvertes dès cette année ; le mois dernier, j’ai annoncé l’ouverture de 1 000 places supplémentaires en 2023 ; nous allons doubler la présence policière dans la rue. Je rappelle qu’en ces domaines, seule l’institution judiciaire peut déterminer les faits, dire le droit et sanctionner. La lutte contre les violences conjugales est un combat fondamental auquel je tiens. Le Gouvernement continuera à le mener avec force, avec les associations, les élus et toutes celles et ceux qui veulent s’engager.

> [Prix de l’énergie] mon gouvernement est totalement mobilisé pour protéger les Français, les entreprises et les collectivités face à la flambée des prix de l’énergie. Nous avons d’abord agi pour protéger les Français avec la prolongation des boucliers tarifaires en 2023. Rappelons qu’ils permettront de contenir à 15 %, une hausse des prix du gaz et de l’électricité pour les ménages qui aurait sinon atteint 120 %. Ils bénéficient aux ménages, mais aussi aux très petites entreprises (TPE) et à la plupart des communes, celles-ci pouvant bénéficier des tarifs réglementés de l’électricité.  Mais nous voulons agir pour protéger également les entreprises et les collectivités. Vous avez raison, il s’agit pour cela de traiter le problème à la racine, en faisant baisser le prix de l’électricité sur les marchés européens. Les Espagnols ont réussi à diviser par trois le prix de l’électricité. C’est ce mécanisme que nous voulons étendre à toute l’Europe.
Des avancées ont été réalisées lors du dernier Conseil européen des ministres de l’énergie. Le Président de la République s’entretient cette semaine avec la présidente de la Commission européenne et avec le Chancelier allemand avant le Conseil de vendredi. Même si nous avons vraiment de bonnes raisons de penser que nous pourrons faire aboutir ce mécanisme, nous préparons aussi un filet de sécurité pour aider les entreprises et les collectivités les plus en difficulté.
Pour les entreprises, il s’agit tout d’abord d’améliorer le mécanisme de soutien créé pour aider celles qui consomment beaucoup d’énergie. Le ministre de l’économie y travaille.
S’agissant des collectivités, rappelons que nous avons voté dès cet été, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, un dispositif visant à protéger les plus fragiles. À mes yeux, c’est un exemple des compromis que nous pouvons trouver ensemble. Nous travaillons à améliorer ce dispositif pour qu’il réponde bien à toutes les situations.
Au-delà de ces situations d’urgence, nous devons renforcer notre souveraineté énergétique. C’est l’objet de deux projets de loi dont vous serez prochainement saisis, visant à accélérer l’un le développement des énergies renouvelables, l’autre le renouvellement de notre parc nucléaire.

> J’ai pris acte de la décision rendue hier dans le cadre de la procédure engagée contre ?Éric Dupond-Moretti devant la Cour de justice de la République. Voyez-vous, je ne crois pas qu’il soit démocratiquement sain que des décisions de l’autorité judiciaire soient commentées ici, dans l’enceinte du pouvoir législatif, par un membre de l’exécutif. Je le rappelle : l’indépendance de l’institution judiciaire est un principe cardinal de notre démocratie. La présomption d’innocence en est un autre pilier. J’ai pleinement confiance dans notre démocratie et dans notre justice

 

Bruno Le Maire (ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique)
> Discours lors du Forum Paris Infraweek 2022]

Nous devons changer de modèle économique pour aller vers un modèle décarboné, plus respectueux de l'environnement, plus respectueux du climat. Mais pour tout vous dire, une fois que nous avons dit ça, nous n’avons pas dit grand-chose parce que nous n'avons rien dit sur la méthode, rien dit sur le coût, rien dit sur le financement. Et je voudrais mettre en regard deux crises qui, de toute façon, se percutent et doivent vous amener, nous amener, à trouver des solutions. D’un côté la crise climatique avec son lot d'incendies, de catastrophes naturelles, d'ouragan, de montée des mers, de déplacement de population, d’impact économique, d'impact social, d'impact géopolitique.
Et puis de l'autre, la crise qui nous occupe 7 jours sur 7 avec le président de la République, qui est la crise énergétique, la flambée des prix du gaz, la flambée des prix de l'électricité, et le risque de voir un certain nombre d'entreprises en Europe et en France baisser leur production, voire se mettre au chômage partiel, voire fermer leur porte, voire délocaliser. Donc nous devons impérativement apporter à la fois de l’énergie à ces entreprises,et dans le même temps, décarboner l’économie. Nous devons avoir un modèle économiquement soutenable et du point de vue environnemental qui accomplit cette transition indispensable et c’est tout le défi que nous avons à mener. C'est trop facile de dire qu'on ne s'occupe que d'un défi et pas de l'autre. Si vous ne vous occupez que d'un défi et pas de l'autre, vous serez rattrapé par le premier ou par le second.
La première chose pour tenir ces deux fils ensemble, c'est d'abord de se fixer des objectifs qui soient clairs.
L'Europe l'a fait, je crois, avec beaucoup de force, 50 % de réduction des émissions en 2030 par rapport à 1990, c’est l'engagement Fit For 55, et neutralité carbone en 2050. Nous avons 4 millions de CO2 en moins par an entre 2012 et 2017, 8 millions entre 2017 et 2021, 16 millions entre 2022 et 2030. Donc, il y a des chiffres, il y a un calendrier et il y a un engagement.
Du point de vue national, je pense que nous avons pris aussi toute la mesure du sujet. Et pris les mesures nécessaires pour tenir ces engagements chiffrés dont je viens de parler. D'abord, nous nous sommes engagés pour produire plus d'électricité décarbonée en renforçant la filière nucléaire déjà unique au monde. Alors j’entends les critiques sur le passé, je préfère regarder l’avenir et les décisions qui ont été annoncées par le président de la République, c’est la première fois qu’un président de la République depuis plusieurs décennies prend l’engagement de construire 6 nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR 2 et de lancer des études sur la construction de 8 EPR 2 additionnels.
Nous avons également décidé d’accélérer le développement des énergies renouvelables, l'installation du premier site éolien offshore, le doublement de la capacité éolienne terrestre et la multiplication par 10 de la puissance installée d'énergie solaire d'ici 2028.
Au-delà de cette production, nous avons aussi pris des engagements pour décarboner nos industries. Et là aussi, le défi est considérable, parce qu'il faut à la fois réindustrialiser et décarboner les industries que nous installons. Il faut être compétitif pour que les sites industriels s'ouvrent en France avec les emplois, avec les technologies, avec la valeur ajoutée qui va avec et il faut dans le même temps consacrer des dizaines de milliards d'euros à la décarbonation de cette industrie qui, je le rappelle, représente près de 20 % des émissions françaises. Dans France 2030, je rappelle que nous allons consacrer près de 6 milliards d'euros à la décarbonation du mix énergétique. Le meilleur exemple, c'est celui d'ArcelorMittal et de ses hauts fourneaux de Dunkerque et de Fos-sur-Mer. Je recommande à chacun d'entre vous d'aller visiter ces installations parce que ça permet de prendre,au-delà des grands discours de salon, de prendre conscience physiquement, matériellement, de l'enjeu économique que cela représente, de décarboner des sites qui font des centaines d'hectares, qui représentent des installations absolument considérables, et donc, des coûts considérables derrière.
Nous avons également pris des mesures pour améliorer nos réseaux de transport. Je pense à ce qui a été fait sur les réseaux ferroviaire avec le développement du fret mais également le canal Seine-Nord Europe avec 5 milliards d’investissement qui reliera le bassin de La Seine au réseau fluvial du Nord de l’Europe.
L’Europe s’est également engagée aux côtés de la Nation française et des autres nations. Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, un tiers des 1 800 milliards d’euros d’investissements du plan de relance Next Generation EU seront consacrés à la transition et à la décarbonation de l’économie.
Nous avons également la taxonomie verte, nous avons le Global Gateway qui se donne pour objectif de mobiliser 300 milliards d’euros pour financer de nouvelles infrastructures. Nous avons donc des décisions et des engagements européens qui sont forts.
Maintenant nous avons besoin et c’est pour ça que je vous remercie de votre présence ici de la mobilisation totale de l’écosystème financier.
Quand on regarde au niveau mondial, les besoins en nouvelles infrastructures qui permettront de réduire les émissions de carbone liées au transport ou à l’industrie sont estimés à 450 milliards d’euros par an au niveau mondial. Ce sont donc des sommes absolument considérables. Inutile de vous dire que ce ne sont pas les financeurs publics et les budgets des Etats qui vont assumer seuls ces coûts. Ils n’en ont ni les moyens ni l’opportunité à un moment où les tensions sur les marchés sont fortes, où les taux d’intérêt sont élevés et où l’endettement des Etats, je le rappelle a explosé en raison de la pandémie, de la crise du Covid19 et des mesures nécessaires contre l’inflation.
Donc, nous allons avoir besoin d’un nouveau partenariat beaucoup plus ambitieux entre les financeurs publics et les financeurs privés, entre les Etats et les investisseurs. Mais c’est la condition du succès de la lutte contre le réchauffement climatique.
Tout ne peut pas reposer sur la puissance publique, tout ne peut pas reposer uniquement sur les forces privées non plus, il faut que nous arrivions à bâtir un nouveau pacte entre les financeurs publics et les financeurs privés.
Nous avons un certain nombre d’initiatives qui ont été lancé en la matière, je voudrais en citer deux : les principes du G20 pour les investissements des infrastructures de qualité et je remercie l’ambassadeur indien de sa présence quand nos partenaires indiens ont pris la décision de poursuivre ce travail d'orientation stratégique et de remise à niveau. Je me rendrai à New Delhi dans quelques semaines pour en discuter avec nos partenaires indiens.
Nous avons également une autre initiative lancée par le Premier ministre Modi lors du sommet action climat de l'ONU en 2019. La Coalition for Disaster Resilient Infrastructure (CDRI), qui a été lancée en 2019 et qui vise à encourager la réalisation d'infrastructures résilientes aux catastrophes naturelles et aux aléas climatiques. Je voudrais saluer cette initiative du Premier ministre Modi. Nous avons eu l'occasion d'en parler avec le président de la République et le Premier ministre Modi lors de sa visite à Paris. Et je voudrais confirmer à l'ambassadeur notre intention de soutenir cette coalition.
La France, évidemment, souhaite se mettre au cœur de ces grandes transformations. D'abord pour le faire, il faut qu'elle reste attractive : attractive globalement et attractive plus particulièrement sur le financement des infrastructures.
Nous avons réussi grâce à vous, grâce à vous tous ici, à devenir un écosystème particulièrement riche et attractif pour le financement des infrastructures avec des banques, des sociétés de gestion et des cabinets de gestion spécialisés. Nous avons également réuni de nouveaux acteurs, mobilisé davantage de fond, tout ça avance dans la bonne direction. C’est dans cette perspective et sur la base de ces premiers résultats que le président de la République a soutenu l'initiative FAST-Infra lancée lors du One Planet Summit, qui avait organisé précisément le président de la République il y a quelques mois.
Qu'est-ce que c'est que FAST-Infra ? C'est d'abord un label qui va permettre de distinguer entre les infrastructures durables et celles qui ne le sont pas. Chacun sait qu'il existe partout dans le monde, en particulier dans les pays en développement, des besoins d'infrastructures qui sont considérables, j’ai donné le chiffre qui suscite parfois une convoitise économique considérable et où les marchés sont parfois gagnés par ceux qui offrent les solutions les plus rapides, les plus économiques et les moins favorables au climat.
Je pense qu'il était absolument indispensable pour la construction de ponts, de routes, d'aéroports, de tout type d'infrastructure, d'acheminement d'eau, de systèmes de dépollution, qu'il y ait un label de durabilité de ces infrastructures, sans quoi les marchés seront systématiquement gagnés par ceux qui proposent le coût le moins élevé, le prix le plus faible, sans aucune considération pour l'impact écologique de ces infrastructures.
Donc je crois profondément à ce label qui va permettre de valoriser des constructions selon les meilleurs standards environnementaux, sociaux de résilience et de gouvernance. L’enjeu est économique. Il est aussi très politique parce que dans le fond, c’est la défense du modèle économique européen que nous voulons mettre en avant. Il s’agit d’expliquer que notre modèle qui fait attention aux coûts financiers d’une infrastructure, mais également aux coûts sociaux, aux coûts environnementaux, est le bon modèle et qu’il a vocation, donc, à servir de référence à travers la planète.
Cette référence, elle doit être ouverte, c’est pour ça que Fast Infra sera aussi une plateforme digitale de collaboration qui accompagnera les acteurs des infrastructures durables, notamment dans les pays en développement dans la préparation, le financement et le déploiement de programmes à grande échelle. Il ne s’agit pas d’imposer, il s’agit de coopérer pour aboutir, au bout du compte, à une économie qui soit durable, dynamique, respectueuse de l'environnement. C'est pour toutes ces raisons que je suis fier et heureux de vous annoncer que l'association Fast Infra a fait le choix de s'établir à Paris. Je pense que c'est une belle victoire française et une belle victoire pour le développement durable et notre volonté de défendre un modèle de développement économique plus durable. Nous soutiendrons évidemment l'association pour qu'elle bénéficie du dynamisme de notre écosystème.

Catherine Colonna (ministre de l’Europe et des Affaires étrangères)
> Vendredi dernier, après sept mois d’une guerre d’agression aussi brutale qu’injustifiée, Moscou franchissait un nouveau seuil. En s’autorisant des simulacres de scrutins organisés à la hâte en zones occupées, le Kremlin annexait en toute illégalité les territoires occupés dans les régions de Louhansk, Donestk, Zaporijjia et Kherson. Je le dis sans ambiguïté : le fait accompli ne fera jamais le droit, n’en déplaise aux propagandistes du Kremlin.
La France et ses partenaires ne reconnaîtront jamais ces pseudo-référendums. Ils ne reflètent en rien la volonté de la population ukrainienne – sa résistance héroïque en témoigne.
Ils traduisent tout au plus le cynisme de l’agresseur russe, qui ne recule devant aucune mascarade pour tenter de maquiller ce qui est, en réalité, un projet impérialiste et expansionniste, un projet de conquête qui, vous le savez, mesdames et messieurs les députés, porte profondément atteinte à toutes les règles régissant les relations internationales, la vie entre les nations. Car la Russie, membre permanent du Conseil de sécurité qui plus est, a bafoué en agressant l’Ukraine les principes fondateurs de la Charte des Nations unies que sont la non-agression, le règlement pacifique des différends, la souveraineté des États et le respect de leur intégrité territoriale. La France a en conséquence fait le choix du droit et de ses valeurs, comme l’a souligné Mme la Première ministre. La Russie, elle, a choisi la guerre, une guerre d’agression, une guerre brutale avec son cortège de meurtres et d’exactions. Elle a choisi des élections illégales, méthode de sinistre mémoire. Nous l’appelons à revenir à un comportement responsable
Dès lors, en ce moment de bascule, nous faisons depuis sept mois le seul choix qui vaille, le seul choix responsable, celui du soutien à l’Ukraine et à nos valeurs, comme vous l’avez rappelé si justement ce matin encore, madame la présidente de l’Assemblée nationale. Nous faisons choix de défendre l’ordre international fondé sur la règle de droit, cet ordre que la Russie voudrait détruire. Quel pays pourra s’estimer à l’abri dans ses frontières si la souveraineté et l’intégrité territoriale d’un État peuvent être violées de manière aussi décomplexée ?
Si tout est permis en Ukraine, tout le sera davantage ailleurs. C’est bien pourquoi cette guerre n’est pas une guerre régionale : elle est l’affaire de tous. Nous n’avons pas ménagé nos efforts pour le faire valoir auprès de l’ensemble de la communauté internationale, et ces efforts commencent à porter leurs fruits comme nous l’avons constaté lors de l’Assemblée générale des Nations unies, où de nombreux pays tiers, ne faisant pourtant pas partie des traditionnels soutiens de l’Ukraine, ont pris leurs distances vis-à-vis de la Russie en appelant au plein respect des principes fondamentaux de la Charte et en rappelant que l’heure n’était pas à la guerre – je pense, par exemple, à la Chine et à l’Inde. Nous sommes déterminés à poursuivre dans cette voie.
Mesdames et messieurs les députés, vous avez été nombreux à évoquer la lutte contre l’impunité. Nous faisons le choix de la justice en refusant l’impunité des criminels. Je l’ai dit clairement au Conseil de sécurité, dont j’ai présidé, le 22 septembre, la première réunion de niveau ministériel sur la situation en Ukraine depuis le déclenchement de l’invasion : il n’y aura pas de paix sans justice. Les exactions et les crimes de guerre devront faire l’objet de poursuites ; nous y contribuons au sein des organisations internationales comme dans un cadre bilatéral. À ce titre, notre pays a envoyé depuis le mois d’avril, certains d’entre vous l’ont rappelé, trois équipes spécialisées de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, la dernière d’entre elles étant arrivée mardi dernier. Celle-ci aidera la justice ukrainienne à faire toute la lumière sur les atrocités découvertes à Izioum, comme l’ont déjà fait les autres équipes à Boutcha. La justice doit passer.
La question des sanctions et de leur impact a aussi été évoquée. Nous faisons, comme l’a souligné Mme la Première ministre, le choix de la fermeté face à un agresseur qui menace la stabilité de notre continent et la sécurité de l’ensemble de la communauté internationale. C’est ainsi qu’avec une célérité inédite, nous avons mis en œuvre, avec nos partenaires européens et internationaux, une politique de sanctions d’une rigueur sans précédent. Ces sanctions ont un but clair : asphyxier l’effort de guerre russe et appliquer une pression maximale sur les fauteurs de guerre.
D’ores et déjà, l 200 individus et plus de 100 entités russes y sont soumis. Ces sanctions sont réfléchies et appropriées. Elles sont efficaces et auront un impact massif et durable sur la machine de guerre russe, comme l’a rappelé Mme la Première ministre : le PIB de la Russie va reculer de six points en 2022 et retomber, d’ici à deux ans, à son niveau du début des années 2000… vingt ans en arrière. Nous asséchons aussi ses revenus tirés des hydrocarbures. Et l’accès aux technologies dont elle a besoin est déjà mis en cause dans des secteurs aussi stratégiques que sont l’aéronautique, l’automobile et l’armement. Nous ne faiblirons pas. La France souhaite, vous le savez, l’adoption rapide d’un nouveau paquet de sanctions européennes, lequel devrait être finalisé dans les tout prochains jours.
Qu’il s’agisse des sanctions, du soutien à l’Ukraine – y compris par l’envoi d’équipements militaires –, de l’aide humanitaire massive, de l’accueil des réfugiés, de l’isolement de la Russie ou des exportations de céréales de l’Ukraine, toutes mesures que vous avez citées, l’Union européenne a agi vite, clairement et de façon unie. Oui, nous sommes au rendez-vous de nos valeurs humanistes lorsque nous accueillons au sein de l’Union plusieurs millions de réfugiés ukrainiens. Oui, nous sommes au rendez-vous de l’Histoire lorsque nous octroyons à l’Ukraine le statut de candidat à l’Union européenne à l’unanimité, lui offrant ainsi un avenir européen. Cette unité fait notre force collective face à une Russie dont l’isolement est chaque jour plus manifeste. Nous sommes unis et nous le resterons.
Vous avez été nombreux à vous exprimer sur le soutien à l’Ukraine, sur ses différentes composantes et sur ses conséquences. Je tiens à le redire : nous avons fait le choix d’apporter à ce pays un soutien déterminé et constant. Et je veux être très claire : ni la France, ni aucun pays européen, ni aucun État membre du G7 n’est en guerre avec la Russie. Nous aidons un pays agressé, l’Ukraine, à exercer son droit à la légitime défense, conformément au droit international, en particulier à la Charte des Nations unies.
Nous avons réaffirmé ce soutien il y a quelques jours à l’Assemblée générale des Nations unies, par la voix du Président de la République, et au Conseil de sécurité : il est à la fois politique, diplomatique, humanitaire, économique et financier. Il représente un effort national de 2 milliards d’euros auquel s’ajoutent, d’une part, notre aide militaire, dont le ministre des armées va vous exposer l’ampleur, sachant qu’une partie sera prise en charge par la facilité européenne pour la paix, et, d’autre part, l’aide européenne, à laquelle notre pays contribue.
J’ai à nouveau témoigné de notre soutien au Président Zelensky et à mon homologue Dmytro Kuleba à Kiev, la semaine dernière, à l’occasion de mon troisième déplacement en Ukraine. À Kiev, à Hostomel, à Boutcha comme à Irpin, j’ai vu l’ampleur des destructions causées par les bombardements russes et pu mesurer la bravoure, la détermination et l’esprit de résistance intacts du peuple ukrainien. Je sais que plusieurs d’entre vous ont accompagné en Ukraine Mme la présidente de l’Assemblée nationale. Je me félicite que la représentation nationale et l’exécutif, unis, aient ainsi témoigné sur place de la solidarité de la France.
Nous sommes solidaires de la cause que défend le peuple ukrainien, solidaires du combat qu’il mène pour les valeurs démocratiques qui sont aussi les nôtres, ce combat pour la paix et pour la liberté, solidaires de ses souffrances. Et nous l’aidons, comme nous l’avons encore montré le 28 septembre en envoyant, depuis Marseille, plus de 1 000 tonnes de fret humanitaire, rassemblées grâce aux contributions de l’ensemble des forces de notre société : l’État et ses opérateurs, les collectivités locales, les acteurs privés et les ONG. La France est aux côtés de l’Ukraine depuis le début de l’agression, et elle le restera non seulement jusqu’à ce que ce pays retrouve sa pleine souveraineté et son intégrité territoriale, mais aussi après la guerre – car il y aura un après.
Sur le terrain, l’armée russe a subi ces dernières semaines son troisième échec tactique. En février, elle prenait l’Ukraine en tenaille sur trois axes, au nord, à l’est et au sud, cherchant clairement à prendre Kiev pour y renverser le président légitimement élu par le peuple ukrainien, mais en avril, incapable de prendre cette ville, elle s’est retirée du nord du pays. Incapable également de s’emparer rapidement de l’ensemble du Donbass malgré le concours de ses supplétifs séparatistes, elle a dû reculer dans la région de Kharkiv. À la mi-septembre, une contre-offensive l’a prise de court, les Ukrainiens regagnant 9 000 kilomètres carrés de territoire.
Hier, l’Ukraine résistait ; aujourd’hui, elle reprend l’initiative, grâce à la détermination de ses soldats, à la qualité de son commandement et à l’élan de tout un peuple qui se bat pour son pays, grâce aussi aux équipements que nous lui avons livrés avec nos partenaires et qui prouvent leur efficacité.
Le constat est clair : la Russie s’est enfoncée dans une triple impasse, à commencer par une impasse sur le terrain comme le montrent ses récents reculs. C’est aussi une impasse vis-à-vis de la communauté internationale au sein de laquelle la Russie est de plus en plus seule, et enfin dans une impasse vis-à-vis de sa population depuis la décision de mobilisation partielle, une décision lourde de conséquences qui a été prise contre l’opinion d’une population qui comprend de moins en moins pourquoi elle doit subir les conséquences d’une guerre inutile, illégale et injuste, une guerre qu’elle n’a pas choisie.
La fuite en avant de la Russie a été soulignée au cours de ce débat. Mais il va falloir tenir dans la durée, ne nous y trompons pas, Mme la Première Ministre l’a dit cet après-midi à plusieurs reprises. En effet, Moscou a choisi la fuite en avant politique – les déclarations du président russe vendredi dernier n’en sont que le dernier exemple. Elle a pris la responsabilité d’un chantage à la sécurité alimentaire, auquel nous avons réagi en permettant à l’Ukraine d’exporter à nouveau ses céréales. Dans l’esprit de l’initiative Farm que le Président a lancée depuis le printemps, notre pays vient aussi de participer, avec l’Allemagne, au cofinancement du transport et de la distribution par le Programme alimentaire mondial (PAM) de 50 000 tonnes de céréales données par l’Ukraine pour l’Éthiopie et pour la Somalie car la corne de l’Afrique est particulièrement touchée par la crise alimentaire.
Il y a aussi un chantage à la sécurité énergétique par la coupure des vannes du gaz alors que nous sommes témoins de mystérieuses explosions en mer Baltique. Quant au chantage à la sécurité du site de la centrale nucléaire de Zaporijjia, il nous a conduits à soutenir fortement les efforts du directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour réduire les tensions et le risque d’un accident nucléaire, efforts qui se poursuivent en ce moment même.
La Russie a aussi choisi la fuite en avant militaire en annonçant une mobilisation partielle de sa population. Par la décision de mobiliser, pour la première fois depuis 1941, la Russie prend un grand risque. Nous y voyons avant tout un aveu de faiblesse, une reconnaissance de l’incapacité de ses forces armées à remplir les objectifs fixés par le Kremlin. L’impact de cette mobilisation sur le terrain est de surcroît très incertain, l’armée russe ayant fait preuve de graves lacunes logistiques depuis le début du conflit, lacunes qui ne disparaîtront pas en envoyant de force au front une population dont tout montre qu’elle ne souhaite pas cette guerre – en atteste le départ du pays de plusieurs centaines de milliers de personnes ces derniers jours, ou encore les scènes de protestations dont nous avons été témoins dans plusieurs régions russes. Quoiqu’en dise la propagande, il n’y a aucun élan patriotique, mais une mobilisation subie.
Enfin, la fuite en avant est également rhétorique : les menaces irresponsables proférées dans le but de nous intimider en sont le signe. Nous ne céderons pas, mais nous ne tomberons pas non plus dans le piège : nous continuerons, pour notre part, à faire preuve de la responsabilité qui doit incomber à une puissance dotée de l’arme nucléaire.
Enfin, s’agissant de la reconstruction, le premier orateur, comme d’autres par la suite, en a évoqué la nécessité. Je souligne que ce n’est pas à nous de déterminer quand cette guerre prendra fin et qu’il appartiendra alors à l’Ukraine seule de décider à quel moment, dans quelles conditions et dans quels termes elle pourra envisager un dialogue visant à l’ouverture de négociations. Mais il y aura bel et bien un après, j’en suis convaincue. Et c’est à nous et à nos partenaires qu’il appartiendra alors de fournir à l’Ukraine les moyens de se reconstruire. Nous nous y sommes engagés et commençons déjà à le faire en vue de l’arrivée de l’hiver puisque, parmi les biens envoyés dans notre cargaison humanitaire le 28 septembre figurait notamment du matériel de réhabilitation d’urgence, à savoir plus de six ponts de 20 à 60 mètres de long qui participeront à la reconstruction de la région de Tchernihiv, région où vous vous êtes rendus, madame la présidente, messieurs les présidents de commission.
Je conclurai en rappelant qu’en aidant l’Ukraine, nous faisons notre devoir de solidarité, notre devoir d’humanité, et nous continuerons à le faire aussi longtemps que nécessaire.

> Les manifestations qui ont suivi la mort de Masha Amini ont été – et sont toujours – la cible d’une répression violente qui a déjà fait des dizaines de morts. La France a condamné, dès le 19 septembre et avec la plus grande fermeté, les violences qui ont entraîné le décès choquant de cette jeune femme mais aussi celle dont il est fait usage, aujourd’hui encore, contre les manifestants.
Nous avons appelé les autorités iraniennes au respect du droit à manifester pacifiquement, du droit au rassemblement et du droit des journalistes à exercer leur métier. J’ai moi-même rappelé ces principes fondamentaux à plusieurs reprises, aussitôt, à New York et à Paris, ainsi qu’à Marseille.
L’Iran a considéré que le rappel des principes fondamentaux des droits de l’homme constituait une ingérence et a cru bon de le faire savoir à notre ambassade sur place. J’ai donc décidé de faire convoquer le chargé d’affaires iranien à Paris – où il n’y a pas d’ambassadeur actuellement – pour exiger la fin de la répression et dire clairement ce que nous pensons des méthodes iraniennes. Il a été reçu vendredi 30 septembre au Quai d’Orsay.
Au fond, ce qui est en jeu dans les rues de Téhéran et des autres villes d’Iran, c’est la liberté. La répression est brutale. Nous condamnons, avec les mots les plus fermes, cette répression aveugle menée contre des femmes et des hommes qui revendiquent leur dignité – telle qu’ils la conçoivent – et la liberté à laquelle ils aspirent. Cette aspiration est désormais visible dans les rues, dans les universités et dans les cœurs. Les femmes d’Iran demandent à être libres. Nous ne cesserons pas de les soutenir.
Au-delà des sanctions qui frappent ce pays depuis déjà de longues années, nous avons engagé un travail, au sein de l’Union européenne, pour réflechir à certaines options visant les tenants d’un régime qui conduit des manifestants à la mort et envoie souvent les ressortissants et leurs enfants dans nos pays. Cela ne peut pas durer. Nous devons les sanctionner. Nous le ferons en concertation avec les autres pays.

 

Sébastien Lecornu (ministre des Armées)
> Les trois éléments qui guident la doctrine de notre soutien militaire à l’Ukraine sont assez simples. Premièrement, nous nous efforçons de coller à la demande des Ukrainiens. Nous avons cherché à ne pas être trop diffus dans la manière d’apporter notre aide, par la nature même des équipements. Un dialogue opérationnel et de confiance s’est noué au fil du temps avec le ministère de la défense ukrainien. Les besoins exprimés sont mesurés et clairs ; nous tentons d’y répondre.
Deuxièmement, notre aide s’entoure d’une certaine discrétion – ce sont les Ukrainiens eux-mêmes qui nous en font la demande. C’est de cette façon que nous avons pu constater l’efficacité du système d’artillerie Caesar : l’effet de surprise relatif que nous avons créé est la clé de la réussite sur le champ de bataille.
Troisièmement, ce que nous promettons, nous le donnons vraiment. Beaucoup d’annonces sont faites par certains pays, mais elles ne sont pas toujours suivies d’effets. La France, elle, s’honore de tenir scrupuleusement sa parole.
Je veux aussi rappeler à la représentation nationale les trois grands chapitres d’aide militaire que nous avons apportée à l’Ukraine depuis le début de la guerre.
Le premier chapitre a impliqué la fourniture d’équipements de protection et d’armement individuels, de systèmes de missiles antichars et antiaériens. Il correspondait, entre février et avril, à une réaction d’urgence.
Le deuxième chapitre a été plus lourd : nous avons délivré à l’Ukraine non seulement des pièces d’artilleries – notamment dix-huit canons Caesar assortis de leurs munitions –, mais aussi de nombreux véhicules sous blindage destinés au transport de troupes, tels que les véhicules de l’avant blindés (VAB).
Le troisième chapitre, qui a débuté en septembre, consiste à répondre à des demandes précises formulées par les Ukrainiens, notamment en matière de carburants. L’accès aux carburants est absolument décisif, y compris pour faire rouler les canons Caesar. Nous avons fixé un calendrier de maintenance et d’approvisionnement en pièces détachées – c’est sans doute moins spectaculaire que de fournir des pièces d’artillerie entières, mais les pièces détachées des canons Caesar ou d’autres matériels nécessitent un entretien et nous répondons présent. En outre, la demande en munitions est importante, d’autant que le phénomène d’attrition qui les concerne est particulièrement fort. Autre demande spécifique : la formation. Malheureusement, l’attrition des artilleurs est elle aussi significative : lorsqu’un artilleur tombe, il faut bien qu’un autre prenne sa place, ce qui suppose de le former.
Sous l’autorité du Président de la République, un nouvel agenda d’accompagnement militaire à l’Ukraine a été établi ; il sera déployé dans les semaines à venir. Le président a déjà passé un certain nombre de commandes. Par ailleurs, une mobilisation forte de la BITD – base industrielle et technologique de défense – sera nécessaire, car notre industrie de défense doit être en capacité de régénérer des stocks – j’en reparlerai demain devant la commission de la défense et des forces armées.
Je veux dire quelques mots des classements, sur lesquels ont insisté Mme Valérie Rabault et M. Boris Vallaud. Il faut savoir que ces classements tiennent uniquement compte des éléments en source ouverte : ils écartent une partie de l’aide octroyée par la France à l’Ukraine qui, pour faire simple, n’est pas visible sur la place publique. En outre, les classements agrègent des critères parfois très différents. Certains pays ont par exemple valorisé le coût de la formation ou celui du transport des munitions. La France a choisi de ne pas le faire, c’est un élément que je livre à la représentation nationale.
En outre, en général, les classements ne tiennent compte que de ce qui est promis et non effectivement livré. Je n’en dis pas plus pour ne pas créer d’incidents avec nos amis et alliés, mais, dans les faits, ce qu’a promis la France a été, à l’unité près, donné aux Ukrainiens.
Enfin, ces classements ne prennent jamais en considération la facilité européenne pour la paix, laquelle représente pourtant 450 millions d’euros pour la part française, soit 20% du fonds européen. La France n’est pas forcément meilleure ou moins bonne que d’autres pays ; je me contente par ces propos de vous éclairer sur ces classements qui circulent sur internet et dans la presse, classements au sujet desquels il y aurait beaucoup à dire. Si nous devions les mettre à jour, je pense que la France progresserait de manière assez significative par rapport à ses partenaires européens. Du reste, nul ne conteste que nos amis et alliés américains sont les premiers contributeurs.
Je conclus en évoquant le rôle de la France, en tant que nation cadre de l’Otan, dans les missions de réassurance sur le flanc oriental de l’Europe. Quelque 900 hommes sont mobilisés, la défense du ciel est assurée grâce à des missions d’ampleur et un groupe de l’armée de terre est positionné. Nous avons la capacité, si c’était malheureusement nécessaire, d’atteindre le niveau de la brigade. L’investissement de la France comme nation cadre en Roumanie aura coûté aux contribuables français 700 000 millions d’euros pour la seule année 2022. Ces crédits n’étaient certes pas prévus, mais ils témoignent de l’engagement de la France et de son armée.
Ce qui se passe en Ukraine nécessitera un retour d’expérience (Retex) profond, notamment en ce qui concerne l’hybridité, la dissuasion nucléaire et les stocks de munitions. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen du PLF pour 2023 et, dans l’esprit de coconstruction avec le Parlement et les diverses formations politiques qu’a rappelé la Première ministre, lors de l’élaboration de la prochaine loi de programmation militaire.

 

Olivier Dussopt (ministre du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion)
> [Réforme des retraites soumise à référendum] Nous n’avons pas fait ce choix. Nous avons pris une option différente. D’abord, le Président de la République a décidé de poser le débat pendant la campagne présidentielle. Vous conviendrez avec moi qu’en annonçant avant l’élection que nous envisagions de reculer progressivement l’âge de départ à la retraite, à 64 ans puis à 65 ans, nous prenions un risque politique majeur, qui nous donne une forme de légitimité
Nous avons fait un deuxième choix : celui de la concertation. Là aussi, peut-être conviendrez-vous avec moi qu’elle n’a pas commencé en 2022. Voilà maintenant des années que les questions de pénibilité, d’emploi des seniors, d’équilibre du régime et de prise en compte de la précarité sont soumis à la concertation et font l’objet d’un travail.
Nous avons décidé, sous l’autorité de Mme la Première ministre, d’ouvrir un dernier cycle de concertation sur la réforme des retraites. L’ensemble des organisations syndicales et des organisations d’employeurs siégeant au Conseil d’orientation des retraites (COR) m’ont indiqué qu’elles participeront, dès demain, à la première réunion multilatérale de concertation que j’organise dans ce cadre. Nous ouvrons ce cycle afin de définir le contenu de la réforme, d’arrêter un ensemble de décisions et de trouver un maximum de compromis d’ici à la fin de l’année. Je sais parfaitement que certains désaccords seront difficiles, voire impossibles, à surmonter. L’objectif ultime consiste à proposer cette réforme au Parlement – où se tiendra un débat politique et démocratique – pendant l’hiver, pour qu’elle soit applicable au cours de l’été 2023.
Nous avons plusieurs buts : sauver le système par répartition, garantir sa soutenabilité et sa durabilité et l’améliorer en versant de meilleures pensions et en prenant mieux en compte la pénibilité et les carrières hachées – autant d’objectifs sur lesquels nous pouvons nous retrouver.

 

Pap Ndiaye (ministre de l'Education nationale et de la Jeunesse)
> Devant la multiplication des atteintes à la laïcité, nous ne sommes pas naïfs. Nous agissons avec fermeté pour faire respecter la loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques.

> Je me suis engagé à augmenter les rémunérations des professeurs en début et en milieu de carrière. Nous le faisons, sans oublier les professeurs en fin de carrière : nous leur permettrons de connaître la même évolution que leurs jeunes collègues.

> Vigilance et fermeté : nous sommes très attentifs à la protection des professeurs et des personnels de l’Éducation nationale.

> La classe de sixième est cruciale. Nous nous devons d’y améliorer les résultats et de favoriser l’égalité des chances en réformant le collège.

> Le peuple iranien montre son courage héroïque avec à sa tête des femmes qui luttent contre l’obligation du port du voile et pour leurs droits. J’apporte tout mon soutien à ces combattantes de la liberté et de la dignité.

> Notre école, faisons-la ensemble ! Encourager des initiatives locales associant tous les partenaires : c’est tout l'esprit du CNR initié par le Président.

 

Marc Fesneau (ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire)
> Il y a urgence à relocaliser certaines productions. Il y a plusieurs sujets, le prix des emballages, les hausses de tarifs et de produits de production animale et la guerre en Ukraine qui impacte les tarifs de l'énergie. (…)
Ça participe effectivement, en termes de souveraineté alimentaire, d'une nécessité sur tous les produits, de faire en sorte de détenir une grande part, pour ne pas dire une totalité, de capacités productives pour faire en sorte de lutter contre le dérèglement climatique. Pourquoi cela n'a pas marché cette année ? Parce qu'il y a eu une très mauvaise récolte. Ça doit nous interroger sur le modèle qui pourrait se développer, qui est un modèle de perte de souveraineté et qui fait que, dans la mondialisation qui s'était construite, on avait parfois délesté ou laissé à d'autres le soin de nous nourrir. C'est sur ce point qu'il faut que nous travaillons. 

> [Importations alimentaires ont doublé depuis 2000] C'est une tendance lourde. Sur les fruits et légumes par exemple, on a beaucoup perdu en capacité de souveraineté. Sur la viande également. Cela doit nous interroger. Le premier sujet, c'est d'améliorer la compétitivité de la France parce que c'est souvent une affaire de compétitivité qui fait que les produits viennent de l'importation. Deuxièmement, ça pose la question de la rémunération des agriculteurs dans un certain nombre de cas. C'est parce que la rémunération n'était pas au rendez-vous que les productions ne se sont pas développées. Troisièmement, il faut s'interroger sur les normes qu'on s'impose en France. Il faut regarder quelles sont les normes qu'imposent d'autres pays dans l'espace européen pour ne pas créer des distorsions de concurrence. La question de la distorsion de concurrence dans un espace qui est ouvert, ça n'a pas de sens si on n'arrive pas à le faire, à le faire à l'échelle européenne. Il y a un certain nombre de contraintes réglementaires qui sont plutôt franco-françaises qu'européennes et qui font perdre en compétitivité nos exploitants et industriels. J'ai lancé la semaine dernière un plan de souveraineté fruits et légumes. Ça doit porter sur la compétitivité, sur la recherche et l'innovation, sur la capacité à installer des jeunes.

> [Lait] La crise ukrainienne qui a fait flamber les prix. Et donc, de fait, dans les discussions et les négociations entre les producteurs, les transformateurs et la grande distribution, la mise à niveau du prix du lait ne s'est pas faite dans des conditions satisfaisantes. Il y a une part qui est liée en particulier à une stratégie commerciale et c'est là-dessus qu'il faut qu'on travaille et qu'on se batte. On se bat tous les jours ou toutes les semaines, puisqu'on a un comité de suivi des relations commerciales, pour faire en sorte qu'on atteigne un prix du lait qui corresponde à la réalité des prix, à la fois pour les producteurs et à la fois pour les transformateurs. 
Je note par ailleurs que vous datez votre remarque de juillet. Depuis le mois de juillet, il y a eu un certain nombre discussions qui ont eu lieu. J'entends qu'un certain nombre de distributeurs ont annoncé qu'ils étaient prêts à payer 500 euros les 1.000 litres. Maintenant, il faut que ça se retrouve dans les cours de ferme, c'est-à-dire que ce n'est pas le tout de faire une annonce. D'abord, je souhaite que l'ensemble des distributeurs se mettent dans ces dispositions là. Et puis, qu'on fasse en sorte que la transformation puisse trouver sa rémunération. Il faut avoir la vérité des prix vis-à-vis des consommateurs. Quand vous vendez une brique de lait 0,72 euro, il n'y a pas de rémunération pour les producteurs. Donc c'est un travail de tous les jours d'arriver vers le seuil qui est aujourd'hui le seuil de rentabilité entre guillemets, si on peut appeler ça rentabilité, en tout cas qui couvre les charges, qui est plutôt à 500 euros.

> Il faut qu'on prenne conscience collectivement qu'être en capacité de se nourrir soi-même, c'est une des premières des libertés. Les pays qui sont aujourd'hui dans une situation délicate, ce sont les pays qui ne peuvent pas satisfaire à l'alimentation de leurs populations. Pour être capable de produire pour nos citoyens, il faut une rémunération. Et c'est vrai que pendant 60 ans, quasiment le juste prix, c'était le prix le plus bas. Or, le juste prix, ce n'est pas ça. Le juste prix, c'est celui qui permet aux producteurs, aux transformateurs et aux distributeurs, le cas échéant, de se rémunérer. Donc, on a besoin de faire un travail de conviction pour dire à nos concitoyens que l'alimentation a un prix.

> Il faut une pluralité d'installation [des agriculteurs] et que chacun puisse trouver sa place quel que soit le modèle. Deuxièmement, il faut quand même se mette d'accord. La France n'est pas un modèle agro-industriel. J'invite à aller voir en Belgique, j'invite à aller voir en Pologne, j'invite à aller voir à l'extérieur de nos frontières. Vous verrez ce qu'est qu'un modèle agro-industriel. Ne commençons pas par caricaturer ce qu'est le modèle français. Nous sommes ici dans une terre d'élevage. On est plutôt sur des élevages extensifs, parfois sur des modèles pastoraux. Donc le modèle français est plutôt atypique dans l'espace européen. 
Il faut que l'ensemble des modèles puissent trouver leur place. Les sujets de la formation et de l'innovation sont importants. Il y aussi la problématique financière, car même des exploitations de taille moyenne, je pense à un élevage laitier, demandent aux jeunes de mettre beaucoup d'argent. Vous vous investissez, vous empruntez pour 10, 15 ou 20 ans. Vous n'êtes pas sûr d'avoir la rémunération. Donc évidemment, c'est un frein. Donc il faut qu'on travaille là-dessus. Ce sera l'objet de la loi d'orientation. 
Si on veut attirer des jeunes, il faut arrêter la remise en cause de l'agriculture et du modèle agricole français. Si vous passez votre temps à dire que le métier que font les agriculteurs, il a tous les défauts de la terre alors qu'il a beaucoup de vertus en termes de biodiversité, de préservation de nos territoires, de qualité des produits qui sont faits évidemment, vous n'attirez pas les jeunes. Vous ne pouvez pas attirer un jeune si vous lui dites le métier que je vous propose n'est pas un beau métier. Or, c'est un beau métier.

 

Christophe Béchu (ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires)
> L’urgence climatique est là. Elle nécessite que la sobriété ne soit pas le mot d’ordre uniquement pour l’hiver prochain. Notre pays est celui qui a engagé les sommes les plus importantes afin de protéger ses citoyens. Le bouclier tarifaire que nous avons instauré vaut pour la totalité des ménages mais aussi pour les offices HLM et il couvre le dépassement des factures. Pendant ce temps, en Angleterre ou dans des pays européens comme les Pays-Bas ou l’Allemagne, on a multiplié par deux, par trois ou par quatre le montant de la facture énergétique. Voilà qui montre la réalité de notre effort.

> Notre premier effort, sur le plan européen, était de tenter d’obtenir la réforme du marché de l’électricité, c’est-à-dire le découplage du prix de l’électricité de celui du gaz afin de baisser les tarifs sans que le bouclier tarifaire s’applique aux rentes de certains énergéticiens, lesquels seront reçus demain par Agnès Pannier-Runacher et par Bruno Le Maire.
S’agissant de l’effort en direction des entreprises et des collectivités locales, la baisse des tarifs destinée à éviter le remboursement de sommes indues constitue le premier étage du dispositif. Le deuxième étage, c’est une contribution qui passe par la captation de la rente, le troisième, c’est la rénovation publique des bâtiments, au-delà des efforts menés dans le cadre du plan de relance.
> Nous travaillons cet automne pour préciser les mécanismes permettant d’assurer une rénovation thermique des bâtiments aussi bien de l’État que des collectivités territoriales. L’objectif est de conjuguer la nécessité de passer l’hiver et celle de nous inscrire dans un processus d’atténuation de l’urgence climatique.

> Accélérer la transition écologique pour répondre aux engagements climatiques de notre pays, préserver l’habitabilité de la planète et enrayer le déclin de la biodiversité : voilà les axes principaux de la feuille de route qui m’a été assignée par la Première ministre. Le lancement d’un premier chantier a eu lieu il y a quelques jours. Le choix de Marseille n’était pas totalement étranger à votre présence dans cette ville. Le chantier sera suivi d’une vingtaine d’autres, en vue d’établir, à la fin de cette année, une feuille de route de la planification écologique qui, conformément aux engagements du président Macron, sera présentée par la Première ministre.
Où en sommes-nous ? À la minute où nous parlons, nos émissions de gaz à effet de serre ont baissé de 23 % par rapport à 1990. Le rythme de cette baisse a doublé au cours du dernier quinquennat – en s’établissant à 12 % contre un peu plus de 5 % sous le quinquennat précédent –, et nous devons encore le doubler pour être au rendez-vous des engagements que notre pays a signés. Pour ce faire, nous lancerons en parallèle plusieurs conférences avec des parties prenantes, non pour établir un diagnostic mais pour arrêter les mesures qui seront présentées, avec un budget et avec un calendrier, à la fin de l’année. Chaque grand secteur émetteur sera concerné à la hauteur de ses émissions : le transport pour 30 % l’agriculture, l’énergie, l’industrie, la consommation, sans oublier la préservation de la biodiversité, laquelle ne doit pas être l’angle mort de notre politique de décarbonation.

 

François Braun (ministre de la Santé et de la Prévention)
> Le Président de la République a souhaité que l’on débatte de la fin de vie dans notre société. Avant même d’être une question médicale, c’est effectivement une question de société, et il est souhaitable que tout le monde puisse s’exprimer sur le sujet.
Si les soins palliatifs sont souvent rattachés à la question de la fin de vie, il faut tout de même également les envisager comme un épisode de soins à passer face à d’autres problèmes. L’habitude que l’on a d’accoler systématiquement soins palliatifs et fin de vie contribue probablement à leur mauvaise image.
Les soins palliatifs relèvent du ministère de la santé et de la prévention. Je vous rejoins sur le fait que ces soins palliatifs sont insuffisamment enseignés dans le cadre des études de santé. Si la situation s’est améliorée puisqu’il existe maintenant des enseignements spécifiques, ces derniers doivent encore être développés.
Je vous rejoins également lorsque vous dites que les soins palliatifs sont insuffisamment développés sur notre territoire ; nous y travaillons. Pour cela, il faut aussi des soignants formés aux soins palliatifs. Le plus dangereux serait que certains de nos concitoyens décident de mourir parce qu’ils ont mal physiquement ou psychologiquement du fait que les soins palliatifs ne sont pas assez développés.
En tant que ministre de la santé et de la prévention, je souhaite également donner la parole aux soignants. Ce sont souvent eux qui sont présents au dernier moment auprès des citoyens qui souffrent. Il faut aussi entendre leur parole lorsqu’on propose non plus de donner la vie, mais peut-être de donner la mort. C’est un débat de société important.

 

Jean-Christophe Combe (ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées)
> [Tribune : « Le débat sur la fin de vie ne doit pas nous conduire à considérer que les personnes vulnérables sont un poids »]
L’honneur d’une société se mesure à la place qu’elle accorde aux plus fragiles. Bien vieillir, bien mourir, les débats parfois se confondent et, face aux artisans de confusions, il faut y mettre de l’ordre. Conformément aux engagements qu’il a pris devant les Français, le président de la République vient d’ouvrir deux débats essentiels. Le premier sur le « bien vieillir », le second sur la « fin de vie ».
Ces deux débats se rejoignent en cela qu’ils interrogent le regard que la société porte sur les vulnérabilités et sur les moyens qu’elle se donne pour les accompagner. Ces deux débats se distinguent en cela que notre choix collectif sur la fin de vie ne pourra pas être le symbole de l’échec d’une société qui ne saurait pas prendre soin et accompagner les plus vulnérables.
Pour dire les choses clairement : le débat sur ce qu’est la liberté de choix face à la mort ne devra pas nous conduire à considérer collectivement que les personnes vulnérables sont un poids ou, pire encore, à pousser les personnes vulnérables à le penser. Elles sont tout le contraire : des richesses.
En 2030, un tiers de la population française aura plus de 60 ans. En 2060, les plus de 85 ans seront trois fois plus nombreux qu’aujourd’hui et en 2070, les centenaires dix fois plus nombreux. Ce n’est pas un simple « vieillissement de la population », c’est une transition démographique qui est en train de changer le visage de notre société.
Face à cela, il y a trois façons de réagir. Le déni : par peur ou par mépris, on ignore, on invisibilise, on maltraite. C’est humainement insupportable et politiquement irresponsable. Le conflit des générations : par simplisme ou ressentiment, on sépare, on compare, on oppose. Comme s’il fallait choisir entre le soutien à notre jeunesse et l’accompagnement de nos aînés. Et il y a enfin la voie que nous empruntons : l’anticipation enthousiaste d’un fait de société dont nous devons relever les défis autant qu’en saisir les opportunités.
Le défi d’abord d’en faire l’affaire de tous. Les enjeux du vieillissement concernent toutes les dimensions de la vie en société : logement, mobilité, santé, sports, urbanisme, numérique, etc. C’est donc une mobilisation générale dont nous avons besoin, et cela dès l’enfance. Car « bien » vieillir commence dès la naissance et l’entretien tout au long de la vie de notre santé et de notre regard positif sur le vieillissement. Le prévenir et changer de regard sur les vulnérabilités sont nos priorités. Faire reculer l’âgisme en changeant nos regards, c’est d’ailleurs le thème de la « Semaine bleue » qui se tient en ce moment pour nous rappeler tout ce que les retraités apportent à la société.
Le défi ensuite de répondre à l’aspiration d’une majorité de Français qui souhaitent pouvoir vieillir chez eux. C’est pour cela que le gouvernement soutient financièrement l’adaptation des logements et la transformation des Ehpad pour en faire des centres de ressources gériatriques au service du maintien à domicile. C’est pour cela que nous devons mieux reconnaître et soutenir les aidants. Que nous devons collectivement amplifier nos mesures de soutien aux métiers du « bien vieillir », pour attirer et fidéliser des professionnels compétents, mieux rémunérés et reconnus. Chacun doit prendre ses responsabilités : l’État, les collectivités, les opérateurs, les formateurs. Personne ne réussira seul.
Les opportunités sont tout aussi nombreuses. Celle de bâtir une société plus engagée : un tiers des bénévoles associatifs sont des retraités, 55 % des maires avaient plus de 60 ans en 2020 et combien de grands-parents sont indispensables à la solidarité familiale et à la transmission de savoirs, de souvenirs et d’expériences. Les enjeux du vieillissement peuvent être aussi de formidables terrains d’innovation et de création d’emplois.
Bâtir une société dans laquelle chacun vieillit bien n’est pas qu’une question technique ou financière, c’est une question de société, c’est une question d’autonomie et de lien social. Être autonome, c’est pouvoir choisir là où on veut vivre et y être protégé. Les violences et les maltraitances sont inacceptables que ce soit dans les rues de Cannes, chez soi ou en Ehpad. Être autonome, c’est aussi être reconnu dans son pouvoir d’agir. Ce n’est pas parce que les gens vieillissent qu’on doit penser à leur place !
Être en lien, c’est se sentir utile, au sein de sa famille, d’une association ou de son quartier, c’est pouvoir travailler jusqu’à l’âge de la retraite en prévenant les maladies chroniques sur un marché du travail qui ne rejette pas les seniors. Être en lien, c’est pouvoir participer à la vie de la cité en étant visible, représenté et écouté.
L’honneur d’une société se mesure à la place qu’elle accorde aux plus fragiles. Le débat sur la « fin de vie » comme celui sur le « bien vieillir » doivent donner la parole aux premiers concernés, à celles et ceux qu’on n’entend pas et à celles et ceux qui en prennent soin. Ils sont une magnifique occasion de changer de regard sur la vulnérabilité pour en comprendre toute la richesse. De faire émerger une société plus humaine et plus solidaire, dans laquelle chacun compte, chacun est important. Des 1000 premiers au dernier jour de sa vie.

 

Gabriel Attal (ministre délégué chargé des Comptes publics)
> Il faut continuer à accompagner les entreprises face à l’explosion du prix de l’énergie.
N’en déplaise à certains qui le contestent parfois sur ces bancs, soutenir les entreprises, c’est soutenir l’économie française, c’est soutenir les Français qui travaillent et qui veulent pouvoir continuer à travailler et conserver leur emploi. Nous l’avons fait depuis le début de cette crise et nous continuerons. Le bouclier tarifaire qui bénéficie à 1,5 million d’entreprises qui réalisent moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires et emploient moins de dix salariés, sera prolongé.
Les entreprises qui sont au-dessus de ce seuil sont évidemment très inquiètes de l’envolée des prix. Vous pouvez les rassurer, car nous sommes d’abord mobilisés pour obtenir une baisse des prix sur le marché. Bruno Le Maire est présent à une réunion du conseil pour les affaires économiques et financières, le conseil ECOFIN, en vue d’avancer au niveau européen afin que le marché européen de l’électricité évolue pour faire baisser les prix.
Deuxièmement, nous avons mis en place un fonds de 3 milliards d’euros pour accompagner les entreprises auxquelles vous faites référence. Nous avons commencé à assouplir les critères et nous cherchons à continuer. En tout état de cause, elles peuvent se rendre sur le site impots.gouv.fr où un simulateur leur permettra de vérifier si elles peuvent demander une aide allant jusqu’à 50 millions d’euros pour les plus grandes entreprises.
Enfin, oui, il faut accompagner nos concitoyens qui se chauffent avec des pellets de bois. C’est la raison pour laquelle, à la demande de la Première ministre, nous travaillons sur un nouveau dispositif. A priori, nous retiendrons les mêmes critères que pour le fioul, parce que nos concitoyens qui se chauffent au bois ont fait ce choix de transition pour des raisons tant écologiques qu’économiques et que nous avons la responsabilité de les accompagner.

 

Roland Lescure (ministre délégué chargé de l’Industrie)
> [Supposée inefficacité des sanctions prises à l’encontre de la Russie] Il y a quelques mois, les sanctions tout court étaient mises en doute ; aujourd’hui, ce sont les sanctions sur le gaz que l’on discute. Or comme il n’existe pas de sanctions sur le gaz, c’est au tour des sanctions sur l’énergie d’être contestées. Parmi les sanctions qui ont été prises depuis le 31 mai dernier, l’embargo sur le pétrole russe a eu un impact significatif sur l’économie russe, sans véritablement affecter l’économie française. Le prix du pétrole a ainsi diminué de 20 à 30 dollars, baisse qui a été accompagnée d’efforts importants, matérialisés par le rabais à la pompe.
Il est clair que l’économie russe subit une forte récession. La Première ministre et la ministre des affaires étrangères l’ont rappelé, le PIB de la Russie s’est réduit de 6 % en 2022. C’est considérable. Le gouvernement russe lui-même admet que l’économie du pays aura reculé au moins de 3 % cette année – on s’attend à 4 % de récession supplémentaire en 2023 ! L’inflation en Russie s’établit aujourd’hui à 15 %. Ajoutons que des chiffres ont été calculés avant la mobilisation générale qu’a déclarée Vladimir Poutine, laquelle n’aura sans doute pas d’impact positif sur l’économie russe. On voit l’effet qu’elle a déjà eu en constatant le nombre de sorties du territoire, et je ne parle même pas du « moral des troupes ». Il faut le dire et le répéter : les sanctions ont bien un impact. On nous dit trop souvent que l’économie russe n’est pas affectée par les sanctions alors qu’elle l’est fortement !
Notre engagement aux côtés du peuple ukrainien dans ce conflit ne se fait pas sans peine pour notre économie. Les industries dont j’ai la charge sont considérablement touchées par la hausse du prix des énergies.
Sous l’autorité de la Première ministre, le ministre de l’économie et moi-même travaillons à résoudre ce problème. Bruno Le Maire sera d’ailleurs ce soir et demain au Luxembourg pour négocier avec nos partenaires européens des mesures d’atténuation de la hausse du prix des énergies sur les industries européenne et française. Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, se trouve à Bruxelles depuis vendredi et y restera encore quelques jours pour s’assurer que le marché de l’énergie fonctionne davantage et que les prix de l’énergie baissent de manière durable. Reconnaissons que les efforts ont été accomplis, la plupart d’entre vous les ont même votés.
Sur l’augmentation des tarifs de l’électricité et d’autres énergies qui pèsera sur les Français l’année prochaine, la hausse des tarifs sera cinq fois inférieure à celle enregistrée à peu près partout en Europe. Nous avons prévu d’accompagner les ménages les plus modestes pour les aider à absorber cette hausse.
La France soutient son économie ; cela a été voté ici, soyons-en fiers ! Nous devrons faire davantage d’efforts, mais la situation actuelle est aussi le coût à payer pour aider les Ukrainiens et préserver la paix.

> Concernant les entreprises françaises qui ont choisi de rester en Russie. Sur ce point, je serai extrêmement prudent et éviterai de donner des leçons. Chacun peut avoir ses idées ; certaines seraient sans doute anticonstitutionnelles, parce que confiscatoires, d’autres ne pourraient clairement s’envisager que dans un cadre européen. (…)
Les entreprises citoyennes doivent le rester. Mais attention aux idées qui pourraient, j’insiste, être anticonstitutionnelles et affaiblir nos entreprises par rapport à d’autres acteurs européens ou affaiblir des entreprises déjà affectées.
Concernant les entreprises françaises qui sont en Russie, notre credo est très clair : les sanctions prononcées par la communauté internationale, notamment par l’Union européenne, doivent être respectées – toutes les sanctions, rien que les sanctions ! On ne peut pas imaginer que des entreprises qui se trouvent aujourd’hui en Russie ne respectent pas la loi. Au-delà, veillons à ne pas montrer du doigt les entreprises fragilisées et celles qui sont peut-être déjà en train d’organiser leur sortie du territoire russe. Une chose est claire : celles qui ont déjà quitté la Russie n’ont pas fait d’argent au passage et ont sans doute subi quelques pertes – c’est le modèle de l’entreprise citoyenne.
Certaines entreprises organisent encore leur départ. En septembre, Capgemini et Air Liquide ont annoncé l’abandon de leurs activités en Russie, décision qui concerne des centaines d’employés. Capgemini a même proposé à ses employés un accord afin qu’ils puissent travailler à Lisbonne, ce que certains employés russes ont accepté. Bref, ne montrons pas du doigt les entreprises présentes en Russie qui affrontent déjà une situation extrêmement difficile. La décision de rester sur place relève de leur seule responsabilité, qu’elles engagent face à leurs actionnaires, avec un enjeu relatif à leur réputation et à leur implication, et tous les risques que cela comporte.
Mesdames et messieurs les députés, soyons fiers de ce que la France et son économie ont fait pour soutenir l’Ukraine. Merci à tous et à toutes d’avoir participé à ce débat.

 

Olivia Grégoire (ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme)
> L’inflation lissée sur un an atteint 5,8 % ; l’inflation des prix alimentaires, elle, atteint 7,7 %. L’inflation est plus forte sur les prix alimentaires, c’est vrai. C’est pourquoi nous travaillons sans relâche pour protéger non seulement les producteurs et les agriculteurs, mais aussi les consommateurs et les artisans. (…)
Faut-il en faire plus ? Certainement. Nous continuerons de travailler sur ce sujet. Conjointement avec Marc Fesneau, j’anime toutes les semaines le comité de suivi des relations commerciales Egalim et Egalim 2. C’est toutes les semaines que nous appelons à la responsabilité la grande distribution, dont une partie prend effectivement ses responsabilités.

> Nombre de nos boulangers souffrent. Nous nous efforçons de mettre au point un mécanisme européen pour mieux les protéger. Les boulangers, souvent constitués en très petites entreprises (TPE), sont protégés par les tarifs réglementés de vente (TRV). Aujourd’hui, 1,5 million de TPE bénéficient d’une sorte de bouclier tarifaire, du même acabit que celui qui protège les ménages. Même si les boulangers souffrent, il est important qu’ils contactent leur fournisseur d’énergie pour s’assurer de leur éligibilité au TRV. Cela peut paraître technique, mais ce n’est pas un élément de langage. Le TRV protège 1,5 million d’artisans.

Charlotte Caubel (secrétaire d’Etat chargée de l’Enfance)
> [Délégation aux droits des enfants à l’Assemblée nationale] Avec la création de cette délégation transpartisane, vous envoyez un message clair aux enfants et aux jeunes de notre pays sur la priorité qui leur sera désormais accordée dans les travaux de l’Assemblée. Vous envoyez également un message aux acteurs et aux professionnels du secteur de la protection de l’enfance : ils ont besoin de votre confiance pour maintenir leur engagement, dont nous savons tous combien il est important. Je me tiens évidemment à la disposition des membres de la délégation aux droits des enfants pour travailler avec eux au quotidien.
> Concernant la contractualisation entre l’État et les départements dans le domaine de la protection de l’enfance. Je peux, à ce stade indiquer que soixante-dix-neuf départements ont d’ores et déjà signé avec l’État ou sont sur le point de le faire. En trois ans, nous avons réussi à renforcer la coopération entre l’État et les départements en matière de protection de l’enfance, ce dont nous pouvons nous féliciter. Nous avons ainsi développé des actions très concrètes, en particulier dans le champ de la santé.
Nous devons toutefois aller plus loin, je le sais, en renforçant encore davantage cette coopération dans les territoires. Nous avons déjà eu l’occasion d’en parler ensemble : je souhaite, en particulier, renforcer la coordination de l’État avec deux acteurs importants, l’éducation nationale et la justice, qui participeront à l’avenir à la contractualisation avec les départements, car leur action est indispensable pour protéger nos enfants.

Laurence Boone (secrétaire d’Etat chargée de l'Europe)
> Nous agissons contre la hausse des prix de l'énergie ! Les ministres de l'énergie de l'UE se sont réunis vendredi pour prendre des mesures européennes.
- décision sur les économies d'énergie : les États membres se sont engagés à réduire la demande d'électricité de 10 %, notamment aux heures de pointe, en plus de l'engagement pris en juillet de réduire la demande de gaz de 15 %.
- décisions solidaires : partage des revenus pour les producteurs d'électricité capables de produire à bas coût (plafond de 180 €/MWh) ; mettre en place une contribution de solidarité sur les entreprises qui extraient des énergies fossiles et mènent des activités de raffinage.
La France veut aller plus loin pour réduire les prix de l'énergie :
- étendre le système en Espagne et au Portugal à toute l'Europe pour réduire le prix moyen de l'électricité de 100 €/MWh pour tous les Européens.
- plafonner le prix du gaz et mutualiser nos achats de gaz au niveau européen pour garantir les meilleurs prix.
- repenser notre marché de l'électricité pour que les prix de l'électricité en Europe ne dépendent plus des énergies fossiles importées.

> [Guerre de Poutine contre l’Ukraine] Les sanctions marchent très bien en Russie, on affaiblit l'économie et leur capacité de se réarmer.

> [Répression des manifestations des femmes en Iran] l'Union européenne discute de sanctions pour toutes les personnes qui sont impliquées dans ces violences.

 

Assemblée nationale
Yaël Braun-Pivet (présidente)
> [Déclaration devant les députés] La semaine dernière, j’ai conduit à Varsovie puis à Kiev une délégation transpartisane de notre assemblée. Avec Valérie Rabault, première vice-présidente, chargée des affaires internationales, que je salue, M. Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères, M. Thomas Gassilloud, président de la commission de la défense nationale et des forces armées, et M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes, sans oublier Anne Genetet, députée des Français de l’étranger et, en particulier, des Français d’Ukraine, nous sommes allés dire l’appui indéfectible de l’Assemblée nationale française à l’Ukraine et à son peuple.
Cet appui s’est manifesté depuis le premier jour. Certains ici ont encore en mémoire le visage du président Zelensky s’adressant au Parlement sur les écrans de cet hémicycle. Quelques semaines plus tôt, dès le 1er mars 2022, nous débattions déjà de la guerre en Ukraine. Elle n’a pas cessé depuis de nous préoccuper. Je tiens à saluer depuis ce perchoir mon homologue, Rouslan Stefantchouk, président de la Rada. Il nous a accueillis deux jours durant et accompagnés.
À ses côtés, notre délégation s’est rendue sur le terrain, au contact des Ukrainiens. Représentants de nos nations respectives, notre place est auprès des gens car nous avons en commun, quels que soient nos pays et quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, le fait de les aimer et le devoir de les servir. À Tchernihiv, nous avons vu les immeubles éventrés, les visages creusés, les vies brisées ; nous avons vu aussi la formidable résistance des Ukrainiens, leur détermination à se battre contre l’agresseur russe et, déjà, les premiers efforts de reconstruction, auxquels la France s’honore de participer. Nous avons promis d’en être les témoins et les messagers, comme nous avons promis au président Zelensky et au président Stefantchouk de mener avec eux la bataille de l’opinion publique en Europe.
En tant que responsables politiques, nous avons le devoir de rappeler inlassablement à nos concitoyens que le combat que mènent les Ukrainiens est celui de nos valeurs, celles de la démocratie, de l’humanisme, de la liberté et de la civilisation européenne. Qu’il s’agisse de notre assemblée, de notre pays, de notre Europe, tous, nous avons le devoir de les soutenir et de condamner fermement cette intolérable agression militaire de la Russie, qui a fait bien trop de victimes et d’exilés. Tous, nous avons le devoir d’empêcher des récits autres que la vérité prospérer parmi nos concitoyens.
Pour que le soutien de l’Assemblée nationale à l’Ukraine continue de s’inscrire dans la durée, nous avons souhaité que nos deux chambres signent un protocole d’accord pour développer des coopérations techniques et des échanges d’expériences, échanges qui seront également utiles dans le cadre du processus d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. J’invite solennellement chacun d’entre vous à se saisir de ce protocole et à faire vivre cette coopération renforcée avec nos amis de la Rada.

Partis politiques

● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes et se considèrent de droite ou de gauche ne sont pas retranscrits]
Aurore Bergé (présidente du groupe à l’Assemblée nationale)
> Pour Méline, tout a commencé par ce qu’elle appelle « une petite gifle ». « Puis les coups ont continué. Un coup de poing, puis deux. Quand mon compagnon rentrait avec un problème de travail, c’est moi qui prenais le soir. On reste pour les enfants. On se dit que ce n’est pas possible. Que ça ne va pas recommencer. »
Alexandra, elle, est restée vingt-neuf ans avec son bourreau. Au bout de la première année, pour elle aussi, ça a commencé par une gifle. « Après, c’était des coups de poing, des coups de botte, j’ai été défigurée. Alors moi, je le dis aux femmes : dès que vous recevez une gifle, allez porter plainte. Il ne faut pas avoir peur ; même des fois, par amour, on ne veut pas le faire. Mais il y a des institutions, des associations, des personnes qui sont là pour nous aider. »
Depuis plusieurs semaines, on loue la vertu de celui qui reconnaît des faits de violence conjugale. Depuis plusieurs semaines, on entend ceux qui parlent de leur « affection » pour un homme qui frappe sa femme. Depuis plusieurs semaines, on fait fi des règles élémentaires de l’État de droit. On jette le discrédit sur les femmes et les hommes, policiers et gendarmes, qui, au péril de leur vie, interviennent après des signalements de violences conjugales.

On jette le discrédit sur l’institution judiciaire.  On jette en fait des dizaines d’années de combat de nos associations, qui ont permis aux victimes d’être accompagnées par la seule voie susceptible de mettre un terme à leur souffrance : la voie judiciaire.
Je crois que ce sujet appelle le calme et non le trouble ou le désordre. Il mérite mieux que des esclandres et je suis navrée que vous vous reconnaissiez si bien dans les propos que je viens de tenir. Est-ce que tout fonctionne aujourd’hui,? La réponse est non. Mais est-ce que des progrès ont été accomplis ? La réponse est oui. C’est le conjoint violent qui doit quitter le domicile. Nos policiers, gendarmes et magistrats sont formés. Les dépôts de plainte sont facilités jusque dans nos hôpitaux. Les téléphones grave danger (TGD) sont déployés.

Alors oui, nous devons faire mieux. Et cela commence par nos attitudes, les mots que nous employons. Ça commence par le respect des victimes et le fait d’être au clair avec notre État de droit.

> [Intervention à l’Assemblée nationale] Mon premier mot s’adresse aux Ukrainiennes et aux Ukrainiens attaqués, blessés, violés, tués. Le 24 février dernier, Vladimir Poutine et son gouvernement ont décidé, seuls, et délibérément, de violer la Charte des Nations unies et d’attaquer un pays libre et souverain. Désormais, ils prétendent annexer de force des pans entiers de l’Ukraine. Nous le disons clairement ici : jamais nous ne reconnaîtrons les résultats des référendums d’annexion de quatre régions ukrainiennes. C’est pour moi, purement et simplement, un « nationicide », la négation même de l’idée de nation.
Depuis le début, le peuple ukrainien se bat courageusement pour son intégrité, sa liberté et son identité. Dans ce combat, ce n’est pas seulement leur terre qu’il défend, mais aussi nos valeurs et celles de l’Union européenne : la paix, la liberté et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, autant de valeurs que le régime de Poutine veut réprimer.
Mais, contrairement à 2014, lors de l’annexion de la Crimée, l’Union européenne a su répondre de façon forte et unanime face à l’agression préméditée de la Russie. Sous la présidence française de l’Union européenne, nous avons adopté un paquet de sanctions économiques, politiques et financières d’une ampleur inédite. Notre présidence a su défendre l’idée de l’autonomie stratégique européenne. Nous avons exprimé sans ambiguïté notre soutien à l’Ukraine et à son effort de guerre, notamment grâce à des mesures économiques et des livraisons militaires importantes. Comme vous l’avez souligné, madame la Première ministre, nous avons également accueilli les réfugiés de guerre ukrainiens, par solidarité, en cohérence avec nos valeurs et dans le respect de la Convention de Genève.
Affirmons-le : la solidarité avec le peuple ukrainien, c’est l’honneur de la France. Nous refusons de croiser les bras devant l’impérialisme russe.
Certains – et nous les entendons jusque dans l’hémicycle – appellent désormais à remettre en cause ces sanctions, affirmant qu’elles sont inutiles, et voudraient ainsi que l’invasion d’un État souverain et la mort de milliers de personnes restent sans conséquence.
En sanctionnant la Russie, nous affaiblissons son économie, et donc son effort de guerre. Le PIB russe recule ainsi d’ores et déjà et le pays est en récession. La Russie ne peut plus importer de technologies pour ses industries ou emprunter sur les marchés. À ceux qui se font le relais de sa propagande, je pose donc la question : si les sanctions étaient si inefficaces, pourquoi Poutine chercherait-il désespérément à les faire lever ?
Certains, ici, jouent avec les peurs de nos concitoyens. Ils trouvent des solutions toutes faites, considèrent que la France et l’Europe sont responsables de la crise que nous vivons parce qu’elles ont choisi de défendre la liberté du peuple ukrainien, et donc nos valeurs.
La Russie nous combat sans pudeur, en déployant sa propagande dans les médias et sur les réseaux sociaux, en planifiant des cyberattaques sur nos installations, en s’attaquant à notre sécurité alimentaire, au prix de l’énergie, à la sécurité nucléaire, et c’est nous qui serions coupables ? À celles et ceux qui accablent sans cesse l’Union européenne, je dis : envoyez plutôt vos doléances au Kremlin ! Parlez directement à vos créanciers !
Les faits sont là, documentés, illustrés, précis, incontestables. C’est en Ukraine que les villes se font détruire à coups de mortier : Marioupol en est le triste symbole. C’est en Ukraine que déferlent des soldats russes : avez-vous vu des troupes ukrainiennes en Russie ? C’est en territoire ukrainien que sont dénoncées chaque jour des exactions de l’armée russe, allant de l’exécution sommaire au viol et à la torture. Et c’est en territoire ukrainien que l’on déterre, dans des charniers, des dizaines de corps humains.
Remettre en cause l’existence de ces crimes, c’est du négationnisme. Tôt ou tard, les autorités russes auront à répondre de ces crimes de guerre. Il n’y a pas si longtemps encore, d’une extrême part à l’autre de l’hémicycle, on entendait vanter le modèle politique russe. Quel modèle ? Celui où la population est embrigadée de force dans une guerre à laquelle elle s’oppose ? Celui qui organise des référendums fantoches pour annexer des terres et des peuples contre leur gré ? Celui qui emprisonne, réprime, élimine toute forme de protestation ? Quelle parodie de démocratie ! C’est peut-être votre modèle, mais ce n’est certainement pas le nôtre.
Vous pouvez continuer à fermer les yeux, à vous boucher les oreilles : même si la France n’est pas en guerre, ce conflit nous touche dans notre économie et notre quotidien. À ceux qui, au sein de cet hémicycle, prétendent que nous ne protégeons pas les Français de ses effets économiques, je pose la question : qui prolonge la réglementation des tarifs de l’électricité ? Pas vous. Qui a versé un chèque énergie à des millions de ménages ? Qui a adopté la loi du 16 août 2022 pour la protection du pouvoir d’achat ? Pas vous ! Oui, la guerre a des conséquences. Notre majorité et le Gouvernement se sont, dès le début, mobilisés pour y faire face ; ils continueront aussi longtemps que nécessaire.
Nous le disons haut et fort : jamais nous ne céderons au chantage ni aux menaces de Poutine. Quant à ceux qui persistent à se gargariser de son régime, je les invite à se rappeler le premier mot de notre devise nationale. Mesdames et messieurs les députés, la liberté n’est pas un vain mot que l’on se contente d’invoquer lors des meetings, mais un principe à faire vivre, à défendre quand il est en péril !  C’est là tout le sens du soutien que, depuis le premier jour de la guerre, la France apporte à l’Ukraine et à son peuple – un soutien au sujet duquel notre groupe n’a jamais connu ni ne connaîtra la moindre ambiguïté.

 

Benjamin Haddad (porte-parole du groupe à l’Assemblée nationale)
> [Intervention à l’Assemblée nationale] Nous sommes réunis aujourd’hui pour débattre du soutien à l’Ukraine. Mais à travers l’Ukraine, c’est de la France que nous parlons : de son rôle dans le monde, de sa mission et de son intérêt national.
Nous soutenons l’Ukraine, parce que la France est toujours grande quand elle est avec les nations qui luttent pour leur liberté. Le jeune capitaine de Gaulle le savait quand il combattait en 1920 aux côtés des troupes de Pilsudski pour l’indépendance de la Pologne face à l’URSS ; le général de Gaulle aussi qui, comme François Mitterrand, était avec nos alliés dans les grandes crises de Cuba ou des euromissiles.
« L’Ukraine a toujours aspiré à être libre », disait Voltaire dans son Histoire de Charles XII – cette Ukraine qui a connu le génocide de l’Holodomor, les famines organisées par Staline sur son sol, cette Ukraine qui vota à 90 % pour son indépendance en 1991 et dont les jeunes sont morts pour le drapeau européen à Maïdan. Ces Ukrainiens se battent aujourd’hui pour leur liberté face à l’impérialisme.
Nous soutenons l’Ukraine, parce que nous défendons notre sécurité et nos intérêts. Nous n’avons pas choisi cette guerre. Nous avons tenté de l’empêcher par la diplomatie. Le Président de la République n’a cessé de dialoguer avec les présidents Zelensky et Poutine : il a fait entendre la voix de la France quand tant d’autres avaient abandonné. C’est le président russe qui a tourné le dos à la diplomatie, choisi la guerre, puis l’escalade en mobilisant son peuple et en violant le droit, une fois de plus, avec l’annexion illégale de territoires.
La seule façon d’arrêter cette guerre est d’aider l’Ukraine à se défendre, d’acculer la Russie pour mettre fin à l’agression, d’imposer un rapport de forces. Soyons clairs : si nous n’avions pas soutenu l’Ukraine, cette guerre aurait été plus meurtrière, plus longue et plus étendue sur l’ensemble du territoire ukrainien.
Si nous cédions aux intimidations de Poutine, au chantage nucléaire, si nous imposions un arrêt des combats au moment où les Ukrainiens contre-attaquent, la paix et la stabilité arriveraient-elles comme par magie ? Ne soyons pas naïfs : la faiblesse invite à l’agression. Imaginez un cessez-le-feu avec reconnaissance des annexions : le régime de Poutine prendrait le temps de réarmer, profiterait de la levée des sanctions pour se refaire et lancer une nouvelle attaque contre Kiev.
Poutine ne conteste pas l’élargissement de l’Otan ou le statut du Donbass, mais l’existence même de l’Ukraine. Pour s’en convaincre, il suffit de le lire et de l’écouter. L’histoire nous apprend d’ailleurs que la paix ne vient jamais avec la soumission à l’agression.
Pourtant, les voix de la défaite s’élèvent. Ce sont toujours les mêmes : une colonne de capitulards prêts à se coucher devant la force. Ce qui les dérange, c’est que les démocraties libérales résistent, tiennent. Pendant des années, ils ont répété avec Poutine et Orban qu’elles étaient faibles, exsangues et décadentes. Ils espéraient que l’Ukraine s’effondrerait et que les Européens se diviseraient. Ils sont fidèles à ceux qui les ont précédés. « Pourquoi se battre pour un petit pays si lointain dont nous savons si peu ? » se demandent-ils comme Neville Chamberlain à Munich. « Mourir pour Dantzig, non ! » s’exclament-ils comme Marcel Déat en 1938.
Si nous les avions écoutés, nous serions actuellement les alliés de la Russie. Si nous les avions écoutés, nous serions sortis du commandement militaire intégré de l’Otan et nos alliés prendraient sans nous des décisions majeures concernant cette guerre. Est-ce cela, être souverain ? Si nous les avions écoutés, nous n’aurions pas élargi l’Otan, laissant plus de nations – comme les pays baltes – en proie à l’agression.
Si nous les avions écoutés, nous n’aurions pas livré d’armes, puisque la défaite de l’Ukraine était inéluctable et que nous ne devions pas devenir cobelligérants, comme ils aimaient à le répéter. Sept mois plus tard, nous ne sommes pas cobelligérants : pas un soldat français ne combat la Russie, et l’Ukraine se défend, contre-attaque et reprend du terrain. C’est l’honneur de la France d’aider les Ukrainiens à se défendre en livrant des armes, notamment des canons Caesar, et en formant les soldats ukrainiens. C’est l’honneur de la France de prendre ses responsabilités de nation-cadre en déployant des soldats en Roumanie aux côtés de nos alliés.
Ils se sont toujours trompés, à tous les tournants. Si nous les avions écoutés, notre continent serait plus dangereux, notre pays serait isolé et les Ukrainiens seraient abandonnés et assassinés.
Alors, il faut tenir. La guerre n’est pas finie. L’hiver sera dur, a prévenu le Président de la République. Notre stratégie fonctionne, mais quand l’histoire est tragique, les dénouements faciles et rapides n’existent pas. Restons calmes. Gardons notre sang-froid. En difficulté sur le terrain, la Russie voudra nous diviser, nous voir céder au chantage, elle redoublera de manipulations et aura chez nous ses relais qui instrumentaliseront les peurs des Français.
La France doit continuer d’incarner sa voix pour la sécurité du continent. Les prochains mois vont être décisifs. Face au retour de la guerre, montrons aux Ukrainiens, aux Européens et au monde que la France tient son rang et assume sa puissance, qu’elle guide l’Europe dans ce moment de crise.
Livrons plus d’armes à l’Ukraine pour qu’elle se défende, reprenne son territoire et gagne la guerre. Livrons-lui plus d’armes pour dire à la Russie et au monde que l’agression ne paie jamais. Livrons-lui plus d’armes pour que nos frères européens, polonais, lituaniens, estoniens ou roumains sachent que la France est toujours avec eux, que l’Europe se protège et les protège face aux menaces à nos frontières.
Chaque jour, les Ukrainiens meurent pour la liberté de l’Europe. Nous serons à la hauteur de leur sacrifice : nous ne faillirons pas, nous tiendrons.

 

Pieyre-Alexandre Anglade (député)
> [Guerre de Poutine contre l’Ukraine] j’ai vu de mes yeux l’horreur de cette guerre. Comme eux, j’ai admiré le courage et la force d’âme du peuple ukrainien et de ses plus hauts responsables politiques.
Nous avons rencontré ensemble le cœur battant de la résistance ukrainienne, le président Zelensky et ceux qui l’entourent, des femmes et des hommes qui, dès les premières heures de la guerre, étaient les cibles principales de Vladimir Poutine et qui auraient pu fuir mille fois mais qui ont fait le choix de rester aux côtés de leur peuple et de résister.
Lors de notre entretien avec le président Zelensky, il nous a remerciés pour le soutien actif qu’apporte d’ores et déjà la France à l’Ukraine mais il a aussi formulé plusieurs requêtes. Il nous a en particulier demandé de dire la vérité sur ce que nous avons vu et entendu. Voici donc la ou plutôt les vérités dont je souhaite témoigner aujourd’hui.
En Ukraine, la Russie de Vladimir Poutine ne se comporte plus comme une nation civilisée mais comme un État voyou menant une guerre d’une violence inouïe, niant tous les principes humanitaires. Partout où l’armée russe passe, elle sème la désolation, la souffrance et la mort, frappant en priorité les infrastructures civiles : les écoles, les hôpitaux et les habitations sont visés. Les soudards, les hommes de main – parce que l’on ne peut plus les appeler, à proprement parler, des soldats – qui la composent pillent, pratiquent la torture, violent femmes et enfants, assassinent sans raison, organisent les enlèvements d’enfants.
La vérité c’est qu’Izioum, Marioupol et Boutcha ne sont malheureusement que des théâtres d’atrocités parmi bien d’autres et que, dans chacun des villages libérés, on trouve des salles de torture. La question ne se pose même plus de savoir s’il y a eu ou non des crimes de guerre. Il y a pléthore de ces crimes. Mais les mots décrivant l’horreur ne peuvent suffire. Je veux vous dire à quel point il est important que nous restions mobilisés, que la France et l’Europe restent mobilisées dans leur soutien à l’Ukraine.
Ce soutien est d’autant plus nécessaire que la volonté de puissance du président russe ne semble plus connaître de limite. Car qui peut croire, après son dernier discours transpirant la haine à l’égard de l’Occident, qu’il limitera ses velléités impérialistes à l’Ukraine ? En organisant des simulacres de référendums, en laissant planer la menace nucléaire, la Russie a franchi une étape supérieure dans sa volonté de semer la terreur et de s’emparer, par la force, de territoires qui ne lui appartiennent pas.
Mais ne nous y trompons pas. Cette annexion en grande pompe et ces menaces ne font que révéler l’échec du projet de Vladimir Poutine sur le terrain et sur le théâtre du monde car la Russie est de plus en plus affaiblie et isolée. Preuve, s’il en fallait, que les livraisons d’armes permettent aux Ukrainiens, non seulement de résister mais de contre-attaquer et de gagner des batailles. Preuve que les sanctions européennes affaiblissent considérablement l’effort de guerre russe.
Quelle sera l’issue de cette guerre odieuse ? Nul ne le sait encore mais je reviens de notre déplacement avec une conviction forte : l’Ukraine peut gagner cette guerre, elle en a la détermination absolue et le courage. C’est la raison pour laquelle il est nécessaire qu’avec nos partenaires européens, nous poursuivions les livraisons d’armes et les sanctions. En outre, chez nous, il faut opposer un front uni en faveur de l’Ukraine, sans rien céder aux valets de Poutine qui, jusqu’au sein de cet hémicycle, se font les relais honteux de sa propagande ou qui le soutiennent sans le dire, ce qui est pire encore.
La France, avec ses partenaires européens, a eu raison d’opter pour le soutien à l’Ukraine. Si nous avions écouté Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon qui, en février dernier, main dans la main, refusaient ce soutien, les Russes seraient à Kiev depuis longtemps.
Lorsque nous entendons, cet après-midi encore, les représentants du Rassemblement national et de La France insoumise réécrire l’histoire de cette guerre, inverser les responsabilités pour dédouaner Vladimir Poutine, on ne peut qu’éprouver un sentiment de honte et se réjouir qu’ils ne soient pas aux responsabilités. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
S’opposer aux livraisons d’armes, lever les sanctions comme ils le demandent, ce n’est pas favoriser la paix.  Ce n’est rien d’autre qu’abandonner l’Ukraine aux mains de la Russie et mettre en péril toute la sécurité de l’Europe. N’en déplaise au président du Rassemblement national, non seulement son parti entretient des liens avec la Russie mais, pire encore, il en est le soutien.
Oui, la défense de nos valeurs démocratiques a un prix. Il est déjà élevé. Les Ukrainiens le paient en destructions et en morts. Nous aurons à le payer économiquement. Cependant, si nous ne sommes pas prêts à payer ce prix maintenant pour l’Ukraine, au nom des valeurs des nations civilisées qui fondent notre pays et l’idéal européen, alors les générations futures devront payer un prix infiniment plus élevé.
Le président Zelensky a demandé que nous n’abandonnions pas l’Ukraine. Je souhaite qu’il sache, s’il nous écoute, que nous sommes à ses côtés et aux côtés de son peuple. Qu’il sache aussi que son pays est déjà membre de cœur de notre Union en raison du combat acharné qu’il mène pour la liberté et la démocratie. C’est pourquoi je suis convaincu que l’avenir de l’Ukraine et celui de la France et de l’Europe s’écriront en commun.

 

Jean-René Cazeneuve (député)
> [Loi de programmation budgétaire 2023-2027] On est dans une logique de dialogue. J'espère que les députés LR et PS reviendront à la raison et voteront cette loi de programmation dont nous avons absolument besoin. Elle va être présentée en hémicycle. Si elle était rejetée ce serait assez grave parce que c'est un document très important pour notre crédibilité européenne. C'est l'engagement de la France sur sa trajectoire sur 5 ans de ses finances publiques. Dans cette loi, nous expliquons comment nous arrivons à réduire notre déficit. (…) C'est un outil de pilotage pour le gouvernement, pour les députés. Je suis très surpris du rejet de certains partis. Je crains que ce ne soit pas un bon signal. LR et le PS sont dans l'ombre de partis plus importants, ils sont dans une fuite en avant, et ce n'est pas un vote de responsabilité de leur part. On a vraiment besoin de cette loi de programmation.

> J'ai le sentiment que les LR votent de plus en plus comme le Rassemblement national et que le Parti socialiste vote de plus en plus comme la France insoumise.

 

Constance Le Grip (députée)
Notre assemblée commence cette session automnale par un acte politique fort : un débat sur l’Ukraine, voulu par les députés de la majorité présidentielle. Nous avons voulu ainsi réaffirmer haut et fort notre soutien et notre solidarité totale à ce pays agressé, notre engagement sans faille à ses côtés. L’Ukraine est un pays libre, indépendant, au destin européen, dont la souveraineté et l’intégrité territoriale ont été violées par l’armée russe au service du régime de Vladimir Poutine.
Notre débat se déroule quelques jours après l’annexion illégale de quatre oblasts ukrainiens – Donetsk, Louhansk, Zaporijjia et Kherson – et un discours du président russe que je décrirais comme à charge, violemment belliqueux, anti-Occident, aux relents souvent nauséabonds.
Au même moment, les forces armées russes connaissent des déconvenues sévères sur le terrain. Elles reculent et battent en retraite, notamment depuis la reprise de la ville stratégique de Lyman par les valeureuses troupes ukrainiennes. D’aucuns commencent même à envisager un début de débâcle. Nous sommes donc à un moment important de cette guerre cruelle menée en Ukraine par l’armée russe, et les semaines à venir seront décisives.
Dès le 24 février, l’Union européenne s’est montrée unie pour condamner sévèrement cette agression brutale et déterminée à prendre de lourdes mesures de rétorsion à l’encontre de la Russie. Pas moins de sept trains de sanctions ont été pris, la plupart sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
Citons l’embargo sur l’essentiel du pétrole et du charbon russes, l’exclusion de nombreuses banques russes du système Swift, le gel des avoirs de la banque centrale russe en dehors de la Russie, le gel des avoirs de très nombreux oligarques et de Vladimir Poutine, la fermeture de l’espace aérien européen, de nos ports et de nos routes, l’interdiction des ventes d’avions et d’équipements, l’accès très strictement limité à certaines technologies industrielles sensibles, l’interdiction de diffusion dans l’Union européenne des « médias » Russia Today et Sputnik, considérés comme des organes de propagande du Kremlin.
Un huitième train de sanctions est en cours de discussion, en réponse aux référendums fictifs, fantoches, et à la menace des dirigeants russes d’utiliser certaines armes nucléaires.
Ces sanctions ont un coût, un prix pour nos concitoyens, pour les Européens, pour les habitants d’un très grand nombre de pays. Dans le monde, mais aussi chez nous, les conséquences de cette guerre se font sentir durement – et même parfois dramatiquement – sur les plans énergétique, économique et alimentaire.
Cependant, ne nous y trompons pas : les sanctions produisent leurs effets en Russie. On constate des pénuries généralisées d’approvisionnement et l’effondrement de nombreuses productions industrielles. Le départ des entreprises internationales a entraîné des faillites en cascade parmi les entreprises russes. Le PIB russe a reculé de 6 %. Le mythe d’une économie russe résiliente s’est évanoui.
Ensuite, nous ne devons pas confondre les causes et les conséquences. Qui peut encore défendre l’idée que l’invasion de l’Ukraine par la Russie ne justifie aucune sanction, aussi éprouvantes que puissent être les sanctions pour nos populations ?
En envahissant l’Ukraine, en y poursuivant sa guerre cruelle, la Russie, membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, met en cause les principes les plus fondamentaux de l’ordre international, viole la Charte des Nations unies et, de ce fait, méconnaît totalement sa responsabilité historique.
Elle nourrit la logique de conflictualité et de confrontation, accentue la fragmentation du monde et aggrave partout la menace contre la paix.
Il n’y a pas de paix sans justice. Le chef de l’État français l’a rappelé à la tribune de l’Assemblée générale des Nations unies. Je conclurai donc en rappelant l’engagement sans faille de la France dans la lutte contre l’impunité. Notre pays apporte un appui constant aux enquêtes menées en Ukraine, y dépêche du personnel, y consacre des moyens, mobilise des enquêteurs parfaitement spécialisés. C’est là une notion très importante, et même essentielle : pas de paix sans justice. Nous le devons à l’Ukraine – une Ukraine libre, indépendante et européenne – et à la paix dans le monde.

 

Nicolas Metzdorf (député).

« Et maintenant, messieurs, pourquoi avons-nous réussi à arrêter la guerre, au moment même où elle semblait prête à se déchaîner ? […] Parce que nous avons négocié comme des hommes pour lesquels la négociation n’était pas seulement une phase inévitable de ce grand drame international, mais le véritable chemin de la paix ». Il y a quatre-vingt-quatre ans, en 1938, à cette place, dans cette assemblée, Édouard Daladier prononçait ces mots qui résonnent tragiquement dans l’histoire. Il rentrait de Munich où, en guise de négociation, il avait avalisé le découpage de la Tchécoslovaquie. Il pensait avoir sauvé la paix et l’honneur, mais bientôt l’Europe allait de nouveau s’effondrer.
Ce rappel des heures les plus sombres de notre histoire et cette comparaison avec la situation que nous vivons actuellement ne sont pas fortuits. Nous devons en tirer les leçons, à savoir qu’il n’y a de paix possible que lorsque l’agresseur n’a plus d’autre choix que de se soumettre.
Depuis le 24 février, la France apporte son soutien indéfectible à l’Ukraine et aux Ukrainiens. Ce soutien qui nous honore tous est plus que jamais nécessaire, maintenant que, sans vergogne et au mépris de toutes les conventions internationales et des valeurs humaines, Poutine pense pouvoir annexer les territoires d’une nation souveraine. Le soutien de la France permet à l’Ukraine de tenir et de résister à l’agression, engrangeant des succès qui montrent le courage et la détermination de tout un peuple.
Mais surtout, il s’est aussi levé en France une armée de l’ombre – une force silencieuse que l’on n’entend ni ne voit. Cette force citoyenne s’est mobilisée pour aider, pour accueillir et pour soutenir celles et ceux qui ont fui la guerre et leur pays. Jamais l’hébergement citoyen ne s’était autant manifesté en France que ces derniers mois. Dans cette crise sans précédent, une telle réaction fait aussi notre honneur et mérite d’être soulignée. Cette mobilisation a permis d’accueillir avec humanité plus de 100 000 Ukrainiens sur notre sol – et le chiffre croît chaque jour.
N’oublions pas la mobilisation des services de l’État, qui a permis de scolariser plus de 18 000 enfants dans l’école de la République. Quatre-vingts pour cent des réfugiés sont des femmes ayant fui avec leurs enfants. Que nous disent-elles, ces mères qui ont tout quitté ? En réalité, peu de choses. Mais la plupart, avec une tragique pudeur qui masque leur tristesse, confient que leur mari est mort, que leur frère a disparu ou que leur fils se bat encore.
Depuis la fin de l’hiver dernier, les élus, les fonctionnaires, les associations et surtout les citoyens se sont levés pour subvenir aux besoins de ce peuple en souffrance qui trouve sur notre sol une part de réconfort et d’espoir. Ces Français, j’ai pu les rencontrer au cours de ces derniers mois en tant que rapporteur pour avis sur la mission Immigration, asile et intégration du projet de loi de finances pour 2023. Je les salue. Surtout, je les remercie pour leur engagement et pour le courage dont ils font preuve au quotidien.
« La France n’a jamais été plus grande que lorsqu’elle combattait pour les autres », disait Malraux.
Elle est grande aujourd’hui. Résister à Poutine, ce n’est pas seulement repousser l’armée russe, c’est aussi protéger l’Europe. C’est permettre aux Ukrainiens réfugiés sur les sols européens – sur le nôtre en particulier – de garder leur dignité et l’espoir de retrouver un jour leur foyer. Il nous appartient donc désormais à nous, membres de la représentation nationale, d’être à la hauteur du peuple français.
Personne ici ne se fait d’illusion sur les desseins de Vladimir Poutine, sur ses ambitions folles de construire une Grande Russie ni sur sa volonté de détruire l’Occident, ce que nous incarnons et les valeurs humanistes des Lumières que nous défendons. Face à ce péril, il n’y a qu’une seule chose à faire : faire bloc – pour l’Ukraine, pour la France, pour l’Europe et pour le monde. Je sais pouvoir compter sur vous, car sur ces bancs, c’est aussi la France de Malraux qui siège.

 

Charles Sitzenstuhl (député)
Ce débat relatif aux conséquences pour la France de la guerre en Ukraine est l’occasion de nous interroger sur notre débat démocratique. Comme nombre de Français, je m’interroge depuis longtemps sur ces femmes et ces hommes politiques, dont certains siègent parmi nous, qui se disent patriotes et défenseurs de l’indépendance nationale alors qu’ils prêchent depuis des années un catéchisme étranger conçu au Kremlin et déclarent sans aucune retenue leur admiration pour un chef d’État étranger, Vladimir Poutine, dirigeant d’un régime autoritaire, belliciste et antieuropéen, dirigeant qui souhaite affaiblir nos démocraties par la force et la subversion. Cette si longue complicité idéologique de l’extrême droite avec le pouvoir russe interpelle. Pourquoi tant d’éblouissement pour le régime poutinien ? Pourquoi tant de haine contre notre modèle démocratique européen ? Pourquoi passer son temps à vomir sur la diplomatie française et sur la politique étrangère française, à remettre en cause les positions du chef de l’État français et à critiquer les décisions du Conseil européen tout en se montrant toujours si clément, si compréhensif, si bienveillant avec Moscou ?
Même si nous le savons tous, il faut le redire : un parti politique – le Front national, devenu Rassemblement national – et ses deux présidents successifs, Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen, ont été pendant des années les promoteurs du régime russe en France. Qui se pavanait à Moscou dans les années 1990 et 2000 avec des leaders nationalistes russes proches du Kremlin ? M. Le Pen. Qui déclarait en 2011 dans la presse russe : « […] j’admire Vladimir Poutine. […] Je ne peux qu’être inquiète quand je vois que notre président – il s’agissait à l’époque de Nicolas Sarkozy – tourne le dos à la Russie » ? Mme Le Pen.
Qui a écrit dans son livre en 2012 : « […] notre intérêt national est de renouer l’alliance traditionnelle avec la Russie pour contrebalancer l’impérialisme exacerbé d’une Amérique (…) cherchant à obtenir l’endiguement de cette puissance renaissante » que serait la Russie ? Mme Le Pen. Et puisque Mme Ménard a fait référence tout à l’heure aux années 1930, je me demande d’ailleurs, quant à moi, de quelle « alliance traditionnelle avec la Russie » il est question. Où était cette alliance traditionnelle lorsque les Russes s’entendirent avec l’Allemagne nazie pour la laisser envahir notre pays en 1940 ? De quelle alliance traditionnelle avec la Russie s’agissait-il quand l’URSS, que Vladimir Poutine regrette tant, a bâti le pacte de Varsovie pour faire face à notre alliance, l’Otan, dont nous sommes un pays fondateur ?
Qui a reconnu l’annexion illégale de la Crimée par la Russie en 2014 ? M. et Mme Le Pen. Qui a dit en 2015 après l’assassinat de Boris Nemtsov : « J’ai confiance en la justice russe (…) » ? Mme Le Pen. Qui a déclaré en février 2017 : « Mais il n’y a pas eu d’invasion de la Crimée » ? Mme Le Pen.
Qui a été reçu par Vladimir Poutine, au Kremlin, en tête-à-tête, en mars 2017, en pleine élection présidentielle, et y a présenté son « point de vue sur l’Ukraine qui coïncide avec celui de la Russie » ? Mme Le Pen. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quel génie, enfin, a affirmé en février 2022 : « Je ne crois pas à une invasion russe en Ukraine » ? Mme Le Pen.
Je pourrais continuer ainsi, pendant des heures, à passer en revue toutes les références du catéchisme russo-lepéniste – il y en a tellement ! Le RN pourra nier, éluder, se contorsionner, enfumer les débats par des prises de position hypocrites, faire semblant de pleurer sur le sort de l’Ukraine comme ses représentants l’ont fait aujourd’hui, il pourra essayer de faire oublier ses turpitudes, mais nous serons toujours là pour rappeler sa si longue et aveugle soumission à la Russie poutinienne. Nous ne laisserons pas le président intérimaire du Rassemblement national proférer des menaces publiques contre les personnes qui oseraient rappeler ses années de collaboration idéologique avec la Russie, si largement documentées par la presse et les journalistes français. Ce qui se joue en Ukraine est bien trop grave pour l’avenir du continent européen pour que nous nous taisions.
Le président russe a envahi l’Ukraine, mais chacun sait que c’est bien sur tout l’Occident démocratique qu’il a placé une cible. Nous continuerons à démasquer les faux patriotes et les hypocrites. Nous serons aux côtés des Ukrainiens, aux côtés des alliés et des amis véritables de l’Ukraine, et aussi aux côtés des Russes qui réprouvent l’entreprise guerrière menée par le régime de Moscou.
Soyons fiers de notre modèle démocratique européen. C’est ce modèle qui inspire les soldats ukrainiens qui se battent pour leur patrie et pour notre liberté collective.

 

Anne Genetet (députée)
En mars, je me tenais à cette même tribune pour dénoncer la décision unilatérale de la Russie d’envahir l’Ukraine. Sept mois plus tard, revenant tout juste de Kiev, je veux vous dire ceci avec insistance et avec la plus grande émotion : ne nous habituons pas à cette guerre. Elle qui a déjà volé des milliers de vies, qui a brisé des familles ukrainiennes et russes et qui laissera derrière elle des millions de déplacés et de réfugiés, et un pays à reconstruire.
Alors liberté, je veux dire ton nom, car au cœur de cette guerre inique se dresse un combat pour la liberté – liberté bafouée des citoyens ukrainiens ; liberté volée de leurs enfants ; liberté muselée des journalistes, des activistes et des manifestants en Russie, et liberté ignorée de leurs frères concernés par la mobilisation forcée ; enfin, liberté usurpée de populations et de territoires qui, dans un simulacre de démocratie, ont été récemment annexés.
Égalité, je dis ton nom. En envahissant l’Ukraine le 24 février, la Russie a agressé nos valeurs les plus chères, consacrées notamment par la Charte des Nations unies. La première d’entre elles, puisqu’il faut encore le rappeler, est l’égalité souveraine de toutes les nations, grandes et petites. C’est aussi la défense de l’égalité du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes qui doit unir la représentation nationale et tous ceux – en France et dans le monde – qui défendent l’idéal universel de la démocratie et de la paix.
Je pense ici aux communautés françaises d’Ukraine, mais aussi de Russie, qui vivent au plus près cette tragédie.
Fraternité, je dis ton nom. Fraternité de la France, d’abord, lorsqu’elle décide de conduire l’une de ses plus larges opérations humanitaires en affrétant un bateau pour l’Ukraine transportant notamment des éléments d’un pont qui sera reconstruit par la France dans l’oblast de Tchernihiv.
Fraternité de la France encore, lorsqu’elle envoie une nouvelle mission de gendarmes enquêteurs pour documenter les crimes commis à Izioum et à Kharkiv ; j’ai pu échanger avec eux et je salue leur très grande expertise.
Fraternité de notre parlement et de notre gouvernement, renouvelée lors des fréquentes visites effectuées en Ukraine et au gré des échanges entretenus avec nos amis ukrainiens.
Fraternité de nos concitoyens, enfin, des Français établis en Ukraine, en Pologne, en Roumanie et jusqu’en Australie. Je les ai rencontrés : ils sont engagés corps et âme dans la solidarité avec les Ukrainiens. C’est de cela dont je peux témoigner.
De mon récent déplacement en Ukraine avec la présidente de l’Assemblée, je choisis de retenir une image forte : celle de nos peuples unis, fraternels et solidaires, face à ce drame absolu.
À nos élus et aux associations françaises présents sur le territoire de l’Ukraine, mais aussi de la Pologne et des autres pays limitrophes, contribuant à l’installation de dispositifs d’aide et d’hébergement, je dis merci !
Au réseau culturel français et à nos alliances françaises – j’ai une pensée particulière pour celles de Kharkiv et de Zaporijjia, toutes deux ouvertes aujourd’hui : merci !
À notre lycée Anne-de-Kiev, qui a rouvert ses portes en septembre, passant de 500 à 67 élèves seulement : merci !
À notre lycée Alexandre-Dumas de Moscou : courage !
Aux conseillers du commerce extérieur, à nos 160 entreprises encore présentes en Ukraine, dont beaucoup ont pu se mobiliser pour aider de multiples manières : merci !
À nos journalistes, qui continuent d’effectuer un travail exceptionnel dans des conditions particulièrement difficiles, et à notre compatriote qui a payé de sa vie la nécessité d’informer de la réalité et de la vérité de cette guerre : merci !
À nos diplomates qui agissent en première ligne, animés par l’indéfectible désir de rétablir la paix et de protéger nos concitoyens – et je veux ici saluer l’admirable Étienne de Poncins : merci !
Oui, merci à eux tous de faire vivre notre devise ; merci à eux tous d’avoir fait de la sincérité de leur engagement le relais de nos valeurs.
Au début du siècle dernier, le président Raymond Poincaré nous prévenait : « La paix est une création continue. » Alors permettez-moi, madame la présidente, de former le vœu que notre assemblée soit actrice de cette création, afin de soutenir, de reconstruire l’Ukraine et d’ouvrir la voie à la paix.
Que vive l’Ukraine libre ! Vive la République, et vive la France.

 

● MoDem
Perrine Goulet (députée)
> La création de la délégation aux droits des enfants est de nature à favoriser le retour de la confiance de nos concitoyens dans nos institutions. Je veux également remercier les membres de la délégation qui m’ont fait confiance en me confiant sa présidence.
Avec la création de cette délégation aux enjeux forts, je mesure le poids de la charge qui m’incombe : il me faudra insuffler l’énergie nécessaire pour que cette délégation fasse œuvre utile. Je sais que nous y arriverons car la question de la protection des enfants dépasse les clivages partisans. Or les sujets qui les concernent sont nombreux : le harcèlement, la pauvreté, l’éducation, l’utilisation des outils numérique, la prostitution, les violences intrafamiliales, la protection de l’enfance, l’enfant et la justice, et tant d’autres…

 

Frédéric Petit (député)

Le 24 février dernier, jour de l’invasion, j’avais ici même employé les termes de « guerre culturelle » et d’« anti-Europe ». Je voudrais y revenir pour commencer mon intervention. Je représente les Français d’Europe centrale, aux premières loges de ce conflit, mais je représente aussi le Franco-Allemand, le Franco-Allemand profond, ancien et en plein renouveau, le Franco-Allemand solide, le Franco-Allemand citoyen.
Il y a bientôt quatre-vingts ans, les ruines étaient encore fumantes. Au sortir de l’horreur, des villes entières avaient encore faim et froid l’hiver. La région de la Sarre était encore française, et devait l’être douze ans de plus, en proie à des tensions communautaires parfois violentes. Le Bade-Wurtemberg n’était pas allemand, mais une zone d’occupation. C’est alors, dans ce contexte de tensions, que ces ennemis héréditaires qu’étaient la France et l’Allemagne, en un contre-pied génial au déterminisme et aux nationalismes étriqués, fondèrent la Communauté européenne du charbon et de l’acier, un modèle unique de réconciliation par le faire-ensemble, sur les terres belligènes de notre chère Europe.
Oui, nos territoires sont belligènes et le resteront. Comment en serait-il autrement ? Sur un isthme assez contraint, tant de nations, de peuples, de religions, de systèmes administratifs, de langues, d’alphabets même, tant de systèmes de valeurs, de nostalgies contradictoires, se sont entrecroisés et s’entrecroisent encore. Après tant de migrations, lentes ou rapides, récentes ou anciennes, spontanées ou contraintes, chacun est aussi légitime que son voisin, voire que son colocataire, si différent qu’il soit.
Deux modèles tentent de répondre à cette question posée depuis des siècles à notre Europe : un modèle impérialiste, rétrograde, souvent violent, qui promeut la domination d’une nation sur les autres, et un modèle coopératif qui prône « l’unité dans la diversité », tourné vers des défis communs et supérieurs. Ce modèle s’appuie sur une gestion humaniste des conflits indispensables à la diversité européenne. Pour lui, l’histoire est un débat scientifique et un outil de rapprochement, l’avenir de la planète est un sujet commun et urgent.
Les masques sont désormais tombés en ce qui concerne la Russie. L’histoire devient une arme au service de l’état-major de l’agresseur, les soldats ne sont plus des citoyens avertis, la langue devient un oukase. Tant que l’impérialisme moscovite se concentre sur sa propre survie, alimente sa nostalgie, comment pourra-t-il affronter les vrais défis du XXIe siècle – la défense de la planète, la lutte contre les inégalités ? Comment pourra-t-il participer, de près ou de loin, à un effort commun ?
On nous accuse souvent d’utiliser de grands mots ; on prétend que le terme de « valeurs » ne pèse rien face à l’hiver qui arrive et aux intérêts réels de nos concitoyens. Pourtant, la guerre rend concrète, évidente, tangible, cette confrontation de modèles, cette confrontation de valeurs. Non, nos valeurs ne relèvent pas d’une novlangue destinée à cacher l’anti-France ou encore la guerre sociale.
Le modèle désormais défendu sans masque par le régime de Moscou, c’est l’assignation à résidence permanente : assignation à résidence dans une langue, dans un récit historique. Les dernières parodies de référendum l’ont prouvé, ces assignés à résidence n’ont même plus besoin d’être chez eux pour que l’empereur leur impose son choix. Nous sommes revenus au temps de Gogol : ce ne sont plus les âmes mortes que l’on fait participer au scrutin, mais les âmes enfuies, les familles réfugiées et déplacées, dont on nous explique qu’elles ont voté.
Fidèles à notre modèle, nous nous battons au contraire pour l’émancipation, contre l’assignation à résidence. L’Union européenne n’est pas l’arrangement tranquille des heures de paix, elle n’est pas une vieille idée avachie de fin de banquet électoral. Cette guerre nous le rappelle. L’Union européenne, c’est une méthode permanente de règlement humaniste des conflits inhérents, voire nécessaires, aux territoires européens. C’est une idée jeune, parfois incomprise. C’est une organisation qui se trompe et commet parfois des fautes, c’est vrai. Mais c’est une idée vitale, indispensable à la diversité européenne, et qui demande à présent de la vaillance de notre part, face aux agressions qu’elle subit, à l’escalade de la violence et au tourbillon de bas instincts qui la menacent.
Défendre cette ligne, ce n’est pas être va-t-en-guerre. C’est être lucide sur ce qu’une paix durable exige de vaillance. Ce n’est pas être « va-t-en-guerre », mais être « bats-toi-pour-la-paix ». Quand bien même ce n’est pas notre guerre, c’est notre confrontation.
Quelles conséquences pour nos concitoyens ? Pour notre rôle de parlementaires français ? Gardons-nous tout d’abord de l’arrogance. Nous avons besoin d’un langage de vérité, et non de certitudes ou de divisions. Ce n’est pas l’arrogance qui permettra la lente construction d’institutions démocratiques fiables, mais l’entraide, la franchise, et toujours le respect.
Si Poutine est en difficulté sur le plan militaire, il est encore efficace sur le terrain politique. Il met à l’épreuve notre constance à défendre nos valeurs, notre modèle et notre avenir. Alors que l’hiver s’annonce difficile et que des partis politiques, par calcul électoral ou par soumission intellectuelle, voudraient mettre un terme aux sanctions et à l’aide à l’Ukraine, il nous faudra tenir notre cap et nos engagements. Il faut poser clairement la question au Rassemblement national : devons-nous abandonner les sanctions économiques contre un régime qui, par exemple, déporte des milliers d’enfants et de civils ukrainiens pour les russifier ? Cela ne serait conforme ni à nos valeurs, ni même à notre intérêt.
Nous, députés du groupe Démocrate, avons annoncé très clairement notre position dès le premier jour et n’avons jamais tergiversé : nous sommes favorables au renforcement des sanctions à l’encontre du régime de Moscou. Nous devons, de plus, nous engager dans la reconstruction de l’Ukraine. Cette reconstruction concerne du dur, des bâtiments bombardés souvent sans raison tactique, des maisons, des hôpitaux, des écoles, des routes, des ponts, des infrastructures… Elle consiste aussi à remettre en place des administrations fragilisées depuis longtemps par l’ancienne bureaucratie ou encore la corruption, à recréer des circuits de finances publiques et collectives. Oui, nous devons commencer à reconstruire, participer de façon assumée à cette reconstruction !
De fait, outre la fourniture de moyens militaires, les Ukrainiens nous demandent de participer à la reconstruction, et plus encore : lors de nombreuses visites et rencontres, mes interlocuteurs ukrainiens m’ont davantage parlé de modernisation que de simple reconstruction. Ils assument la fragilité de leur démocratie récente, les dysfonctionnements, leurs divisions ; ils ne souhaitent pas reconstruire à l’identique, dans un grand bricolage plus ou moins humanitaire, ni maintenir les mêmes processus. Ils veulent que nous les aidions à moderniser et à transformer, à rendre leurs pratiques publiques plus transparentes et plus efficaces. Cela, je l’ai entendu dire par des gouverneurs de région, des responsables d’association, des maires, des directeurs d’école ou d’hôpital.
Or, nous avons, en France et dans l’Union européenne, des outils qui permettent de lutter contre la corruption et de promouvoir la libre et juste entreprise, de combattre l’endoctrinement des médias et de favoriser une citoyenneté éclairée, de lutter contre l’embrigadement et d’encourager l’émancipation dans les écoles.
Nous n’allons pas aider des « gentils » contre des « méchants » ; nous allons, sur un territoire de conflits, anciens et récents, développer et construire avec vaillance le seul modèle qui garantira, si nous y parvenons, que la fin de la guerre d’aujourd’hui ne sera pas à l’origine de celles de demain.
Il y a, au cœur de notre action, un enjeu critique, dramatique : les enfants d’Ukraine sont l’avenir de ce pays. Nous devons donc aider le système scolaire à rester en vie, maintenir le lien des enfants ukrainiens réfugiés avec leur pays, puis les y ramener dès que possible, contribuer à les éduquer et multiplier les échanges scolaires, comme nous l’avons fait entre Français et Allemands. Nous devrons par ailleurs faire notre possible pour que reviennent de captivité ceux que le régime russe a kidnappés et déportés – il n’y a pas d’autres mots.
Il s’agit, non pas du geste d’un grand frère en faveur d’un petit frère, de nations dominantes en faveur de prétendus esclaves ou colonisés, mais de la lente construction d’une coopération dans laquelle l’Ukraine apportera à la communauté ses forces, celles que l’on connaît – son agriculture – mais aussi celles auxquelles on pense moins, comme la décarbonation de l’énergie ou la numérisation de l’état civil, qui est une réussite dans ce pays.
C’est notre manière de faire, notre modèle de coopération, la boussole européenne dans le fracas du monde : planifier, structurer et faire ensemble dès aujourd’hui pour vivre, demain, une paix durable et souveraine.
Les Ukrainiennes et les Ukrainiens se battent pour leur liberté, et pour la nôtre. Nous devons les soutenir ; nous devons, avec vaillance et courage, prendre la main sur la reconstruction, pour notre souveraineté et la leur.

 

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