Voici une sélection, ce 5 octobre 2022, des derniers propos tenus par des centristes dans les médias ou sur les réseaux sociaux en France.
► Emmanuel Macron (Président de la
République)
> [Déclaration à l'occasion du lancement de la grande consultation numérique
du Conseil national de la refondation]
Mes chers compatriotes, si je m’adresse à vous aujourd’hui, c’est pour vous
parler de cette nouvelle méthode que nous souhaitons mettre en place pour bâtir
ensemble, pour notre pays, à la fois plus de consensus, un cadre de pensée
d’action commun et aussi des solutions concrètes pour chacune et chacun d’entre
nous.
Durant les 5 dernières années, nous avons changé beaucoup de choses dans la vie
du pays. Évidemment par des textes de lois, par des décrets, par de l'action
publique, de l'action collective. Je veux ici à nouveau remercier nos
parlementaires, les services de l'Etat, nos élus qui n'ont cessé de contribuer
à cette transformation, en plus de la gestion des crises.
Nous avons aussi collectivement innové d'un point de vue démocratique avec le
grand débat qui, alors même que nous vivions une crise sociale sans précédent,
a permis d'aller à votre rencontre, grâce à nos maires partout sur le
territoire, et de dégager des propositions très concrètes qui nous ont permis
de changer les choses. C'est grâce au grand débat que nous avons changés
l'impôt sur le revenu, créé plus de 2.000 Maisons France services pour recréer
des services publics sur le territoire, que nous allons recréer des
sous-préfectures, je l'annoncerai dans les prochains jours, que nous avons
remis de la force d'action publique partout sur le terrain, que nous avons
décidé de rouvrir des petites lignes de chemin de fer, que nous avons aussi
décidé, et bien des choses très concrètes, par exemple pour les familles
monoparentales, c'est-à-dire souvent ces femmes seules qui élèvent leurs
enfants et qui ont en plus à essayer de retrouver un travail ou à bien vivre de
leur travail, par là aussi, des mesures fiscales et d'accompagnement très
concrètes.
Nous avons ensuite bâti, c'était une des conclusions du grand débat, cette
Convention citoyenne sur le climat qui nous a permis, non seulement ce travail
démocratique inédit, de faire avancer le débat public en matière de lutte
contre le réchauffement climatique et pour la biodiversité, mais aussi
d'arriver à un texte de loi inédit qui, grâce au travail aussi de nos
parlementaires et de nos administrations, est en train de nous permettre
d'améliorer très concrètement les choses. Accélérer la rénovation thermique des
bâtiments, l'amélioration de nos moyens de déplacement pour sortir
progressivement du carbone, un meilleur respect de la biodiversité en
protégeant contre l'artificialisation des sols ou en luttant contre l’usage
unique du plastique, qui va nous permettre de tenir nos objectifs et termes de
réduction de nos émissions de CO2 et de protection de la biodiversité.
Mais on a tous conscience que les choses ne vont pas assez loin, qu’il y a dans
notre démocratie quelque chose qui au fond n’est pas totalement abouti. Je le
formulerai en des termes simples. D'abord, le débat public, et nous l'avons vu
lors des dernières élections, continue de se faire autour de divergences très
profondes qui ne sont pas simplement des divergences d'idées mais parfois, nous
n'avons pas même pas la même vision de la nature, des problèmes et des faits.
La deuxième chose c'est que, je le sens à travers les courriers, les
déplacements, ce que vous me dites, il y a une volonté d'être associé, mais pas
simplement au moment des élections, pas simplement dans des temps de
délibérations, mais de participer à la prise de décision, d'être vous-mêmes des
acteurs de ce qu'est l'action publique, et de dire que le citoyen n'est pas
quelqu'un à qui on va imposer des décisions, à qui on va même proposer des
solutions sans être pleinement associé à la réponse.
Cette méthode différente, c'est celle que j'ai voulu porter en campagne avec ce
fameux «avec vous». C'est celle que j'ai voulu installer dès les premiers jours
de ce mandat et qui est au cœur du Conseil national de la refondation. Ce
Conseil national de la refondation, au niveau national, c'est ce que j'ai lancé
il y a quelques semaines à Marcoussis avec la Première ministre et plusieurs
ministres, réuni le Gouvernement, les forces syndicales, patronales, les forces
politiques, évidemment, l'ensemble des représentants de nos territoires et donc
des associations d'élus, mais également les forces vives de la société et donc
toutes celles et ceux qui représentent le monde associatif, nos ONG et les
différentes causes qu'ils portent, en plus, évidemment, des présidentes et
présidents des chambres qui sont prévues par la Constitution et du Plan qui a
vocation, là aussi, à mobiliser l'expertise dans la nation.
Cette première réunion, qui sera suivie d'autres, a pour vocation à se dire :
quels sont les faits? Quelle est la situation du pays sur le plan économique,
social, en termes de climat, de biodiversité, d'inégalités? Et de bâtir du
consensus, d'essayer de définir sur quoi les uns et les autres sont d'accord et
pas d'accord, mais d'essayer d'éviter les désaccords sur des faits qui sont
incontestables. Ensuite, nous sommes en train de définir des chantiers
nationaux, les grands éléments sur lesquels nous avons la conviction qu'il
faut, là aussi, avec toutes les parties prenantes que je viens de citer,
pouvoir construire des stratégies nationales sur les grands sujets que sont les
inégalités, que sont au fond, j’allais dire, les grands sujets de
transition.
La transition productive et celle du modèle social. La transition climatique,
c’est-à-dire la réponse au réchauffement climatique et à la biodiversité. La
transition démographique, c’est-à-dire le vieillissement de la population et
les réponses qu'il importe. La transition numérique, avec les changements de
comportement, d'organisation de notre production, les inégalités qu'ils
suscitent. La transition du travail, qui est un peu le fruit de tout
cela.
Tous ces grands sujets de transition, on doit les penser dans le temps long,
bâtir des stratégies nationales, et réussir à créer de la coopération entre les
acteurs.
Ce que je vous propose aujourd'hui, c'est de pouvoir changer les choses
ensemble : sur ces grands sujets, j'ai besoin que vous puissiez aussi prendre
part au travail du Conseil national de la refondation. Avec vous, qui portez
des idées de changement, qui imaginez des projets pour nos territoires, qui
avez des idées très concrètes, de pouvoir nous en faire part en les mettant en
commun, sur www.conseil-refondation.fr .
Rendez-vous dès maintenant sur cette plateforme. Choisissez les sujets qui vous
tiennent à cœur : l'écologie, l'école, la santé, la démographie, le
vieillissement, le travail… et participez pour contribuer à ce travail de
conception, pour apporter vos contributions plus personnelles, plus
approfondies, pour lever aussi de nouvelles questions.
Nous aider à bâtir dans le cadre de ce Conseil national de la refondation,
thématique par thématique, les projets, les travaux, nous inspirer
d'expériences locales, le faire en direct et en toute transparence pour nous
dire où sont vos réflexions, quelles sont vos contributions, quels sont les
premiers changements, les premières innovations, et nous faire partager les
choses pour que nous puissions avancer sur ces grands sujets.
À côté de cette participation sur notre plateforme :
www.conseil-refondation.fr, qui sera lancée dès aujourd'hui et pour laquelle je
compte sur vous, je voulais aussi vous dire qu'il y aura dès les prochains
jours deux immenses chantiers nationaux qui seront lancés partout sur le
terrain et de manière très concrète. Et là, ce n'est pas de la consultation, ce
n'est pas du débat, c'est de l'action.
Sur l'école et sur la santé, nous allons lancer un travail de refondation.
Notre école et notre santé où nous allons demander, partout sur le territoire
où les gens sont volontaires, pas d'obligation, de pouvoir se saisir de la
question, des questions clés qui se posent de manière très concrète.
Au niveau de chaque établissement scolaire qui le souhaite, de pouvoir mettre
autour de la table, sur le modèle de ce que nous avons fait avec «Marseille en
grand», les enseignants et enseignantes, les directrices et directeurs
d'établissement, les parents d'élèves, les élèves lorsqu'ils ont l'âge, le
monde associatif en charge du périscolaire, les élus et toutes celles et ceux
qui ont vocation à participer à l'éducation de nos enfants dans le temps
scolaire ou périscolaire. Se mettre autour de la table pour bien cibler les
objectifs, les difficultés auxquelles ils sont confrontés et les objectifs
qu'ils se donnent, et de pouvoir construire dans les semaines et mois qui
viennent, une feuille de route.
L'administration sera au service de ce travail de refondation. Les rectorats,
les équipes de l'administration centrale seront là, comme je l'ai expliqué aux
recteurs, pour vous appuyer, vous donner en quelque sorte la boîte à outils,
les instruments, vous aider à inventer les bonnes réponses pédagogiques.
Il y a des établissements où on n'arrive pas à bien enseigner les mathématiques
: il faut qu'on vous permette d'avoir le laboratoire qui convient, les méthodes
qui s’adaptent, peut-être échanger avec d'autres collègues. Il y a d'autres
endroits, c'est le temps périscolaire qui pose un problème, parce que les
enfants sont trop livrés à eux-mêmes, parce qu'on n'arrive pas à bien organiser
l'accompagnement ou les devoirs qui sont faits à la maison. Comment mieux
coopérer entre l'Education nationale, les bonnes associations? Comment
permettre de donner des perspectives aux parents? Il y a d'autres endroits,
d'autres niveaux où la clé sera. À chaque territoire, en plus évidemment de ce
qui est le cadre national, des objectifs, des problématiques. Donc il faut des
réponses différenciées et il faut permettre à nos enseignants pouvoir le faire,
c’est pour ça que j’ai décidé d’un nouveau pacte avec les enseignants, on va
les accompagner, mais aussi d’un fonds d’innovations pédagogiques qui permettra
très vite, de libérer de l’argent pour accompagner ces innovations
pédagogiques.
On commence dès maintenant et sur les premières demandes de propositions du
terrain, école par école ; dès le début d'année prochaine il y aura des
réponses concrètes et des choses qui changeront. À tel endroit, une salle qui
sera ouverte, à tel autre peut-être un poste d’accompagnant qui sera créé, du
temps qui sera libéré pour tel enseignant… c'est du changement à l'échelle
humaine, à l'échelle de vos vies, en temps réel, avec des financements qui sont
prévus.
Pour la santé, c’est la même démarche que nous allons lancer dès octobre. Nous
connaissons tous le problème des urgences qui débordent, un hôpital qui souffre
et des déserts médicaux. On a mis beaucoup de moyens, on continuera de le faire
dans les textes financiers qui arrivent. Mais au-delà de tout cela, la réponse
est au plus près du terrain. Nos professionnels de santé, qu'ils soient
soignants, paramédicaux, nos associations, nos élus, nos associations aussi de
patients : tous ont la même volonté. Les réponses, là aussi, doivent être
différenciées sur le terrain. Il y a certains de nos territoires où, pour
répondre à la problématique, il faut parfois avoir simplement deux semestres
d'étudiants, peut-être, du chef-lieu voisin ou de la capitale régionale pour
venir combler un manque à d'autres, il faudra trouver les moyens de convaincre
peut-être des professionnels de santé de reprendre des gardes. Dans d'autres,
il faudra retrouver une autre organisation entre l'hôpital et les libéraux qui
sont là. Il n'y a pas une réponse au niveau national. Il y en a en fait des
milliers, autant que de bassins de vie.
Ce que nous allons organiser, là aussi partout où les acteurs le veulent et ils
sont prêts, ce sont ces projets, notre santé, ou bassin de vie par bassin de
vie, on va permettre aux hospitaliers d'aller avec les libéraux, avec les
associations de praticiens, avec les Samu, avec déjà les fameux collectifs de
libéraux qui sont organisés – CPTS comme on le dit techniquement – permettre
aux acteurs de télémédecine, aux associations d’usagers, évidemment aux
pharmaciennes et pharmaciens, aux infirmiers, infirmières, aux
kinésithérapeutes, aux psychologues, aux psychiatres, à toutes celles et ceux
qui font notre santé, de se mettre autour d’une table et de faire pendant les
premières semaines le même bilan, au fond de la situation, un constat partagé,
et de voir où sont de manière très précise les points qui changeraient leur
vie.
Là aussi, de mettre nos agences régionales de santé, notre ministère de la
Santé au service de cette expression des besoins sur le territoire, et de
pouvoir apporter des réponses très différenciées. Parfois, on le sait très
bien, en changeant de toutes petites choses on change des vies. Nous allons
accompagner ce mouvement d’un formidable mouvement de transformation dans nos
hôpitaux, en permettant de redonner le pouvoir au niveau du service et en
redonnant le pouvoir, si je puis dire, en tout cas plus de responsabilité aux
soignants.
Cette révolution, ces révolutions de l’école et de la santé, je ne les ferai
qu’avec vous quand vous êtes concernés. Là aussi, je m’exprime au-delà de la
consultation de la plateforme, aux enseignants, aux parents d’élèves, aux
associations, à nos médecins, nos infirmiers, à nos pharmaciens, à nos usagers
: participez partout sur le territoire à ces grands travaux de refondation. Là,
ce ne sont pas des débats, ce sont des refondations profondes.
Dès la mi-octobre, nous lançons «Notre école et notre santé» dans le cadre du
Conseil national de la refondation. «Notre école et notre santé», c’est le
«avec vous» mis en œuvre. Nous tous, nous allons les refaire. Je compte donc
sur vous, avec beaucoup d’enthousiasme, de conviction, de force : participez à
la plateforme, aidez-moi à transformer le pays.
Aidons-nous à trouver de manière intelligente, tous ensemble, les bonnes
solutions, loin des postures, des conservatismes, loin des débats qui sont
parfois caricaturaux, mais en considérant tous que nous avons notre part
d’idées à prendre, d’initiatives, de changements très locaux. Nous pouvons
changer les vies si nous décidons de le faire. C’est le choix que j’ai fait, je
serai à vos côtés pour le faire, envers et contre tous les blocages. Vive la
République et vive la France !
► Gouvernement
[Nota: dans ce gouvernement, certains membres ne sont pas centristes; nous
retranscrivons cependant leurs propos en rapport avec leur fonction parce
qu’ils font partie selon nos critères d’une équipe qui suit une politique
globalement centriste]
Elisabeth Borne (Première
ministre)
> [Déclaration du Gouvernement relative à la guerre en Ukraine et aux
conséquences pour la France]
Il y a un peu plus de sept mois, par une attaque
illégale, brutale, meurtrière, la Russie a tenté d’envahir l’Ukraine. Beaucoup
alors pensaient que le pays ne tiendrait pas et que la puissance russe
l’emporterait rapidement. Sept mois plus tard, les combats durent toujours.
L’Ukraine progresse et la Russie se retranche dans le cynisme, la menace et le
chantage.
Mesdames et messieurs les députés, cette guerre n’est
pas seulement un conflit entre deux pays : c’est tout l’ordre mondial
d’après-guerre qui est remis en cause. La Russie a menti à la face du monde,
violé les lois internationales, et agite aujourd’hui la menace suprême.
L’Europe n’est plus une terre de paix et les armes y font à nouveau des morts,
des blessés, des déplacés. Certaines nations montrent qu’elles sont prêtes à
tout dans leur quête de puissance et, si nous laissons faire, le nouvel ordre
mondial qui s’ouvrira sera celui de la loi du plus fort.
Cette guerre, c’est une lutte pour nos valeurs.
Vendredi dernier, Vladimir Poutine l’a lui-même reconnu: c’est notre modèle
démocratique qu’il attaque, ce sont les droits de l’homme qu’il remet en cause.
Poutine n’accepte pas de voir la démocratie s’imposer peu à peu à ses
frontières; alors, il veut intimider et écraser ceux qui y aspirent. Le message
du Kremlin est clair: gare à ceux qui voudraient s’émanciper de son joug, gare
à tous ceux qui croient en autre chose que l’hégémonie russe.
Alors quand la liberté et la démocratie sont sous les
bombes, nous n’avons pas le droit de faiblir, pas le droit de louvoyer. La
France et l’Europe doivent être au rendez-vous. Cette guerre, c’est une leçon
de solidarité. L’agression violente et délibérée d’un État contre un autre, en
violation de toutes les règles internationales et de ses responsabilités
particulières de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, est
seule responsable de cette guerre et de ses conséquences.
Dans notre réponse face à la Russie, nous devons être
solidaires: solidaires des Ukrainiens qui risquent leur vie pour leur liberté;
solidaires, car pour être forts et efficaces, nous devons avancer unis avec
l’Europe, avec tous ceux qui partagent nos valeurs.
Le Président de la République l’a dit, ce conflit
engage notre responsabilité à tous. C’est un membre de la famille européenne
qui est agressé, ce sont nos valeurs qui sont attaquées. C’est notre
détermination face au nouvel impérialisme russe qui est éprouvée. Ce conflit
dure et durera ; ses conséquences sont concrètes et perceptibles dans toute
l’Europe et dans notre pays.
Aussi, comme je m’y étais engagée, je reviens
aujourd’hui devant vous, sept mois après le premier débat sur la guerre en
Ukraine dans cet hémicycle, pour un débat sur le fondement de l’article 50-1 de
notre Constitution.
Avant toute chose, je voulais avoir un mot pour le
peuple ukrainien. Les Ukrainiens répondent à l’assaut russe depuis sept mois.
Ils subissent les tirs, les bombes, comptent des blessés, des morts et ont tout
perdu pour certains, mais ils n’ont jamais renoncé, jamais baissé la tête. Leur
courage est exemplaire. Leur résistance, leur héroïsme même, forcent le
respect.
Avec le président Zelensky, avec le Premier ministre Denys Chmygal, avec les forces ukrainiennes, le peuple ukrainien combat pour sa liberté et je veux, avec vous, leur rendre hommage et devant vous, monsieur l’ambassadeur, leur dire notre indéfectible soutien.
Mesdames et messieurs les députés,
je commencerai en faisant un point sur la situation opérationnelle. L’agression
russe était illégale sur le plan du droit international et les méthodes
employées par la Russie sur le terrain le sont également.
Chaque jour, avec le plus grand cynisme, la Russie
repousse les frontières de la barbarie, elle fait usage des armes sans
discernement, en ciblant les civils, en visant des écoles, des hôpitaux, des
centres commerciaux, des convois humanitaires. Dans les territoires occupés, on
assiste à des transferts forcés de populations, enfants compris. Leur
libération s’accompagne de la découverte de nouvelles atrocités, comme à
Boutcha en avril ou à Izioum plus récemment. Ces images nous indignent, nous
choquent, nous révoltent. Elles témoignent de la réalité des opérations russes
et de ce que risque le peuple ukrainien. Ce sont autant de violations des lois
de la guerre, autant d’actes qui justifient d’agir, autant de monstruosités
dont la Russie devra répondre.
On note par ailleurs sur le front la présence de
Wagner, société de mercenaires qui prend ses ordres directement du Kremlin,
société qui emploie aujourd’hui des criminels russes pour venir combattre sur
le front, société dont les méthodes sont bien connues, comme en témoignent ses
exactions documentées en République centrafricaine et au Mali.
Enfin, les frappes sur la centrale nucléaire d’Ukraine
du Sud et l’occupation militaire de la centrale de Zaporijjia par les Russes
font courir des risques inconsidérés à l’Ukraine, à l’Europe et à la Russie
elle-même.
Nous sommes extrêmement préoccupés par la situation à
Zaporijjia. L’arrivée sur place d’une mission de l’Agence internationale de
l’énergie atomique (AIEA) est une première étape. Nous disposons désormais
d’informations en temps réel sur la situation et le risque nucléaire.
Cependant, l’information n’exclut pas le danger. C’est pourquoi nous soutenons
la proposition du directeur général de l’AIEA d’arrêt des tirs et de retrait du
matériel militaire de la zone : notre objectif, c’est la démilitarisation.
Nous sommes déterminés à ce que les crimes commis par
la Russie soient documentés, jugés et punis, condition essentielle pour le
retour d’une paix durable. Nous voulons y prendre part : nous avons décidé
d’une contribution exceptionnelle à la Cour pénale internationale et avons fait
don d’un laboratoire ADN mobile à l’Ukraine. Des experts de la gendarmerie
nationale ont également été dépêchés sur place pour collecter des preuves.
L’ambassade de France, qui n’a jamais fermé depuis le 24 février, est pleinement
mobilisée afin de faciliter ce travail essentiel.
Au-delà des lignes de front, la Russie agit sur tous
les champs : je pense aux cyberattaques ou encore à la multiplication des
fausses informations. Au moment où nous parlons, la Russie brandit la menace
d’utiliser toutes les armes à sa disposition. N’ayons aucun doute : elle est
susceptible d’aller plus loin dans l’illégalité et l’escalade.
Néanmoins, malgré les méthodes inacceptables de la
Russie, l’Ukraine tient bon. Elle est parvenue à arrêter les forces russes dans
les oblasts de Donetsk et de Louhansk et elle a entamé une contre-offensive qui
obtient des résultats. Elle a effectué plusieurs percées dans les régions de
Kharkiv et de Lyman et des avancées plus lentes, mais notables, au sud de la région
de Kherson. Ces résultats militaires montrent que le courage des forces
ukrainiennes et la livraison de matériels militaires occidentaux produisent
leurs effets sur le terrain. En reprenant l’initiative sur le front, en
bousculant les Russes et en provoquant leur repli, les soldats ukrainiens ont
enregistré de véritables succès militaires, qui doivent désormais être
consolidés.
Il ne fait aucun doute que le dispositif russe est
fragilisé. La mascarade des référendums truqués organisés dans certaines régions
de l’est de l’Ukraine prouve que la Russie se rend compte de sa propre
fragilité et cherche à donner un vernis démocratique à son offensive. Le
Président de la République l’a rappelé : nous ne reconnaîtrons évidemment pas
les résultats de ces prétendus référendums, ni l’annexion illégale de Vladimir
Poutine. Ce n’est rien d’autre qu’une nouvelle provocation.
L’appel à la mobilisation partielle lancé par Vladimir
Poutine est un double aveu de faiblesse : une faiblesse militaire inattendue,
mais aussi une faiblesse interne, alors que la mobilisation entraîne des
contestations et des départs massifs vers l’étranger.
Mais ne nous méprenons pas : il est bien trop tôt pour
espérer la fin des combats. La mobilisation russe permettra d’envoyer de
nouveaux soldats sur le front. La Russie est déterminée et prête à tout: les
combats dureront. Pourtant, l’issue du conflit ne doit pas être militaire, mais
bien diplomatique.
En attendant que soient réunies les conditions d’une
sortie du conflit, notre devoir est d’aider l’Ukraine autant que possible, sans
entrer en guerre avec la Russie. Dès le début du conflit, le Président de la
République, s’adressant aux Français, avait prévenu : cette guerre aura des
conséquences durables, dont nous n’avons pas fini de mesurer l’ampleur.
Pourtant, avec nos voisins européens, avec les alliés,
nous n’avons pas hésité. Laisser faire la Russie eût été accepter un ordre
mondial brutalisé, dans lequel tous les moyens sont bons et toutes les
exactions possibles. L’histoire nous a appris ce qu’il en coûtait de détourner
le regard en croyant se protéger.
Ne rien faire aurait montré à la Russie qu’elle pouvait aller plus loin encore
et prolonger sa volonté d’impérialisme. Ne rien faire aurait été perçu comme un
blanc-seing donné à toutes les nations qui veulent affirmer leur puissance et
nous mettre devant le fait accompli. Ne rien faire aurait planté les germes de
nouveaux conflits qui nous auraient menacés plus directement encore.
Défendre nos valeurs, ce n’est pas un idéal romantique:
c’est prouver que la démocratie n’est pas faible, c’est défendre un modèle qui
nous protège, c’est affirmer que nous croyons en un monde de paix et de
stabilité.
C’est pourquoi, depuis le début du conflit, avec les
alliés et les autres nations européennes, nous avons multiplié les livraisons
de matériels militaires à l’Ukraine. Nous l’assumons, car nous devons lui
donner les moyens de se défendre face à l’invasion. Dès la fin du mois de
février, notre pays a fourni aux forces armées ukrainiennes des missiles antichars,
des missiles antiaériens, des équipements de protection et de l’armement léger.
Dans un second temps, nous avons livré des systèmes plus lourds et plus
complexes : des véhicules légers, des blindés et surtout des systèmes
d’artillerie Caesar avec leurs munitions. Nous poursuivons cet effort : nous
avons formé les soldats ukrainiens et des cessions de carburants sont en cours.
Nous continuons à agir en Européens. Nous soutenons le
lancement d’une mission d’assistance militaire de l’Union européenne dont la
création a été entérinée cet été, et nous y contribuerons dès qu’elle sera
effective.
Au-delà de l’Ukraine, nous agissons en allié fiable et
crédible. Dès les premiers jours du conflit, à la demande du Président de la
République, nous avons renforcé notre dispositif sur le flanc est de l’Otan,
dans le cadre des missions de réassurance de l’Alliance. Régulièrement, nos
avions de combat surveillent et protègent l’espace aérien de l’est de l’Europe.
Nous avons pris la tête de la mission de l’Otan en Roumanie en tant que nation
cadre. Et, de la Baltique à la mer Noire, nous sommes présents d’un bout à
l’autre du flanc est.
La Russie pensait trouver l’Otan faible et divisée,
elle l’a ressoudée. Moscou sait désormais que les alliés sont unis, prêts, et
ce qu’il lui en coûterait si elle prolongeait ses volontés guerrières.
Notre soutien militaire n’est qu’un des aspects de
notre action. Dès les premiers jours de la guerre, avec l’Union européenne,
nous avons pris des sanctions fortes. Là encore, alors que Vladimir Poutine
pensait diviser l’Europe, cette dernière a fait face et montré son unité et sa
détermination face à la crise. Je dirais même plus : bien malgré lui, le
président Poutine a renforcé l’Europe.
Le premier paquet de sanctions a été adopté en moins
de vingt-quatre heures. Sept paquets ont été votés jusqu’à présent et le
huitième est en cours de négociation. Notre objectif est le même depuis le
début : rendre le coût de la guerre insupportable pour la Russie et frapper
durement son économie afin de l’empêcher de financer son offensive.
Nous avons pris des sanctions massives et de tous
ordres : financières, afin de limiter les capacités de financement de l’État
russe et des entreprises ; bancaires, avec l’exclusion de nombreuses banques
russes du système Swift ; commerciales, avec des restrictions à l’importation
et à l’exportation ; des sanctions contre la désinformation russe, en empêchant
la diffusion de la chaîne Russia Today et de l’agence Sputnik dans l’Union
européenne ; des sanctions politiques, enfin, contre les dirigeants, les
oligarques et les propagandistes. Avec le huitième paquet sur la table, près de
1 300 personnes seront directement concernées par des gels d’avoirs ou des
interdictions de voyage en Europe.
Les Russes misaient sur notre peur et notre division.
L’Union européenne a montré qu’elle était forte et savait réagir. L’Europe n’a
pas reculé devant les décisions courageuses, telles que l’embargo sur les
importations de charbon, de pétrole brut et de produits raffinés russes.
Ces sanctions, n’en déplaisent à ceux qui masquent
leur fascination pour l’impérialisme russe par un prétendu patriotisme,
fonctionnent! L’économie russe s’est considérablement rétractée, avec une chute
de 6 % de son PIB cette année. L’inflation russe a explosé. La Russie a perdu
l’accès à des matériels de haute technologie nécessaires pour moderniser le
pays et assurer sa croissance.
Moscou tente pour l’instant de maintenir l’illusion
grâce aux prix élevés de l’énergie. Mais les faits sont là. La propagande russe
ne doit pas nous berner: l’économie russe est à l’asphyxie. Par son
obstination, Vladimir Poutine hypothèque l’avenir de son pays. Il jette des
millions de citoyens russes dans la pauvreté, car c’est bien son peuple qui, le
premier, ressent l’effondrement de l’économie russe et pâtit de sa volonté
guerrière.
Les sanctions perdureront tant que Poutine s’évertuera
dans la spirale du conflit et de la confrontation. Abandonner les sanctions, ce
serait abandonner l’Ukraine, renoncer à nos valeurs et nous soumettre à la
Russie. Mais la France, le patriotisme, ce n’est ni l’abandon, ni le
renoncement, ni la soumission.
Mesdames et messieurs les députés,
la fourniture de matériels militaires et les sanctions sont les deux piliers de
notre soutien à l’Ukraine dans sa riposte face à la Russie. Mais notre
accompagnement ne s’arrête pas là. Nous apportons à l’Ukraine un soutien
humanitaire : plus de 200 millions d’euros ont été mobilisés et 2 500 tonnes de
matériels livrées. Ce soutien est à l’œuvre dans tous les domaines ; il se
déploie sur place et dans les pays frontaliers ; il est coordonné avec nos
partenaires, avec les ONG et les organisations internationales. Il se poursuit
en ce moment même, puisqu’un quatrième convoi humanitaire a quitté Marseille
par bateau la semaine dernière.
Nous nous sommes également organisés pour accueillir
les réfugiés. Plus de 100 000 Ukrainiens ont été accueillis et près de 19 000
enfants ont été scolarisés. Cela s’est fait rapidement, efficacement et
dignement. Cela a été possible, une fois encore, grâce à la réaction exemplaire
de l’Europe. Dès le 3 mars, l’Union s’est accordée pour que les réfugiés
ukrainiens bénéficient de la protection temporaire, c’est-à-dire de l’accueil,
de l’accès à l’éducation, à la santé, à l’emploi ou encore à l’hébergement.
C’était une première. Il s’agit d’un acte décisif, dont bénéficient aujourd’hui
en Europe plus de 4 millions d’Ukrainiens.
Je veux saluer ici toutes celles et tous ceux qui
participent à cet élan de solidarité remarquable envers l’Ukraine depuis sept
mois. Je pense à nos ONG et à nos entreprises. Je veux également rendre hommage
à toutes les collectivités qui se mobilisent, organisent la solidarité et
permettent l’accueil et la scolarisation des réfugiés ukrainiens : je les en
remercie. Leur engagement est précieux et déterminant. Je pense enfin à tous
les Français qui se sont engagés et que nous devons soutenir. C’est pourquoi je
vous confirme la mise en place, à partir de fin novembre, d’une aide à
destination de nos compatriotes qui accueillent des déplacés ukrainiens chez
eux.
Notre soutien à l’Ukraine est également diplomatique.
Elle fait pleinement partie de la famille européenne. Lors du Conseil européen
de juin, le statut de pays candidat à l’adhésion lui a été accordé à l’unanimité.
Il s’agit d’une décision historique, que nous avons jugée indispensable dans le
contexte de profond changement géopolitique qui affecte notre continent. Le
chemin de l’adhésion sera long et exigeant. Il n’y aura pas de procédure
accélérée ou de critères au rabais : ce ne serait dans l’intérêt de personne,
ni de l’Union européenne ni de l’Ukraine. Cette dernière le sait. Mais je veux
saluer ici l’action des autorités ukrainiennes, qui ont entamé, malgré la
période, la mise en œuvre des recommandations de la Commission.
Sans préjudice de ce processus d’adhésion, la
communauté politique européenne, proposée par le Président de la République,
tiendra sa première réunion jeudi prochain à Prague. Elle permettra à ses
membres, dont l’Ukraine, de renforcer leur ancrage européen et de bénéficier de
coopérations concrètes dans les domaines des infrastructures, de la sécurité,
de l’énergie ou bien encore en matière de mobilité.
Soutenir l’Ukraine, c’est enfin penser sa
reconstruction. On évalue les besoins du pays en la matière à près de 350
milliards d’euros. Il s’agit d’un défi colossal et collectif. La France y
prendra sa part. À court terme, nous nous sommes engagés à concentrer nos
efforts sur la reconstruction de la région de Tchernihiv, dans le nord du pays,
suivant en cela le mécanisme de parrainage proposé par le président Zelensky.
Les Européens sont engagés. Après la conférence de Lugano cet été, une
conférence sur la reconstruction sera organisée le 25 octobre prochain en
Allemagne. De son côté, la France organisera dans les prochains mois, à Paris,
avec les autorités ukrainiennes, une conférence économique en vue de mobiliser
les entreprises françaises.
Nous soutenons enfin les initiatives de la Commission
européenne pour accompagner et organiser le financement de la reconstruction de
l’Ukraine.
Nous le savons tous : les conséquences de cette guerre
dépassent largement les frontières de l’Ukraine. Aussi, depuis février, le
Gouvernement agit sans relâche pour limiter l’impact du conflit sur notre pays.
Le premier enjeu est énergétique. Du fait de la reprise post-covid19, et avant
même le début de la guerre, les prix de l’énergie avaient considérablement
augmenté. Le conflit et l’arrêt quasi total des livraisons de gaz russe vers
l’Europe ont entraîné des tensions d’approvisionnement et une nouvelle hausse
des prix.
Je veux ici rappeler les choses fermement. N’inversons
pas les rôles : c’est la Russie qui a lancé cette guerre. C’est elle qui nous
pousse à agir. C’est elle, encore, qui choisit de faire du gaz un objet de
chantage. Ces derniers jours, des explosions ont été constatées sur les
gazoducs Nord Stream 1 et 2. Tout indique qu’un acte de sabotage grave et
irresponsable a été commis. Je ne tirerai pas de conclusions ici : une enquête
internationale indépendante doit être conduite. Avec l’Union européenne, nous
répondrons de manière ferme et unie à cette attaque contre des infrastructures
énergétiques européennes.
Quoi qu’il en soit, nous sommes prêts à affronter
l’hiver qui s’annonce. Nous avons anticipé la situation : ainsi, nous avons
porté nos stocks de gaz au maximum, au niveau national comme au niveau européen
; nous avons augmenté les capacités d’importation de nos terminaux méthaniers,
et nous avons diversifié notre approvisionnement. Cet été, le Président de la
République a annoncé un plan de sobriété. Si chacun prend sa part, nous
traverserons les mois à venir sans risque de coupure. Nous y parviendrons aussi
grâce à la solidarité européenne : nous livrerons du gaz à nos partenaires, qui
nous livreront de l’électricité en retour.
Arrêter la solidarité, ce serait prendre le risque de
manquer d’électricité.
Une fois de plus, le simplisme et
les propos d’estrade nous mènent dans l’impasse. Protéger les Français, c’est
aussi limiter l’impact de l’inflation sur leur pouvoir d’achat. Très tôt, nous
avons pris des mesures extrêmement fortes, les plus protectrices d’Europe. Le
bouclier tarifaire a bloqué les prix du gaz et limité la hausse des prix de
l’électricité – sans cela, les prix auraient explosé, comme en Belgique, en
Allemagne ou au Royaume-Uni. Il y a deux semaines, j’ai annoncé le maintien du
bouclier tarifaire à compter de début 2023 : alors que les prix auraient dû
plus que doubler, leur hausse sera limitée à 15 %. Cela représente une économie
moyenne de 175 euros par mois pour les Français qui se chauffent au gaz, et de
160 euros par mois pour ceux qui utilisent l’électricité. Cette mesure est
efficace. Elle s’accompagne d’un chèque énergie exceptionnel de 100 ou 200
euros pour les 12 millions de foyers les plus modestes, soit 40 % des foyers
français.
Nous devons aussi protéger toutes les entreprises et
les collectivités face à la hausse des prix, notamment de l’électricité. Nous
avançons au niveau européen pour traiter le problème à la racine. Lors du
Conseil Énergie de vendredi dernier, nous avons progressé vers la mise en œuvre
d’un plafond du prix du gaz et vers l’extension à toute l’Europe du mécanisme
ibérique, qui a permis de ramener les prix de l’électricité à des niveaux deux
à trois fois plus faibles que dans le reste de l’Europe. En parallèle, nous
travaillons pour protéger les entreprises et les collectivités face à la
flambée des prix de l’énergie. Le Gouvernement présentera prochainement des
dispositions en ce sens.
En complément, nous continuons à renforcer et à
simplifier l’aide destinée aux entreprises les plus en difficulté. Notre
objectif est de limiter au maximum les baisses d’activité, voire les fermetures
d’usines.
Au-delà des réponses d’urgence,
cette guerre nous montre la nécessité de conquérir rapidement notre
souveraineté énergétique et de sortir de notre dépendance aux énergies
fossiles. Nous y parviendrons par une stratégie ambitieuse en matière de
nucléaire et de renouvelable – nous aurons l’occasion d’en discuter plus
longuement lors du débat sur la politique énergétique que j’ai proposé de tenir
devant le Parlement.
Protéger, c’est aussi agir pour les agriculteurs et
l’alimentation. L’Ukraine et la Russie sont parmi les principaux producteurs de
céréales et d’oléagineux. La guerre a eu pour effet de rompre certaines chaînes
de production et d’augmenter les prix des céréales et des engrais. Dès le mois
de mars, des mesures ont été prises, avec l’appui de l’Union européenne, pour
protéger les agriculteurs et les consommateurs. Une enveloppe d’aides de près
de 500 millions d’euros a été débloquée. Des mesures spécifiques ont également
été prises, au niveau européen comme au niveau français, en faveur des secteurs
les plus touchés, en particulier l’élevage. Par ailleurs, une plus grande part
des aides directes de la politique agricole commune (PAC) seront versées en
avance aux agriculteurs.
Nous agissons également, en Français et en Européens,
pour faciliter l’acheminement des exportations agricoles ukrainiennes. Avec
l’aide de la Commission européenne, nous avons créé des corridors de
solidarité, notamment via la Roumanie. Grâce à cette action, 14 millions de
tonnes de céréales ukrainiennes ont pu sortir du pays – et, contrairement aux
affirmations mensongères de Moscou, parmi les céréales exportées vers l’Europe,
70 % ont ensuite été envoyées vers l’Afrique ou l’Asie. Là encore, ce conflit
nous montre l’importance de bâtir une souveraineté alimentaire française et
européenne. Nous y œuvrerons notamment grâce aux investissements de France 2030
et à la future loi d’orientation et d’avenir pour l’agriculture.
Cette guerre, enfin, fait planer une menace grave sur la sécurité alimentaire
de nombreux pays en développement. Une crise alimentaire mondiale est possible.
Aussi le Président de la République a-t-il été à l’origine de l’initiative
internationale Farm – Food and Agricultural Resilience Mission –, qui organise
la solidarité vis-à-vis des pays les plus menacés.
Protéger les Français, c’est aussi tirer tous les
enseignements stratégiques de la crise. Ce conflit montre une fois de plus
l’importance du multilatéralisme : nous sommes forts quand nous avançons unis,
entre Européens, entre alliés, entre nations qui aspirent à la paix et à la
sécurité internationale. La guerre a prouvé la nécessité de la souveraineté et
de l’autonomie stratégique européennes. L’Union européenne s’est construite
autour de l’idée de paix et de la défense de valeurs : l’État de droit, le
pluralisme, les droits de l’homme. C’est ce modèle qui est attaqué par Vladimir
Poutine ; c’est ce modèle que nous devons défendre ensemble.
Ces derniers mois, sous la présidence française du
Conseil européen, ont été l’occasion d’avancées historiques. La facilité
européenne pour la paix a été utilisée pour aider directement un pays attaqué à
se défendre – c’est une véritable révolution copernicienne pour l’Europe. Nous
avons acté notre volonté de muscler les investissements européens en matière de
défense, en adoptant la Boussole stratégique en mars dernier. Toujours en mars,
lors du sommet de Versailles, nous nous sommes engagés collectivement à lutter
contre nos dépendances stratégiques, à commencer par celle qui concerne
l’énergie. Désormais, nous ne sommes plus isolés quand nous parlons de
souveraineté européenne : c’est une ambition largement partagée dans l’Union.
Ce conflit a marqué le réveil géopolitique de l’Europe. Nous savons désormais
qu’il nous faut peser pour faire valoir nos valeurs et notre modèle.
Enfin, la guerre justifie les choix que nous avons
réalisés lors de la précédente loi de programmation militaire. Nous devons
maintenir des capacités opérationnelles fortes, afin d’être prêts à agir dans
tous les milieux et à faire face au retour de la guerre de haute intensité.
C’est l’objet de la revue nationale stratégique demandée par le Président de la
République, et sur laquelle s’appuiera la prochaine loi de programmation
militaire. Cette revue stratégique sera partagée avec vous mi-octobre, et je
souhaite que le Parlement soit associé aux travaux d’élaboration de la loi de
programmation militaire.
Cette guerre dure, mais elle aura un lendemain – et
dans ce monde, l’Ukraine sera debout et maîtresse de son territoire. La Russie
aussi sera présente. Elle est et reste une puissance majeure. Elle sera
toujours notre voisin demain : nous ne pouvons l’ignorer. L’avenir s’écrira
autour d’une table de négociation, et non pas sur un champ de bataille.
C’est pourquoi le Président de la République a choisi
de maintenir des échanges avec le président russe. Ces négociations devront se
tenir, en permettant à l’Ukraine de faire pleinement entendre sa voix. Aussi
l’heure est-elle au soutien de la contre-offensive de cette dernière. Nous
appuierons l’Ukraine, jusqu’à ce que ses dirigeants estiment le moment des
négociations venu.
La nouvelle session parlementaire s’ouvre par ce débat
: cela s’imposait. Avec la guerre en Ukraine, beaucoup de nos certitudes ont
été ébranlées, beaucoup d’urgences se sont fait jour, et beaucoup de
transitions doivent être accélérées. Cette guerre nous a rappelé que la
démocratie était fragile, et qu’il ne fallait jamais cesser de la défendre.
Elle nous a prouvé, une fois de plus, que l’unité et la solidarité européennes
étaient des armes puissantes pour peser dans les équilibres internationaux et protéger
nos concitoyens. Elle a confirmé qu’il était urgent de reconquérir notre
souveraineté énergétique, industrielle et alimentaire. Nous ne faiblirons pas,
ni face à l’agresseur russe, ni pour protéger les Français, ni pour préparer
l’avenir de notre pays. La guerre en Ukraine va durer, mais nous sommes prêts.
La résistance du peuple ukrainien nous oblige ; nous serons au rendez-vous ;
nous serons à la hauteur. (…)
La guerre en Ukraine a bousculé le
monde. Elle nous pousse à accélérer des transitions majeures et elle a des
conséquences dont nous n’avons pas fini de mesurer les effets.
Des divergences subsistent entre nous ; c’est le principe même de la
démocratie. C’est pourquoi ce débat, à l’ouverture de la session ordinaire,
était important. Je veux saluer l’esprit de responsabilité qui s’est manifesté
sur la majorité des bancs de cette assemblée. Je reconnais votre volonté de
faire valoir des idées plutôt que d’agiter des polémiques. La situation en
Ukraine est grave : nous devions être à la hauteur.
Je souhaite également saluer le large consensus qui se dégage de nos débats.
Nous condamnons tous l’agression russe ; elle est illégale, brutale, violente ;
elle enfreint toutes les règles internationales. La Russie est prête à toutes
les méthodes, tous les chantages. Elle est seule responsable de cette
situation. Nous ne pouvons pas l’accepter. Nous soutenons collectivement
l’Ukraine dans sa résistance, nous partageons un immense respect pour les
autorités, les forces et le peuple ukrainiens. Nous débattons des meilleures
manières d’accompagner l’Ukraine, mais nous nous accordons sur la nécessité de
l’aider.
Bien sûr, je regrette que certains n’expriment qu’un soutien rhétorique qui
n’aboutirait à exercer aucune pression sur la Russie. Ce discours semble même
renvoyer dos à dos l’Ukraine et la Russie.
Je m’étonne également que d’autres
parlent de guerre sociale alors que la France est le pays qui a le mieux
protégé sa population des effets de la guerre, comme elle l’a fait face au
covid19.
> L’explosion des prix de l’énergie, c’est avant tout la
conséquence de l’agression de l’Ukraine par la Russie. Les prix s’envolent
parce que la Russie a décidé de réduire considérablement l’approvisionnement en
gaz de l’Europe. Cette hausse est renforcée par la faible disponibilité de
notre parc nucléaire. Face à cela, notre
stratégie est globale et cohérente : elle vise à protéger les Français et à
préparer l’avenir. Protéger les
Français, c’est d’abord faire en sorte que nous puissions passer l’hiver sans
coupures. C’est ce que nous faisons en ayant anticipé cette situation dès l’été
en portant nos stocks de gaz au niveau maximal, en diversifiant nos
approvisionnements, en augmentant les capacités de nos terminaux méthaniers. C’est
ce que nous faisons avec le plan « sobriété ». Nous présenterons ce plan dans
les prochains jours et il mobilise l’État, les collectivités, les entreprises
et nos concitoyens. Et c’est enfin ce que nous ferons grâce à la solidarité
européenne : nous livrerons du gaz à nos voisins qui nous livreront en retour
de l’électricité. C’est à l’échelle européenne que nous assurerons notre
sécurité d’approvisionnement et que nous pourrons maîtriser les prix de
l’énergie. Car protéger les Français, c’est aussi agir contre la hausse des
prix. C’est le but des boucliers tarifaires sur le gaz et l’électricité qui
empêchent les prix de doubler ; c’est la mesure la plus protectrice qui ait été
prise en Europe – cela mérite d’être rappelé.
Mais bien sûr, nous agissons pour tous les Français, y compris ceux qui se
chauffent au fioul et sont souvent les plus précaires. Le Parlement a voté cet
été une enveloppe de 230 millions d’euros, destinée à aider ceux qui sont en
train de remplir leur cuve, et je vous confirme que ces Français recevront bien
une aide dans les prochaines semaines ; ils bénéficieront en outre d’un chèque
énergie exceptionnel pour affronter la hausse des prix. Au total, les Français
les plus modestes pourront bénéficier d’une aide allant jusqu’à 400 euros pour
payer leur facture de fioul. Je le précise, nous protégeons tous les Français
face à cette situation d’urgence, mais nous préparons aussi l’avenir. L’avenir,
c’est une société décarbonée; c’est notre souveraineté énergétique.
Grâce à MaPrimeRénov’, nous accompagnons les Français qui changent leur
chaudière à fioul ; plus largement, pour assurer notre souveraineté énergétique,
nous tablons sur le nucléaire et sur les
énergies renouvelables. Votre assemblée est saisie d’un projet de loi relatif à
l’accélération de la production d’énergies renouvelables et vous serez
prochainement saisis d’un autre projet de loi visant à accélérer les projets
d’énergie nucléaire.
> Il y a vingt ans, jour pour jour, une femme de 17 ans, Sohane Benziane, était brûlée vive. Elle est devenue l’un des plus tragiques symboles des violences faites aux femmes. Je veux avoir une pensée pour elle, pour sa famille, pour toutes les femmes victimes de violences.
L’égalité entre les femmes et les hommes est la grande cause des quinquennats d’Emmanuel Macron. Nous avons agi dans tous les domaines. Nous avons agi aussi avec force contre toutes les formes de violences sexistes et sexuelles. Avec le Grenelle des violences conjugales, nous avons obtenu de nombreuses avancées. Pour que la parole se libère et que chaque victime puisse être prise en charge, nous avons étendu les horaires du numéro d’appel 39-19, ouvert une plateforme de signalement en ligne, favorisé la prise de plaintes et lancé la création d’un fichier des mis en cause. Les actions qui ont été engagées depuis 2017. Pour le traitement des plaintes et mieux protéger les victimes, nous avons formé près de 160 000 policiers et gendarmes, déployé des téléphones grave danger et des bracelets anti-rapprochement. Mais tant qu’il y aura des coups, nous continuerons : 10 000 places d’hébergement seront ouvertes dès cette année ; le mois dernier, j’ai annoncé l’ouverture de 1 000 places supplémentaires en 2023 ; nous allons doubler la présence policière dans la rue. Je rappelle qu’en ces domaines, seule l’institution judiciaire peut déterminer les faits, dire le droit et sanctionner. La lutte contre les violences conjugales est un combat fondamental auquel je tiens. Le Gouvernement continuera à le mener avec force, avec les associations, les élus et toutes celles et ceux qui veulent s’engager.
> [Prix de l’énergie] mon gouvernement est totalement
mobilisé pour protéger les Français, les entreprises et les collectivités face
à la flambée des prix de l’énergie. Nous avons d’abord agi pour protéger les
Français avec la prolongation des boucliers tarifaires en 2023. Rappelons
qu’ils permettront de contenir à 15 %, une hausse des prix du gaz et de
l’électricité pour les ménages qui aurait sinon atteint 120 %. Ils bénéficient
aux ménages, mais aussi aux très petites entreprises (TPE) et à la plupart des
communes, celles-ci pouvant bénéficier des tarifs réglementés de l’électricité.
Mais nous voulons agir pour protéger
également les entreprises et les collectivités. Vous avez raison, il s’agit
pour cela de traiter le problème à la racine, en faisant baisser le prix de
l’électricité sur les marchés européens. Les Espagnols ont réussi à diviser par
trois le prix de l’électricité. C’est ce mécanisme que nous voulons étendre à
toute l’Europe.
Des avancées ont été réalisées lors du dernier Conseil européen des ministres
de l’énergie. Le Président de la République s’entretient cette semaine avec la
présidente de la Commission européenne et avec le Chancelier allemand avant le
Conseil de vendredi. Même si nous avons vraiment de bonnes raisons de penser
que nous pourrons faire aboutir ce mécanisme, nous préparons aussi un filet de
sécurité pour aider les entreprises et les collectivités les plus en
difficulté.
Pour les entreprises, il s’agit tout d’abord d’améliorer le mécanisme de
soutien créé pour aider celles qui consomment beaucoup d’énergie. Le ministre
de l’économie y travaille.
S’agissant des collectivités, rappelons que nous avons voté dès cet été, dans
le cadre du projet de loi de finances rectificative, un dispositif visant à
protéger les plus fragiles. À mes yeux, c’est un exemple des compromis que nous
pouvons trouver ensemble. Nous travaillons à améliorer ce dispositif pour qu’il
réponde bien à toutes les situations.
Au-delà de ces situations d’urgence, nous devons renforcer notre souveraineté
énergétique. C’est l’objet de deux projets de loi dont vous serez prochainement
saisis, visant à accélérer l’un le développement des énergies renouvelables,
l’autre le renouvellement de notre parc nucléaire.
> J’ai pris acte de la décision rendue hier dans le cadre de la procédure engagée contre ?Éric Dupond-Moretti devant la Cour de justice de la République. Voyez-vous, je ne crois pas qu’il soit démocratiquement sain que des décisions de l’autorité judiciaire soient commentées ici, dans l’enceinte du pouvoir législatif, par un membre de l’exécutif. Je le rappelle : l’indépendance de l’institution judiciaire est un principe cardinal de notre démocratie. La présomption d’innocence en est un autre pilier. J’ai pleinement confiance dans notre démocratie et dans notre justice
Bruno Le Maire
(ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et
Numérique)
> Discours lors du Forum Paris Infraweek 2022]
Nous devons changer de modèle économique pour aller vers un
modèle décarboné, plus respectueux de l'environnement, plus respectueux du
climat. Mais pour tout vous dire, une fois que nous avons dit ça, nous n’avons
pas dit grand-chose parce que nous n'avons rien dit sur la méthode, rien dit
sur le coût, rien dit sur le financement. Et je voudrais mettre en regard deux
crises qui, de toute façon, se percutent et doivent vous amener, nous amener, à
trouver des solutions. D’un côté la crise climatique avec son lot d'incendies,
de catastrophes naturelles, d'ouragan, de montée des mers, de déplacement de
population, d’impact économique, d'impact social, d'impact géopolitique.
Et puis de l'autre, la crise qui nous occupe 7 jours sur 7 avec le président de
la République, qui est la crise énergétique, la flambée des prix du gaz, la
flambée des prix de l'électricité, et le risque de voir un certain nombre
d'entreprises en Europe et en France baisser leur production, voire se mettre
au chômage partiel, voire fermer leur porte, voire délocaliser. Donc nous
devons impérativement apporter à la fois de l’énergie à ces entreprises,et dans
le même temps, décarboner l’économie. Nous devons avoir un modèle économiquement
soutenable et du point de vue environnemental qui accomplit cette transition
indispensable et c’est tout le défi que nous avons à mener. C'est trop facile
de dire qu'on ne s'occupe que d'un défi et pas de l'autre. Si vous ne vous occupez
que d'un défi et pas de l'autre, vous serez rattrapé par le premier ou par le second.
La première chose pour tenir ces deux fils ensemble, c'est d'abord de se fixer
des objectifs qui soient clairs.
L'Europe l'a fait, je crois, avec beaucoup de force, 50 % de réduction des
émissions en 2030 par rapport à 1990, c’est l'engagement Fit For 55, et
neutralité carbone en 2050. Nous avons 4 millions de CO2 en moins par an entre
2012 et 2017, 8 millions entre 2017 et 2021, 16 millions entre 2022 et 2030.
Donc, il y a des chiffres, il y a un calendrier et il y a un engagement.
Du point de vue national, je pense que nous avons pris aussi toute la mesure du
sujet. Et pris les mesures nécessaires pour tenir ces engagements chiffrés dont
je viens de parler. D'abord, nous nous sommes engagés pour produire plus
d'électricité décarbonée en renforçant la filière nucléaire déjà unique au
monde. Alors j’entends les critiques sur le passé, je préfère regarder l’avenir
et les décisions qui ont été annoncées par le président de la République, c’est
la première fois qu’un président de la République depuis plusieurs décennies
prend l’engagement de construire 6 nouveaux réacteurs nucléaires de type EPR 2
et de lancer des études sur la construction de 8 EPR 2 additionnels.
Nous avons également décidé d’accélérer le développement des énergies renouvelables,
l'installation du premier site éolien offshore, le doublement de la capacité
éolienne terrestre et la multiplication par 10 de la puissance installée d'énergie
solaire d'ici 2028.
Au-delà de cette production, nous avons aussi pris des engagements pour décarboner
nos industries. Et là aussi, le défi est considérable, parce qu'il faut à la fois
réindustrialiser et décarboner les industries que nous installons. Il faut être
compétitif pour que les sites industriels s'ouvrent en France avec les emplois,
avec les technologies, avec la valeur ajoutée qui va avec et il faut dans le
même temps consacrer des dizaines de milliards d'euros à la décarbonation de
cette industrie qui, je le rappelle, représente près de 20 % des émissions
françaises. Dans France 2030, je rappelle que nous allons consacrer près de 6
milliards d'euros à la décarbonation du mix énergétique. Le meilleur exemple,
c'est celui d'ArcelorMittal et de ses hauts fourneaux de Dunkerque et de
Fos-sur-Mer. Je recommande à chacun d'entre vous d'aller visiter ces
installations parce que ça permet de prendre,au-delà des grands discours de
salon, de prendre conscience physiquement, matériellement, de l'enjeu
économique que cela représente, de décarboner des sites qui font des centaines
d'hectares, qui représentent des installations absolument considérables, et
donc, des coûts considérables derrière.
Nous avons également pris des mesures pour améliorer nos réseaux de transport.
Je pense à ce qui a été fait sur les réseaux ferroviaire avec le développement
du fret mais également le canal Seine-Nord Europe avec 5 milliards
d’investissement qui reliera le bassin de La Seine au réseau fluvial du Nord de
l’Europe.
L’Europe s’est également engagée aux côtés de la Nation française et des autres
nations. Dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe, un tiers des 1 800
milliards d’euros d’investissements du plan de relance Next Generation EU
seront consacrés à la transition et à la décarbonation de l’économie.
Nous avons également la taxonomie verte, nous avons le Global Gateway qui se donne
pour objectif de mobiliser 300 milliards d’euros pour financer de nouvelles infrastructures.
Nous avons donc des décisions et des engagements européens qui sont forts.
Maintenant nous avons besoin et c’est pour ça que je vous remercie de votre présence
ici de la mobilisation totale de l’écosystème financier.
Quand on regarde au niveau mondial, les besoins en nouvelles infrastructures
qui permettront de réduire les émissions de carbone liées au transport ou à
l’industrie sont estimés à 450 milliards d’euros par an au niveau mondial. Ce
sont donc des sommes absolument considérables. Inutile de vous dire que ce ne
sont pas les financeurs publics et les budgets des Etats qui vont assumer seuls
ces coûts. Ils n’en ont ni les moyens ni l’opportunité à un moment où les
tensions sur les marchés sont fortes, où les taux d’intérêt sont élevés et où
l’endettement des Etats, je le rappelle a explosé en raison de la pandémie, de
la crise du Covid19 et des mesures nécessaires contre l’inflation.
Donc, nous allons avoir besoin d’un nouveau partenariat beaucoup plus ambitieux
entre les financeurs publics et les financeurs privés, entre les Etats et les investisseurs.
Mais c’est la condition du succès de la lutte contre le réchauffement climatique.
Tout ne peut pas reposer sur la puissance publique, tout ne peut pas reposer uniquement
sur les forces privées non plus, il faut que nous arrivions à bâtir un nouveau
pacte entre les financeurs publics et les financeurs privés.
Nous avons un certain nombre d’initiatives qui ont été lancé en la matière, je voudrais
en citer deux : les principes du G20 pour les investissements des infrastructures
de qualité et je remercie l’ambassadeur indien de sa présence quand nos
partenaires indiens ont pris la décision de poursuivre ce travail d'orientation
stratégique et de remise à niveau. Je me rendrai à New Delhi dans quelques semaines
pour en discuter avec nos partenaires indiens.
Nous avons également une autre initiative lancée par le Premier ministre Modi
lors du sommet action climat de l'ONU en 2019. La Coalition for Disaster
Resilient Infrastructure (CDRI), qui a été lancée en 2019 et qui vise à
encourager la réalisation d'infrastructures résilientes aux catastrophes
naturelles et aux aléas climatiques. Je voudrais saluer cette initiative du
Premier ministre Modi. Nous avons eu l'occasion d'en parler avec le président
de la République et le Premier ministre Modi lors de sa visite à Paris. Et je
voudrais confirmer à l'ambassadeur notre intention de soutenir cette coalition.
La France, évidemment, souhaite se mettre au cœur de ces grandes transformations.
D'abord pour le faire, il faut qu'elle reste attractive : attractive globalement
et attractive plus particulièrement sur le financement des infrastructures.
Nous avons réussi grâce à vous, grâce à vous tous ici, à devenir un écosystème particulièrement
riche et attractif pour le financement des infrastructures avec des banques,
des sociétés de gestion et des cabinets de gestion spécialisés. Nous avons
également réuni de nouveaux acteurs, mobilisé davantage de fond, tout ça avance
dans la bonne direction. C’est dans cette perspective et sur la base de ces
premiers résultats que le président de la République a soutenu l'initiative
FAST-Infra lancée lors du One Planet Summit, qui avait organisé précisément le
président de la République il y a quelques mois.
Qu'est-ce que c'est que FAST-Infra ? C'est d'abord un label qui va permettre de
distinguer entre les infrastructures durables et celles qui ne le sont pas.
Chacun sait qu'il existe partout dans le monde, en particulier dans les pays en
développement, des besoins d'infrastructures qui sont considérables, j’ai donné
le chiffre qui suscite parfois une convoitise économique considérable et où les
marchés sont parfois gagnés par ceux qui offrent les solutions les plus
rapides, les plus économiques et les moins favorables au climat.
Je pense qu'il était absolument indispensable pour la construction de ponts, de
routes, d'aéroports, de tout type d'infrastructure, d'acheminement d'eau, de systèmes
de dépollution, qu'il y ait un label de durabilité de ces infrastructures, sans
quoi les marchés seront systématiquement gagnés par ceux qui proposent le coût le
moins élevé, le prix le plus faible, sans aucune considération pour l'impact écologique
de ces infrastructures.
Donc je crois profondément à ce label qui va permettre de valoriser des constructions
selon les meilleurs standards environnementaux, sociaux de résilience et de
gouvernance. L’enjeu est économique. Il est aussi très politique parce que dans
le fond, c’est la défense du modèle économique européen que nous voulons mettre
en avant. Il s’agit d’expliquer que notre modèle qui fait attention aux coûts
financiers d’une infrastructure, mais également aux coûts sociaux, aux coûts
environnementaux, est le bon modèle et qu’il a vocation, donc, à servir de
référence à travers la planète.
Cette référence, elle doit être ouverte, c’est pour ça que Fast Infra sera
aussi une plateforme digitale de collaboration qui accompagnera les acteurs des
infrastructures durables, notamment dans les pays en développement dans la préparation,
le financement et le déploiement de programmes à grande échelle. Il ne s’agit
pas d’imposer, il s’agit de coopérer pour aboutir, au bout du compte, à une économie
qui soit durable, dynamique, respectueuse de l'environnement. C'est pour toutes
ces raisons que je suis fier et heureux de vous annoncer que l'association Fast
Infra a fait le choix de s'établir à Paris. Je pense que c'est une belle victoire
française et une belle victoire pour le développement durable et notre volonté
de défendre un modèle de développement économique plus durable. Nous soutiendrons
évidemment l'association pour qu'elle bénéficie du dynamisme de notre
écosystème.
Catherine Colonna
(ministre de l’Europe et des Affaires étrangères)
> Vendredi dernier, après sept mois d’une guerre d’agression aussi
brutale qu’injustifiée, Moscou franchissait un nouveau seuil. En s’autorisant
des simulacres de scrutins organisés à la hâte en zones occupées, le Kremlin
annexait en toute illégalité les territoires occupés dans les régions de
Louhansk, Donestk, Zaporijjia et Kherson. Je le dis sans ambiguïté : le fait
accompli ne fera jamais le droit, n’en déplaise aux propagandistes du Kremlin.
La France et ses partenaires ne reconnaîtront jamais ces pseudo-référendums.
Ils ne reflètent en rien la volonté de la population ukrainienne – sa
résistance héroïque en témoigne.
Ils traduisent tout au plus le cynisme de l’agresseur russe, qui ne recule
devant aucune mascarade pour tenter de maquiller ce qui est, en réalité, un
projet impérialiste et expansionniste, un projet de conquête qui, vous le
savez, mesdames et messieurs les députés, porte profondément atteinte à toutes
les règles régissant les relations internationales, la vie entre les nations.
Car la Russie, membre permanent du Conseil de sécurité qui plus est, a bafoué
en agressant l’Ukraine les principes fondateurs de la Charte des Nations unies
que sont la non-agression, le règlement pacifique des différends, la
souveraineté des États et le respect de leur intégrité territoriale. La France
a en conséquence fait le choix du droit et de ses valeurs, comme l’a souligné
Mme la Première ministre. La Russie, elle, a choisi la guerre, une guerre
d’agression, une guerre brutale avec son cortège de meurtres et d’exactions.
Elle a choisi des élections illégales, méthode de sinistre mémoire. Nous
l’appelons à revenir à un comportement responsable
Dès lors, en ce moment de bascule, nous faisons depuis sept mois le seul choix
qui vaille, le seul choix responsable, celui du soutien à l’Ukraine et à nos
valeurs, comme vous l’avez rappelé si justement ce matin encore, madame la
présidente de l’Assemblée nationale. Nous faisons choix de défendre l’ordre
international fondé sur la règle de droit, cet ordre que la Russie voudrait
détruire. Quel pays pourra s’estimer à l’abri dans ses frontières si la
souveraineté et l’intégrité territoriale d’un État peuvent être violées de
manière aussi décomplexée ?
Si tout est permis en Ukraine, tout le sera davantage ailleurs. C’est bien
pourquoi cette guerre n’est pas une guerre régionale : elle est l’affaire de
tous. Nous n’avons pas ménagé nos efforts pour le faire valoir auprès de
l’ensemble de la communauté internationale, et ces efforts commencent à porter
leurs fruits comme nous l’avons constaté lors de l’Assemblée générale des
Nations unies, où de nombreux pays tiers, ne faisant pourtant pas partie des
traditionnels soutiens de l’Ukraine, ont pris leurs distances vis-à-vis de la
Russie en appelant au plein respect des principes fondamentaux de la Charte et
en rappelant que l’heure n’était pas à la guerre – je pense, par exemple, à la
Chine et à l’Inde. Nous sommes déterminés à poursuivre dans cette voie.
Mesdames et messieurs les députés, vous avez été nombreux à évoquer la lutte
contre l’impunité. Nous faisons le choix de la justice en refusant l’impunité
des criminels. Je l’ai dit clairement au Conseil de sécurité, dont j’ai
présidé, le 22 septembre, la première réunion de niveau ministériel sur la
situation en Ukraine depuis le déclenchement de l’invasion : il n’y aura pas de
paix sans justice. Les exactions et les crimes de guerre devront faire l’objet
de poursuites ; nous y contribuons au sein des organisations internationales
comme dans un cadre bilatéral. À ce titre, notre pays a envoyé depuis le mois
d’avril, certains d’entre vous l’ont rappelé, trois équipes spécialisées de
l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, la dernière
d’entre elles étant arrivée mardi dernier. Celle-ci aidera la justice
ukrainienne à faire toute la lumière sur les atrocités découvertes à Izioum,
comme l’ont déjà fait les autres équipes à Boutcha. La justice doit passer.
La question des sanctions et de leur impact a aussi été évoquée. Nous faisons,
comme l’a souligné Mme la Première ministre, le choix de la fermeté face à un
agresseur qui menace la stabilité de notre continent et la sécurité de
l’ensemble de la communauté internationale. C’est ainsi qu’avec une célérité
inédite, nous avons mis en œuvre, avec nos partenaires européens et
internationaux, une politique de sanctions d’une rigueur sans précédent. Ces
sanctions ont un but clair : asphyxier l’effort de guerre russe et appliquer
une pression maximale sur les fauteurs de guerre.
D’ores et déjà, l 200 individus et plus de 100 entités russes y sont soumis.
Ces sanctions sont réfléchies et appropriées. Elles sont efficaces et auront un
impact massif et durable sur la machine de guerre russe, comme l’a rappelé Mme
la Première ministre : le PIB de la Russie va reculer de six points en 2022 et
retomber, d’ici à deux ans, à son niveau du début des années 2000… vingt ans en
arrière. Nous asséchons aussi ses revenus tirés des hydrocarbures. Et l’accès
aux technologies dont elle a besoin est déjà mis en cause dans des secteurs
aussi stratégiques que sont l’aéronautique, l’automobile et l’armement. Nous ne
faiblirons pas. La France souhaite, vous le savez, l’adoption rapide d’un
nouveau paquet de sanctions européennes, lequel devrait être finalisé dans les
tout prochains jours.
Qu’il s’agisse des sanctions, du soutien à l’Ukraine – y compris par l’envoi
d’équipements militaires –, de l’aide humanitaire massive, de l’accueil des
réfugiés, de l’isolement de la Russie ou des exportations de céréales de
l’Ukraine, toutes mesures que vous avez citées, l’Union européenne a agi vite,
clairement et de façon unie. Oui, nous sommes au rendez-vous de nos valeurs
humanistes lorsque nous accueillons au sein de l’Union plusieurs millions de
réfugiés ukrainiens. Oui, nous sommes au rendez-vous de l’Histoire lorsque nous
octroyons à l’Ukraine le statut de candidat à l’Union européenne à l’unanimité,
lui offrant ainsi un avenir européen. Cette unité fait notre force collective
face à une Russie dont l’isolement est chaque jour plus manifeste. Nous sommes
unis et nous le resterons.
Vous avez été nombreux à vous exprimer sur le soutien à l’Ukraine, sur ses
différentes composantes et sur ses conséquences. Je tiens à le redire : nous
avons fait le choix d’apporter à ce pays un soutien déterminé et constant. Et
je veux être très claire : ni la France, ni aucun pays européen, ni aucun État
membre du G7 n’est en guerre avec la Russie. Nous aidons un pays agressé,
l’Ukraine, à exercer son droit à la légitime défense, conformément au droit
international, en particulier à la Charte des Nations unies.
Nous avons réaffirmé ce soutien il y a quelques jours à l’Assemblée générale
des Nations unies, par la voix du Président de la République, et au Conseil de
sécurité : il est à la fois politique, diplomatique, humanitaire, économique et
financier. Il représente un effort national de 2 milliards d’euros auquel
s’ajoutent, d’une part, notre aide militaire, dont le ministre des armées va
vous exposer l’ampleur, sachant qu’une partie sera prise en charge par la
facilité européenne pour la paix, et, d’autre part, l’aide européenne, à
laquelle notre pays contribue.
J’ai à nouveau témoigné de notre soutien au Président Zelensky et à mon
homologue Dmytro Kuleba à Kiev, la semaine dernière, à l’occasion de mon
troisième déplacement en Ukraine. À Kiev, à Hostomel, à Boutcha comme à Irpin,
j’ai vu l’ampleur des destructions causées par les bombardements russes et pu
mesurer la bravoure, la détermination et l’esprit de résistance intacts du
peuple ukrainien. Je sais que plusieurs d’entre vous ont accompagné en Ukraine
Mme la présidente de l’Assemblée nationale. Je me félicite que la
représentation nationale et l’exécutif, unis, aient ainsi témoigné sur place de
la solidarité de la France.
Nous sommes solidaires de la cause que défend le peuple ukrainien, solidaires
du combat qu’il mène pour les valeurs démocratiques qui sont aussi les nôtres,
ce combat pour la paix et pour la liberté, solidaires de ses souffrances. Et
nous l’aidons, comme nous l’avons encore montré le 28 septembre en envoyant,
depuis Marseille, plus de 1 000 tonnes de fret humanitaire, rassemblées grâce
aux contributions de l’ensemble des forces de notre société : l’État et ses
opérateurs, les collectivités locales, les acteurs privés et les ONG. La France
est aux côtés de l’Ukraine depuis le début de l’agression, et elle le restera
non seulement jusqu’à ce que ce pays retrouve sa pleine souveraineté et son
intégrité territoriale, mais aussi après la guerre – car il y aura un après.
Sur le terrain, l’armée russe a subi ces dernières semaines son troisième échec
tactique. En février, elle prenait l’Ukraine en tenaille sur trois axes, au
nord, à l’est et au sud, cherchant clairement à prendre Kiev pour y renverser
le président légitimement élu par le peuple ukrainien, mais en avril, incapable
de prendre cette ville, elle s’est retirée du nord du pays. Incapable également
de s’emparer rapidement de l’ensemble du Donbass malgré le concours de ses
supplétifs séparatistes, elle a dû reculer dans la région de Kharkiv. À la
mi-septembre, une contre-offensive l’a prise de court, les Ukrainiens regagnant
9 000 kilomètres carrés de territoire.
Hier, l’Ukraine résistait ; aujourd’hui, elle reprend l’initiative, grâce à la
détermination de ses soldats, à la qualité de son commandement et à l’élan de
tout un peuple qui se bat pour son pays, grâce aussi aux équipements que nous
lui avons livrés avec nos partenaires et qui prouvent leur efficacité.
Le constat est clair : la Russie s’est enfoncée dans une triple impasse, à
commencer par une impasse sur le terrain comme le montrent ses récents reculs.
C’est aussi une impasse vis-à-vis de la communauté internationale au sein de
laquelle la Russie est de plus en plus seule, et enfin dans une impasse
vis-à-vis de sa population depuis la décision de mobilisation partielle, une
décision lourde de conséquences qui a été prise contre l’opinion d’une
population qui comprend de moins en moins pourquoi elle doit subir les
conséquences d’une guerre inutile, illégale et injuste, une guerre qu’elle n’a
pas choisie.
La fuite en avant de la Russie a été soulignée au cours de ce débat. Mais il va
falloir tenir dans la durée, ne nous y trompons pas, Mme la Première Ministre
l’a dit cet après-midi à plusieurs reprises. En effet, Moscou a choisi la fuite
en avant politique – les déclarations du président russe vendredi dernier n’en
sont que le dernier exemple. Elle a pris la responsabilité d’un chantage à la
sécurité alimentaire, auquel nous avons réagi en permettant à l’Ukraine
d’exporter à nouveau ses céréales. Dans l’esprit de l’initiative Farm que le
Président a lancée depuis le printemps, notre pays vient aussi de participer,
avec l’Allemagne, au cofinancement du transport et de la distribution par le
Programme alimentaire mondial (PAM) de 50 000 tonnes de céréales données par
l’Ukraine pour l’Éthiopie et pour la Somalie car la corne de l’Afrique est
particulièrement touchée par la crise alimentaire.
Il y a aussi un chantage à la sécurité énergétique par la coupure des vannes du
gaz alors que nous sommes témoins de mystérieuses explosions en mer Baltique.
Quant au chantage à la sécurité du site de la centrale nucléaire de Zaporijjia,
il nous a conduits à soutenir fortement les efforts du directeur général de
l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour réduire les tensions
et le risque d’un accident nucléaire, efforts qui se poursuivent en ce moment
même.
La Russie a aussi choisi la fuite en avant militaire en annonçant une
mobilisation partielle de sa population. Par la décision de mobiliser, pour la
première fois depuis 1941, la Russie prend un grand risque. Nous y voyons avant
tout un aveu de faiblesse, une reconnaissance de l’incapacité de ses forces
armées à remplir les objectifs fixés par le Kremlin. L’impact de cette
mobilisation sur le terrain est de surcroît très incertain, l’armée russe ayant
fait preuve de graves lacunes logistiques depuis le début du conflit, lacunes
qui ne disparaîtront pas en envoyant de force au front une population dont tout
montre qu’elle ne souhaite pas cette guerre – en atteste le départ du pays de
plusieurs centaines de milliers de personnes ces derniers jours, ou encore les
scènes de protestations dont nous avons été témoins dans plusieurs régions
russes. Quoiqu’en dise la propagande, il n’y a aucun élan patriotique, mais une
mobilisation subie.
Enfin, la fuite en avant est également rhétorique : les menaces irresponsables
proférées dans le but de nous intimider en sont le signe. Nous ne céderons pas,
mais nous ne tomberons pas non plus dans le piège : nous continuerons, pour
notre part, à faire preuve de la responsabilité qui doit incomber à une
puissance dotée de l’arme nucléaire.
Enfin, s’agissant de la reconstruction, le premier orateur, comme d’autres par
la suite, en a évoqué la nécessité. Je souligne que ce n’est pas à nous de
déterminer quand cette guerre prendra fin et qu’il appartiendra alors à
l’Ukraine seule de décider à quel moment, dans quelles conditions et dans quels
termes elle pourra envisager un dialogue visant à l’ouverture de négociations.
Mais il y aura bel et bien un après, j’en suis convaincue. Et c’est à nous et à
nos partenaires qu’il appartiendra alors de fournir à l’Ukraine les moyens de
se reconstruire. Nous nous y sommes engagés et commençons déjà à le faire en
vue de l’arrivée de l’hiver puisque, parmi les biens envoyés dans notre
cargaison humanitaire le 28 septembre figurait notamment du matériel de
réhabilitation d’urgence, à savoir plus de six ponts de 20 à 60 mètres de long qui
participeront à la reconstruction de la région de Tchernihiv, région où vous
vous êtes rendus, madame la présidente, messieurs les présidents de commission.
Je conclurai en rappelant qu’en aidant l’Ukraine, nous faisons notre devoir de
solidarité, notre devoir d’humanité, et nous continuerons à le faire aussi
longtemps que nécessaire.
> Les manifestations qui ont suivi la mort de Masha Amini
ont été – et sont toujours – la cible d’une répression violente qui a déjà fait
des dizaines de morts. La France a condamné, dès le 19 septembre et avec la
plus grande fermeté, les violences qui ont entraîné le décès choquant de cette
jeune femme mais aussi celle dont il est fait usage, aujourd’hui encore, contre
les manifestants.
Nous avons appelé les autorités iraniennes au respect du droit à manifester
pacifiquement, du droit au rassemblement et du droit des journalistes à exercer
leur métier. J’ai moi-même rappelé ces principes fondamentaux à plusieurs
reprises, aussitôt, à New York et à Paris, ainsi qu’à Marseille.
L’Iran a considéré que le rappel des principes fondamentaux des droits de
l’homme constituait une ingérence et a cru bon de le faire savoir à notre
ambassade sur place. J’ai donc décidé de faire convoquer le chargé d’affaires
iranien à Paris – où il n’y a pas d’ambassadeur actuellement – pour exiger la
fin de la répression et dire clairement ce que nous pensons des méthodes iraniennes.
Il a été reçu vendredi 30 septembre au Quai d’Orsay.
Au fond, ce qui est en jeu dans les rues de Téhéran et des autres villes
d’Iran, c’est la liberté. La répression est brutale. Nous condamnons, avec les
mots les plus fermes, cette répression aveugle menée contre des femmes et des
hommes qui revendiquent leur dignité – telle qu’ils la conçoivent – et la
liberté à laquelle ils aspirent. Cette aspiration est désormais visible dans
les rues, dans les universités et dans les cœurs. Les femmes d’Iran demandent à
être libres. Nous ne cesserons pas de les soutenir.
Au-delà des sanctions qui frappent ce pays depuis déjà de longues années, nous
avons engagé un travail, au sein de l’Union européenne, pour réflechir à
certaines options visant les tenants d’un régime qui conduit des manifestants à
la mort et envoie souvent les ressortissants et leurs enfants dans nos pays.
Cela ne peut pas durer. Nous devons les sanctionner. Nous le ferons en
concertation avec les autres pays.
Sébastien Lecornu
(ministre des Armées)
> Les trois éléments qui guident la doctrine de
notre soutien militaire à l’Ukraine sont assez simples. Premièrement, nous nous
efforçons de coller à la demande des Ukrainiens. Nous avons cherché à ne pas
être trop diffus dans la manière d’apporter notre aide, par la nature même des
équipements. Un dialogue opérationnel et de confiance s’est noué au fil du temps
avec le ministère de la défense ukrainien. Les besoins exprimés sont mesurés et
clairs ; nous tentons d’y répondre.
Deuxièmement, notre aide s’entoure d’une certaine
discrétion – ce sont les Ukrainiens eux-mêmes qui nous en font la demande.
C’est de cette façon que nous avons pu constater l’efficacité du système
d’artillerie Caesar : l’effet de surprise relatif que nous avons créé est la
clé de la réussite sur le champ de bataille.
Troisièmement, ce que nous promettons, nous le donnons
vraiment. Beaucoup d’annonces sont faites par certains pays, mais elles ne sont
pas toujours suivies d’effets. La France, elle, s’honore de tenir
scrupuleusement sa parole.
Je veux aussi rappeler à la représentation nationale
les trois grands chapitres d’aide militaire que nous avons apportée à l’Ukraine
depuis le début de la guerre.
Le premier chapitre a impliqué la fourniture
d’équipements de protection et d’armement individuels, de systèmes de missiles
antichars et antiaériens. Il correspondait, entre février et avril, à une
réaction d’urgence.
Le deuxième chapitre a été plus lourd : nous avons
délivré à l’Ukraine non seulement des pièces d’artilleries – notamment dix-huit
canons Caesar assortis de leurs munitions –, mais aussi de nombreux véhicules
sous blindage destinés au transport de troupes, tels que les véhicules de
l’avant blindés (VAB).
Le troisième chapitre, qui a débuté en septembre,
consiste à répondre à des demandes précises formulées par les Ukrainiens,
notamment en matière de carburants. L’accès aux carburants est absolument
décisif, y compris pour faire rouler les canons Caesar. Nous avons fixé un
calendrier de maintenance et d’approvisionnement en pièces détachées – c’est
sans doute moins spectaculaire que de fournir des pièces d’artillerie entières,
mais les pièces détachées des canons Caesar ou d’autres matériels nécessitent
un entretien et nous répondons présent. En outre, la demande en munitions est
importante, d’autant que le phénomène d’attrition qui les concerne est
particulièrement fort. Autre demande spécifique : la formation.
Malheureusement, l’attrition des artilleurs est elle aussi significative :
lorsqu’un artilleur tombe, il faut bien qu’un autre prenne sa place, ce qui
suppose de le former.
Sous l’autorité du Président de la République, un
nouvel agenda d’accompagnement militaire à l’Ukraine a été établi ; il sera
déployé dans les semaines à venir. Le président a déjà passé un certain nombre
de commandes. Par ailleurs, une mobilisation forte de la BITD – base
industrielle et technologique de défense – sera nécessaire, car notre industrie
de défense doit être en capacité de régénérer des stocks – j’en reparlerai
demain devant la commission de la défense et des forces armées.
Je veux dire quelques mots des classements, sur
lesquels ont insisté Mme Valérie Rabault et M. Boris Vallaud. Il faut savoir
que ces classements tiennent uniquement compte des éléments en source ouverte :
ils écartent une partie de l’aide octroyée par la France à l’Ukraine qui, pour
faire simple, n’est pas visible sur la place publique. En outre, les
classements agrègent des critères parfois très différents. Certains pays ont
par exemple valorisé le coût de la formation ou celui du transport des
munitions. La France a choisi de ne pas le faire, c’est un élément que je livre
à la représentation nationale.
En outre, en général, les classements ne tiennent
compte que de ce qui est promis et non effectivement livré. Je n’en dis pas
plus pour ne pas créer d’incidents avec nos amis et alliés, mais, dans les
faits, ce qu’a promis la France a été, à l’unité près, donné aux Ukrainiens.
Enfin, ces classements ne prennent jamais en
considération la facilité européenne pour la paix, laquelle représente pourtant
450 millions d’euros pour la part française, soit 20% du fonds européen. La
France n’est pas forcément meilleure ou moins bonne que d’autres pays ; je me
contente par ces propos de vous éclairer sur ces classements qui circulent sur
internet et dans la presse, classements au sujet desquels il y aurait beaucoup
à dire. Si nous devions les mettre à jour, je pense que la France progresserait
de manière assez significative par rapport à ses partenaires européens. Du
reste, nul ne conteste que nos amis et alliés américains sont les premiers
contributeurs.
Je conclus en évoquant le rôle de la France, en tant
que nation cadre de l’Otan, dans les missions de réassurance sur le flanc
oriental de l’Europe. Quelque 900 hommes sont mobilisés, la défense du ciel est
assurée grâce à des missions d’ampleur et un groupe de l’armée de terre est
positionné. Nous avons la capacité, si c’était malheureusement nécessaire,
d’atteindre le niveau de la brigade. L’investissement de la France comme nation
cadre en Roumanie aura coûté aux contribuables français 700 000 millions d’euros
pour la seule année 2022. Ces crédits n’étaient certes pas prévus, mais ils
témoignent de l’engagement de la France et de son armée.
Ce qui se passe en Ukraine nécessitera un retour d’expérience
(Retex) profond, notamment en ce qui concerne l’hybridité, la dissuasion
nucléaire et les stocks de munitions. Nous aurons l’occasion d’en discuter lors
de l’examen du PLF pour 2023 et, dans l’esprit de coconstruction avec le
Parlement et les diverses formations politiques qu’a rappelé la Première
ministre, lors de l’élaboration de la prochaine loi de programmation militaire.
Olivier Dussopt
(ministre du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion)
> [Réforme des retraites soumise à référendum] Nous n’avons pas fait ce
choix. Nous avons pris une option différente. D’abord, le Président de la République
a décidé de poser le débat pendant la campagne présidentielle. Vous conviendrez
avec moi qu’en annonçant avant l’élection que nous envisagions de reculer
progressivement l’âge de départ à la retraite, à 64 ans puis à 65 ans, nous
prenions un risque politique majeur, qui nous donne une forme de légitimité
Nous avons fait un deuxième choix : celui de la concertation. Là aussi, peut-être
conviendrez-vous avec moi qu’elle n’a pas commencé en 2022. Voilà maintenant
des années que les questions de pénibilité, d’emploi des seniors, d’équilibre
du régime et de prise en compte de la précarité sont soumis à la concertation
et font l’objet d’un travail.
Nous avons décidé, sous l’autorité de Mme la Première ministre, d’ouvrir un
dernier cycle de concertation sur la réforme des retraites. L’ensemble des
organisations syndicales et des organisations d’employeurs siégeant au Conseil
d’orientation des retraites (COR) m’ont indiqué qu’elles participeront, dès
demain, à la première réunion multilatérale de concertation que j’organise dans
ce cadre. Nous ouvrons ce cycle afin de définir le contenu de la réforme,
d’arrêter un ensemble de décisions et de trouver un maximum de compromis d’ici
à la fin de l’année. Je sais parfaitement que certains désaccords seront
difficiles, voire impossibles, à surmonter. L’objectif ultime consiste à
proposer cette réforme au Parlement – où se tiendra un débat politique et
démocratique – pendant l’hiver, pour qu’elle soit applicable au cours de l’été
2023.
Nous avons plusieurs buts : sauver le système par répartition, garantir sa
soutenabilité et sa durabilité et l’améliorer en versant de meilleures pensions
et en prenant mieux en compte la pénibilité et les carrières hachées – autant
d’objectifs sur lesquels nous pouvons nous retrouver.
Pap Ndiaye (ministre
de l'Education nationale et de la Jeunesse)
> Devant la multiplication des atteintes à la
laïcité, nous ne sommes pas naïfs. Nous agissons avec fermeté pour faire
respecter la loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques.
> Je me suis engagé à augmenter les rémunérations des professeurs en début et en milieu de carrière. Nous le faisons, sans oublier les professeurs en fin de carrière : nous leur permettrons de connaître la même évolution que leurs jeunes collègues.
> Vigilance et fermeté : nous sommes très attentifs à la protection des professeurs et des personnels de l’Éducation nationale.
> La classe de sixième est cruciale. Nous nous devons d’y améliorer les résultats et de favoriser l’égalité des chances en réformant le collège.
> Le peuple iranien montre son courage héroïque avec à sa tête des femmes qui luttent contre l’obligation du port du voile et pour leurs droits. J’apporte tout mon soutien à ces combattantes de la liberté et de la dignité.
> Notre école, faisons-la ensemble ! Encourager des initiatives locales associant tous les partenaires : c’est tout l'esprit du CNR initié par le Président.
Marc Fesneau
(ministre de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire)
> Il y a urgence à relocaliser certaines productions. Il y a plusieurs
sujets, le prix des emballages, les hausses de tarifs et de produits de
production animale et la guerre en Ukraine qui impacte les tarifs de l'énergie.
(…)
Ça participe effectivement, en termes de souveraineté alimentaire, d'une
nécessité sur tous les produits, de faire en sorte de détenir une grande part,
pour ne pas dire une totalité, de capacités productives pour faire en sorte de
lutter contre le dérèglement climatique. Pourquoi cela n'a pas marché cette
année ? Parce qu'il y a eu une très mauvaise récolte. Ça doit nous
interroger sur le modèle qui pourrait se développer, qui est un modèle de perte
de souveraineté et qui fait que, dans la mondialisation qui s'était construite,
on avait parfois délesté ou laissé à d'autres le soin de nous nourrir. C'est sur
ce point qu'il faut que nous travaillons.
> [Importations alimentaires ont doublé depuis 2000] C'est une tendance lourde. Sur les fruits et légumes par exemple, on a beaucoup perdu en capacité de souveraineté. Sur la viande également. Cela doit nous interroger. Le premier sujet, c'est d'améliorer la compétitivité de la France parce que c'est souvent une affaire de compétitivité qui fait que les produits viennent de l'importation. Deuxièmement, ça pose la question de la rémunération des agriculteurs dans un certain nombre de cas. C'est parce que la rémunération n'était pas au rendez-vous que les productions ne se sont pas développées. Troisièmement, il faut s'interroger sur les normes qu'on s'impose en France. Il faut regarder quelles sont les normes qu'imposent d'autres pays dans l'espace européen pour ne pas créer des distorsions de concurrence. La question de la distorsion de concurrence dans un espace qui est ouvert, ça n'a pas de sens si on n'arrive pas à le faire, à le faire à l'échelle européenne. Il y a un certain nombre de contraintes réglementaires qui sont plutôt franco-françaises qu'européennes et qui font perdre en compétitivité nos exploitants et industriels. J'ai lancé la semaine dernière un plan de souveraineté fruits et légumes. Ça doit porter sur la compétitivité, sur la recherche et l'innovation, sur la capacité à installer des jeunes.
> [Lait] La crise ukrainienne qui a fait flamber les
prix. Et donc, de fait, dans les discussions et les négociations entre les
producteurs, les transformateurs et la grande distribution, la mise à niveau du
prix du lait ne s'est pas faite dans des conditions satisfaisantes. Il y a une
part qui est liée en particulier à une stratégie commerciale et c'est là-dessus
qu'il faut qu'on travaille et qu'on se batte. On se bat tous les jours ou
toutes les semaines, puisqu'on a un comité de suivi des relations commerciales,
pour faire en sorte qu'on atteigne un prix du lait qui corresponde à la réalité
des prix, à la fois pour les producteurs et à la fois pour les
transformateurs.
Je note par ailleurs que vous datez votre remarque de juillet. Depuis le mois
de juillet, il y a eu un certain nombre discussions qui ont eu lieu. J'entends
qu'un certain nombre de distributeurs ont annoncé qu'ils étaient prêts à payer
500 euros les 1.000 litres. Maintenant, il faut que ça se retrouve dans les
cours de ferme, c'est-à-dire que ce n'est pas le tout de faire une annonce.
D'abord, je souhaite que l'ensemble des distributeurs se mettent dans ces
dispositions là. Et puis, qu'on fasse en sorte que la transformation puisse
trouver sa rémunération. Il faut avoir la vérité des prix vis-à-vis des
consommateurs. Quand vous vendez une brique de lait 0,72 euro, il n'y a pas de
rémunération pour les producteurs. Donc c'est un travail de tous les jours
d'arriver vers le seuil qui est aujourd'hui le seuil de rentabilité entre
guillemets, si on peut appeler ça rentabilité, en tout cas qui couvre les
charges, qui est plutôt à 500 euros.
> Il faut qu'on prenne conscience collectivement qu'être en capacité de se nourrir soi-même, c'est une des premières des libertés. Les pays qui sont aujourd'hui dans une situation délicate, ce sont les pays qui ne peuvent pas satisfaire à l'alimentation de leurs populations. Pour être capable de produire pour nos citoyens, il faut une rémunération. Et c'est vrai que pendant 60 ans, quasiment le juste prix, c'était le prix le plus bas. Or, le juste prix, ce n'est pas ça. Le juste prix, c'est celui qui permet aux producteurs, aux transformateurs et aux distributeurs, le cas échéant, de se rémunérer. Donc, on a besoin de faire un travail de conviction pour dire à nos concitoyens que l'alimentation a un prix.
> Il faut une pluralité d'installation [des agriculteurs]
et que chacun puisse trouver sa place quel que soit le modèle. Deuxièmement, il
faut quand même se mette d'accord. La France n'est pas un modèle
agro-industriel. J'invite à aller voir en Belgique, j'invite à aller voir en
Pologne, j'invite à aller voir à l'extérieur de nos frontières. Vous verrez ce
qu'est qu'un modèle agro-industriel. Ne commençons pas par caricaturer ce
qu'est le modèle français. Nous sommes ici dans une terre d'élevage. On est
plutôt sur des élevages extensifs, parfois sur des modèles pastoraux. Donc le
modèle français est plutôt atypique dans l'espace européen.
Il faut que l'ensemble des modèles puissent trouver leur place. Les sujets de
la formation et de l'innovation sont importants. Il y aussi la problématique
financière, car même des exploitations de taille moyenne, je pense à un élevage
laitier, demandent aux jeunes de mettre beaucoup d'argent. Vous vous
investissez, vous empruntez pour 10, 15 ou 20 ans. Vous n'êtes pas sûr d'avoir
la rémunération. Donc évidemment, c'est un frein. Donc il faut qu'on travaille
là-dessus. Ce sera l'objet de la loi d'orientation.
Si on veut attirer des jeunes, il faut arrêter la remise en cause de
l'agriculture et du modèle agricole français. Si vous passez votre temps à dire
que le métier que font les agriculteurs, il a tous les défauts de la terre
alors qu'il a beaucoup de vertus en termes de biodiversité, de préservation de
nos territoires, de qualité des produits qui sont faits évidemment, vous
n'attirez pas les jeunes. Vous ne pouvez pas attirer un jeune si vous lui dites
le métier que je vous propose n'est pas un beau métier. Or, c'est un beau
métier.
Christophe Béchu
(ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires)
> L’urgence climatique est là. Elle nécessite
que la sobriété ne soit pas le mot d’ordre uniquement pour l’hiver prochain.
Notre pays est celui qui a engagé les sommes les plus
importantes afin de protéger ses citoyens. Le bouclier tarifaire que nous avons
instauré vaut pour la totalité des ménages mais aussi pour les offices HLM et
il couvre le dépassement des factures. Pendant ce temps, en Angleterre ou dans
des pays européens comme les Pays-Bas ou l’Allemagne, on a multiplié par deux,
par trois ou par quatre le montant de la facture énergétique. Voilà qui montre
la réalité de notre effort.
> Notre premier effort, sur le
plan européen, était de tenter d’obtenir la réforme du marché de l’électricité,
c’est-à-dire le découplage du prix de l’électricité de celui du gaz afin de
baisser les tarifs sans que le bouclier tarifaire s’applique aux rentes de
certains énergéticiens, lesquels seront reçus demain par Agnès Pannier-Runacher
et par Bruno Le Maire.
S’agissant de l’effort en direction des entreprises et
des collectivités locales, la baisse des tarifs destinée à éviter le
remboursement de sommes indues constitue le premier étage du dispositif. Le
deuxième étage, c’est une contribution qui passe par la captation de la rente,
le troisième, c’est la rénovation publique des bâtiments, au-delà des efforts
menés dans le cadre du plan de relance.
> Nous travaillons cet automne pour préciser les
mécanismes permettant d’assurer une rénovation thermique des bâtiments aussi
bien de l’État que des collectivités territoriales. L’objectif est de conjuguer
la nécessité de passer l’hiver et celle de nous inscrire dans un processus
d’atténuation de l’urgence climatique.
> Accélérer la transition
écologique pour répondre aux engagements climatiques de notre pays, préserver
l’habitabilité de la planète et enrayer le déclin de la biodiversité : voilà
les axes principaux de la feuille de route qui m’a été assignée par la Première
ministre. Le lancement d’un premier chantier a eu lieu il y a quelques jours.
Le choix de Marseille n’était pas totalement étranger à votre présence dans
cette ville. Le chantier sera suivi d’une vingtaine d’autres, en vue d’établir,
à la fin de cette année, une feuille de route de la planification écologique
qui, conformément aux engagements du président Macron, sera présentée par la
Première ministre.
Où en sommes-nous ? À la minute où nous parlons, nos
émissions de gaz à effet de serre ont baissé de 23 % par rapport à 1990. Le
rythme de cette baisse a doublé au cours du dernier quinquennat – en
s’établissant à 12 % contre un peu plus de 5 % sous le quinquennat précédent –,
et nous devons encore le doubler pour être au rendez-vous des engagements que notre
pays a signés. Pour ce faire, nous lancerons en parallèle plusieurs conférences
avec des parties prenantes, non pour établir un diagnostic mais pour arrêter
les mesures qui seront présentées, avec un budget et avec un calendrier, à la
fin de l’année. Chaque grand secteur émetteur sera concerné à la hauteur de ses
émissions : le transport pour 30 % l’agriculture, l’énergie, l’industrie, la
consommation, sans oublier la préservation de la biodiversité, laquelle ne doit
pas être l’angle mort de notre politique de décarbonation.
François Braun
(ministre de la Santé et de la Prévention)
> Le Président de la République a souhaité que
l’on débatte de la fin de vie dans notre société. Avant même d’être une
question médicale, c’est effectivement une question de société, et il est
souhaitable que tout le monde puisse s’exprimer sur le sujet.
Si les soins palliatifs sont souvent rattachés à la
question de la fin de vie, il faut tout de même également les envisager comme
un épisode de soins à passer face à d’autres problèmes. L’habitude que l’on a
d’accoler systématiquement soins palliatifs et fin de vie contribue
probablement à leur mauvaise image.
Les soins palliatifs relèvent du ministère de la santé
et de la prévention. Je vous rejoins sur le fait que ces soins palliatifs sont
insuffisamment enseignés dans le cadre des études de santé. Si la situation
s’est améliorée puisqu’il existe maintenant des enseignements spécifiques, ces
derniers doivent encore être développés.
Je vous rejoins également lorsque vous dites que les
soins palliatifs sont insuffisamment développés sur notre territoire ; nous y
travaillons. Pour cela, il faut aussi des soignants formés aux soins
palliatifs. Le plus dangereux serait que certains de nos concitoyens décident
de mourir parce qu’ils ont mal physiquement ou psychologiquement du fait que
les soins palliatifs ne sont pas assez développés.
En tant que ministre de la santé et de la prévention,
je souhaite également donner la parole aux soignants. Ce sont souvent eux qui
sont présents au dernier moment auprès des citoyens qui souffrent. Il faut
aussi entendre leur parole lorsqu’on propose non plus de donner la vie, mais
peut-être de donner la mort. C’est un débat de société important.
Jean-Christophe Combe
(ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées)
> [Tribune : « Le débat sur la fin de vie ne doit pas nous
conduire à considérer que les personnes vulnérables sont un poids »]
L’honneur d’une société se mesure à la place qu’elle accorde aux plus fragiles.
Bien vieillir, bien mourir, les débats parfois se confondent et, face aux
artisans de confusions, il faut y mettre de l’ordre. Conformément aux
engagements qu’il a pris devant les Français, le président de la République
vient d’ouvrir deux débats essentiels. Le premier sur le « bien vieillir », le
second sur la « fin de vie ».
Ces deux débats se rejoignent en cela qu’ils interrogent le regard que la
société porte sur les vulnérabilités et sur les moyens qu’elle se donne pour
les accompagner. Ces deux débats se distinguent en cela que notre choix
collectif sur la fin de vie ne pourra pas être le symbole de l’échec d’une
société qui ne saurait pas prendre soin et accompagner les plus vulnérables.
Pour dire les choses clairement : le débat sur ce qu’est la liberté de choix
face à la mort ne devra pas nous conduire à considérer collectivement que les
personnes vulnérables sont un poids ou, pire encore, à pousser les personnes
vulnérables à le penser. Elles sont tout le contraire : des richesses.
En 2030, un tiers de la population française aura plus de 60 ans. En 2060, les
plus de 85 ans seront trois fois plus nombreux qu’aujourd’hui et en 2070, les
centenaires dix fois plus nombreux. Ce n’est pas un simple « vieillissement de
la population », c’est une transition démographique qui est en train de changer
le visage de notre société.
Face à cela, il y a trois façons de réagir. Le déni : par peur ou par mépris,
on ignore, on invisibilise, on maltraite. C’est humainement insupportable et
politiquement irresponsable. Le conflit des générations : par simplisme ou
ressentiment, on sépare, on compare, on oppose. Comme s’il fallait choisir
entre le soutien à notre jeunesse et l’accompagnement de nos aînés. Et il y a
enfin la voie que nous empruntons : l’anticipation enthousiaste d’un fait de
société dont nous devons relever les défis autant qu’en saisir les
opportunités.
Le défi d’abord d’en faire l’affaire de tous. Les enjeux du vieillissement
concernent toutes les dimensions de la vie en société : logement, mobilité,
santé, sports, urbanisme, numérique, etc. C’est donc une mobilisation générale
dont nous avons besoin, et cela dès l’enfance. Car « bien » vieillir commence
dès la naissance et l’entretien tout au long de la vie de notre santé et de
notre regard positif sur le vieillissement. Le prévenir et changer de regard
sur les vulnérabilités sont nos priorités. Faire reculer l’âgisme en changeant
nos regards, c’est d’ailleurs le thème de la « Semaine bleue » qui se tient en
ce moment pour nous rappeler tout ce que les retraités apportent à la société.
Le défi ensuite de répondre à l’aspiration d’une majorité de Français qui
souhaitent pouvoir vieillir chez eux. C’est pour cela que le gouvernement
soutient financièrement l’adaptation des logements et la transformation des Ehpad
pour en faire des centres de ressources gériatriques au service du maintien à
domicile. C’est pour cela que nous devons mieux reconnaître et soutenir les
aidants. Que nous devons collectivement amplifier nos mesures de soutien aux
métiers du « bien vieillir », pour attirer et fidéliser des professionnels compétents,
mieux rémunérés et reconnus. Chacun doit prendre ses responsabilités : l’État,
les collectivités, les opérateurs, les formateurs. Personne ne réussira seul.
Les opportunités sont tout aussi nombreuses. Celle de bâtir une société plus
engagée : un tiers des bénévoles associatifs sont des retraités, 55 % des
maires avaient plus de 60 ans en 2020 et combien de grands-parents sont
indispensables à la solidarité familiale et à la transmission de savoirs, de
souvenirs et d’expériences. Les enjeux du vieillissement peuvent être aussi de
formidables terrains d’innovation et de création d’emplois.
Bâtir une société dans laquelle chacun vieillit bien n’est pas qu’une question
technique ou financière, c’est une question de société, c’est une question
d’autonomie et de lien social. Être autonome, c’est pouvoir choisir là où on
veut vivre et y être protégé. Les violences et les maltraitances sont
inacceptables que ce soit dans les rues de Cannes, chez soi ou en Ehpad. Être
autonome, c’est aussi être reconnu dans son pouvoir d’agir. Ce n’est pas parce
que les gens vieillissent qu’on doit penser à leur place !
Être en lien, c’est se sentir utile, au sein de sa famille, d’une association
ou de son quartier, c’est pouvoir travailler jusqu’à l’âge de la retraite en
prévenant les maladies chroniques sur un marché du travail qui ne rejette pas
les seniors. Être en lien, c’est pouvoir participer à la vie de la cité en
étant visible, représenté et écouté.
L’honneur d’une société se mesure à la place qu’elle accorde aux plus fragiles.
Le débat sur la « fin de vie » comme celui sur le « bien vieillir » doivent
donner la parole aux premiers concernés, à celles et ceux qu’on n’entend pas et
à celles et ceux qui en prennent soin. Ils sont une magnifique occasion de
changer de regard sur la vulnérabilité pour en comprendre toute la richesse. De
faire émerger une société plus humaine et plus solidaire, dans laquelle chacun
compte, chacun est important. Des 1000 premiers au dernier jour de sa vie.
Gabriel Attal (ministre
délégué chargé des Comptes publics)
> Il faut continuer à accompagner les
entreprises face à l’explosion du prix de l’énergie.
N’en déplaise à certains qui le contestent parfois sur
ces bancs, soutenir les entreprises, c’est soutenir l’économie française, c’est
soutenir les Français qui travaillent et qui veulent pouvoir continuer à
travailler et conserver leur emploi. Nous l’avons fait depuis le début de cette
crise et nous continuerons. Le bouclier tarifaire qui bénéficie à 1,5 million
d’entreprises qui réalisent moins de 2 millions d’euros de chiffre d’affaires
et emploient moins de dix salariés, sera prolongé.
Les entreprises qui sont au-dessus de ce seuil sont
évidemment très inquiètes de l’envolée des prix. Vous pouvez les rassurer, car
nous sommes d’abord mobilisés pour obtenir une baisse des prix sur le marché.
Bruno Le Maire est présent à une réunion du conseil pour les affaires
économiques et financières, le conseil ECOFIN, en vue d’avancer au niveau
européen afin que le marché européen de l’électricité évolue pour faire baisser
les prix.
Deuxièmement, nous avons mis en place un fonds de 3
milliards d’euros pour accompagner les entreprises auxquelles vous faites
référence. Nous avons commencé à assouplir les critères et nous cherchons à
continuer. En tout état de cause, elles peuvent se rendre sur le site
impots.gouv.fr où un simulateur leur permettra de vérifier si elles peuvent
demander une aide allant jusqu’à 50 millions d’euros pour les plus grandes
entreprises.
Enfin, oui, il faut accompagner nos concitoyens qui se
chauffent avec des pellets de bois. C’est la raison pour laquelle, à la demande
de la Première ministre, nous travaillons sur un nouveau dispositif. A priori,
nous retiendrons les mêmes critères que pour le fioul, parce que nos concitoyens
qui se chauffent au bois ont fait ce choix de transition pour des raisons tant
écologiques qu’économiques et que nous avons la responsabilité de les
accompagner.
Roland Lescure
(ministre délégué chargé de l’Industrie)
> [Supposée inefficacité des sanctions prises à l’encontre de la Russie]
Il y a quelques mois, les sanctions tout court étaient mises en doute ;
aujourd’hui, ce sont les sanctions sur le gaz que l’on discute. Or comme il
n’existe pas de sanctions sur le gaz, c’est au tour des sanctions sur l’énergie
d’être contestées. Parmi les sanctions qui ont été prises depuis le 31 mai
dernier, l’embargo sur le pétrole russe a eu un impact significatif sur
l’économie russe, sans véritablement affecter l’économie française. Le prix du
pétrole a ainsi diminué de 20 à 30 dollars, baisse qui a été accompagnée
d’efforts importants, matérialisés par le rabais à la pompe.
Il est clair que l’économie russe subit une forte récession. La Première
ministre et la ministre des affaires étrangères l’ont rappelé, le PIB de la
Russie s’est réduit de 6 % en 2022. C’est considérable. Le gouvernement russe
lui-même admet que l’économie du pays aura reculé au moins de 3 % cette année –
on s’attend à 4 % de récession supplémentaire en 2023 ! L’inflation en Russie
s’établit aujourd’hui à 15 %. Ajoutons que des chiffres ont été calculés avant
la mobilisation générale qu’a déclarée Vladimir Poutine, laquelle n’aura sans
doute pas d’impact positif sur l’économie russe. On voit l’effet qu’elle a déjà
eu en constatant le nombre de sorties du territoire, et je ne parle même pas du
« moral des troupes ». Il faut le dire et le répéter : les sanctions ont bien
un impact. On nous dit trop souvent que l’économie russe n’est pas affectée par
les sanctions alors qu’elle l’est fortement !
Notre engagement aux côtés du peuple ukrainien dans ce conflit ne se fait pas
sans peine pour notre économie. Les industries dont j’ai la charge sont
considérablement touchées par la hausse du prix des énergies.
Sous l’autorité de la Première ministre, le ministre de l’économie et moi-même
travaillons à résoudre ce problème. Bruno Le Maire sera d’ailleurs ce soir et
demain au Luxembourg pour négocier avec nos partenaires européens des mesures
d’atténuation de la hausse du prix des énergies sur les industries européenne
et française. Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, se
trouve à Bruxelles depuis vendredi et y restera encore quelques jours pour
s’assurer que le marché de l’énergie fonctionne davantage et que les prix de
l’énergie baissent de manière durable. Reconnaissons que les efforts ont été
accomplis, la plupart d’entre vous les ont même votés.
Sur l’augmentation des tarifs de l’électricité et d’autres énergies qui pèsera
sur les Français l’année prochaine, la hausse des tarifs sera cinq fois
inférieure à celle enregistrée à peu près partout en Europe. Nous avons prévu
d’accompagner les ménages les plus modestes pour les aider à absorber cette
hausse.
La France soutient son économie ; cela a été voté ici, soyons-en fiers ! Nous
devrons faire davantage d’efforts, mais la situation actuelle est aussi le coût
à payer pour aider les Ukrainiens et préserver la paix.
> Concernant les entreprises françaises qui ont choisi de
rester en Russie. Sur ce point, je serai extrêmement prudent et éviterai de
donner des leçons. Chacun peut avoir ses idées ; certaines seraient sans doute
anticonstitutionnelles, parce que confiscatoires, d’autres ne pourraient
clairement s’envisager que dans un cadre européen. (…)
Les entreprises citoyennes doivent le rester. Mais attention aux idées qui
pourraient, j’insiste, être anticonstitutionnelles et affaiblir nos entreprises
par rapport à d’autres acteurs européens ou affaiblir des entreprises déjà
affectées.
Concernant les entreprises françaises qui sont en Russie, notre credo est très
clair : les sanctions prononcées par la communauté internationale, notamment
par l’Union européenne, doivent être respectées – toutes les sanctions, rien
que les sanctions ! On ne peut pas imaginer que des entreprises qui se trouvent
aujourd’hui en Russie ne respectent pas la loi. Au-delà, veillons à ne pas
montrer du doigt les entreprises fragilisées et celles qui sont peut-être déjà
en train d’organiser leur sortie du territoire russe. Une chose est claire :
celles qui ont déjà quitté la Russie n’ont pas fait d’argent au passage et ont
sans doute subi quelques pertes – c’est le modèle de l’entreprise citoyenne.
Certaines entreprises organisent encore leur départ. En septembre, Capgemini et
Air Liquide ont annoncé l’abandon de leurs activités en Russie, décision qui
concerne des centaines d’employés. Capgemini a même proposé à ses employés un
accord afin qu’ils puissent travailler à Lisbonne, ce que certains employés
russes ont accepté. Bref, ne montrons pas du doigt les entreprises présentes en
Russie qui affrontent déjà une situation extrêmement difficile. La décision de
rester sur place relève de leur seule responsabilité, qu’elles engagent face à
leurs actionnaires, avec un enjeu relatif à leur réputation et à leur
implication, et tous les risques que cela comporte.
Mesdames et messieurs les députés, soyons fiers de ce que la France et son
économie ont fait pour soutenir l’Ukraine. Merci à tous et à toutes d’avoir
participé à ce débat.
Olivia Grégoire
(ministre déléguée chargée des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce, de
l’Artisanat et du Tourisme)
> L’inflation lissée sur un an atteint 5,8 % ;
l’inflation des prix alimentaires, elle, atteint 7,7 %. L’inflation est plus
forte sur les prix alimentaires, c’est vrai. C’est pourquoi nous travaillons
sans relâche pour protéger non seulement les producteurs et les agriculteurs,
mais aussi les consommateurs et les artisans. (…)
Faut-il en faire plus ? Certainement. Nous
continuerons de travailler sur ce sujet. Conjointement avec Marc Fesneau,
j’anime toutes les semaines le comité de suivi des relations commerciales
Egalim et Egalim 2. C’est toutes les semaines que nous appelons à la
responsabilité la grande distribution, dont une partie prend effectivement ses
responsabilités.
> Nombre de nos boulangers
souffrent. Nous nous efforçons de mettre au point un mécanisme européen pour
mieux les protéger. Les boulangers, souvent constitués en très petites
entreprises (TPE), sont protégés par les tarifs réglementés de vente (TRV).
Aujourd’hui, 1,5 million de TPE bénéficient d’une sorte de bouclier tarifaire,
du même acabit que celui qui protège les ménages. Même si les boulangers
souffrent, il est important qu’ils contactent leur fournisseur d’énergie pour
s’assurer de leur éligibilité au TRV. Cela peut paraître technique, mais ce
n’est pas un élément de langage. Le TRV protège 1,5 million d’artisans.
Charlotte Caubel
(secrétaire d’Etat chargée de l’Enfance)
> [Délégation aux droits des enfants à l’Assemblée nationale] Avec la
création de cette délégation transpartisane, vous envoyez un message clair aux
enfants et aux jeunes de notre pays sur la priorité qui leur sera désormais
accordée dans les travaux de l’Assemblée. Vous envoyez également un message aux
acteurs et aux professionnels du secteur de la protection de l’enfance : ils
ont besoin de votre confiance pour maintenir leur engagement, dont nous savons
tous combien il est important. Je me tiens évidemment à la disposition des
membres de la délégation aux droits des enfants pour travailler avec eux au
quotidien.
> Concernant la contractualisation entre l’État et les départements dans le
domaine de la protection de l’enfance. Je peux, à ce stade indiquer que
soixante-dix-neuf départements ont d’ores et déjà signé avec l’État ou sont sur
le point de le faire. En trois ans, nous avons réussi à renforcer la
coopération entre l’État et les départements en matière de protection de
l’enfance, ce dont nous pouvons nous féliciter. Nous avons ainsi développé des
actions très concrètes, en particulier dans le champ de la santé.
Nous devons toutefois aller plus loin, je le sais, en renforçant encore
davantage cette coopération dans les territoires. Nous avons déjà eu l’occasion
d’en parler ensemble : je souhaite, en particulier, renforcer la coordination
de l’État avec deux acteurs importants, l’éducation nationale et la justice,
qui participeront à l’avenir à la contractualisation avec les départements, car
leur action est indispensable pour protéger nos enfants.
Laurence Boone
(secrétaire d’Etat chargée de l'Europe)
> Nous agissons contre la hausse
des prix de l'énergie ! Les ministres de l'énergie de l'UE se sont réunis
vendredi pour prendre des mesures européennes.
- décision sur les économies d'énergie :
les États membres se sont engagés à réduire la demande d'électricité de 10 %,
notamment aux heures de pointe, en plus de l'engagement pris en juillet de
réduire la demande de gaz de 15 %.
- décisions solidaires : partage des
revenus pour les producteurs d'électricité capables de produire à bas coût
(plafond de 180 €/MWh) ; mettre en place une contribution de solidarité sur les
entreprises qui extraient des énergies fossiles et mènent des activités
de raffinage.
La France veut aller plus loin pour
réduire les prix de l'énergie :
- étendre le système en Espagne et au
Portugal à toute l'Europe pour réduire le prix moyen de l'électricité de 100
€/MWh pour tous les Européens.
- plafonner le prix du gaz et mutualiser
nos achats de gaz au niveau européen pour garantir les meilleurs prix.
- repenser notre marché de l'électricité
pour que les prix de l'électricité en Europe ne dépendent plus des énergies
fossiles importées.
> [Guerre de Poutine contre l’Ukraine] Les sanctions marchent très bien en Russie, on affaiblit l'économie et leur capacité de se réarmer.
> [Répression des manifestations des femmes en Iran] l'Union européenne discute de sanctions pour toutes les personnes qui sont impliquées dans ces violences.
► Assemblée nationale
Yaël Braun-Pivet (présidente)
> [Déclaration devant les députés] La semaine
dernière, j’ai conduit à Varsovie puis à Kiev une délégation transpartisane de
notre assemblée. Avec Valérie Rabault, première vice-présidente, chargée des affaires
internationales, que je salue, M. Jean-Louis Bourlanges, président de la
commission des affaires étrangères, M. Thomas Gassilloud, président de la
commission de la défense nationale et des forces armées, et M. Pieyre-Alexandre
Anglade, président de la commission des affaires européennes, sans oublier Anne
Genetet, députée des Français de l’étranger et, en particulier, des Français
d’Ukraine, nous sommes allés dire l’appui indéfectible de l’Assemblée nationale
française à l’Ukraine et à son peuple.
Cet appui s’est manifesté depuis le premier jour.
Certains ici ont encore en mémoire le visage du président Zelensky s’adressant
au Parlement sur les écrans de cet hémicycle. Quelques semaines plus tôt, dès
le 1er mars 2022, nous débattions déjà de la guerre en Ukraine. Elle
n’a pas cessé depuis de nous préoccuper. Je tiens à saluer depuis ce perchoir
mon homologue, Rouslan Stefantchouk, président de la Rada. Il nous a accueillis
deux jours durant et accompagnés.
À ses côtés, notre délégation s’est rendue sur le
terrain, au contact des Ukrainiens. Représentants de nos nations respectives,
notre place est auprès des gens car nous avons en commun, quels que soient nos
pays et quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons, le fait de les
aimer et le devoir de les servir. À Tchernihiv, nous avons vu les immeubles
éventrés, les visages creusés, les vies brisées ; nous avons vu aussi la
formidable résistance des Ukrainiens, leur détermination à se battre contre
l’agresseur russe et, déjà, les premiers efforts de reconstruction, auxquels la
France s’honore de participer. Nous avons promis d’en être les témoins et les
messagers, comme nous avons promis au président Zelensky et au président
Stefantchouk de mener avec eux la bataille de l’opinion publique en Europe.
En tant que responsables politiques, nous avons le
devoir de rappeler inlassablement à nos concitoyens que le combat que mènent
les Ukrainiens est celui de nos valeurs, celles de la démocratie, de
l’humanisme, de la liberté et de la civilisation européenne. Qu’il s’agisse de
notre assemblée, de notre pays, de notre Europe, tous, nous avons le devoir de
les soutenir et de condamner fermement cette intolérable agression militaire de
la Russie, qui a fait bien trop de victimes et d’exilés. Tous, nous avons le
devoir d’empêcher des récits autres que la vérité prospérer parmi nos
concitoyens.
Pour que le soutien de l’Assemblée nationale à
l’Ukraine continue de s’inscrire dans la durée, nous avons souhaité que nos
deux chambres signent un protocole d’accord pour développer des coopérations
techniques et des échanges d’expériences, échanges qui seront également utiles
dans le cadre du processus d’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne.
J’invite solennellement chacun d’entre vous à se saisir de ce protocole et à
faire vivre cette coopération renforcée avec nos amis de la Rada.
► Partis politiques
● Renaissance
[Nota: dans ce parti, les propos de ses membres qui ne sont pas centristes
et se considèrent de droite ou de gauche ne sont pas retranscrits]
Aurore Bergé (présidente du groupe à l’Assemblée
nationale)
> Pour Méline, tout a commencé par ce qu’elle appelle « une petite gifle
». « Puis les coups ont continué. Un coup de poing, puis deux. Quand mon
compagnon rentrait avec un problème de travail, c’est moi qui prenais le soir.
On reste pour les enfants. On se dit que ce n’est pas possible. Que ça ne va
pas recommencer. »
Alexandra, elle, est restée vingt-neuf ans avec son bourreau. Au bout de la première
année, pour elle aussi, ça a commencé par une gifle. « Après, c’était des coups
de poing, des coups de botte, j’ai été défigurée. Alors moi, je le dis aux
femmes : dès que vous recevez une gifle, allez porter plainte. Il ne faut pas
avoir peur ; même des fois, par amour, on ne veut pas le faire. Mais il y a des
institutions, des associations, des personnes qui sont là pour nous aider. »
Depuis plusieurs semaines, on loue la vertu de celui qui reconnaît des faits de
violence conjugale. Depuis plusieurs semaines, on entend ceux qui parlent de
leur « affection » pour un homme qui frappe sa femme. Depuis plusieurs
semaines, on fait fi des règles élémentaires de l’État de droit. On jette le
discrédit sur les femmes et les hommes, policiers et gendarmes, qui, au péril
de leur vie, interviennent après des signalements de violences conjugales.
On jette le discrédit sur l’institution judiciaire. On jette en fait des dizaines d’années de
combat de nos associations, qui ont permis aux victimes d’être accompagnées par
la seule voie susceptible de mettre un terme à leur souffrance : la voie
judiciaire.
Je crois que ce sujet appelle le calme et non le trouble ou le désordre. Il
mérite mieux que des esclandres et je suis navrée que vous vous reconnaissiez
si bien dans les propos que je viens de tenir. Est-ce que tout fonctionne
aujourd’hui,? La réponse est non. Mais est-ce que des progrès ont été accomplis
? La réponse est oui. C’est le conjoint violent qui doit quitter le domicile.
Nos policiers, gendarmes et magistrats sont formés. Les dépôts de plainte sont
facilités jusque dans nos hôpitaux. Les téléphones grave danger (TGD) sont
déployés.
Alors oui, nous devons faire mieux. Et cela commence par nos attitudes, les mots que nous employons. Ça commence par le respect des victimes et le fait d’être au clair avec notre État de droit.
> [Intervention à l’Assemblée nationale] Mon premier mot
s’adresse aux Ukrainiennes et aux Ukrainiens attaqués, blessés, violés, tués.
Le 24 février dernier, Vladimir Poutine et son gouvernement ont décidé, seuls,
et délibérément, de violer la Charte des Nations unies et d’attaquer un pays
libre et souverain. Désormais, ils prétendent annexer de force des pans entiers
de l’Ukraine. Nous le disons clairement ici : jamais nous ne reconnaîtrons les
résultats des référendums d’annexion de quatre régions ukrainiennes. C’est pour
moi, purement et simplement, un « nationicide », la négation même de l’idée de
nation.
Depuis le début, le peuple ukrainien se bat courageusement pour son intégrité,
sa liberté et son identité. Dans ce combat, ce n’est pas seulement leur terre
qu’il défend, mais aussi nos valeurs et celles de l’Union européenne : la paix,
la liberté et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, autant de valeurs
que le régime de Poutine veut réprimer.
Mais, contrairement à 2014, lors de l’annexion de la Crimée, l’Union européenne
a su répondre de façon forte et unanime face à l’agression préméditée de la
Russie. Sous la présidence française de l’Union européenne, nous avons adopté
un paquet de sanctions économiques, politiques et financières d’une ampleur
inédite. Notre présidence a su défendre l’idée de l’autonomie stratégique
européenne. Nous avons exprimé sans ambiguïté notre soutien à l’Ukraine et à
son effort de guerre, notamment grâce à des mesures économiques et des
livraisons militaires importantes. Comme vous l’avez souligné, madame la Première
ministre, nous avons également accueilli les réfugiés de guerre ukrainiens, par
solidarité, en cohérence avec nos valeurs et dans le respect de la Convention
de Genève.
Affirmons-le : la solidarité avec le peuple ukrainien, c’est l’honneur de la
France. Nous refusons de croiser les bras devant l’impérialisme russe.
Certains – et nous les entendons jusque dans l’hémicycle – appellent désormais
à remettre en cause ces sanctions, affirmant qu’elles sont inutiles, et
voudraient ainsi que l’invasion d’un État souverain et la mort de milliers de
personnes restent sans conséquence.
En sanctionnant la Russie, nous affaiblissons son économie, et donc son effort de
guerre. Le PIB russe recule ainsi d’ores et déjà et le pays est en récession.
La Russie ne peut plus importer de technologies pour ses industries ou
emprunter sur les marchés. À ceux qui se font le relais de sa propagande, je
pose donc la question : si les sanctions étaient si inefficaces, pourquoi
Poutine chercherait-il désespérément à les faire lever ?
Certains, ici, jouent avec les peurs de nos concitoyens. Ils trouvent des
solutions toutes faites, considèrent que la France et l’Europe sont
responsables de la crise que nous vivons parce qu’elles ont choisi de défendre
la liberté du peuple ukrainien, et donc nos valeurs.
La Russie nous combat sans pudeur, en déployant sa propagande dans les médias
et sur les réseaux sociaux, en planifiant des cyberattaques sur nos
installations, en s’attaquant à notre sécurité alimentaire, au prix de
l’énergie, à la sécurité nucléaire, et c’est nous qui serions coupables ? À
celles et ceux qui accablent sans cesse l’Union européenne, je dis : envoyez
plutôt vos doléances au Kremlin ! Parlez directement à vos créanciers !
Les faits sont là, documentés, illustrés, précis, incontestables. C’est en
Ukraine que les villes se font détruire à coups de mortier : Marioupol en est
le triste symbole. C’est en Ukraine que déferlent des soldats russes :
avez-vous vu des troupes ukrainiennes en Russie ? C’est en territoire ukrainien
que sont dénoncées chaque jour des exactions de l’armée russe, allant de
l’exécution sommaire au viol et à la torture. Et c’est en territoire ukrainien
que l’on déterre, dans des charniers, des dizaines de corps humains.
Remettre en cause l’existence de ces crimes, c’est du négationnisme. Tôt ou
tard, les autorités russes auront à répondre de ces crimes de guerre. Il n’y a
pas si longtemps encore, d’une extrême part à l’autre de l’hémicycle, on
entendait vanter le modèle politique russe. Quel modèle ? Celui où la
population est embrigadée de force dans une guerre à laquelle elle s’oppose ?
Celui qui organise des référendums fantoches pour annexer des terres et des
peuples contre leur gré ? Celui qui emprisonne, réprime, élimine toute forme de
protestation ? Quelle parodie de démocratie ! C’est peut-être votre modèle, mais
ce n’est certainement pas le nôtre.
Vous pouvez continuer à fermer les yeux, à vous boucher les oreilles : même si
la France n’est pas en guerre, ce conflit nous touche dans notre économie et
notre quotidien. À ceux qui, au sein de cet hémicycle, prétendent que nous ne
protégeons pas les Français de ses effets économiques, je pose la question :
qui prolonge la réglementation des tarifs de l’électricité ? Pas vous. Qui a
versé un chèque énergie à des millions de ménages ? Qui a adopté la loi du 16
août 2022 pour la protection du pouvoir d’achat ? Pas vous ! Oui, la guerre a
des conséquences. Notre majorité et le Gouvernement se sont, dès le début,
mobilisés pour y faire face ; ils continueront aussi longtemps que nécessaire.
Nous le disons haut et fort : jamais nous ne céderons au chantage ni aux
menaces de Poutine. Quant à ceux qui persistent à se gargariser de son régime,
je les invite à se rappeler le premier mot de notre devise nationale. Mesdames
et messieurs les députés, la liberté n’est pas un vain mot que l’on se contente
d’invoquer lors des meetings, mais un principe à faire vivre, à défendre quand
il est en péril ! C’est là tout le sens
du soutien que, depuis le premier jour de la guerre, la France apporte à
l’Ukraine et à son peuple – un soutien au sujet duquel notre groupe n’a jamais
connu ni ne connaîtra la moindre ambiguïté.
Benjamin Haddad
(porte-parole du groupe à l’Assemblée nationale)
> [Intervention à l’Assemblée nationale] Nous sommes réunis aujourd’hui
pour débattre du soutien à l’Ukraine. Mais à travers l’Ukraine, c’est de la
France que nous parlons : de son rôle dans le monde, de sa mission et de son
intérêt national.
Nous soutenons l’Ukraine, parce que la France est toujours grande quand elle
est avec les nations qui luttent pour leur liberté. Le jeune capitaine de
Gaulle le savait quand il combattait en 1920 aux côtés des troupes de Pilsudski
pour l’indépendance de la Pologne face à l’URSS ; le général de Gaulle aussi
qui, comme François Mitterrand, était avec nos alliés dans les grandes crises
de Cuba ou des euromissiles.
« L’Ukraine a toujours aspiré à être libre », disait Voltaire dans son Histoire
de Charles XII – cette Ukraine qui a connu le génocide de l’Holodomor, les
famines organisées par Staline sur son sol, cette Ukraine qui vota à 90 % pour
son indépendance en 1991 et dont les jeunes sont morts pour le drapeau européen
à Maïdan. Ces Ukrainiens se battent aujourd’hui pour leur liberté face à
l’impérialisme.
Nous soutenons l’Ukraine, parce que nous défendons notre sécurité et nos
intérêts. Nous n’avons pas choisi cette guerre. Nous avons tenté de l’empêcher
par la diplomatie. Le Président de la République n’a cessé de dialoguer avec
les présidents Zelensky et Poutine : il a fait entendre la voix de la France
quand tant d’autres avaient abandonné. C’est le président russe qui a tourné le
dos à la diplomatie, choisi la guerre, puis l’escalade en mobilisant son peuple
et en violant le droit, une fois de plus, avec l’annexion illégale de
territoires.
La seule façon d’arrêter cette guerre est d’aider l’Ukraine à se défendre,
d’acculer la Russie pour mettre fin à l’agression, d’imposer un rapport de
forces. Soyons clairs : si nous n’avions pas soutenu l’Ukraine, cette guerre
aurait été plus meurtrière, plus longue et plus étendue sur l’ensemble du
territoire ukrainien.
Si nous cédions aux intimidations de Poutine, au chantage nucléaire, si nous
imposions un arrêt des combats au moment où les Ukrainiens contre-attaquent, la
paix et la stabilité arriveraient-elles comme par magie ? Ne soyons pas naïfs :
la faiblesse invite à l’agression. Imaginez un cessez-le-feu avec
reconnaissance des annexions : le régime de Poutine prendrait le temps de
réarmer, profiterait de la levée des sanctions pour se refaire et lancer une
nouvelle attaque contre Kiev.
Poutine ne conteste pas l’élargissement de l’Otan ou le statut du Donbass, mais
l’existence même de l’Ukraine. Pour s’en convaincre, il suffit de le lire et de
l’écouter. L’histoire nous apprend d’ailleurs que la paix ne vient jamais avec
la soumission à l’agression.
Pourtant, les voix de la défaite s’élèvent. Ce sont toujours les mêmes : une
colonne de capitulards prêts à se coucher devant la force. Ce qui les dérange,
c’est que les démocraties libérales résistent, tiennent. Pendant des années,
ils ont répété avec Poutine et Orban qu’elles étaient faibles, exsangues et
décadentes. Ils espéraient que l’Ukraine s’effondrerait et que les Européens se
diviseraient. Ils sont fidèles à ceux qui les ont précédés. « Pourquoi se
battre pour un petit pays si lointain dont nous savons si peu ? » se
demandent-ils comme Neville Chamberlain à Munich. « Mourir pour Dantzig, non !
» s’exclament-ils comme Marcel Déat en 1938.
Si nous les avions écoutés, nous serions actuellement les alliés de la Russie.
Si nous les avions écoutés, nous serions sortis du commandement militaire
intégré de l’Otan et nos alliés prendraient sans nous des décisions majeures
concernant cette guerre. Est-ce cela, être souverain ? Si nous les avions
écoutés, nous n’aurions pas élargi l’Otan, laissant plus de nations – comme les
pays baltes – en proie à l’agression.
Si nous les avions écoutés, nous n’aurions pas livré d’armes, puisque la
défaite de l’Ukraine était inéluctable et que nous ne devions pas devenir
cobelligérants, comme ils aimaient à le répéter. Sept mois plus tard, nous ne
sommes pas cobelligérants : pas un soldat français ne combat la Russie, et
l’Ukraine se défend, contre-attaque et reprend du terrain. C’est l’honneur de
la France d’aider les Ukrainiens à se défendre en livrant des armes, notamment
des canons Caesar, et en formant les soldats ukrainiens. C’est l’honneur de la
France de prendre ses responsabilités de nation-cadre en déployant des soldats
en Roumanie aux côtés de nos alliés.
Ils se sont toujours trompés, à tous les tournants. Si nous les avions écoutés,
notre continent serait plus dangereux, notre pays serait isolé et les
Ukrainiens seraient abandonnés et assassinés.
Alors, il faut tenir. La guerre n’est pas finie. L’hiver sera dur, a prévenu le
Président de la République. Notre stratégie fonctionne, mais quand l’histoire
est tragique, les dénouements faciles et rapides n’existent pas. Restons
calmes. Gardons notre sang-froid. En difficulté sur le terrain, la Russie
voudra nous diviser, nous voir céder au chantage, elle redoublera de manipulations
et aura chez nous ses relais qui instrumentaliseront les peurs des Français.
La France doit continuer d’incarner sa voix pour la sécurité du continent. Les
prochains mois vont être décisifs. Face au retour de la guerre, montrons aux
Ukrainiens, aux Européens et au monde que la France tient son rang et assume sa
puissance, qu’elle guide l’Europe dans ce moment de crise.
Livrons plus d’armes à l’Ukraine pour qu’elle se défende, reprenne son
territoire et gagne la guerre. Livrons-lui plus d’armes pour dire à la Russie
et au monde que l’agression ne paie jamais. Livrons-lui plus d’armes pour que
nos frères européens, polonais, lituaniens, estoniens ou roumains sachent que
la France est toujours avec eux, que l’Europe se protège et les protège face aux
menaces à nos frontières.
Chaque jour, les Ukrainiens meurent pour la liberté de l’Europe. Nous serons à
la hauteur de leur sacrifice : nous ne faillirons pas, nous tiendrons.
Pieyre-Alexandre
Anglade (député)
> [Guerre de Poutine contre l’Ukraine] j’ai vu de mes yeux l’horreur de
cette guerre. Comme eux, j’ai admiré le courage et la force d’âme du peuple
ukrainien et de ses plus hauts responsables politiques.
Nous avons rencontré ensemble le cœur battant de la résistance ukrainienne, le
président Zelensky et ceux qui l’entourent, des femmes et des hommes qui, dès
les premières heures de la guerre, étaient les cibles principales de Vladimir
Poutine et qui auraient pu fuir mille fois mais qui ont fait le choix de rester
aux côtés de leur peuple et de résister.
Lors de notre entretien avec le président Zelensky, il nous a remerciés pour le
soutien actif qu’apporte d’ores et déjà la France à l’Ukraine mais il a aussi
formulé plusieurs requêtes. Il nous a en particulier demandé de dire la vérité
sur ce que nous avons vu et entendu. Voici donc la ou plutôt les vérités dont
je souhaite témoigner aujourd’hui.
En Ukraine, la Russie de Vladimir Poutine ne se comporte plus comme une nation
civilisée mais comme un État voyou menant une guerre d’une violence inouïe,
niant tous les principes humanitaires. Partout où l’armée russe passe, elle
sème la désolation, la souffrance et la mort, frappant en priorité les infrastructures
civiles : les écoles, les hôpitaux et les habitations sont visés. Les soudards,
les hommes de main – parce que l’on ne peut plus les appeler, à proprement
parler, des soldats – qui la composent pillent, pratiquent la torture, violent
femmes et enfants, assassinent sans raison, organisent les enlèvements
d’enfants.
La vérité c’est qu’Izioum, Marioupol et Boutcha ne sont malheureusement que des
théâtres d’atrocités parmi bien d’autres et que, dans chacun des villages
libérés, on trouve des salles de torture. La question ne se pose même plus de
savoir s’il y a eu ou non des crimes de guerre. Il y a pléthore de ces crimes.
Mais les mots décrivant l’horreur ne peuvent suffire. Je veux vous dire à quel
point il est important que nous restions mobilisés, que la France et l’Europe
restent mobilisées dans leur soutien à l’Ukraine.
Ce soutien est d’autant plus nécessaire que la volonté de puissance du
président russe ne semble plus connaître de limite. Car qui peut croire, après
son dernier discours transpirant la haine à l’égard de l’Occident, qu’il
limitera ses velléités impérialistes à l’Ukraine ? En organisant des simulacres
de référendums, en laissant planer la menace nucléaire, la Russie a franchi une
étape supérieure dans sa volonté de semer la terreur et de s’emparer, par la
force, de territoires qui ne lui appartiennent pas.
Mais ne nous y trompons pas. Cette annexion en grande pompe et ces menaces ne
font que révéler l’échec du projet de Vladimir Poutine sur le terrain et sur le
théâtre du monde car la Russie est de plus en plus affaiblie et isolée. Preuve,
s’il en fallait, que les livraisons d’armes permettent aux Ukrainiens, non
seulement de résister mais de contre-attaquer et de gagner des batailles. Preuve
que les sanctions européennes affaiblissent considérablement l’effort de guerre
russe.
Quelle sera l’issue de cette guerre odieuse ? Nul ne le sait encore mais je
reviens de notre déplacement avec une conviction forte : l’Ukraine peut gagner
cette guerre, elle en a la détermination absolue et le courage. C’est la raison
pour laquelle il est nécessaire qu’avec nos partenaires européens, nous
poursuivions les livraisons d’armes et les sanctions. En outre, chez nous, il
faut opposer un front uni en faveur de l’Ukraine, sans rien céder aux valets de
Poutine qui, jusqu’au sein de cet hémicycle, se font les relais honteux de sa
propagande ou qui le soutiennent sans le dire, ce qui est pire encore.
La France, avec ses partenaires européens, a eu raison d’opter pour le soutien
à l’Ukraine. Si nous avions écouté Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon qui, en
février dernier, main dans la main, refusaient ce soutien, les Russes seraient
à Kiev depuis longtemps.
Lorsque nous entendons, cet après-midi encore, les représentants du
Rassemblement national et de La France insoumise réécrire l’histoire de cette
guerre, inverser les responsabilités pour dédouaner Vladimir Poutine, on ne
peut qu’éprouver un sentiment de honte et se réjouir qu’ils ne soient pas aux
responsabilités. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
S’opposer aux livraisons d’armes, lever les sanctions comme ils le demandent,
ce n’est pas favoriser la paix. Ce n’est
rien d’autre qu’abandonner l’Ukraine aux mains de la Russie et mettre en péril
toute la sécurité de l’Europe. N’en déplaise au président du Rassemblement
national, non seulement son parti entretient des liens avec la Russie mais,
pire encore, il en est le soutien.
Oui, la défense de nos valeurs démocratiques a un prix. Il est déjà élevé. Les
Ukrainiens le paient en destructions et en morts. Nous aurons à le payer
économiquement. Cependant, si nous ne sommes pas prêts à payer ce prix
maintenant pour l’Ukraine, au nom des valeurs des nations civilisées qui
fondent notre pays et l’idéal européen, alors les générations futures devront
payer un prix infiniment plus élevé.
Le président Zelensky a demandé que nous n’abandonnions pas l’Ukraine. Je
souhaite qu’il sache, s’il nous écoute, que nous sommes à ses côtés et aux
côtés de son peuple. Qu’il sache aussi que son pays est déjà membre de cœur de
notre Union en raison du combat acharné qu’il mène pour la liberté et la démocratie.
C’est pourquoi je suis convaincu que l’avenir de l’Ukraine et celui de la
France et de l’Europe s’écriront en commun.
Jean-René Cazeneuve
(député)
> [Loi de programmation budgétaire 2023-2027] On est dans une logique de
dialogue. J'espère que les députés LR et PS reviendront à la raison et voteront
cette loi de programmation dont nous avons absolument besoin. Elle va être
présentée en hémicycle. Si elle était rejetée ce serait assez grave parce que
c'est un document très important pour notre crédibilité européenne. C'est
l'engagement de la France sur sa trajectoire sur 5 ans de ses finances
publiques. Dans cette loi, nous expliquons comment nous arrivons à réduire
notre déficit. (…) C'est un outil de pilotage pour le gouvernement, pour les
députés. Je suis très surpris du rejet de certains partis. Je crains que ce ne
soit pas un bon signal. LR et le PS sont dans l'ombre de partis plus
importants, ils sont dans une fuite en avant, et ce n'est pas un vote de
responsabilité de leur part. On a vraiment besoin de cette loi de
programmation.
> J'ai le sentiment que les LR votent de plus en plus comme le Rassemblement national et que le Parti socialiste vote de plus en plus comme la France insoumise.
Constance Le Grip
(députée)
Notre assemblée commence cette session automnale par un acte politique fort
: un débat sur l’Ukraine, voulu par les députés de la majorité présidentielle.
Nous avons voulu ainsi réaffirmer haut et fort notre soutien et notre
solidarité totale à ce pays agressé, notre engagement sans faille à ses côtés.
L’Ukraine est un pays libre, indépendant, au destin européen, dont la
souveraineté et l’intégrité territoriale ont été violées par l’armée russe au
service du régime de Vladimir Poutine.
Notre débat se déroule quelques jours après l’annexion illégale de quatre
oblasts ukrainiens – Donetsk, Louhansk, Zaporijjia et Kherson – et un discours
du président russe que je décrirais comme à charge, violemment belliqueux,
anti-Occident, aux relents souvent nauséabonds.
Au même moment, les forces armées russes connaissent des déconvenues sévères
sur le terrain. Elles reculent et battent en retraite, notamment depuis la
reprise de la ville stratégique de Lyman par les valeureuses troupes ukrainiennes.
D’aucuns commencent même à envisager un début de débâcle. Nous sommes donc à un
moment important de cette guerre cruelle menée en Ukraine par l’armée russe, et
les semaines à venir seront décisives.
Dès le 24 février, l’Union européenne s’est montrée unie pour condamner
sévèrement cette agression brutale et déterminée à prendre de lourdes mesures
de rétorsion à l’encontre de la Russie. Pas moins de sept trains de sanctions
ont été pris, la plupart sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
Citons l’embargo sur l’essentiel du pétrole et du charbon russes, l’exclusion
de nombreuses banques russes du système Swift, le gel des avoirs de la banque
centrale russe en dehors de la Russie, le gel des avoirs de très nombreux
oligarques et de Vladimir Poutine, la fermeture de l’espace aérien européen, de
nos ports et de nos routes, l’interdiction des ventes d’avions et
d’équipements, l’accès très strictement limité à certaines technologies
industrielles sensibles, l’interdiction de diffusion dans l’Union européenne
des « médias » Russia Today et Sputnik, considérés comme des organes de
propagande du Kremlin.
Un huitième train de sanctions est en cours de discussion, en réponse aux
référendums fictifs, fantoches, et à la menace des dirigeants russes d’utiliser
certaines armes nucléaires.
Ces sanctions ont un coût, un prix pour nos concitoyens, pour les Européens,
pour les habitants d’un très grand nombre de pays. Dans le monde, mais aussi
chez nous, les conséquences de cette guerre se font sentir durement – et même
parfois dramatiquement – sur les plans énergétique, économique et alimentaire.
Cependant, ne nous y trompons pas : les sanctions produisent leurs effets en
Russie. On constate des pénuries généralisées d’approvisionnement et
l’effondrement de nombreuses productions industrielles. Le départ des
entreprises internationales a entraîné des faillites en cascade parmi les
entreprises russes. Le PIB russe a reculé de 6 %. Le mythe d’une économie russe
résiliente s’est évanoui.
Ensuite, nous ne devons pas confondre les causes et les conséquences. Qui peut
encore défendre l’idée que l’invasion de l’Ukraine par la Russie ne justifie
aucune sanction, aussi éprouvantes que puissent être les sanctions pour nos
populations ?
En envahissant l’Ukraine, en y poursuivant sa guerre cruelle, la Russie, membre
permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, met en cause les principes
les plus fondamentaux de l’ordre international, viole la Charte des Nations
unies et, de ce fait, méconnaît totalement sa responsabilité historique.
Elle nourrit la logique de conflictualité et de confrontation, accentue la
fragmentation du monde et aggrave partout la menace contre la paix.
Il n’y a pas de paix sans justice. Le chef de l’État français l’a rappelé à la
tribune de l’Assemblée générale des Nations unies. Je conclurai donc en
rappelant l’engagement sans faille de la France dans la lutte contre
l’impunité. Notre pays apporte un appui constant aux enquêtes menées en
Ukraine, y dépêche du personnel, y consacre des moyens, mobilise des enquêteurs
parfaitement spécialisés. C’est là une notion très importante, et même
essentielle : pas de paix sans justice. Nous le devons à l’Ukraine – une
Ukraine libre, indépendante et européenne – et à la paix dans le monde.
Nicolas Metzdorf (député).
« Et maintenant, messieurs, pourquoi avons-nous réussi à
arrêter la guerre, au moment même où elle semblait prête à se déchaîner ? […]
Parce que nous avons négocié comme des hommes pour lesquels la négociation
n’était pas seulement une phase inévitable de ce grand drame international, mais
le véritable chemin de la paix ». Il y a quatre-vingt-quatre ans, en 1938, à
cette place, dans cette assemblée, Édouard Daladier prononçait ces mots qui
résonnent tragiquement dans l’histoire. Il rentrait de Munich où, en guise de
négociation, il avait avalisé le découpage de la Tchécoslovaquie. Il pensait
avoir sauvé la paix et l’honneur, mais bientôt l’Europe allait de nouveau
s’effondrer.
Ce rappel des heures les plus sombres de notre histoire et cette comparaison
avec la situation que nous vivons actuellement ne sont pas fortuits. Nous
devons en tirer les leçons, à savoir qu’il n’y a de paix possible que lorsque
l’agresseur n’a plus d’autre choix que de se soumettre.
Depuis le 24 février, la France apporte son soutien indéfectible à l’Ukraine et
aux Ukrainiens. Ce soutien qui nous honore tous est plus que jamais nécessaire,
maintenant que, sans vergogne et au mépris de toutes les conventions
internationales et des valeurs humaines, Poutine pense pouvoir annexer les
territoires d’une nation souveraine. Le soutien de la France permet à l’Ukraine
de tenir et de résister à l’agression, engrangeant des succès qui montrent le
courage et la détermination de tout un peuple.
Mais surtout, il s’est aussi levé en France une armée de l’ombre – une force
silencieuse que l’on n’entend ni ne voit. Cette force citoyenne s’est mobilisée
pour aider, pour accueillir et pour soutenir celles et ceux qui ont fui la
guerre et leur pays. Jamais l’hébergement citoyen ne s’était autant manifesté
en France que ces derniers mois. Dans cette crise sans précédent, une telle
réaction fait aussi notre honneur et mérite d’être soulignée. Cette
mobilisation a permis d’accueillir avec humanité plus de 100 000 Ukrainiens sur
notre sol – et le chiffre croît chaque jour.
N’oublions pas la mobilisation des services de l’État, qui a permis de
scolariser plus de 18 000 enfants dans l’école de la République. Quatre-vingts
pour cent des réfugiés sont des femmes ayant fui avec leurs enfants. Que nous
disent-elles, ces mères qui ont tout quitté ? En réalité, peu de choses. Mais
la plupart, avec une tragique pudeur qui masque leur tristesse, confient que
leur mari est mort, que leur frère a disparu ou que leur fils se bat encore.
Depuis la fin de l’hiver dernier, les élus, les fonctionnaires, les
associations et surtout les citoyens se sont levés pour subvenir aux besoins de
ce peuple en souffrance qui trouve sur notre sol une part de réconfort et
d’espoir. Ces Français, j’ai pu les rencontrer au cours de ces derniers mois en
tant que rapporteur pour avis sur la mission Immigration, asile et intégration
du projet de loi de finances pour 2023. Je les salue. Surtout, je les remercie
pour leur engagement et pour le courage dont ils font preuve au quotidien.
« La France n’a jamais été plus grande que lorsqu’elle combattait pour les
autres », disait Malraux.
Elle est grande aujourd’hui. Résister à Poutine, ce n’est pas seulement
repousser l’armée russe, c’est aussi protéger l’Europe. C’est permettre aux
Ukrainiens réfugiés sur les sols européens – sur le nôtre en particulier – de
garder leur dignité et l’espoir de retrouver un jour leur foyer. Il nous
appartient donc désormais à nous, membres de la représentation nationale,
d’être à la hauteur du peuple français.
Personne ici ne se fait d’illusion sur les desseins de Vladimir Poutine, sur
ses ambitions folles de construire une Grande Russie ni sur sa volonté de
détruire l’Occident, ce que nous incarnons et les valeurs humanistes des
Lumières que nous défendons. Face à ce péril, il n’y a qu’une seule chose à
faire : faire bloc – pour l’Ukraine, pour la France, pour l’Europe et pour le
monde. Je sais pouvoir compter sur vous, car sur ces bancs, c’est aussi la
France de Malraux qui siège.
Charles Sitzenstuhl
(député)
Ce débat relatif aux conséquences pour la France de la guerre en Ukraine
est l’occasion de nous interroger sur notre débat démocratique. Comme nombre de
Français, je m’interroge depuis longtemps sur ces femmes et ces hommes
politiques, dont certains siègent parmi nous, qui se disent patriotes et
défenseurs de l’indépendance nationale alors qu’ils prêchent depuis des années
un catéchisme étranger conçu au Kremlin et déclarent sans aucune retenue leur
admiration pour un chef d’État étranger, Vladimir Poutine, dirigeant d’un
régime autoritaire, belliciste et antieuropéen, dirigeant qui souhaite
affaiblir nos démocraties par la force et la subversion. Cette si longue
complicité idéologique de l’extrême droite avec le pouvoir russe interpelle.
Pourquoi tant d’éblouissement pour le régime poutinien ? Pourquoi tant de haine
contre notre modèle démocratique européen ? Pourquoi passer son temps à vomir
sur la diplomatie française et sur la politique étrangère française, à remettre
en cause les positions du chef de l’État français et à critiquer les décisions
du Conseil européen tout en se montrant toujours si clément, si compréhensif,
si bienveillant avec Moscou ?
Même si nous le savons tous, il faut le redire : un parti politique – le Front
national, devenu Rassemblement national – et ses deux présidents successifs,
Jean-Marie Le Pen et Marine Le Pen, ont été pendant des années les promoteurs
du régime russe en France. Qui se pavanait à Moscou dans les années 1990 et
2000 avec des leaders nationalistes russes proches du Kremlin ? M. Le Pen. Qui
déclarait en 2011 dans la presse russe : « […] j’admire Vladimir Poutine. […]
Je ne peux qu’être inquiète quand je vois que notre président – il s’agissait à
l’époque de Nicolas Sarkozy – tourne le dos à la Russie » ? Mme Le Pen.
Qui a écrit dans son livre en 2012 : « […] notre intérêt national est de
renouer l’alliance traditionnelle avec la Russie pour contrebalancer l’impérialisme
exacerbé d’une Amérique (…) cherchant à obtenir l’endiguement de cette
puissance renaissante » que serait la Russie ? Mme Le Pen. Et puisque Mme
Ménard a fait référence tout à l’heure aux années 1930, je me demande
d’ailleurs, quant à moi, de quelle « alliance traditionnelle avec la Russie »
il est question. Où était cette alliance traditionnelle lorsque les Russes
s’entendirent avec l’Allemagne nazie pour la laisser envahir notre pays en 1940
? De quelle alliance traditionnelle avec la Russie s’agissait-il quand l’URSS,
que Vladimir Poutine regrette tant, a bâti le pacte de Varsovie pour faire face
à notre alliance, l’Otan, dont nous sommes un pays fondateur ?
Qui a reconnu l’annexion illégale de la Crimée par la Russie en 2014 ? M. et
Mme Le Pen. Qui a dit en 2015 après l’assassinat de Boris Nemtsov : « J’ai confiance
en la justice russe (…) » ? Mme Le Pen. Qui a déclaré en février 2017 : « Mais
il n’y a pas eu d’invasion de la Crimée » ? Mme Le Pen.
Qui a été reçu par Vladimir Poutine, au Kremlin, en tête-à-tête, en mars 2017,
en pleine élection présidentielle, et y a présenté son « point de vue sur l’Ukraine
qui coïncide avec celui de la Russie » ? Mme Le Pen. (Applaudissements sur
plusieurs bancs du groupe RE.) Quel génie, enfin, a affirmé en février 2022 : «
Je ne crois pas à une invasion russe en Ukraine » ? Mme Le Pen.
Je pourrais continuer ainsi, pendant des heures, à passer en revue toutes les
références du catéchisme russo-lepéniste – il y en a tellement ! Le RN pourra
nier, éluder, se contorsionner, enfumer les débats par des prises de position
hypocrites, faire semblant de pleurer sur le sort de l’Ukraine comme ses
représentants l’ont fait aujourd’hui, il pourra essayer de faire oublier ses
turpitudes, mais nous serons toujours là pour rappeler sa si longue et aveugle
soumission à la Russie poutinienne. Nous ne laisserons pas le président
intérimaire du Rassemblement national proférer des menaces publiques contre les
personnes qui oseraient rappeler ses années de collaboration idéologique avec
la Russie, si largement documentées par la presse et les journalistes français.
Ce qui se joue en Ukraine est bien trop grave pour l’avenir du continent
européen pour que nous nous taisions.
Le président russe a envahi l’Ukraine, mais chacun sait que c’est bien sur tout
l’Occident démocratique qu’il a placé une cible. Nous continuerons à démasquer
les faux patriotes et les hypocrites. Nous serons aux côtés des Ukrainiens, aux
côtés des alliés et des amis véritables de l’Ukraine, et aussi aux côtés des
Russes qui réprouvent l’entreprise guerrière menée par le régime de Moscou.
Soyons fiers de notre modèle démocratique européen. C’est ce modèle qui inspire
les soldats ukrainiens qui se battent pour leur patrie et pour notre liberté
collective.
Anne Genetet (députée)
En mars, je me tenais à cette même tribune pour dénoncer la décision
unilatérale de la Russie d’envahir l’Ukraine. Sept mois plus tard, revenant
tout juste de Kiev, je veux vous dire ceci avec insistance et avec la plus
grande émotion : ne nous habituons pas à cette guerre. Elle qui a déjà volé des
milliers de vies, qui a brisé des familles ukrainiennes et russes et qui
laissera derrière elle des millions de déplacés et de réfugiés, et un pays à
reconstruire.
Alors liberté, je veux dire ton nom, car au cœur de cette guerre inique se
dresse un combat pour la liberté – liberté bafouée des citoyens ukrainiens ;
liberté volée de leurs enfants ; liberté muselée des journalistes, des
activistes et des manifestants en Russie, et liberté ignorée de leurs frères
concernés par la mobilisation forcée ; enfin, liberté usurpée de populations et
de territoires qui, dans un simulacre de démocratie, ont été récemment annexés.
Égalité, je dis ton nom. En envahissant l’Ukraine le 24 février, la Russie a
agressé nos valeurs les plus chères, consacrées notamment par la Charte des
Nations unies. La première d’entre elles, puisqu’il faut encore le rappeler,
est l’égalité souveraine de toutes les nations, grandes et petites. C’est aussi
la défense de l’égalité du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes qui doit
unir la représentation nationale et tous ceux – en France et dans le monde –
qui défendent l’idéal universel de la démocratie et de la paix.
Je pense ici aux communautés françaises d’Ukraine, mais aussi de Russie, qui
vivent au plus près cette tragédie.
Fraternité, je dis ton nom. Fraternité de la France, d’abord, lorsqu’elle
décide de conduire l’une de ses plus larges opérations humanitaires en
affrétant un bateau pour l’Ukraine transportant notamment des éléments d’un
pont qui sera reconstruit par la France dans l’oblast de Tchernihiv.
Fraternité de la France encore, lorsqu’elle envoie une nouvelle mission de
gendarmes enquêteurs pour documenter les crimes commis à Izioum et à Kharkiv ;
j’ai pu échanger avec eux et je salue leur très grande expertise.
Fraternité de notre parlement et de notre gouvernement, renouvelée lors des
fréquentes visites effectuées en Ukraine et au gré des échanges entretenus avec
nos amis ukrainiens.
Fraternité de nos concitoyens, enfin, des Français établis en Ukraine, en
Pologne, en Roumanie et jusqu’en Australie. Je les ai rencontrés : ils sont
engagés corps et âme dans la solidarité avec les Ukrainiens. C’est de cela dont
je peux témoigner.
De mon récent déplacement en Ukraine avec la présidente de l’Assemblée, je
choisis de retenir une image forte : celle de nos peuples unis, fraternels et
solidaires, face à ce drame absolu.
À nos élus et aux associations françaises présents sur le territoire de
l’Ukraine, mais aussi de la Pologne et des autres pays limitrophes, contribuant
à l’installation de dispositifs d’aide et d’hébergement, je dis merci !
Au réseau culturel français et à nos alliances françaises – j’ai une pensée
particulière pour celles de Kharkiv et de Zaporijjia, toutes deux ouvertes
aujourd’hui : merci !
À notre lycée Anne-de-Kiev, qui a rouvert ses portes en septembre, passant de
500 à 67 élèves seulement : merci !
À notre lycée Alexandre-Dumas de Moscou : courage !
Aux conseillers du commerce extérieur, à nos 160 entreprises encore présentes
en Ukraine, dont beaucoup ont pu se mobiliser pour aider de multiples manières
: merci !
À nos journalistes, qui continuent d’effectuer un travail exceptionnel dans des
conditions particulièrement difficiles, et à notre compatriote qui a payé de sa
vie la nécessité d’informer de la réalité et de la vérité de cette guerre :
merci !
À nos diplomates qui agissent en première ligne, animés par l’indéfectible
désir de rétablir la paix et de protéger nos concitoyens – et je veux ici
saluer l’admirable Étienne de Poncins : merci !
Oui, merci à eux tous de faire vivre notre devise ; merci à eux tous d’avoir
fait de la sincérité de leur engagement le relais de nos valeurs.
Au début du siècle dernier, le président Raymond Poincaré nous prévenait : « La
paix est une création continue. » Alors permettez-moi, madame la présidente, de
former le vœu que notre assemblée soit actrice de cette création, afin de
soutenir, de reconstruire l’Ukraine et d’ouvrir la voie à la paix.
Que vive l’Ukraine libre ! Vive la République, et vive la France.
● MoDem
Perrine Goulet (députée)
> La création de la délégation aux droits des
enfants est de nature à favoriser le retour de la confiance de nos concitoyens
dans nos institutions. Je veux également remercier les membres de la délégation
qui m’ont fait confiance en me confiant sa présidence.
Avec la création de cette délégation aux enjeux forts,
je mesure le poids de la charge qui m’incombe : il me faudra insuffler
l’énergie nécessaire pour que cette délégation fasse œuvre utile. Je sais que
nous y arriverons car la question de la protection des enfants dépasse les
clivages partisans. Or les sujets qui les concernent sont nombreux : le
harcèlement, la pauvreté, l’éducation, l’utilisation des outils numérique, la
prostitution, les violences intrafamiliales, la protection de l’enfance,
l’enfant et la justice, et tant d’autres…
Frédéric Petit (député)
Le 24 février dernier, jour de l’invasion, j’avais ici même
employé les termes de « guerre culturelle » et d’« anti-Europe ». Je voudrais y
revenir pour commencer mon intervention. Je représente les Français d’Europe
centrale, aux premières loges de ce conflit, mais je représente aussi le
Franco-Allemand, le Franco-Allemand profond, ancien et en plein renouveau, le
Franco-Allemand solide, le Franco-Allemand citoyen.
Il y a bientôt quatre-vingts ans, les ruines étaient encore fumantes. Au sortir
de l’horreur, des villes entières avaient encore faim et froid l’hiver. La
région de la Sarre était encore française, et devait l’être douze ans de plus,
en proie à des tensions communautaires parfois violentes. Le Bade-Wurtemberg
n’était pas allemand, mais une zone d’occupation. C’est alors, dans ce contexte
de tensions, que ces ennemis héréditaires qu’étaient la France et l’Allemagne,
en un contre-pied génial au déterminisme et aux nationalismes étriqués,
fondèrent la Communauté européenne du charbon et de l’acier, un modèle unique
de réconciliation par le faire-ensemble, sur les terres belligènes de notre chère
Europe.
Oui, nos territoires sont belligènes et le resteront. Comment en serait-il
autrement ? Sur un isthme assez contraint, tant de nations, de peuples, de
religions, de systèmes administratifs, de langues, d’alphabets même, tant de
systèmes de valeurs, de nostalgies contradictoires, se sont entrecroisés et
s’entrecroisent encore. Après tant de migrations, lentes ou rapides, récentes
ou anciennes, spontanées ou contraintes, chacun est aussi légitime que son
voisin, voire que son colocataire, si différent qu’il soit.
Deux modèles tentent de répondre à cette question posée depuis des siècles à
notre Europe : un modèle impérialiste, rétrograde, souvent violent, qui promeut
la domination d’une nation sur les autres, et un modèle coopératif qui prône «
l’unité dans la diversité », tourné vers des défis communs et supérieurs. Ce
modèle s’appuie sur une gestion humaniste des conflits indispensables à la
diversité européenne. Pour lui, l’histoire est un débat scientifique et un
outil de rapprochement, l’avenir de la planète est un sujet commun et urgent.
Les masques sont désormais tombés en ce qui concerne la Russie. L’histoire
devient une arme au service de l’état-major de l’agresseur, les soldats ne sont
plus des citoyens avertis, la langue devient un oukase. Tant que l’impérialisme
moscovite se concentre sur sa propre survie, alimente sa nostalgie, comment
pourra-t-il affronter les vrais défis du XXIe siècle – la défense de la
planète, la lutte contre les inégalités ? Comment pourra-t-il participer, de
près ou de loin, à un effort commun ?
On nous accuse souvent d’utiliser de grands mots ; on prétend que le terme de «
valeurs » ne pèse rien face à l’hiver qui arrive et aux intérêts réels de nos
concitoyens. Pourtant, la guerre rend concrète, évidente, tangible, cette
confrontation de modèles, cette confrontation de valeurs. Non, nos valeurs ne
relèvent pas d’une novlangue destinée à cacher l’anti-France ou encore la
guerre sociale.
Le modèle désormais défendu sans masque par le régime de Moscou, c’est
l’assignation à résidence permanente : assignation à résidence dans une langue,
dans un récit historique. Les dernières parodies de référendum l’ont prouvé,
ces assignés à résidence n’ont même plus besoin d’être chez eux pour que
l’empereur leur impose son choix. Nous sommes revenus au temps de Gogol : ce ne
sont plus les âmes mortes que l’on fait participer au scrutin, mais les âmes
enfuies, les familles réfugiées et déplacées, dont on nous explique qu’elles ont
voté.
Fidèles à notre modèle, nous nous battons au contraire pour l’émancipation,
contre l’assignation à résidence. L’Union européenne n’est pas l’arrangement
tranquille des heures de paix, elle n’est pas une vieille idée avachie de fin
de banquet électoral. Cette guerre nous le rappelle. L’Union européenne, c’est
une méthode permanente de règlement humaniste des conflits inhérents, voire
nécessaires, aux territoires européens. C’est une idée jeune, parfois
incomprise. C’est une organisation qui se trompe et commet parfois des fautes,
c’est vrai. Mais c’est une idée vitale, indispensable à la diversité
européenne, et qui demande à présent de la vaillance de notre part, face aux
agressions qu’elle subit, à l’escalade de la violence et au tourbillon de bas instincts
qui la menacent.
Défendre cette ligne, ce n’est pas être va-t-en-guerre. C’est être lucide sur
ce qu’une paix durable exige de vaillance. Ce n’est pas être « va-t-en-guerre
», mais être « bats-toi-pour-la-paix ». Quand bien même ce n’est pas notre guerre,
c’est notre confrontation.
Quelles conséquences pour nos concitoyens ? Pour notre rôle de parlementaires
français ? Gardons-nous tout d’abord de l’arrogance. Nous avons besoin d’un
langage de vérité, et non de certitudes ou de divisions. Ce n’est pas
l’arrogance qui permettra la lente construction d’institutions démocratiques
fiables, mais l’entraide, la franchise, et toujours le respect.
Si Poutine est en difficulté sur le plan militaire, il est encore efficace sur
le terrain politique. Il met à l’épreuve notre constance à défendre nos
valeurs, notre modèle et notre avenir. Alors que l’hiver s’annonce difficile et
que des partis politiques, par calcul électoral ou par soumission
intellectuelle, voudraient mettre un terme aux sanctions et à l’aide à
l’Ukraine, il nous faudra tenir notre cap et nos engagements. Il faut poser
clairement la question au Rassemblement national : devons-nous abandonner les
sanctions économiques contre un régime qui, par exemple, déporte des milliers
d’enfants et de civils ukrainiens pour les russifier ? Cela ne serait conforme
ni à nos valeurs, ni même à notre intérêt.
Nous, députés du groupe Démocrate, avons annoncé très clairement notre position
dès le premier jour et n’avons jamais tergiversé : nous sommes favorables au
renforcement des sanctions à l’encontre du régime de Moscou. Nous devons, de
plus, nous engager dans la reconstruction de l’Ukraine. Cette reconstruction
concerne du dur, des bâtiments bombardés souvent sans raison tactique, des
maisons, des hôpitaux, des écoles, des routes, des ponts, des infrastructures…
Elle consiste aussi à remettre en place des administrations fragilisées depuis
longtemps par l’ancienne bureaucratie ou encore la corruption, à recréer des
circuits de finances publiques et collectives. Oui, nous devons commencer à
reconstruire, participer de façon assumée à cette reconstruction !
De fait, outre la fourniture de moyens militaires, les Ukrainiens nous
demandent de participer à la reconstruction, et plus encore : lors de
nombreuses visites et rencontres, mes interlocuteurs ukrainiens m’ont davantage
parlé de modernisation que de simple reconstruction. Ils assument la fragilité
de leur démocratie récente, les dysfonctionnements, leurs divisions ; ils ne
souhaitent pas reconstruire à l’identique, dans un grand bricolage plus ou
moins humanitaire, ni maintenir les mêmes processus. Ils veulent que nous les aidions
à moderniser et à transformer, à rendre leurs pratiques publiques plus
transparentes et plus efficaces. Cela, je l’ai entendu dire par des gouverneurs
de région, des responsables d’association, des maires, des directeurs d’école
ou d’hôpital.
Or, nous avons, en France et dans l’Union européenne, des outils qui permettent
de lutter contre la corruption et de promouvoir la libre et juste entreprise,
de combattre l’endoctrinement des médias et de favoriser une citoyenneté
éclairée, de lutter contre l’embrigadement et d’encourager l’émancipation dans
les écoles.
Nous n’allons pas aider des « gentils » contre des « méchants » ; nous allons,
sur un territoire de conflits, anciens et récents, développer et construire
avec vaillance le seul modèle qui garantira, si nous y parvenons, que la fin de
la guerre d’aujourd’hui ne sera pas à l’origine de celles de demain.
Il y a, au cœur de notre action, un enjeu critique, dramatique : les enfants
d’Ukraine sont l’avenir de ce pays. Nous devons donc aider le système scolaire
à rester en vie, maintenir le lien des enfants ukrainiens réfugiés avec leur
pays, puis les y ramener dès que possible, contribuer à les éduquer et
multiplier les échanges scolaires, comme nous l’avons fait entre Français et
Allemands. Nous devrons par ailleurs faire notre possible pour que reviennent
de captivité ceux que le régime russe a kidnappés et déportés – il n’y a pas
d’autres mots.
Il s’agit, non pas du geste d’un grand frère en faveur d’un petit frère, de
nations dominantes en faveur de prétendus esclaves ou colonisés, mais de la
lente construction d’une coopération dans laquelle l’Ukraine apportera à la
communauté ses forces, celles que l’on connaît – son agriculture – mais aussi
celles auxquelles on pense moins, comme la décarbonation de l’énergie ou la
numérisation de l’état civil, qui est une réussite dans ce pays.
C’est notre manière de faire, notre modèle de coopération, la boussole
européenne dans le fracas du monde : planifier, structurer et faire ensemble
dès aujourd’hui pour vivre, demain, une paix durable et souveraine.
Les Ukrainiennes et les Ukrainiens se battent pour leur liberté, et pour la
nôtre. Nous devons les soutenir ; nous devons, avec vaillance et courage,
prendre la main sur la reconstruction, pour notre souveraineté et la leur.
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