Si l’on excepte le militant des droits humains, Anatoli Martchenko en 1988, qui l’obtint à titre posthume et avec Nelson Mandela, Alexeï Navalny est le premier russe à recevoir le «prix Sakharov pour la liberté de l’esprit», du nom du célèbre dissident et père de la bombe atomique soviétique, décerné par le Parlement européen et récompensant les personnes (ou des organisations) qui se battent pour les libertés fondamentales (en 2009, Memoriale, ONG russe de défense des droits de l’humain et de préservation de la mémoire des victimes des répressions de l'époque soviétique, avait également été distinguée).
Une sorte de retour à l’envoyeur 33 ans après la création du prix pour honorer un homme qui se bat contre le système Poutine, comme Sakharov se battait contre le système communiste.
Navalny – qui incarne l’opposition démocratique et dont la candidature au prix avait été proposée par le groupe centriste Renew Europe – est aujourd’hui en prison pour des raisons fallacieuses et condamné par une justice aux ordres qui rappellent des temps que l’on espérait définitivement disparus après une tentative d’empoisonnement où il s’en est tiré de justesse grâce à l’intervention des Occidentaux et sa prise en charge par des médecins en Allemagne.
Le président du Parlement européen, David Sassoli s’est félicité du choix et a déclaré:
«Il s'est battu sans relâche contre la corruption du régime de Vladimir Poutine. Cela lui a coûté sa liberté et presque sa vie. Le prix décerné aujourd'hui reconnaît son immense bravoure et nous réitérons notre appel à sa libération immédiate.»
Navalny est évidemment un symbole même si l’on peut ne pas partager ses convictions politiques et son prix récompense également tous les opposants à l’autocrate assassin du Kremlin qui a déjà fait tuer quelques uns d’entre eux comme Boris Nemtsov éliminé de quatre balles le 27 février 2015 en plein centre de Moscou, comme Boris Berezovski, comme Sergeï Magnitsky, comme Natalia Estemirova, comme Alexandre Litvinenko ou comme Stanislav Markelov.
Et, évidemment, il faut relier ce prix au prix Nobel de la paix décerné il y a quelques jours à un autre Russe, Dmitri Mouratov, rédacteur en chef du journal Novaïa Gazeta, celui-là même où travaillait Anna Politkovskaïa, assassinée en 2006 par les amis de Poutine et qui a accepté le prix «au nom des journalistes russes qui subissent actuellement des répressions».
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