Il y a, concomitamment, une demande de plus de respect dans la société et une absence de plus en plus grande de sa pratique.
Peut-être que cette forte demande ressort de cette immense absence.
J’ai dit maintes fois que le respect était la vertu la plus importante dans une démocratie républicaine et que cette dernière devait devenir en ce 21e siècle, une «respectocratie» tant la demande était prégnante et tant l’absence était ressentie dans des sociétés où monte inexorablement cette autonomie qui n’est pas celle, responsable, qui devrait légitimement accompagner la liberté mais sa perversion, celle qui est égoïste et égocentrique, celle qui réclame constamment de l’assistanat, celle qui porte fièrement son irresponsabilité, celle qui demeure constamment insatisfaite et, enfin, celle qui est complètement irrespectueuse de l’autre.
Mais, attention, la réalité de cette demande de respect ne doit pas cacher un avatar de cette autonomie négative, c’est-à-dire que cette demande est en fait uniquement pour soi-même et ne concerne pas les autres.
Car le respect n’a de valeur humaniste et démocratique que s’il est réciproque, symétrique et transitif.
Sinon, il n’est qu’un moyen de négation de l’autre, de domination sur l’autre quand il est réclamé sans contrepartie et fait alors furieusement penser à une société d’états comme l’était l’ancien régime avec la noblesse, le clergé et le tiers-état où le «respect» dû à ceux d’«en haut» n’était qu’un asservissement de ceux d’«en bas».
C’est d’ailleurs une des origines des règles de la politesse, politesse qui, seule, n’est qu’une hypocrisie si elle n’est pas reliée au vrai respect.
C’est pourquoi quand les Français expriment dans un récent sondage à 96% que le respect est la «valeur» la plus importante pour eux (et 75% qu’elle est «très importante»), on doit s’en réjouir tout en demeurent vigilant sur ce qui se cache derrière.
S’il s’agit autant d’une demande de reconnaissance de sa dignité que d’un mouvement altruiste et empathique, alors nous sommes sur la bonne voie.
Si l’on est dans ces phénomènes de la «sur-égalité» et de la «sur-reconnaissance» où toute demande de ce genre se base sur une demande égoïste et égocentrique d’être plus égal que l’autre, alors nous allons vers une société de plus en plus dure et violente.
L’absence de réel respect n’est pas une donnée nouvelle mais elle a pris une dimension nouvelle avec les progrès de la démocratie qui semblent parfois s’être accomplis en oubliant sur quels fondements celle-ci doit reposer pour ne pas être qu’une caricature licencieuse d’elle-même.