Par Jean-François Borrou & Alexandre Vatimbella
Dans
cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui
ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but
d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme d’un journaliste proche des idées
centristes.
Alexandre Vatimbella est le directeur du CREC.
Aux Etats-Unis, un quotidien de Cleveland, dans l’Ohio, The Plain Dealer a décidé de ne plus publier les mensonges sciemment faits par les politiciens ainsi que les informations qui n’ont aucune base de réalité, c’est-à-dire les fake news, d’où qu’elles viennent.
Les responsables du journal ont en effet estimé que la presse et les journalistes avaient pour mission de transmettre ce qui était vrai et non de donner des nouvelles erronées à leurs lecteurs même si c’était pour les contredire.
Voilà donc une réponse neuve à ce fléau qui ne cesse de s’étendre des fake news et des faits alternatifs qui parvient à prendre de l’importance notamment parce que ces mensonges sont diffusées à grande échelle et ce même si c’est pour expliquer que ce ne sont que des mensonges.
Donald Trump a ainsi bâti toutes ses campagnes électorales en 2016 et 2020 sur la reprise de ses bobards par les médias parce que même s’ils les contredisaient ensuite, ils leur donnaient également une couverture nationale et internationale et, pire, leur apporter, souvent mais pas toujours malgré eux, une légitimité certaine pour ceux qui voulaient y croire puisqu’ils prenaient la peine d’en parler.
The Plain Dealer estime donc que reprendre ces propos est en réalité, non pas informer sur les opinions divergentes qui sont à la base du pluralisme démocratique, mais ne relayer que de la propagande que l’on sait n’être qu’une tromperie parce que ne s’appuyant sur aucun fait réel.
Si quelqu’un dit, par exemple, que le soleil est vert, aucun média sérieux et à la déontologie éprouvée, ne reprendra cette information, ni n’en fera sa une.
Alors, pourquoi lorsqu’une personnalité dit une énormité du même genre, il obtient une couverture médiatique parfois impressionnante?
Ainsi, le quotidien de l’Ohio n’a pas repris les assertions de Trump lors d’un meeting à Cleveland il y a un mois où le populiste démagogue éructait encore une fois ses fabulations sur une élection présidentielle truquée qui lui aurait coûté la victoire.
Il n’en a même pas fait mention.
Néanmoins, cette décision ne fait pas l’unanimité.
Passons chez ceux qui les utilisent comme arme politique ou pour booster la diffusion de leur médias mais également chez ceux qui défendent une presse sérieuse et à la déontologie éprouvée.
Beaucoup préfère contextualiser les mensonges proférés et faire un commentaire plutôt que de les passer sous silence.
Car, démonter une fausse information c’est aussi la démasquer et éviter qu’elle ne se diffuse en toute impunité dans la société.
Evidemment, cela lui permet d’être connue mais également d’être pointée du doigt comme une tromperie dangereuse.
D’autres pensent qu’il faudrait faire la part des choses en commentant les fausses informations venues d’émetteurs reconnus comme les principaux partis politiques et leurs représentants et en passant sous silence celles provenant de personnages ou de groupes dont le but est de les diffuser pour un but idéologique bien précis, celui de détruire la démocratie.
Par exemple, il faudrait parler des mensonges de Trump mais pas de ceux des groupuscules suprémacistes blancs.
En parler et les mettre en perspective est une autre réponse à cette lutte incessante contre la désinformation qui est devenue si prégnante dans notre 21e siècle.
Il n’y a sans doute pas de réponse parfaite à ce fléau si nuisible et préjudiciable pour la démocratie.
Mais le choix du quotidien de Cleveland a le mérite de ne pas demeurer passif face à celui-ci tout en évitant de faire de la publicité à toutes les intox et les contrevérités dont nous sommes abreuvés quotidiennement par des émetteurs que l’on peut clairement identifié.
Parce qu’in fine c’est bien notre liberté qui est en jeu.
Jean-François Borrou & Alexandre Vatimbella