«Le vote obligatoire, ce n’est pas la démocratie!», déclare
cette personne interrogée par la télévision qui ajoute «la liberté c’est
choisir de ne pas aller voter».
Si elle ne semble pas avoir compris exactement comment
fonctionne la démocratie, que dire celle-là qui, à la question de savoir si
elle est allée voter, répond «non, j’ai oublié mais j’irai demain»!
Cela rappelle cette fameuse blague on l’on promet que l’on
fera telle chose «demain» et qu’on se propose même de le mettre par écrit…
Ces deux propos après l’abstention record lors des élections
régionales sont symptomatiques d’un délitement démocratique de par l’absence de
conscience qu’il est indispensable de remplir un devoir citoyen si l’on veut
continuer à vivre dans un régime de liberté.
Bien sûr, la démocratie n’est plus seulement «le pouvoir du
peuple, par le peuple, pour le peuple» selon la fameuse formule de Lincoln lors
de son discours de Gettysburg.
La démocratie moderne c’est aujourd’hui le régime politique indépassable
qui, s’il n’est pas «naturel», est bien le seul qui garantisse dans son projet
le respect de la dignité humaine avec son triptyque liberté, égalité,
fraternité.
De ce point de vue, il n’est pas optionnel – et conditionné
par le seul vote – comme le croit certains et l’affirme péremptoirement ses
ennemis mais bien le seul régime légitime parce que le seul qui défend les
droits fondamentaux de l’individu à être l’égal d’un autre et à être libre.
Dès lors, l’élection n’est qu’une procédure démocratique
parmi d’autres – même si elle demeure essentielle – et le vote n’est qu’un des
droits du citoyen.
Mais il est aussi un devoir.
Car ce même citoyen, pour bénéficier des bienfaits de la
démocratie républicaine, se doit de remplir ses devoirs, c’est une évidence, c’est
même un impératif.
La démocratie, comme dit l’autre, ne s’use que si l’on ne s’en
sert pas, que si l’on ne la fait pas fonctionner.
Or, les rouages de la machine démocratique, pour ne pas
rouiller et se gripper, pour être en état de marche, doivent être entretenus.
Si l’on les considère comme capables de fonctionner seuls,
sans protection et sans s’en servir, alors ils tomberont en poussière un jour ou
l’autre, c’est une évidence.
Et ce jour semble de moins en moins hypothétique, de moins
en moins éloigné.
Donc, l’entretien de la démocratie c’est, en premier lieu,
la participation citoyenne qui passe, entre autres, par le vote qui est, à la
fois, un droit et un devoir.
Le rendre obligatoire est loin d’être une hérésie.
Evidemment, on ne va pas mettre en prison ceux qui n’iront
pas voter et les amendes seront toujours peu coûteuses ce qui n’incitera pas les
récalcitrants à se rendre aux urnes comme le montre les exemples de pays qui
ont rendu le vote obligatoire.
Cependant le symbole sera là.
Parce que le civisme est un rempart face aux attaques de la
démocratie dont on ne rappellera jamais assez la fragilité.
C’est cette même fragilité qui fait sa grandeur et sa beauté,
qui fait de nous des êtres civilisés qui peuvent dépasser la force et la
violence pour offrir à chacun la dignité humaine à laquelle il a droit, de sa
naissance à sa mort, de générations en générations.