mardi 9 mars 2021

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Le Front républicain ne concerne que les partis démocratiques et républicains, pas les partis extrémistes

Soyons clairs: se désister systématiquement pour le candidat défendant la démocratie républicaine libérale face à un candidat extrémiste est un devoir impératif pour tout citoyen démocrate et républicain.

Et, face à un duel entre deux extrémistes, il lui faut choisir le moindre mal.

Mais, dans ce dernier cas, il n’y a aucun désistement automatique que ce soit pour l’extrême-droite ou l’extrême-gauche.

Quant au barrage face à l’extrémisme, libres aux électeurs des extrêmes de voter pour un candidat qui ne représente pas l’extrême inverse mais, en l’occurrence, il ne s’agit pas pour eux de défendre la démocratie républicaine libérale, ils veulent simplement empêcher leur adversaire principal déclaré de parvenir au pouvoir.

Concrètement, le devoir des électeurs de la Gauche, du Centre et de la Droite est de faire partie de ce Front républicain.

En revanche, les électeurs de l’extrême-droite et de l’extrême-gauche n’en font pas partie et non aucune autre obligation que de demeurer fidèles à leurs croyances et à éliminer leur pire ennemi pour leur propre sauvegarde.

En cas de duel entre un extrême et un représentant des partis démocratiques, par exemple entre Le Pen et Macron, aucun électeur se disant défenseur de la démocratie et de la république ne peut donner sa voix à Marine Le Pen ou s’abstenir ou voter blanc, et se doit de voter pour Emmanuel Macron.

Même cas de figure pour tout candidat représentant la Gauche, le Centre et la Droite face à la même Marine Le Pen.

Tout est différent en cas de duel Le Pen et Mélenchon.

Ici les électeurs démocrates et républicains n’ont pas un choix imposé autre que d’éliminer le moindre mal s’il existe ou, sinon, de ne pas voter.

En cas de duel entre Macron et Le Pen ou Mélenchon, personne ne demande aux électeurs d’extrême-droite ou d’extrême-gauche de faire partie d’un Front républicain pour la défense d’une démocratie républicaine qu’ils détestent.

A eux de savoir s’ils préfèrent, pour l’extrême-droite, Macron ou Mélenchon, et, pour l’extrême-gauche, Macron ou Le Pen.

Bien entendu, leur refus de voter ou leur vote blanc s’assimilent à voter contre Macron et donc pour le candidat extrémiste qui lui est opposé.

Et cela vaut pour tout candidat venant du PS, d’EELV, du MoDem, du Mouvement radical, de l’UDI, d’Agir ou de LR face à un représentant de l’extrémisme (RN, LFI, Debout la France, etc.).

Pour finir, la raison voudrait que les électeurs des extrêmes préfèrent voter pour empêcher un régime qui risque de les combattre, voire de les persécuter, d’accéder aux commandes.

Mais l’on sait que les passerelles entre l’extrême-droite et l’extrême-gauche sont avérés et démontrés, et peuvent apporter des surprises qui n’en sont pas.

Tout politiste sait que nombre d’électeurs qui ont fait défaut au PC dans les quarante dernières années se sont retrouvés à voter FN parce que l’extrémisme attire l’extrémisme.

Du coup, aucune excuse n’est acceptable venant de représentants des partis démocrates et républicains pour ne pas appeler à faire toujours barrage aux extrêmes parce qu’aucune voix ne peut manquer à la démocratie et à la république.

Et ceux qui prétendent qu’ils ont déjà donné, ont oublié cette réalité que la démocratie est un combat de tous les jours et renouvelé sans cesse.

L’Histoire nous apprend malheureusement que lorsque cette évidence a été oubliée, des régimes scélérats et ignobles ont pu s’installer.

 

Une Semaine en Centrisme. Proportionnelle: la défaite programmée de Bayrou est une claque politique qui risque de percuter la majorité

François Bayrou

Emmanuel Macron n’a rien cédé et François Bayrou a perdu la partie, c’est sans doute la conclusion que l’on devra tirer de la campagne menée par le président du Mouvement démocrate pour contraindre le président de la république à faire adopter une loi pour introduire la proportionnelle ou une dose de proportionnelle lors des prochaines législatives de 2022.

Malgré les pressions, surtout par le biais d’une voie médiatique utilisée sans subtilité mais également sans réelle efficacité, le MoDem n’a pas réussi à changer la donne, en tout cas avant la présidentielle de l’année prochaine.

Même si dans le camp de LaREM un certain nombre de députés se sont déclarés en faveur de l’introduction d’une dose de proportionnelle immédiatement, le courant dominant est plutôt dans le parti présidentiel de repousser cette promesse de campagne d’Emmanuel Macron au prochain quinquennat.

Il reste encore une chance minime de voir inscrire les deux propositions de loi (ou l’une d’entre elles) déposées par Patrick Mignola, le président du groupe MoDem à l’Assemblée nationale, être inscrites au calendrier des travaux des députés mais il faudrait qu’un vote ait lieu au Parlement au plus tard en juin puisque passer cette date il ne sera plus possible de modifier la loi électorale pour les élections de 2022.

La stratégie adoptée par le président de la république, le gouvernement et LaREM, c’est-à-dire à ne pas fermer la porte sans l’ouvrir, semble donc avoir fonctionné parfaitement, enfermant François Bayrou dans une impasse dont il lui est très difficile de sortir sans provoquer un clash qui serait désastreux pour la majorité présidentielle.

Mais, au-delà d’un échec sur la proportionnelle, l’absence de changement de la loi électorale serait pour le Haut-commissaire au Plan une défaite politique cuisante parce qu’elle montrerait son peu de pouvoir dans cette même majorité, surtout que sa soi-disant proximité avec Emmanuel Macron, qu’il est le seul des deux hommes à étaler sans cesse dans les médias, est à tout le moins très exagérée.

C’est donc son statut et sa stature politique qui est en jeu dans cette bataille que le centriste à lui-même initiée pour tester son influence politique qu’il pensait plus importante, notamment depuis que La république en marche a perdu la majorité absolue à l’Assemblée nationale et que le Mouvement démocrate s’est renforcé grâce aux transfuges venus de la première nommée.

Même si Emmanuel Macron fera sans doute un geste ou une déclaration pour sortir son allié de cette impasse pour lui éviter le ridicule et une animosité qui pourrait avoir des conséquences pour les élections générales de 2022, la défaite politique sera bien là, in fine.

Parce que, de toute façon, même si par extraordinaire, une proposition devait être discutée, l’opposition du PS et de LR à la proportionnelle enliserait les discussions notamment en la faisant passer pour une tentative politicienne de sauver les meubles de la majorité présidentielle comme ce fut le cas en 1986 avec l’introduction de la proportionnelle intégrale par François Mitterrand pour éviter la déroute des socialistes.

Un risque que ne veut pas prendre Emmanuel Macron, plus important sans doute que la bouderie de François Bayrou.

Reste que, pour l’instant, les dirigeants du MoDem continuent à mettre la pression et personne ne peut dire avec certitude si cette histoire ne va pas dégénérer, échappant même à ses protagonistes.

Alors, la claque que recevra François Bayrou sera aussi une claque à toute la majorité présidentielle, donc à Emmanuelle Macron.

D’autant que quel que soit sa fin, mise en œuvre ou non de la proportionnelle pour 2022, la critique s’abattra sur le président de la république, soit pour avoir fait adopter un changement de règle un an avant une élection majeure, soit pour n’avoir pas respecté un de ses engagements…

Et l’on se demande si le président du parti centriste a vraiment réfléchi à toutes les implications de son coup politique qui pourraient être désastreuses pour son propre camp.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC

Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC