Selon les médias américains repris par les médias français, la politique du président Joe Biden serait bloquée, tant en matière économique, sociale et environnementale par une poignée d’élus «centristes» de son propre camp, le Parti démocrate, dont les deux plus couramment cités sont les sénateurs Joe Manchin de la Virginie occidentale et Kyrsten Sinema d’Arizona, tous deux représentants d’Etats à forte dominante républicaine (même si l’Arizona a voté majoritairement pour Biden à la présidentielle de 2020).
Le problème avec la dénomination «centriste» utilisée pour caractériser leur positionnement politique est, à tout le moins, problématique.
Ainsi, les mêmes médias qualifient l’ancien président Barack Obama ainsi que la candidate à la présidentielle de 2016, Hillary Clinton, de centristes.
Or Obama et Clinton n’ont pas du tout les mêmes positionnements que Manchin et Sinema…
Si, dans les deux premiers cas l’appellation semble justifiée, elle ne l’est pas du tout pour les deux derniers.
En réalité, Manchin et Sinema font partie de l’aile droite du Parti démocrate, ultra-minoritaire mais néanmoins encore existante.
Elle est composée essentiellement d’élus des Etats «rouges» (républicains) qui, pour être élus puis réélus se doivent d’avoir des prises de position beaucoup plus à droite que le reste du parti dont la majorité est centriste mais qui possède une aile gauche dont une part s’est radicalisée ces dernières années.
Dans le cas de Joe Manchin, principale épine dans le pied de Biden – parce que les démocrates ont le même nombre de sénateurs que les républicains et ne peuvent donc agir que tous ensemble au vu de l’obstruction systématique du camp d’en-face (en cas d’égalité de voix c’est la présidente du Sénat de droit, la vice-présidente Kamala Harris qui tranche par son vote) –, il faut ajouter qu’il est un élu d’un Etat sinistré dans la seule richesse est le charbon dont les entreprises minières qui l’exploitent sont des gros pourvoyeurs d’emploi.
Ainsi, Manchin, s’il veut avoir une chance d’être réélu, doit adopter des positions en faveur du charbon, c’est-à-dire contre le plan ambitieux de Biden contre le réchauffement climatique.
Mais il serait trop facile de rejeter uniquement la faute sur les élus de l’aile droite qui ont quand même obtenu l’investiture du Parti démocrate et ne sont pas sortis de nulle part.
En effet, à l’opposé du Parti républicain dont la quasi-totalité des candidats sont désormais bien ancrés à la droite radicale et le plus souvent populiste, les démocrates investissent souvent des «modérés» de droite dans des bastions républicains afin de gagner des sièges qui seraient presqu’ingagnables avec des candidats même du Centre.
C’est souvent nécessaire pour la Chambre des représentants à cause du charcutage électoral qu’ont effectué les républicains ces dernières décennies dans nombre d’Etats où ils ont redécoupé les circonscriptions afin d’avoir presque toujours la majorité dans les élections locales ou nationales (à part la présidentielle qui, elle, souffre d’un système électoral indirect qui a permis notamment à Trump de devenir président en 2016 avec trois millions de voix en moins que Clinton…).
Dans le cas du Sénat, c’est un peu différent puisque la Constitution accorde de droit deux sénateurs à chaque Etat, quel que soit sa grandeur et, surtout, sa population.
Et beaucoup d’Etats à dominante rurale avec des populations clairsemées sont plutôt conservateurs d’où cette nécessité pour les démocrates d’avoir des candidats de droite comme c’est le cas en Virginie occidentale avec Joe Manchin.
Le fait de désigner celui-ci comme «centriste» est une erreur, voire un moyen pour la Droite et la Gauche américaine de jeter l’opprobre sur le Centre.
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