La séquence des élections générales de 2017 peut s’analyser de deux manières différentes pour le MoDem.
La première est de constater qu’Emmanuel Macron et LaREM ont réalisé ce que François Bayrou et son Mouvement démocrate ont été incapables de faire pendant dix ans (et qu’ils auraient été incapables de faire dans les dix prochaines années), c’est-à-dire réunir l’axe central et faire gagner le Centre, et à la présidentielle, et aux législatives.
La deuxième est de prétendre que Macron et ses troupes se sont accaparés l’espace politique investi par Bayrou et son parti, en reprenant leurs slogans, en captant leurs électeurs et privant ceux-ci d’une victoire qui aurait été possible en 2017 comme l’ont prouvé les résultats des élections.
L’un dans l’autre, le résultat a été qu’Emmanuel Macron et LaREM, tout en leur permettant d’avoir un avenir politique et des députés, ont réduit François Bayrou et le MoDem a un rôle d’affidé, de partenaire subalterne, et, surtout, en ont fait leurs obligés puisque ce sont les victoires des premiers qui ont permis une renaissance des seconds.
Selon que l’on privilégie l’une ou l’autre de ces explications, deux stratégies se présentent à François Bayrou au MoDem aujourd’hui en vue des prochaines échéances électorales nationales.
Soit acter qu’Emmanuel Macron et En marche! ont réussi ce qu’ils ne seront jamais capable de faire, en tout cas dans un futur proche.
Soit tenter de récupérer le leadership de l’espace centriste.
Dans la première, il s’agit de demeurer les alliés de Macron et de LaREM en tant que deuxièmes dans la hiérarchie.
Dans la seconde, il s’agit de s’engager dans une compétition vis-à-vis de ceux-ci en vue de devenir le cœur et le fer de lance de l’espace central.
On comprend aisément que le souhait de Bayrou et du Mouvement démocrate se trouve dans cette dernière stratégie.
En cette fin de quinquennat d’Emmanuel Macron, sans savoir s’il y en aura un deuxième, la tentation est forte – comme on peut le voir quotidiennement – de la part du Mouvement démocrate de reprendre son autonomie, voire sa liberté.
D’autant que cette indépendance est peut être aussi le moyen de continuer à exister sachant que si Macron perd en 2022 il est fort possible que LaREM disparaisse corps et bien et le MoDem également, surtout s’il se trouve trop collé à la formation présidentielle.
Mais si le MoDem parvient à survivre seul, il sera alors en droit de revendiquer d’être le continuateur légitime de LaREM en s’appuyant sur le fait que c’est bien cette dernière qui s’était accaparée son espace pour une période somme toute courte (et à François Bayrou de prétendre devenir le chef de cette mouvance centrale-centriste en vue des présidentielles de 2027).
Drôle de situation où le MoDem serait l’héritier de celui qui s’était accaparé son héritage…
Tout dépendra donc du résultat des prochaines élections.
En cas de victoire d’Emmanuel Macron et de LaREM, le scénario de ces quatre dernières années sera le plus évident même s’il peut y avoir un certain rééquilibrage à l’intérieur des partis présidentiels.
En cas de défaite, la situation sera tout autre faisant sans doute du MoDem le principal recours au centre.
D'autant plus s'il parvient à faire en sorte que cette défaite ne soit pas aussi perçue comme la sienne, exercice d'équilibriste difficile mais pas impossible.
Mais, pour se préparer à l’une ou l’autre des alternatives, le MoDem doit agir dès maintenant, c’est-à-dire un an avant les élections, en se demandant quel doit être son positionnement face à LaREM entre allié modèle et partenaire plus exigeant dans une sorte de rupture du cordon ombilical.
Le parti centriste n’a pas encore définitivement choisi même si, ces dernières semaines, on a vu une volonté d’indépendance de sa part dans les propos tenus et jusque dans le fait de voter contre LaREM à l’Assemblée nationale.
Néanmoins, il est encore difficile de savoir si ce nouveau comportement signifie une volonté de se différencier de cette dernière dans l’optique des échéances électorales afin de se présenter comme un parti à part entière qui a ses propres points de vue et qui n’hésite pas à le faire savoir ou s’il s’agit de mouvement d’humeur et de signaux envoyés sur la nécessité de mieux être traité par la formation présidentielle et la président de la république.
Exister par soi-même est bien évidemment légitime pour un parti politique et donc pour le MoDem.
Cependant, celui-ci est face à une inconnue que quatre ans dans la majorité n’a pas permis de lever: y a-t-il un avenir sans Emmanuel Macron et LaREM?
Le passé d’avant 2017 semble indiquer que oui mais qu’il ne serait guère flamboyant.
Paradoxalement, la séquence 2017-2021 semble plus prometteuse malgré la domination de LaREM puisqu’il a réussi à garder une identité propre et à être au pouvoir pour la première fois de son existence, ce qui a certainement contribué à le crédibiliser.
Jusqu’à quel point?
Il est difficile de répondre d’où, certainement, les atermoiements de ses dirigeants entre suivisme et indépendance.
Mais, à n’en pas douter, c’est bien le deuxième état qui a leur préférence.
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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