dimanche 17 mai 2020

Une Semaine en Centrisme. Le «momentum» Bayrou est-il enfin arrivé?

François Bayrou

Les Américains qualifient la période faste et d’essor d’une personnalité politique de «momentum» (littéralement élan ou dynamique).
Au moment où LaREM devrait perdre sa majorité absolue à l’Assemblée nationale avec le départ de quelques députés et où, pour poursuivre la politique du gouvernement, la majorité aura absolument besoin des voix du Mouvement démocrate, son président, François Bayrou ne voit-il pas le sien se dessiner, enfin.

Car le voici bientôt capable de poser ses conditions et de demander que l’on suive plus à la lettre ses «conseils» qu’il affirme prodiguer sans cesse à une oreille attentive d’Emmanuel Macron.

Et ceux qui doutent qu’il ne profite de la situation ou qui déclarent que cela ne l’intéresse pas, ne connaissent pas l’homme ou sont en train de créer un écran de fumée pour noyer le poisson et éviter de trop l’exposer.

Parce qu’il est une évidence que l’on ne peut nier sauf à réécrire l’histoire: Bayrou est un homme ambitieux qui a toujours voulu le pouvoir.

Ne s’est-il pas présenté trois fois pour devenir président de la république, la plus haute fonction politique du pays?

Et s’il ne s’est pas présenté en 2017 alors que les astres semblaient favorables à une victoire centriste, c’est simplement parce qu’un jeunot lui a piqué la place qu’il convoitait depuis si longtemps.

Un jeunot qu’il a d’ abord raillé avant de le rallier pour pouvoir encore exister politiquement et qui lui a fait un cadeau qu’il pourrait regretter pour les deux ans qui restent de son quinquennat: 46 députés qui vont désormais être indispensables pour gouverner.

Dès lors, personne de sensée et un petit peu au courant de la politique ne peut croire sérieusement que François Bayrou ne va pas utiliser cette position de force pour lui et ses idées.

Bien entendu, il n’a pas intérêt à surexploiter son nouveau statut, aller au clash, ni à faire du chantage qui se retourneraient sans doute contre lui et son parti.

En tout cas dans un futur proche.

En revanche, il se peut que sa petite musique lancinante qui n’était souvent qu’une musique d’ambiance fort lointaine voire un bruit de fond à peine perceptible devienne un morceau phare de la playlist de la majorité présidentielle.

De même, s’il parvient à se débarrasser de l’affaire des attachés parlementaires européens du MoDem qui lui a valu une mise en examen, son ambition de Matignon retrouvera à n’en pas douter une nouvelle jeunesse.

Il est sans doute trop tôt pour savoir ce qui va se passer ou faire des prédictions sérieuses mais il est évident que le président du MoDem doit réfléchir à comment utiliser du mieux possible sa nouvelle position tout en en abusant pas.

Interviewé aujourd’hui sur France Inter, bizarrement, personne ne lui a posé la question et il ne l’a pas abordé de front, affirmant juste que «la division est mortelle» et ajoutant: 
«La certitude qui est la mienne, c’est que, si on accepte la division ou si on la recherche, à ce moment-là on se condamne à mort. On l'a vu à d'autres époques avec d'autres partis et je recommande qu'on ne l'oublie pas.»

Voilà en tout cas une nouvelle phase du quinquennat d’Emmanuel Macron qui va s’ouvrir et, pour la première fois réellement, François Bayrou pourra avoir un rôle central concret et non virtuel.



Alexandre Vatimbella

Directeur du CREC

Jean-Louis Pommery

Directeur des études du CREC