Michael Bloomberg |
«Lors de mon tour du pays, raconte Michael Bloomberg, on me
dit souvent, ‘vous voulez vraiment une élection entre deux milliardaires newyorkais’
et je réponds, ‘quel est le deuxième?!’»
Cette blague sur la fortune de Donald Trump que ce dernier aurait
très largement surévaluée pose bien une des lignes de force de la candidature
de Bloomberg.
Au cours de ses meetings, il se présente comme le candidat «un-Trump»
pour signifier clairement qu’il est le contraire du populiste démagogue, pas
seulement en nombre de dollars qui les distinguent (la fortune de Bloomberg est
évaluée autour de 60 milliards de dollars).
Car être le «un-Trump» c’est surtout pour Bloomberg de dire
et démontrer qu’il est à l’opposé politique du président actuel et que ses
promesses, lui, il les tient comme il les a tenues quand il était maire de New
York.
Parce que contrairement à ce que disent ses concurrents pour
les primaires démocrates, non seulement, il n’est pas qu’un milliardaire (self-made
man venu d’un milieu modeste, faut-il ajouter, encore une différence avec
Trump) mais qu’il a aussi un bilan qui est plus qu’honorable en matières
environnementale, de lutte contre la violence par armes à feu, de création d’emplois,
d’assurance santé, de lutte contre la criminalité, sans oublier les millions de
dollars qu’il a dépensé pour faire battre une vingtaine de représentants
républicains extrémistes et permettre ainsi aux démocrates de redevenir
majoritaires à la Chambre des représentants lors des élections de mi-mandat de
novembre 2018.
C'est pourquoi, d'ailleurs, il a choisi comme slogan,«Mike will get it done» c'est-à-dire «Mike le fera» (il a décidé de se faire appeler Mike et non Michael pour cette présidentielle).
En outre, son programme est assez clair ce qui n’est pas
forcément le cas de tous les autres candidats démocrates.
En tout cas la stratégie de celui qui est un centriste totalement
assumé (à l’inverse d’un Joe Biden, d’un Pete Buttgieg et d’une Amy Klobuchar
qui le disent sans le dire pour éviter les foudres de la gauche du parti
démocrate) et qui veut «réconcilier» les deux Amériques, donne des résultats.
Parce que contrairement à ce que pensaient nombre de
commentateurs médiatiques et de «pundits» (experts) mais surtout ses rivaux, il
n’a pas été qu’un feu de paille et il se positionne désormais en troisième
position dans la course à l’investiture alors même qu’il n’a pas encore participé
à aucune primaire et aucun caucus et que ce ne sera toujours pas le cas pour
les prochains.
Même le barrage de critiques sur son action à New York (en particulier
l’utilisation, lors de ses trois mandats par la police de la ville, la NYPD, de
la très controversée technique «stop and frisk» – littéralement «arrêter et
fouiller» à la recherche d’armes et de drogues essentiellement – qui a permis
de faire baisser la criminalité mais qui avait un biais ethnique – racistes pour
ses opposants – en touchant avant tout les afro-américains), le management à la
tête de sa société et, surtout, sa fortune (qui le fait mettre dans le même sac
que Trump simplement parce qu’il est riche!) n’ont pas réussi à arrêter sa dynamique.
Du coup, tous les autres prétendants ont mis le turbo, aidés
en cela par une presse qui n’aime pas les milliardaires mais aussi qui se rappelle
son fiasco en ayant participé à la victoire de Trump par ses nombreuses erreurs
et fautes professionnelles, et les attaques pleuvent couplées avec celles de l’hôte
de la Maison blanche qui hait autant qu’il craint son compatriote newyorkais.
Reste que la montée en puissance de Michael Bloomberg
bénéficie avant tout, à l’heure actuelle à… Bernie Sanders!
Le socialiste profite dans les sondages, non seulement, d’un
report des voix de l’autre candidate de gauche à la primaire démocrate, Elizabeth
Warren, qui perd du terrain constamment, mais surtout de la baisse de celui qui
était jusqu’à présent le favori, Joe Biden, baisse essentiellement due dynamique
Bloomberg à la manière d’un vase communiquant.
Dès lors, on peut se demander si l’ancien maire de New York
ne va pas prendre la place de l’ancien vice président de Barack Obama comme candidat
centriste et peut-être même favori de la compétition.
Il est trop tôt pour le dire mais les attaques de plus en
plus virulentes de Joe Biden à l’encontre de Michael Bloomberg montrent que le
natif de Pennsylvanie sait que le newyorkais est une grande menace, voire la
principale, sur ses chances de devenir le candidat démocrate.
Il semble ainsi que les électeurs centristes trouvent en
Bloomberg un homme qui a un meilleur profil pour gagner, et la primaire et la
présidentielle.
Il est évidemment beaucoup trop tôt pour dire qu’il va l’emporter
et sa candidature, désormais attaquée de toutes parts, peut encore s’effondrer
sous les coups de boutoirs d’une campagne qui va devenir de plus en plus
violente à son encontre au fur et à mesure des bons sondages et qui n’est pas à
l’abri de révélations spectaculaires, voire de fake news et autres articles nauséabonds
qui font malheureusement partie dorénavant des élections et pas seulement aux
Etats-Unis.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC