Il faut dire que les centristes parisiens, jusqu’à présent,
avaient des leaders et/ou des candidats assez transparents (comme Michel d’Ornano
en 1977 ou Marielle de Sarnez en 2008) et peu à même de s’imposer en tant que
maire de la capitale.
Cela n’empêche pas Paris d’avoir cette fibre humaniste
propre au Centrisme.
Car, oui, Paris n’aime pas les sectaires, elle n’aime
surtout pas les populistes et les extrémistes dont les scores lors d’élections
sont souvent anecdotiques.
C’est en partie la raison des scores excellents d’Emmanuel
Macron dans la capitale en 2017 (puis de LaREM lors des législatives) et le
temps semblait venu pour qu’elle devienne une place forte du Centre
progressiste et social et que ce dernier s’impose aux municipales de mars prochain.
Mais ce ne sera sans doute pas le cas et la majorité
présidentielle pourrait même bien y connaitre une de ses pires déconvenues,
même si un sursaut hypothétique demeure encore possible.
Comment en est-on arrivé là?
Cette situation est autant due aux personnes, à ce qu’elles
sont et à leurs erreurs qu’à ce qu’est LaREM comme organisation et de la manière
dont elle fonctionne.
La seule chose qui n’est pas en cause, c’est le projet et la
ligne politiques à la fois du programme pour Paris mais également celui que
porte Emmanuel Macron pour la France.
Le choix de Benjamin Griveaux a été une erreur de taille.
Evidemment, nous ne parlons pas ici de l’affaire
ignominieuse de la sex-tape qui vient de l’amener à se retirer de la campagne
électorale mais plutôt de sa personnalité clivante, sans charisme, quasiment
inconnue des Français, incapable de donner une âme à sa campagne et dont la
nomination comme candidat du parti n’a pas été un exercice de démocratie
interne des plus aboutis, c’est le moins que l’on puisse dire.
C’est d’ailleurs ce qui a amené cette guerre entre Griveaux
et le prétendant malheureux, Cédric Villani qui a été un révélateur, à la fois,
de la faiblesse du candidat officiel (de l’hubris du battu) et de la fragilité
constitutive de LaREM.
Car si la guerre entre Griveaux et Villani est un problème
de personnes, surtout d’égos, elle est surtout symptomatique de ce qu’est la
formation présidentielle, une réunion de personnes mais pas encore, loin de là,
un vrai parti.
Aujourd’hui, LaREM demeure avant tout constituée de gens qui
ont rejoint à titre individuel Emmanuel Macron (et d’ailleurs le recrutement
des candidats aux législatives c’est fait sur cette base d’une implication
individuelle, les fameux «amateurs» vantés récemment par Emmanuel Macron).
Dès lors, elle s’expose, non seulement, à des guerres comme
celle que l’on vient de connaitre à Paris – puisque chacun trimballe avec lui
sa propre légitimité – mais aussi à des départs de militants (d’autant plus que
l’adhésion est gratuite, c'est-à-dire qu’elle n’implique rien d’autre que de
signifier que l’on est membre du parti ou qu’on ne l’est plus) et d’élus, ce
qui s’est déjà produit avec une dizaine de députés, ce qui n’est guère
exceptionnel au vu de ce qu’est LaREM.
Les dirigeants de celle-ci sont bien conscients de ces
insuffisances, voire des ces inconsistances à la base même de son existence et
travaillent à structurer ce «mouvement» sans y parvenir réellement d’autant qu’ils
ne peuvent non plus gommer ce qui a fait son succès au risque de la faire
imploser mais qui pourrait également entraîner sa chute.
Par ailleurs, l’actuelle déficience structurelle de LaREM,
si rien ne change, lui donne peu de chances de survivre au départ d’Emmanuel Macron
de l’Elysée que ce soit en 2022 ou 2027.
Parce que sans le lien Macron, nombre de militants et d’élus
ne partagent pas grand-chose et que comme on vient de le dire, dans une telle
adhésion, chacun y a mis ce qu’il a voulu, ce qui est aussi une des raisons de
sa réussite mais également de son possible effondrement rapide.
Reste que l’on apprend de ces erreurs et que les leaders macronistes
savent ce qui ne marche pas et peuvent s’atteler à réparer leur formation.
Pour cela, ils doivent certainement y mettre un peu de «professionnalisme».
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC