Président du groupe centriste Renew (dont fait partie Renaissance composée de membres de laREM, du MoDem, d’Agir et du Mouvement radical), l’ancien commissaire européen à l’Agriculture, Dacian Ciolos a signé une tribune avec les présidents de trois autres groupes (gauche, droite et écologie) au Parlement européen en ce sens (lire ci-dessous)
Dans une récente interview au quotidien Ouest France, il avait
affirmé qu’il était tout à fait normal de conditionner le versement des crédits
de l’UE au respect des valeurs européennes:
«Il s’agit de l’argent du contribuable européen. Il faut veiller à ce qu’il ne
tombe pas dans la poche des autocrates, de personnes corrompues ou
d’institutions qui devraient fonctionner de façon transparente et démocratique.
Demander de respecter les valeurs européennes, ce n’est pas faire preuve
d’ingérence. Les mêmes règles doivent s’appliquer à tous. »
► Tribune de Dacian Ciolos, président du groupe Renew Europe ; Iratxe Garcia Perez, présidente du groupe Socialistes et democrates (S&D) ; Ska Keller et Philippe Lamberts, coprésidents du groupe des Verts/Alliance libre européenne ; Manfred Weber, président du groupe Parti populaire européen (PPE).
Budget européen: une véritable conditionnalité liée au respect de l’Etat de droit est indispensable
Nous, présidents des quatre plus grands groupes politiques
du Parlement européen, nous unissons pour envoyer le message suivant au Conseil
européen, au Conseil de l’Union européenne (UE) et à la Commission
européenne : nos valeurs ne sont pas à vendre.
Ces dernières semaines, les négociateurs du Conseil européen se sont montrés
totalement réticents au changement du moindre iota du compromis sur le budget
de l’UE et sur le plan de relance « Next Generation EU », conclu cet
été par les dirigeants européens. Cela n’est pas conforme aux engagements pris
quant à l’introduction d’un mécanisme de conditionnalité au respect de l’Etat
de droit.
Nous sommes unanimes pour saluer le plan de relance. Nos économies ont un
besoin urgent de fonds pour sauver des emplois et créer des opportunités pour
l’avenir. Le soutien du Parlement européen ne fait aucun doute. Nous l’avons
d’ailleurs montré en votant le plan de relance dès le 16 septembre.
Maintenant, c’est au tour des vingt-sept gouvernements et de leurs Parlements
nationaux d’en faire autant. Les défis économiques auxquels nos citoyens
doivent faire face deviennent de plus en plus importants. Il est inacceptable
que ceux qui entendent saper l’Etat de droit soient prêts à prendre en otage le
fonds de relance et, ce faisant, à servir leurs propres intérêts plutôt que
ceux de leurs citoyens.
Notre système judiciaire est en crise ; l’ensemble de notre édifice
juridique européen vacille lorsque l’un de nos gouvernements muselle ses juges
et crée un climat de peur et de contrôle à tous les échelons de son système
judiciaire national.
Nos libertés civiles, la liberté des médias et le pluralisme sont soumis à
d’immenses pressions. Les attaques contre la liberté de la presse, la société
civile, les agressions verbales et physiques contre les journalistes – voire
les assassinats – et la prise de contrôle de groupes de médias par une
oligarchie liée au pouvoir semblent devenir la norme dans certains Etats
membres. La liberté de la presse n’est pas un luxe. C’est une condition
préalable à l’existence de démocraties libres et fonctionnelles. Notre marché
intérieur est menacé. Dans certains Etats membres, nous voyons une poignée de
gens prendre le contrôle des fonds comme des marchés publics, et la corruption
devenir la norme.
Nous sommes fondamentalement convaincus qu’une véritable conditionnalité liée
au respect de l’Etat de droit dans le budget européen est indispensable pour
s’attaquer à ces problèmes.
Le temps presse. Le Conseil a adopté sa position, ce qui permet aux
négociations de commencer, enfin ! Mais certaines garanties fondamentales
font malheureusement défaut. Le processus de conditionnalité doit être clair.
Premièrement, la décision en matière d’éventuelles sanctions doit être déléguée
à la Commission et ne doit pouvoir être annulée que par un vote à la majorité
qualifiée au Conseil. Deuxièmement, le champ d’application de cette
conditionnalité doit inclure au minimum la violation des principes de l’Etat de
droit et de l’indépendance de la justice. De plus, la Commission doit fonder
ses conclusions sur le nouveau rapport annuel sur l’Etat de droit en s’appuyant
également sur un panel d’experts indépendants. Troisièmement, il ne doit pas y
avoir d’échappatoire : l’idée d’offrir aux Etats membres la possibilité de
reporter la mise à l’agenda de ces questions aux futures réunions du Conseil
européen leur permettrait en réalité de reporter les décisions sine die. Cela
ne sert que les intérêts de ceux qui ne souhaitent pas que des décisions soient
prises.
Plus important encore, nous devons protéger les citoyens contre le comportement
de certains gouvernements. Cela passe par un système permettant à ces derniers
de continuer à recevoir directement des fonds. Pas un seul citoyen européen ne
devrait être puni parce que son gouvernement ne respecte pas et ne défend pas
les principes fondateurs de notre Union. De plus, nos trois institutions
devraient être impliquées dans ce processus de décision, ce qui signifie un
rôle important pour le Parlement européen, aux côtés de la Commission et du
Conseil. Le Parlement européen est prêt à assumer pleinement ses
responsabilités, c’est ce que nos citoyens nous demandent.
Nous invitons le Conseil à faire de même et à adopter une attitude constructive
sur la question de l’Etat de droit. Nous devons faire tout notre possible pour
protéger notre grande démocratie européenne, notre économie, nos valeurs et,
surtout, nos citoyens. Pour ce faire, nous resterons fidèles à notre mission,
qui est de veiller à ce que les valeurs européennes ne soient pas à vendre.
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