François Bayou |
Il n’aura aucun pouvoir exécutif, il ne pourra être autonome et son travail risque de n’être qu’une longue liste de rapports et de recommandations qui comme tous les rapports et recommandations finiront dans des tiroirs après avoir été encensés.
Mais pourquoi donc François Bayou veut-il devenir le chef d’un
«machin» comme le Commissariat au plan recréé (ou plutôt revitalisé puisqu’il
existe déjà un organisme de prospective au sein de l’administration, France stratégie
qui, à ses débuts, s’appelait Commissariat au plan…)?
Parce qu’il pense que celui-ci sera une tribune politique et
médiatique qui lui permettra de dire ce qu’il pense de bon pour le pays, que
ses propos auront une résonnance particulière auprès de la population et que
même il pourra faire pression sur le président de la république et le
gouvernement pour faire passer des mesures et devenir, non pas un
contrepouvoir, mais une sorte de co-pouvoir.
Cela lui permettra également de démontrer qu’il a bien l’oreille
du président et que celle-ci n’est pas distraite voire sourde à ses propos
comme le disent certains.
Politiquement, ce poste est donc intéressant pour un François
Bayrou qui ne peut se contenter de jouer le sage béarnais qui, du pied de ses
montagnes pyrénéennes, délivre de temps en temps la bonne parole, lui, l’homme
qui voulait (veut?) devenir président.
Retrouver donc une dynamique politique personnelle bien mise
à mal par l’élection d’Emmanuel Macron puis par l’affaire des attachés parlementaires
européens du MoDem pour laquelle il a été mis en examen en décembre dernier.
Mais ce poste dont lui-même explique l’importance à ses
interlocuteurs, peut également le mener sur une voie de garage dorée où, enfin
casé, il sera obligé de rentrer, quoi qu’il en dise, dans le moule de l’équipe
qui dirige la France au lieu d’en être, à peu de frais, celui qui lui délivre
des conseils, des bons et des mauvais points tout en prétendant parler en tant
que gardien de la flamme des valeurs et du programme portés par Emmanuel Macron
lors de la présidentielle de 2017, ce qui est actuellement le cas lors de
toutes ses interventions dans les médias.
Servir à quelque chose à la tête d’un «machin» qui souvent
été le moyen de montrer que l’on s’occupe d’un problème tout en le mettant
délicatement sous l’éteignoir, voilà un challenge qui mérite d’avoir toutes les
assurances que l’on ne sera pas uniquement une belle potiche qui sera sur les
photos tout en comptant pour pain et beurre.
De même, l’Elysée et Matignon doivent également prendre
toutes les assurances que le centriste ne va pas utiliser son poste pour s’introniser
comme une sorte de guide suprême au-dessus de tous, président et premier
ministre compris avec, en plus, une posture de critique de l’action gouvernementale
si celle-ci ne va pas dans le bon sens.
Voilà sans doute pourquoi, alors même que début juillet sa
nomination était actée, il n’est toujours pas en place au 1er août
et que sa prise de fonction ne devrait pas intervenir avant la rentrée.
Car, il faut que Bayrou puisse donner une solennité à son arrivée
et que, de l’autre côté, on fasse bien comprendre à l’opinion qu’il y a déjà un
président qui préside, un premier ministre et un gouvernement qui gouvernent.
S’il est à souhaiter que ce «machin» serve à quelque chose,
on comprend que les principaux intéressés espèrent qu’il ne sera pas une
terrible usine à gaz qui polluera l’action gouvernementale en produisant de la
division plutôt que du consensus au sein de la majorité.
Parce que cette dernière éventualité n’est pas du tout fantaisiste,
elle serait même la plus sérieuse.
Ne pas passer d’une possible donne gagnante-gagnante à un fiasco
perdant-perdant en quelque sorte.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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