En recevant à l’Elysée les 150 personnes qui ont composé la Convention citoyenne sur le climat et qui viennent de rendre leurs 149 propositions (les consulter ici), Emmanuel Macron leur a indiqué qu’il validait 146 d’entre elles et qu’elles seraient «transmises soit au Gouvernement, soit au Parlement, soit au peuple français».
Tout en affirmant que «cette aventure démocratique et humaine constitue une première
mondiale» parce qu’«en neuf mois» cette convention a
«renouvelé de manière inédite les formes de la
démocratie», il a estimé que «le temps est venu de faire, d’agir» et que «toutes les propositions
qui sont prêtes» seront «mises en œuvre au plus vite».
Puis il a énuméré les quatre
principes qui «guideront» le gouvernement pour y parvenir:
«Le premier principe: remettre
l’écologie au cœur de notre modèle productif et faire le pari de
l’investissement dans les transports, les énergies, les technologies de demain.
En somme : réconcilier écologie et économie. Le deuxième principe: la justice
sociale. La transformation écologique n'est possible que si elle est aussi une
transformation sociale et solidaire. Le troisième principe: réussir
l'aménagement de notre territoire. Nous veillerons à l'accessibilité de chaque
région tout en favorisant les transports les plus compatibles avec notre
ambition environnementale. Le quatrième principe: la responsabilité de chacun.
Pour parvenir à un changement de modèle, toute la nation doit s'engager,
changer son regard, son comportement au quotidien.»
De plus, il «souhaite laisser ouverte
la possibilité de conduire dès 2021 un référendum sur un ou plusieurs textes de
loi reprenant les propositions» de la Convention
même si celle-ci ne l’a pas demandé expressément.
A propos de la création d’un crime
«d’écocide» demandé par les membres de cette dernière, il a indiqué:
«Je porterai ce combat au nom de la
France dans les instances multilatérales pour inscrire ce crime dans le droit
international. Sur le plan français, nous étudierons comment ce principe peut
rentrer dans notre droit.»
En revanche, il a expliqué qu’il ne
souhaite pas reprendre la proposition de «réécrire
le préambule de la Constitution en plaçant l’environnement au-dessus de nos
autres valeurs fondamentales».
Enfin, estimant que puisque «durant neuf mois, la Convention citoyenne a montré qu’il était possible sur un sujet aussi difficile et
inflammable de créer du consensus et de prendre des mesures courageuses» il s’est dit favorable «qu'il y
ait d'autres Conventions citoyennes à l'avenir»
sur d’autres sujets.
► Voici le discours
prononcé par le Président de la République devant les membres de la Convention
Citoyenne pour le Climat
Mesdames et Messieurs les ministres, Monsieur le président
du CESE. Mesdames, Messieurs les parlementaires. Mesdames, Messieurs, chers
amis, chers 150, merci d'être là. Dans ce jour un peu particulier et dans cette
maison qui est la vôtre et celle de toutes les Françaises et tous les Français.
Et en vous écoutant un instant, je dois dire, c'était assez émouvant d'entendre
à la fois la conviction, les idées, les propositions, ce que vous avez porté,
mais aussi ce que vous avez vécu et les pages que vous avez transmises -
et je serai votre ambassadeur dès cet après-midi, je vous rassure - ne disent
sans doute pas tout de l'expérience humaine unique que vous avez portée,
partagée. Et notre démocratie, c'est aussi cela, c'est de pouvoir débattre
entre personnes qui ont des accords et des désaccords sur des sujets aussi
essentiels pour le présent et l'avenir de notre pays comme de notre planète, et
de savoir tirer quelques conclusions, quelques lignes de convergence.
C'était en avril 2019, à la fin du Grand Débat national qui
succédait au mouvement des gilets jaunes, qu’en effet la décision de créer
cette Convention citoyenne a été prise. Avec cette question pressante dans tout
le pays : comment, après la colère suscitée par la taxe carbone, entres autres,
comment mieux associer les Français aux décisions qui les concernent et qui impactent
leur quotidien ? On aurait pu alors dire : il y a une crise sociale terrible
dans le pays, mieux vaut abandonner, lâcher cette affaire et considérer en
quelque sorte qu'on ne peut pas réconcilier la fin du monde et la fin du mois.
Formule désormais connue à laquelle vous avez fait référence et avançons pour
gérer les urgences du pays. C'eût été injuste, y compris injuste pour nos
concitoyens qui s’étaient opposés à cette taxe et qui n’ont jamais voulu
opposer l’un et l’autre, et qui considéraient que la transition écologique
devait être juste et qu’au fond nous nous y étions sans doute mal pris, pas
suffisamment expliquée, pas suffisamment partagée, préparée.
Un collectif avait alors proposé le principe d'une assemblée
de citoyens tirés au sort. Nous en avions parlé ensemble cher Cyril DION. Et
beaucoup à ce moment-là qualifiaient cette idée, je dois le dire, de
fantaisiste, d’illégitime même et nous avons, nous, avec le Premier ministre,
avec le Gouvernement, décidé de tenter l'aventure, de faire confiance aux
citoyens, d'assumer, de construire une démocratie délibérative qui, évidemment,
ne s'oppose pas à la démocratie parlementaire, mais qui la complète et qui
l'enrichit.
Et d'ailleurs, en écoutant vos travaux, en lisant aussi vos
conclusions, j'ai pu voir combien vous aviez mesuré de là où vous étiez
l'importance du travail fait par les parlementaires et la nécessité d'articuler
ce travail de démocratie délibérative où des citoyens tirés au sort qui n'ont
pas la même légitimité que des citoyens élus, mais parce qu'ils réfléchissent,
travaillent, acquièrent des connaissances, représentent malgré tout quelque
chose ; eh bien comment cette intelligence collective pouvait se marier avec la
responsabilité qui est celle de l'exécutif et du pouvoir législatif.
Tout, dans cette aventure démocratique et humaine, constitue
une première mondiale, autant par son ambition que par son ampleur. Il y avait
eu des expériences comparables sur des sujets beaucoup plus limités pour
essayer de démêler des divergences dans une société ; jamais sur un sujet aussi
large. Et votre engagement si constant et si fort a aussi été une première.
Vous avez pris sur votre temps familial, amical, y compris dans des conditions
sanitaires exceptionnelles que notre pays a vécu et vous l'avez rappelé un
instant. Et le sérieux avec lequel vous avez œuvré doit aujourd'hui pleinement
vous permettre de valoriser cette expérience dans votre vie professionnelle.
C'est pourquoi j'ai aussi demandé au Gouvernement que cet engagement dans la
Convention citoyenne puisse être valorisé dans le parcours professionnel et de
formation ; mais que tous ceux qui vous suivront dans les expériences que nous
aurons ainsi à reprendre, puissent bénéficier de la même validation.
Je veux ici aussi saluer l'implication du comité de
gouvernance et je remercie Laurence TUBIANA, Thierry PECH, le groupe d'appui,
le comité légistique, les garants, les animateurs, l'ensemble des équipes et de
celles et ceux qui ont fait vivre cette convention.
En 9 mois, la Convention citoyenne a renouvelé de manière
inédite les formes de la démocratie et bousculé le système. Et si cette
expérience est une réussite, c'est avant tout par la qualité du travail que
vous avez produit. Vous l'avez rappelé, c'est une question difficile qu'aucun
pays du monde n'a vraiment à ce stade résolu qui vous avez été posée : comment
réduire d'au moins 40 % par rapport à 1990, nos émissions de gaz à effet de
serre d'ici 2030, dans un esprit de justice sociale ? Vous vous êtes formé,
vous avez auditionné, vous avez travaillé, vous avez débattu et vous avez
répondu avec profondeur et intelligence. Vous avez répondu par un plan touchant
à de nombreux domaines les déplacements, l'agriculture, le bâtiment, la
responsabilisation des entreprises et des consommateurs. Et à la fin de ces 9
mois, ce temps d’une grossesse qui vous a permis d’aboutir à ce travail, vous
avez remis à la ministre Elisabeth BORNE ce que vous aviez réussi à faire,
conjuguant ambition et recherche de consensus. Et je veux saluer dans le
travail que vous avez constamment mené cette ambition parce que vous aussi
compris l’état dans lequel nos démocraties se trouvent. Certains d’entre vous
l’ont dit, nous avons pris une claque. Certains ont découvert l’urgence. Mais
vous avez tous pesé, le fait qu’on ne peut pas répondre à cette urgence en
divisant, en opposant, en culpabilisant. C’est parfois l’erreur que nous avons
faite, moi-même le premier. On ne peut y arriver qu’en embarquant l’ensemble de
nos concitoyens et donc en trouvant les voies d’un vrai consensus. C’est ce que
vous avez cherché entre vous, et c’est maintenant ce que nous devons
collectivement cherché au sein du pays pour que l’ensemble de vos propositions
deviennent une réalité.
D’abord parce que l’urgence est là, vous l’avez rappelé,
plus prégnante encore qu’au moment où nous avons lancé vos travaux. La planète
pourrait être sur une trajectoire de plus 7 degrés d’ici 2100, la biodiversité
continue de se dégrader, les choses ne s’améliorent pas spontanément. Depuis 3
ans nous avons commencé à déployer un agenda écologique en étant le premier
pays au monde à fermer ses centrales à charbon, en mettant fin aux permis
d’hydrocarbures, en donnant l’objectif de classer 30 % de notre espace maritime
et terrestre en aires protégées. Mais ce que vous avez démontré c’est que nous
devons aller beaucoup plus loin, beaucoup plus fort, qu’au fond même si nous
avons déjà un bilan, l’histoire s’accélérant il est insuffisant. Le défi
climatique nous impose de faire beaucoup plus. Au fond, ce que vous nous dites
c’est que le temps est venu de faire, d’agir. Et ce temps d’action concrète,
c’est celui que votre travail inaugure.
Alors lorsque nous nous sommes vus en janvier, je vous avais
dit toutes les propositions qui seront abouties et précises seront transmises
sans filtre soit au Gouvernement pour ce qui relève du domaine réglementaire
soit pour ce qui relève de la loi, au Parlement, ou directement au peuple
français. Et donc notre échange d’aujourd’hui n’est pas un grand discours sur
des principes abstraits, c’est la réponse à laquelle je m’étais engagé et le
lancement d’un nouveau processus. Et je vous confirme ce matin que j’irai au
bout de ce contrat moral qui nous lie en transmettant effectivement la totalité
de vos propositions à l’exception de 3 d’entre elles - les 3 jokers dont nous
avions parlé en janvier, sur 149 sur lesquelles justement je vais revenir.
Je veux que toutes vos propositions qui sont prêtes soient
mises en œuvre au plus vite. Certaines, les premières, en particulier toutes
celles qui relèvent justement du champ réglementaire, seront abordées lors d’un
prochain Conseil de défense écologique -c’est un Conseil des ministres
restreint dédié aux questions de biodiversité, d’environnement et de climat -
d’ici fin juillet.
D’autres seront intégrées au plan de relance qui, comme je
l’ai dit aux Français, sera économique, écologique et social et sera soumis au
Parlement dès la fin de l’été. D’ores et déjà, vos contributions et nos
échanges ont permis d’éclairer une partie et d’influencer profondément une
partie des plans sectoriels. Je pense à ce que nous avons décidé sur
l’autonomie, l’automobile ou l’aéronautique qui a d’ores et déjà pu prendre en
compte plusieurs des propositions qui avaient été les vôtres et j’y reviendrai.
Ensuite un projet de loi spécifique sera présenté à la fin
de l’été. Il intégrera l’ensemble de vos mesures qui relèvent du champ
législatif qui seront finalisées dans les prochaines semaines ; et y compris
celles qui méritent encore d’être affinées ou complétées dans le cadre d’un
travail auquel je tiens à ce que vous soyez étroitement associés. Le
Gouvernement et le parlement y travailleront et, comme je m’y étais engagé, je
souhaite que vous soyez associés dans le cadre du suivi. Dès demain, ce que je
vous propose c’est de mettre en place les groupes de travail sur vos
propositions qui permettront avec les parlementaires et le Gouvernement de
pleinement vous associer aux transformations en lois, en règles concrètes. Et
dès la semaine prochaine, le président de l’Assemblée nationale vous recevra à
cette fin.
Certaines de vos propositions dépendent aussi des
collectivités territoriales. Pour augmenter le nombre de parkings relais,
interdire les véhicules polluant dans les centres-villes, pour accélérer sur
les filières de recyclage des déchets, instaurer des clauses environnementales
dans les marchés publics, il nous faut en effet dialoguer avec les maires et
les élus locaux. Je propose donc que le Gouvernement réunisse les associations
d’élus pour discuter de l’ensemble de ces propositions, de leur mise en œuvre
et pouvoir ainsi intégrer le fruit de ces échanges dans les modifications
législatives nécessaires qui seront ainsi intégrées à ce projet de loi.
Enfin, plusieurs de vos propositions relèvent de l’échelon
européen, parfois international. C’est le cas de la politique commerciale. Vous
dites “aucun accord commercial avec des États qui ne respecteraient l’Accord de
Paris”. Je partage votre proposition et c’est pour cela que sur le MERCOSUR,
j’ai stoppé net les négociations et les derniers rapports qui ont pu nous être
soumis me confortent dans cette décision.
Sur le CETA, et nous avions échangé sur ce point en janvier,
comme vous le savez il est mis en place aujourd’hui de manière transitoire et
après un travail qui a permis d’améliorer son contrôle, sa vérification, son
évaluation - et qui est d’ailleurs le fruit d’un engagement du Gouvernement et
de nos parlementaires. Je vous réponds sur le CETA, continuons à évaluer. Je
n’ai aucun tabou : si l’évaluation montre qu’il n’est pas conforme avec la
trajectoire de l’Accord de Paris, je serai le premier à proposer qu’on
l’abandonne.
Des sujets comme la mise en place de la taxe carbone aux
frontières du continent ou le verdissement de la politique agricole commune
relèvent quant à eux de l'échelon européen. Je les partage. La France, durant
la crise sanitaire, a obtenu que le prochain budget comporte des
investissements massifs pour la transition écologique. Nous avons aussi porté
ce plan de reconquête au niveau européen, d'abord par un accord franco-allemand
puis une proposition de la Commission européenne. Les prochaines semaines
seront décisives pour que les investissements soient à la hauteur de ses
ambitions au niveau européen, avec les règles qui conviennent. Je serai le 17
juillet prochain à Bruxelles pour poursuivre ce combat et vous pouvez compter
sur moi. L'échelon européen est indispensable si nous voulons un vrai prix du
carbone, une vraie taxe aux frontières, les vrais investissements pour nos
industries et les transformer et notre politique agricole. Voilà donc pour la
méthode du sans filtre.
Sur le suivi de vos propositions auxquelles je m'étais
engagé en janvier, je souhaite que le Gouvernement fasse le point avec vous
chaque mois. La démocratie délibérative ne doit pas s'arrêter à la porte des
ministères ou des assemblées - et c'est bien un travail partenarial qui la
poursuivra que je vous propose. Voilà pour la méthode, le calendrier, mais je
veux aller plus loin.
Vous l'avez très bien dit, ce que vous proposez c'est un
projet cohérent. Ce ne sont pas une série de mesures qui s'additionnent. C'est
un projet cohérent pour mieux vivre, un projet humaniste auquel j'adhère. Notre
société a besoin d'une transformation profonde qui nous permette de respecter
nos engagements internationaux et qui nous permettent de faire notre part, nous
Français, pour lutter contre le réchauffement climatique et pour lutter pour la
biodiversité. Et de rester une grande nation géopolitique, de continuer à
financer notre modèle social qui est lui aussi très ambitieux et nécessite de
produire pour le financer, et que tous ensemble nous arrivions à vivre mieux et
améliorer la qualité de la vie.
C'est pourquoi il y a quatre principes que je partage avec
vous et qui sont pour moi les piliers de votre projet et de ce que je vois
comme véritablement la transformation écologique que notre pays peut porter.
Le premier, c'est que vous avez assumé, décidé et je le
partage de placer l'écologie au cœur du modèle économique en faisant le pari de
l'investissement dans les transports, les énergies, les technologies de demain.
Et quand je dis ça, ça n'est pas simplement une formule, ça veut dire
qu'ensemble, nous décidons de ne pas faire deux autres choix. Il y a un choix
possible qui est de continuer à dire le cœur de notre modèle économique, c'est
de produire sans se soucier de l'écologie. Plus exactement, l'écologie, c'est
ce que les économistes appelleraient une externalité négative et on la corrige
après. Ce n'est plus possible ! Nous sommes aux limites du système.
On doit remettre l'ambition écologique au cœur du modèle
productif, c'est-à-dire chercher par ses transformations, ses investissements à
produire différemment, à l'évaluer, à le mesurer, à transformer nos capacités.
C'est le choix qui est derrière vos propositions et c'est un changement profond
de philosophie.
Mais le deuxième choix auquel vous tournez le dos aussi,
c'est celui qu'on appelle le modèle de la décroissance. Vous ne proposez pas,
et j'ai entendu comme vous parfois beaucoup de caricatures sur vos
propositions, vous ne proposez pas de ne plus produire. Et je crois comme vous
que ce ne serait pas une réponse au défi qui est le nôtre. Vous voulez qu'on
produise pour servir ce modèle, un modèle humaniste. Mais si nous disions
collectivement pour réussir ce défi écologique, il faut moins travailler, moins
produire, j'aurais une réponse simple à vous apporter, je vous dirais en bonne
foi : si nous produisons moins nous travaillons, moins nous ne pourrons plus
financer le modèle social qui est le nôtre. La crise sanitaire nous l’a fait
vivre et les débats dans lesquels nous sommes au sortir de cette crise nous le
montrent, nous avons besoin là aussi d'investir de l'argent public dans notre
santé. Nous pouvons l'investir parce que nous produisons. Un modèle de
décroissance, c'est un modèle de décroissance aussi de notre modèle social. Et
les chiffres que nous avons vécu dans cette période certes ont permis dans les
métropoles d'améliorer la qualité de l'air et c'est ça qu'il faut réussir à
consolider en changeant les modes de transport, c'est ce que vous proposez.
Mais une économie quasiment à l'arrêt n'a réduit que de 8 %
les émissions. Et donc on voit bien que le choix de décroissance n'est pas une
réponse au défi climatique non plus. Non, remettre l'écologie au cœur du modèle
productif, faire le pari de l'investissement dans les transports, les énergies,
les technologies de demain est pour moi ce premier pilier qui réconcilie
économie et écologie que vous assumez et auquel je crois.
Investir, transformer, innover, c'est ce qui correspond à
notre pays, à cette philosophie des Lumières qui nous a fait. C'est en étant
plus intelligent, en sachant changer les comportements, en investissant sur les
domaines les plus importants pour notre pays et notre économie que nous saurons
relever ces défis.
Investir dans les transports propres, rénover nos bâtiments,
inventer les industries de demain, investir aussi dans des domaines que parfois
vous n'avez pas traités dans vos travaux mais qu'il nous faut assumer comme les
énergies décarbonées, les réseaux, la préservation des ressources en eau. Je
pense à ce sujet que nous avons commencé à embrasser dans le cadre d'un gros
travail avec les collectivités locales. Nous continuons à être un pays qui
gaspille énormément d'eau, il faudra investir là aussi dans nos réseaux de
distribution et ça fait partie de cet esprit, de cette philosophie, des mesures
que vous portez.
L'Etat prendra toute sa part. C'est pourquoi dès le plan de
relance que nous sommes en train de préparer, 15 milliards d'euros
supplémentaires sur 2 ans seront injectés dans la conversion écologique de
notre économie.
Nous allons mettre en place un fonds de transformation
écologique de notre économie dans le plan de relance, avec là aussi de manière
sous-jacente un objectif qui apparaît partout dans vos propositions : le fait
que ce modèle est cohérent avec un objectif d'indépendance. Remettre plus
d'écologie dans notre modèle productif, c'est aussi par notre organisation
renforcer l'indépendance européenne et française. Je ne prendrai qu'un exemple,
celui de la souveraineté alimentaire. Si on veut réussir à suivre votre ligne,
il faut renforcer notre capacité à produire nos propres protéines ; en effet comme
vous le dites, réduire pour aller vers la suppression de nos importations de
protéines sous OGM qui viennent du bout du monde et réussir à avoir un modèle
beaucoup plus indépendant sur ce plan là.
L'économie au coeur du modèle productif et une plus grande
indépendance est au cœur de ce projet. L'Etat a son rôle à jouer et les
collectivités publiques avec lui. Le secteur privé a aussi un rôle à jouer et
c'est notamment pour cela, je le dis clairement, que je suis en désaccord —
j'avais dit que j'avais quelques jokers — avec la taxe de 4 % sur les
dividendes que vous proposez.
Je ne dis pas qu'il ne faut pas réorienter une partie des
investissements vers des investissements plus verts, mais mettre sur tous les
investissements une taxe, c'est réduire notre chance d'attirer des
investissements supplémentaires. Je crois à la croissance de notre économie, je
crois à un modèle qui innove. Nos entreprises ont besoin d'innover. Elles ont
donc besoin d'attirer des capitaux, français et étrangers, sur notre sol pour
innover et changer le modèle. Nous sommes déjà un pays qui est très fiscalisé.
Je pense qu'accroître la fiscalité pour répondre à ce défi n'est pas la bonne
manière. Par contre, continuer à réfléchir sur une fiscalité plus incitative
vers ce qui est plus vert et qui doit donc être plus rentable, j'y suis prêt.
Le second principe de cette transformation, c'est un
principe de justice sociale. Vous y êtes revenus avec beaucoup de force de
conviction, vous avez convoqué à juste titre Condorcet et je partage cette
philosophie. Je le dis avec d'autant plus d'humilité que nous ne l'avions pas
assez vu au début et que je crois que le chemin que nous avons collectivement
fait dans notre pays depuis 3 ans et que vous éclairez remarquablement, c'est
que la transformation écologique n'est possible que si elle est aussi, en même
temps, comme dirait l'autre, une transformation sociale et solidaire.
Faire en sorte que cette transition écologique ne laisse
personne au bord du chemin. Et sur ce sujet, vous avez beaucoup de propositions
fortes que je souhaite toutes voir reprises : proposer des chèques alimentaires
pour permettre aux plus modestes d'acheter des produits de qualité de cette
agriculture que vous voulez transformer, de cette agroécologie dont vous voulez
accélérer la promotion, et vous avez raison ; proposer des aides renforcées
pour que les plus modestes puissent acquérir des véhicules propres. Vous
proposez aussi d'interdire des passoires thermiques. Nous le souhaitons tous.
Et vous reconvoquez un débat qu'il y a eu au sein du Gouvernement avec le
Parlement, qui est très compliqué et qui pose toute la difficulté de
l'articulation de la problématique environnementale et sociale ; et vous l'avez
d'ailleurs vécu dans vos débats. On s'est arrêtés à une position qui vous
apparaît trop timide parce qu'on n'a pas totalement interdit les passoires
thermiques avec une date ; c'était dans mes propositions de campagne. Si le
Gouvernement, avec les acteurs du secteur et le Parlement, ne l'a pas
totalement interdit, c'est qu'il a vu que si on y mettait les moyens actuels,
interdire, c'était, au fond, mettre des ménages qui sont parfois en situation
modeste dans des situations impossibles et c'était réduire l'offre de logement,
et donc accroître le mal-logement dans notre pays. Il y a sans doute un chemin
qui rend la chose possible - et c'est ça que nous allons travailler sur la base
de vos propositions, avec vous, pour le finaliser, c'est d'investir davantage
pour être au rendez-vous de cette ambition, et donc d'une part investir pour
transformer plus vite tout ce qui est dans le parc public ou chez les bailleurs
en accompagnant financièrement et investir pour accompagner les ménages les
plus modestes pour qu'ils ne soient pas face à une impasse.
Nous ne pouvons remporter ce combat qu'en trouvant les
accompagnements nécessaires, en assurant des aides financières pour ces ménages
pour qu'aucun propriétaire et aucun locataire ne soit dans l'impasse ; au fond,
veiller toujours à ce que la transition n'exclue pas les plus modestes, ne les
relègue pas, ce qui doit être la marque de fabrique d'une écologie à la
française.
C'est aussi pour cela, je parle d'un mot de ce que vous
n'avez pas évoqué, que vous n'êtes pas revenus sur la taxe carbone. On s'en
était parlé en janvier. Vous avez eu parfois le sentiment qu'au fond, c'était
le plan caché, en disant : "s'ils veulent qu'on relégitime la taxe
carbone, ils n'ont pas réussi à le faire donc ils voudraient que 150 citoyens
reviennent et la mettent sur la table". Mais j'ai vu vos débats sur ce
sujet. Alors sur ce point, je vais vous parler très franchement, je pense que
la fixation d'un vrai prix du carbone, et vous le savez, vous l'avez dit entre
vous, est l'un des moyens les plus puissants pour réussir notre objectif. Là,
nous avons encore les cicatrices de ce débat.
Donc au fond, ce que vous avez envoyé comme message, c'est :
"on va refroidir un peu le moteur sur le plan franco-français, faites-le
déjà sur le plan européen". Oui, et pour éviter tous les biais et toutes
les distorsions de concurrence, la priorité pour moi des prochains mois, c'est
d'avoir véritablement une taxe carbone européenne, c'est-à-dire de monter
véritablement le prix de référence, d'avoir un prix plancher, d'avoir une taxe
aux frontières, c’est clé si nous voulons tenir non seulement nos objectifs,
mais comme on le doit, rehausser nos objectifs 2030, avoir une trajectoire
crédible. C'est l'objectif des prochains mois en européen, c'est essentiel. Et
là, j'aurai un travail de conviction et je le commencerai dès cet après-midi.
Au niveau national, il nous faudra, dans les prochaines
années, ce n'est pas quelque chose qu'on peut engager dans les deux ans qui
viennent, réfléchir à une transformation profonde de notre fiscalité pour
intégrer une juste tarification du carbone, mais qui suppose de réformer les
autres impôts pour en même temps rendre cette taxation juste. Et donc c'est ça
qu'il faut faire de manière apaisée dans le pays. Je crois que vous avez raison
de ne pas proposer une taxe carbone dès demain, mais je pense qu'il ne faudrait
pas laisser le sujet de la réforme en profondeur de notre fiscalité pour
qu'elle soit plus écologique et plus juste encore. C'est un chantier qui, à
coup sûr, alimentera les débats de 2022.
Le troisième principe d'une écologisation de notre société
et de notre économie est de réussir l'aménagement de notre territoire et c'est
partout, là aussi, dans votre projet, au fond, de bâtir de nouveaux équilibres.
Vous êtes revenus sur quelques propositions très concrètes, mais je pense que
c'est un élément très important.
D'abord avec cette volonté de veiller à l'accessibilité de
chaque territoire, de chaque région, mais de renforcer partout où c'est
possible les transports les plus compatibles avec notre ambition
environnementale. Par exemple en interdisant, en supprimant les vols intérieurs
quand un trajet en train dans des délais raisonnables est possible. Alors oui,
c'est ce que nous avons fait avec le Gouvernement dans le cadre du plan
aéronautique. Lorsqu'il y a un trajet en TGV qui est possible en deux heures et
demie ou moins, nous ne poursuivons pas les lignes intérieures avec l'avion.
Par contre, j’ai vu que parfois dans les débats c'était 4 heures, je crois
qu'il faut savoir raison garder. On ne peut pas ré enclavé des territoires.
Lorsque c'est plus de deux heures et demies en train, c'est très difficile de
couper totalement les lignes intérieures parce que vous avez certains de nos
concitoyens qui ont besoin de se déplacer, qui ont besoin de travailler. Il
faut maintenir là aussi des usines partout sur le territoire, ne pas concentrer
celles-ci dans les métropoles les mieux desservies.
Donc il faut pouvoir articuler ces deux objectifs, un
aménagement harmonieux de notre territoire et de la production partout et la
réduction, si je puis dire, de trajectoires par avion qui ne sont plus utiles
quand on peut se déplacer en TGV à moins de deux heures et demies. C'est cet
équilibre qu'on va donc tenir. Jamais, me semble-t-il, la transition écologique
ne doit se faire au détriment des communes, des régions qui sont les plus
enclavées. Et c'est pour cela, deuxième joker, que je crois qu'il faut reporter
le débat sur les 110 kilomètres/heure.
Alors, croyez-moi, je formule cette proposition en
spécialiste parce que j'ai présenté beaucoup de grands plans très ambitieux,
avec beaucoup de choses formidables, qui ont parfois été résumées à une mesure
ou une petite phrase. Ce serait profondément injuste que tout votre travail
soit résumé à cette proposition. Je vous le dis très sincèrement. J'en
comprends l'objectif, mais vous avez beaucoup débattu et vous l'avez redit dans
vos propos : pour que ça marche, il ne faut pas stigmatiser les gens. Il ne
faut pas les diviser. Il faut réussir à les embarquer tous ensemble. Si on fait
ça, je vous l'écris, nos concitoyens qui sont dans les territoires les plus
enclavés, qui parfois mettent tous les jours 45 minutes, une heure en utilisant
les grands axes pour aller travailler, qui ont besoin pour retrouver leur
famille de les utiliser, dont la vie s'organise par ces transports, ils vont
dire : "OK, leur projet est un projet où il n'y a pas de place pour moi,
c'est un projet d'urbains, il n'existe pas." Ce n'est pas la réponse que
vous voulez apporter. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas la caricature.
Moi, j'ai lu vos propositions, je vous ai écouté, je viens
de vous entendre, et je pense qu’il faut faire maturer ce débat dans la
société, celui de la vitesse et autres. Il faut aussi que les gens aient à
chaque fois plusieurs options. Mais ne donnons jamais le sentiment à certains
de nos concitoyens qu'on les culpabilise ou qu'on les met à l'écart. Et donc je
propose de repousser ce débat. Je ne voudrais pas que vous connaissiez le même
sort que moi, c'est à dire avoir des mois de travail qui s'abîment dans une
polémique.
Vos propositions pour préserver notre environnement naturel
aussi et nos paysages sont pour moi très importantes. Il y a les transports et
puis il y a tout ce que vous dites sur, au fond, la qualité de vie, nos
paysages, l'organisation de l'espace ; et ça c'est très important parce que
c'est notre quotidien. C'est notre quotidien et beaucoup de nos concitoyens,
quand ils sont sortis au moment des gilets jaunes, disaient aussi quelque chose
du mal être dans une France, moi je n’aime pas tellement ce terme de périphérique,
mais dans une France qui avait été souvent dénaturée par les grandes zones
commerciales, ses friches, par des centres-villes qui avaient été quittés par
le logement et le commerce, par des paysages qu’on avait dégradé, des
ronds-points qu’on avait multiplié souvent pour que la bétonisation continue.
Ils en ont trouvé un usage, celui de la protestation, mais ils disaient quelque
chose d’un mal vivre dans ces villes moyennes où l’activité économique était un
peu parfois partie mais où la qualité de l’aménagement de l’espace s’était
désagrégée.
Et donc la division par 2 des surfaces urbanisables, la
sanctuarisation des espaces agricoles naturels, forestiers, le développement de
la ville sur la ville en facilitant la reconversion des friches, toutes les
mesures que vous préconisez en cette matière entrent en échos pour moi avec un
projet auquel je crois beaucoup qu’on a commencé depuis 3 ans qui est aussi de
changer l’espace de notre pays, son aménagement, là aussi de le rendre plus
humain, au fond plus beau. Et c’est cohérent avec le projet « Action cœur
de ville » qui vise à redonner vie aux villes moyennes, aux places de
villages en rénovant les logements, souvent les commerces, mais tout ce que
vous proposez améliore cette qualité de vie, ce beau. C’est un projet humaniste
pour la ville comme pour la campagne qui est de mettre fin à une tendance que
l’on a vue depuis 40 ans dans notre pays qui a désagrégé au fond notre espace
commun, espace dans lequel aujourd'hui nous vivons moins bien.
Et ce choix d'un étalement continue, de logements qui
gagnent en permanence, des coûts de transport qui, comme vous l'avez très bien
compris et décrit, augmentent. Je crois que c'est un modèle dont nos
concitoyens veulent sortir. Ils veulent retrouver une ville à l'échelle humaine
où on vit mieux. Ils veulent retrouver des espaces forestiers, agricoles,
naturels. Ils veulent moins de voitures. Ils ne veulent plus de nouvelles
grandes surfaces en périphérie. Ils veulent retrouver des commerces de
centre-ville et d'échanges humains au plus proche. Ils veulent là aussi au
quotidien, comme vous l'avez décrit, un nouveau projet de vie ensemble,
beaucoup plus humaniste et de qualité. C'est possible. Vos mesures y
contribuent.
Le développement des circuits courts, la sanctuarisation des
terres agricoles y contribue pleinement. Vous voulez aller plus loin avec des
décisions fortes pour mettre fin à la bétonisation, vous avez raison et je le
partage. J'y suis d'autant plus prêt que nous avons inscrit dans le plan
biodiversité le principe du zéro artificialisation nette. Et c'est allé plus
loin et plus fort, ce que vous proposez. Alors allons-y !
Vous proposez d'éviter de nouvelles constructions qui
mentent sur la nature quand des réhabilitations sont possibles, engageons-nous
! Allons-y !
Vous préconisez d'instaurer un moratoire sur les nouvelles
zones commerciales en périphérie des villes, allons-y ! Allons-y, agissons !
Et puis, le quatrième et dernier principe, Lambert vient
d'en parler avec beaucoup de force à l’instant, c'est celui de la
responsabilité de chacun. Ce que vous avez démontré par votre travail, votre
engagement, vos conclusions, c'est que ce changement de société, de modèle, ce
n'est pas l'affaire du Gouvernement, simplement du Parlement, ce n'est pas
l'affaire de textes, c'est l'engagement de toute une nation dans toutes ses
composantes. L'État, les collectivités locales, bien sûr, doivent agir avec le
courage de bousculer le système. Mais seul, ils ne peuvent rien, car la
réussite passe par la conversion des regards, le changement des comportements
de chacun. Des entreprises, en favorisant les bons investissements et des
citoyens. Voilà pourquoi je crois beaucoup à toutes les mesures, vous l'avez
très bien dit de formation, d'incitation que vous proposez.
Avec vous, je crois à l'éducation, au développement durable
de l'école. Avec vous, je crois au CO2 score qui doit permettre à chacun de
savoir si ce qu'il mange ou achète est bon pour le climat et donc mettre en
capacité chacun d'être un acteur de sa propre vie, de faire par ses choix de
consommation, des choses qui sont cohérentes avec ses choix de citoyen.
Avec vous, je crois à la responsabilité sociale et
environnementale des entreprises. Par exemple, au bilan carbone annuel qui,
demain, pourrait être au cœur de l'image des marques, je crois à une vraie
responsabilité sociale et environnementale de nos entreprises, qui est un
levier de transformation profond sur lequel nous devons aller beaucoup plus
loin et c'est ce que vous proposez.
C'est 4 principes qui montrent combien votre projet est
cohérent, comme vous l'avez dit, et constitue un tout, doivent nous permettre
d'agir concrètement pour transformer notre société en rassemblant tout le
monde, en associant l'ensemble de nos concitoyens et des forces vives du pays.
Et c'est pour cela que je mets encore beaucoup d'attentes dans vous et votre
engagement et nous tous, ça n'est pas fini, ce n'est qu'une étape aujourd'hui.
Vous avez enfin souhaité que l'ambition écologique soit
gravée dans le marbre de nos lois en proposant que soit soumise à référendum 3
modifications juridiques fortes. Et les symboles comptent, la République
sociale, la République des territoires sont désormais inscrits dans notre
Constitution. Il était donc légitime de réfléchir à inscrire l'écologie à son
tour. Vous proposez ainsi de réécrire le préambule de la Constitution en
plaçant l'environnement au-dessus de nos valeurs, de nos autres valeurs
fondamentales.
Comme je vous l'ai dit en janvier, de là où je suis, je suis
garant de nos institutions et mon rôle, c'est de veiller à tout ce qui pourrait
mettre en cause l'équilibre des pouvoirs et les valeurs qui fondent la
République.
Or, tel que proposé, la rédaction pour le préambule menace
de placer la protection de l'environnement au-dessus des libertés publiques,
au-dessus même de nos règles démocratiques. Et c'est pourquoi je ne souhaite
pas reprendre cette proposition parce que je considère qu'elle serait contraire
à notre texte constitutionnel, à l'esprit de nos valeurs. Et d'ailleurs, je
crois pouvoir dire que j'ai compris ce que vous proposiez, me semble-t-il, vous
proposez un projet humaniste et tout ce que nous sommes en train de faire pour
l'environnement, toutes ces transformations, c'est non pas parce que nous
mettons la nature au-dessus de nous, mais parce que nous considérons que
défendre les droits de la nature est un de nos devoirs en tant qu’homme au sens
générique du terme. C'est pourquoi il est essentiel de le mettre au bon niveau,
mais de ne pas mettre un droit de la nature au-dessus des droits humains parce
que je crois que ce n'est pas cohérent avec le projet et la philosophie des
Lumières qui portent notre République.
Par contre, vous proposez la réécriture de l'article premier
de notre Constitution et vous proposez d'introduire les notions de
biodiversité, d'environnement, de lutte contre le réchauffement climatique dans
notre texte fondamental. Je suis favorable à cette proposition.
Je veux ainsi que nous puissions engager d'abord à
l'Assemblée nationale et au Sénat, sur la base de votre proposition, un texte
en vue d'une réforme constitutionnelle. Je souhaite la voir aboutir d'ici fin
2021 et je suis prêt à recourir au référendum si celui-ci était alors
constitutionnellement possible après le vote des chambres dans le cadre strict
de notre Constitution parce que, comme je vous l'avais expliqué en janvier, je
ne peux pas prendre cette proposition et tout de suite la mettre au référendum,
cela n'est pas conforme à notre texte constitutionnel.
Sur la question, enfin, de la création d'un crime d'écocide,
je pense que c'est une notion extrêmement structurante pour la protection des
écosystèmes et la défense de l'écologie et la biodiversité pour aujourd'hui et
demain. Je crois d'ailleurs être l'un des premiers dirigeants à avoir employé
ce terme lorsque l'Amazonie brûlée il y a quelques mois. Je partage donc
pleinement l'ambition que vous défendez, votre émotion aussi face à des acteurs
qui, en toute connaissance de cause et en toute impunité, ravagent
volontairement des écosystèmes entiers. La mère des batailles sur ce point est
d'abord internationale. Il faut faire en sorte d'inscrire ce terme dans le
droit international pour que les dirigeants qui sont chargés par leurs peuples
de protéger le patrimoine naturel et qui faillissent délibérément rendent
compte de leurs méfaits devant la Cour pénale internationale. Soyez en sûr, je
porterai donc ce combat au nom de la France dans les instances multilatérales
et c'est cohérent avec ce que nous avons lancé pour un Pacte mondial de
l'environnement, c'est-à-dire créer des droits nouveaux permettant au niveau
international, de donner aux citoyens, aux ONG des droits et des droits de
recours contre celles et ceux qui agissent de manière non conforme à nos
ambitions.
Sur le plan français, je souhaite que nous puissions étudier
avec vous, avec l'appui de justice, comment ce principe peut entrer dans le
droit français, dans le respect de nos principes fondamentaux. Ce n'est pas le
cas de la rédaction qui est aujourd'hui proposée, mais je souhaite que nous
puissions ensemble donner une suite à votre proposition et l’inscrire dans
notre droit. Car c’est une notion structurante et que nous avons besoin là
aussi d’évoluer et d’avancer, cela fait partie des groupes de suivi que je souhaite
que nous mettions en place.
Au-delà des 3 points sur lesquels je vous ai dit très
clairement mes réserves ou mon désaccord, je souhaite laisser ouverte la
possibilité de conduire dès 2021 et même d’ailleurs si vous ne me l’avez pas
demandé mais dès 2021 un référendum sur la base de l’article 11 de la
Constitution sur un ou plusieurs textes de loi reprenant vos propositions.
En effet, sur l’ensemble de vos propositions vous avez
souhaité qu’elles passent par le Parlement. Je vous ai dit que c’est ce que nous
allions faire avec ces groupes de travail et ces textes de loi. Mais si les
choses ne devaient pas avancer assez vite, dans le cadre du suivi auquel je
veux vous associer, et si nous pensons que c’est pertinent, je souhaite laisser
ouverte la possibilité en 2021 de procéder à un référendum avec plusieurs
questions et y attacher les textes pour que dans le cadre de l’article 11 de
notre Constitution nous puissions décider d’un référendum.
Je vous ai fait confiance, vous avez été à la hauteur de
cette confiance. Ensemble nous pouvons aussi, au moment où nous le choisirons
sur des sujets qui peut-être bloqueraient, de faire confiance aux Français. Je
le crois très profondément. C’est pourquoi je veux ici aujourd’hui laisser
cette option ouverte.
Mesdames et Messieurs, il y aura comme je vous l’ai dit une
suite et pour toutes celles et ceux qui y sont prêts un engagement qui
continuera. Vous avez fait un travail remarquable dans votre diversité, de tous
les âges, de toutes les régions, avec tant d’opinions, comme vous l’avez très
bien dit, différentes. J’ai besoin de vous d’abord pour que vous soyez vos
propres ambassadeurs. Il est indispensable que ce que vous avez vécu, porté, la
cohérence de ce projet vous alliez l’expliquer, la diffuser, la partager avec nos
concitoyens. Je pense qu’il faut continuer à avoir en quelque sorte cette force
qui est au cœur de notre République. La République s’est faite par les
colporteurs, vous savez, qui allaient de porte en porte dire la force de nos
valeurs. Vous devez être les colporteurs de cette ambition écologique de notre
pays, c’est-à-dire chacune et chacun continuer d’aller convaincre, d’engager
nos concitoyens, de dire à quel point la responsabilité que vous avez prise est
maintenant aussi la leur.
J’ai besoin qu’au-delà de ce travail de conviction, vous
soyez associés et que vous acceptiez d’être encore associé au travail de suivi
avec les administrations et avec les parlementaires pour que vous soyez en
quelque sorte vos propres garants du travail que vous avez mis sur la table,
que vous soyez associés à toutes les étapes. Et en quelque sorte, le contrat
moral passé dès avril 2019 puis en janvier dernier avec vous, réitéré
aujourd’hui, je le repasse en vous donnant un droit d’alerte dans ce suivi. Si
quelque chose vous semblait ne pas être assez ambitieux sans que ce soit
expliqué, parce que vous avez intégré beaucoup de contraintes, vous avez
parfois revu des ambitions qui étaient les vôtres en intégrant les désaccords
qui étaient ceux d’autres. Vous allez être associés au suivi, s’il y a des
choses qui vous semblent incompréhensibles dans les blocages, vous aurez
vis-à-vis du Gouvernement et de moi-même un droit d’alerte, celui de dire sur
ce point sans explication l’ambition que nous avons portée et la cohérence de notre
projet est trahie. Je vous l’ai dit, chaque mois il y aura ce rendez-vous. Et
je vous l’ai dit, ce travail n’est qu’à une étape et il va continuer parce que
je sais le Gouvernement engagé et le Parlement engagé.
Enfin, il y aura d’autres Conventions citoyennes. Durant ces
9 mois, vous avez montré qu’il était possible sur un sujet difficile,
inflammable même, de créer du consensus, de prendre des mesures courageuses en
cherchant de la concorde et de l’apaisement. C’est cela dont notre pays, notre
démocratie ont besoin, savoir rester ensemble même quand nous ne sommes pas
d’accord, savoir avoir de l’ambition tout en étant apaisés. Je souhaite donc
que se créent d’autres Conventions citoyennes sur d’autres sujets. Une réforme
du Conseil économique, social et environnemental sera présenté au prochain
Conseil des ministres qui fera du CESE la chambre des Conventions citoyennes.
Voilà mes chers amis, je ne vais pas être plus long, je
voulais encore une fois vous dire un grand merci. Le citoyen score je crois de
la Convention doit être autour de 98 %. On n’est pas mal mais vous allez
continuer à le suivre avec moi. Nous allons continuer à déployer ensemble cet
agenda de transformation écologique pour vivre mieux, ce projet humaniste que
vous avez décrit.
Merci infiniment pour votre engagement, la force que vous
avez portée. Mais cela ne fait que commencer, le temps est à l’action et nous
allons agir ensemble.
Vive la République et vive la France !
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