Angela Merkel et Emmanuel Macron |
Le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel ont proposé lundi 18 mai de relancer l'économie européenne avec un plan d’un montant de 500 milliards d'euros afin d’éviter l’effondrement et une dépression dus à la crise épidémique du covid19.
Lors d’une conférence de presse commune, les deux dirigeants
ont rappelé l’importance d’une réponse de l’Union européenne sous forme d’une
stratégie commune à tous les Etats membres.
Les 500 milliards d’euros seront délivrés sous forme de
prêts remboursables dans le cadre d’un fonds de relance.
Emmanuel Macron a également abordé le problème de la santé
qui n’était pas jusqu’à présent une compétence européenne mais qui souhaite qu’elle
le devienne à l’avenir:
«Notre volonté est de doter l'Europe de compétences très
concrètes en matière de santé. Avec des stocks communs de masques et de tests,
des capacités d'achats communes et coordonnées pour les traitements et les
vaccins, des plans de prévention partagés des épidémies, des méthodes communes
pour recenser les cas. Cette Europe de la santé n'a jamais existé, elle doit
devenir notre priorité.»
Il s’est également félicité de la solidarité qui s’est faite
jour entre certains pays de l’Union:
«Face à la pandémie, l’Europe a sans
doute été mise en défaut au début de la crise. Mais il y a eu des gestes de
solidarité très concrets. Cette solidarité a sauvé des vies.»
► Voici
le texte de présentation de cette «Initiative franco-allemande pour la
relance européenne face à la crise du coronavirus»
La crise actuelle est inédite dans l’histoire de l’Union
européenne. Aucune façon de vivre, aucun emploi, aucune entreprise ne sont
épargnés par ce choc mondial. Alors que nos sociétés et nos économies sont en
train de sortir du confinement, des incertitudes considérables demeurent.
Cependant, notre objectif est clair : l’Europe surmontera cette crise ensemble
et en sortira plus forte. Nos efforts conjoints sont guidés par notre volonté
de parvenir à une relance durable pour l’UE. Nous, la France et l’Allemagne,
sommes pleinement déterminées à assumer notre responsabilité pour l’Union
européenne et nous contribuerons à ouvrir la voie pour sortir de la crise.
À cette fin, nous devons plus que jamais mettre à profit la
puissance que nous tirons de notre action conjointe en tant qu’Européens et unir
nos forces de façon inédite.
Nous devrons aussi mener une réflexion approfondie sur les
leçons à tirer de cette crise. La Conférence sur l’avenir de l’Europe sera
l’occasion d’ouvrir un vase débat démocratique sur le projet européen, ses
réformes et ses priorités.
La France et l’Allemagne proposent les mesures suivantes.
1. RENFORCER NOTRE SOUVERAINETÉ SANITAIRE STRATÉGIQUE PAR
UNE « STRATÉGIE SANTÉ » DE L’UE
Notre réponse à la crise actuelle et aux futures crises
sanitaires doit s’appuyer sur une nouvelle approche européenne reposant sur la souveraineté
sanitaire stratégique. Nous appelons de nos vœux une industrie sanitaire
européenne ayant un positionnement stratégique qui améliorera la dimension
européenne des systèmes de santé et réduira la dépendance de l’UE, dans le
plein respect de la responsabilité des États membres. Par conséquent, nous
devons :
- augmenter nos capacités de recherche et développement dans
le domaine des vaccins et des traitements, ainsi que la coordination et le
financement au niveau international (Initiative ACT-A), avec l’objectif à court
terme de mettre au point et de fabriquer un vaccin contre le coronavirus au
sein de l’Union européenne, tout en garantissant un accès mondial à ce vaccin ;
- mettre en place des stocks stratégiques communs de
produits pharmaceutiques et médicaux (équipements de protection, kits de
tests...) et développer les capacités de production de ces produits dans
l’Union européenne ;
- coordonner les politiques européennes en matière de marchés
publics communs pour les vaccins et traitements futurs (par exemple, la
fabrication et le stockage de futurs vaccins potentiels) afin de parler d’une
seule voix face à l’industrie pharmaceutique et de garantir un accès européen
et mondial plus efficace ;
- mettre en place une « task-force » de l’UE chargée de la
santé au sein du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies et
la charger, aux côtés des institutions nationales, d’élaborer des plans de
prévention et de riposte face aux futures épidémies ;
- définir des normes européennes communes en matière
d’interopérabilité des données sanitaires (par exemple une méthodologie
harmonisée permettant de disposer de statistiques comparables sur les cas lors
d’épidémies).
2. CRÉER UN « FONDS DE RELANCE » AMBITIEUX AU NIVEAU DE L’UE
POUR LA SOLIDARITÉ ET LA CROISSANCE
Pour soutenir une reprise durable qui rétablisse et renforce
la croissance dans l’UE, l’Allemagne et la France soutiennent la création d’un Fonds
de relance ambitieux, temporaire et ciblé, dans le cadre du prochain cadre
financier pluriannuel (CFP), et une augmentation du CFP concentrée sur ses
premières années. Compte tenu du caractère exceptionnel des difficultés que la
pandémie de COVID-19 fait peser sur les économies dans l’ensemble de l’UE, la
France et l’Allemagne proposent d’autoriser la Commission européenne à financer
ce soutien à la relance en empruntant sur les marchés au nom de l’UE sur une
base juridique respectant pleinement le Traité européen, le cadre budgétaire de
l’UE et les droits des parlements nationaux.
- Le Fonds de relance sera doté de 500 milliards d’euros en
dépenses budgétaires de l’UE pour les secteurs et régions les plus touchés, sur
la base des programmes budgétaires de l’UE et dans le respect
des priorités européennes. Il renforcera la résilience, la convergence et
la compétitivité des économies européennes, et accroîtra les investissements,
notamment dans les transitions écologique et numérique et dans la recherche et
l’innovation.
- Les financements du Fonds de relance seront ciblés sur les
difficultés liées à la pandémie et sur ses répercussions. Il s’agira d’un
complément exceptionnel, intégré dans la décision relative aux ressources
propres, avec un volume et une date d’expiration clairement spécifiés, et qui
sera lié à un plan de remboursement contraignant au-delà du prochain CFP sur le
budget de l’UE.
- Un accord d’ensemble rapide sur le CFP et le Fonds de
relance est nécessaire pour faire face aux grands défis que l’UE doit relever.
Les négociations s’appuieront sur les progrès réalisés jusqu’en février. Nous
nous efforcerons de fournir l’effort budgétaire lié à la crise du coronavirus
dès que possible.
- Ce soutien à la relance complète les efforts nationaux et
la série de mesures arrêtée par l’Eurogroupe ; elle s’appuiera sur un
engagement clair par les États membres d’appliquer des politiques économiques
saines et un programme de réformes ambitieux.
- L’amélioration du cadre européen pour atteindre une
fiscalité équitable dans l’UE demeure une priorité, notamment en introduisant
une taxation minimale effective et une taxation équitable de l’économie
numérique au sein de l’Union, s’appuyant idéalement sur des conclusions
fructueuses des travaux de l’OCDE, ainsi que la mise en place d’une assiette
commune pour l’impôt sur les sociétés.
3. ACCÉLÉRER LES TRANSITIONS ÉCOLOGIQUE ET NUMÉRIQUE
Il est temps de donner un coup d’accélérateur à la
modernisation de l’économie et des modèles économiques européens. Dans cet
esprit, nous réaffirmons que le « pacte vert » pour l’Europe (Green Deal)
constitue la nouvelle stratégie de croissance de l’UE et notre feuille de route
pour une économie prospère et résiliente sur la voie de la neutralité carbone
d’ici à 2050. En parallèle, nous devons accélérer la transition numérique en
transformant les tendances ayant émergé pendant la crise en un progrès et une
souveraineté numérique durables. À cette fin, nous devons :
- augmenter les objectifs de l’UE en matière de réduction
des émissions pour 2030, de façon coordonnée avec un ensemble de mesures
efficaces pour éviter les « fuites de carbone ». La proposition annoncée par la
Commission concernant un mécanisme d’ajustement des émissions de carbone aux
frontières permettra de compléter les instruments existants en conformité avec
les règles de l’OMC. Les règles relatives aux aides d’Etat doivent être revues
à l’aune d’une politique climatique plus ambitieuse et des risques de fuite de
carbone ;
- soutenir l’introduction d’un prix minimum du carbone au
sein du Système d’échange de quotas d’émission de l’UE (ETS) et travailler à
mettre en place un futur ETS européen pour tous les secteurs ;
- élaborer pour chaque secteur une feuille de route pour une
reprise respectueuse de l’environnement incluant, là où c’est nécessaire, des cibles
et/ou des conditionnalités en matière de climat et d’environnement ;
- accélérer la transformation numérique, notamment par le
déploiement de la 5G, des efforts visant à obtenir des infrastructures et des
technologies de cybersécurité sûres et fiables, la gestion de l’identité
numérique, un cadre favorable à l’intelligence artificielle ainsi qu’une régulation
juste pour les plateformes numériques dans l’UE.
4. ACCROÎTRE LA RÉSILIENCE ET LA SOUVERAINETÉ ÉCONOMIQUES ET
INDUSTRIELLES DE L’UE ET DONNER UN NOUVEL ÉLAN AU MARCHÉ UNIQUE
L’intégration forte au sein du marché unique est la garantie
de notre prospérité. Le redémarrage de l’économie européenne et son adaptation
aux défis qu’elle rencontrera dans l’avenir nécessite une économie et une base
industrielle résilientes et souveraines, ainsi qu’un marché unique robuste. Des
marchés ouverts et un commerce libre et équitable sont un élément essentiel de
la solution. Par conséquent, nous devons :
- soutenir la diversification des chaînes de valeur en
promouvant un agenda commercial ambitieux et équilibré, articulé autour de
l’OMC, intégrant de nouvelles initiatives, notamment dans le domaine du
commerce des produits de santé, renforcer nos mécanismes anti-subventions [des
pays tiers], faire en sorte qu’il existe une réciprocité réelle pour les
marchés publics avec les pays tiers et renforcer le contrôle des
investissements aux niveaux national et européen pour les investisseurs non
européens dans les secteurs stratégiques (notamment santé, médicaments,
biotechnologies...), tout en encourageant des investissements (re)localisés
dans l’UE ;
- adapter la stratégie industrielle de la Commission à la
reprise, en particulier moderniser la politique européenne de concurrence en
accélérant l’adaptation des règles en matière d’aides d’Etat et des règles de
concurrence ainsi que la mise en œuvre des projets importants d’intérêt
européen commun [permettant des aides européennes] ;
- garantir le retour rapide à un marché unique pleinement
fonctionnel et approfondir encore ce dernier au moyen d’une nouvelle feuille de
route visant à créer un marché totalement intégré dans les domaines
prioritaires (numérique, énergie, marchés financiers en particulier) avec des
jalons clairs et un agenda législatif accéléré ;
- faire en sorte que l’espace Schengen fonctionne pleinement,
en améliorant les obligations de coordination entre les États membres en temps
de crise et en renforçant les frontières extérieures communes ;
- renforcer la convergence sociale et accélérer les
discussions sur le cadre de l’UE pour un salaire minimum adapté aux situations
nationales.
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