Emmanuel Macron & Boris Cyrulnik |
Emmanuel Macron, comme tout bon centriste, est un défenseur
de la méritocratie et des «opportunités» comme le disent les Américains,
c'est-à-dire d’une réelle égalité des chances pour réussir son projet de vie.
C’était un des piliers, si ce n’est le pilier principal, de
sa campagne et de son programme présidentiels, libérer les énergies
individuelles pour faire gagner le collectif dans une démarche où l’individu
est le moteur du progrès tout en en étant le principal bénéficiaire parce qu’il
a pu faire fructifier au mieux de ses potentialités pour réaliser ses ambitions.
Dès lors, c’est bien dès la naissance que se joue cette
capacité à prendre en main son existence pour en faire, en toute
responsabilité, un succès, d’abord personnel.
C’est donc dès ce moment-là mais aussi avant la naissance
que l’on doit agir en premier comme l’ont montré toutes les recherches
médicales les plus récentes dans ce domaine de la petite enfance.
Et c’est le sens du projet «Parcours 1000 premiers jours»
qui va voir le jour en 2020 et qui tient beaucoup à cœur au Président de la
République.
Lors de sa présentation, le 19 septembre, il a ainsi
expliqué que «La vraie injustice c’est celle qui consiste à ne pas aider
l’enfant qui nait à réussir comme un autre enfant qui naitre dans une autre
famille ou dans d’autres conditions».
«Je
crois, a-t-il ajouté, que ce que nous sommes en train de faire pour l’école
corrige beaucoup d’injustices, ce que l’on fait à travers notre politique de
soins, d’accompagnement, de lutte contre la pauvreté corrige beaucoup d’injustices
mais je crois que ce qui est au cœur de [ce parcours] c’est précisément une
politique d’égalité des chances ce qui est pour moi l’injustice la première et
la plus inconcevable, celle que subit un être qui n’a rien demandé, qui n’est
en en état de décider de son propre destin mais qui arrive à un moment donné,
dans une famille et a qui, de facto, on ne va pas donner les mêmes chances. Et
qui arrive dans un espace que la société n’a pas organisé et qu’elle a
complètement délégué à la sphère privée. Tout cela dans un environnement où de
plus en plus d’enfants naissent dans des familles monoparentales, dans la
grande pauvreté, dans des contextes économiques et sociaux de plus en plus durs
et on doit avoir des réponses pour aider à ces situations, qu’elles soient
organisationnelles, qu’elles soient d’apprentissage, qu’elles soient aussi
d’accompagnement affectif parce que l’on sait combien c’est essentiel d’œuvrer
dans ces moments là.»
Pour ce faire, Emmanuel Macron a mis en place une commission
de seize membres qui va définir très concrètement ce parcours, commission
présidée par le très médiatique et très respecté Boris Cyrulnik.
Celle-ci s’est vue fixer «quatre grandes priorités» qui sont:
- Elaborer un consensus scientifique sur les principales
règles de santé publique à appliquer pendant cette période ;
- Elaborer un nouveau parcours parent au cours de cette
période ;
- Apporter un éclairage scientifique sur la question des
congés de naissance ;
- Repenser le fonctionnement de notre système d’accueil du
jeune enfant.
Ce parcours est conçu comme un accompagnement des familles
et devrait comprendre des conseils dans nombre de domaines de la prévention à
la nutrition, de l’exposition aux écrans des enfants à la place du père en
passant, entre autres par l’impact de l’arrivée de l’enfant sur le couple, la
naissance d’un bébé prématuré ou en situation de handicap.
En outre, il proposera un ensemble de services en matière
éducative ou médicales via internet.
Par ailleurs, pour les moins de trois ans, une remise à plat
des modes de gardes et du fonctionnement
des centres de Protection maternelle et infantile (PMI) devrait être mise en œuvre.
Intervenant lors de la mise en place de la commission, Boris
Cyrulnik a estimé que «pendant très longtemps, on pensait que les enfants, les
bébés pré-verbaux n’avaient pas de vie psychique et que s’ils étaient mal
partis dans l’existence, tant pis, c’était le destin. Or maintenant on se rend
compte que la plasticité cérébrale, psychologique, est très facile à rattraper.
Un bébé est très facile à blesser. Un bébé est très facile à rattraper. On
rattrape le bébé en réorganisant le milieu (...) On pense que la plasticité est
telle que si on répare l’environnement du bébé, la plupart des bébés reprendront
un bon développement.»
Et de préciser que ces 1000 premiers jours «sont un moment à
ne pas rater».
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC