Nombre de «collaspologues» nous affirment que nos
civilisations actuelles vont disparaître parce que nous n’avons plus le temps
de nous attaquer au défi écologique qui se présente à l’Humanité, que les
ravages de notre inconscience sont déjà irréversibles.
En réalité, si l’urgence est bien là d’agir au plus vite, ce
n’est pas le facteur temps qui est le plus essentiel afin de mettre enfin nos
comportements en accord avec la situation qui se présente à nos yeux mais celui
de la volonté.
Et quand je parle de volonté, ce n’est pas celle des
Français ou celle des Américains, celle des Chinois ou des Brésiliens, mais
celle de tous les l’humains où qu’ils habitent sur cette planète.
Pour bien comprendre le défi qui se pose à l’Humanité, c’est
de se rendre compte que dans les pays d’«abondance» (les guillemets parce que
dans ces pays «riches» la grande pauvreté touche une partie de la population),
il y a déjà une réticence, voire un refus (le mouvement de foule des «gilets
jaunes» en France en est un bon exemple) à agir «à la marge», c'est-à-dire à
prendre des décisions qui agissent avant tout sur le superflu et non
l’essentiel de notre existence.
Alors, comment faire comprendre aux gens qui n’ont
pratiquement rien et qui vivent souvent dans des pays où les normes
environnementales n’existent pas ou, quand elles existent, ne sont pas
appliquées, qu’ils doivent faire des efforts et des sacrifices sur l’essentiel,
c'est-à-dire sur ce qui leur permet de survivre.
On l’a bien vu avec le développement ces dernières décennies
des pays émergents avec, de la Chine à l’Inde en passant par le Brésil ou
l’Indonésie, des populations n’avaient aucune envie de faire des sacrifices
avant d’avoir «rejoint» celles des pays développés.
Et ces gens sont la majorité de la population mondiale.
Parce que, si même les populations «riches», voire celles
qui sont sorties récemment du sous-développement, cessaient de polluer et de détruire
leur environnement du jour au lendemain par «conscience écologique», ce ne
serait sans doute pas le cas des populations «pauvres» par «nécessité existentielle».
On comprend bien que la dimension écologique a deux niveaux
essentiels: celui de l’individu et celui de l’Humanité.
Car c’est bien, d’abord, dans la prise de conscience et
l’action de chacun que réside réellement la possibilité de l’enfantement d’une
révolution écologique des comportements et que c’est, ensuite, dans une action
concertée au niveau mondial que les réelles solutions se trouvent et se mettent
en place avec efficacité.
Attention, dans le monde tel qu’il est, cela ne veut
évidemment pas dire que tous les niveaux intermédiaires entre l’individu et
l’Humanité ne comptent pas, bien au contraire.
Et bien évidemment celui du pays.
Mais, admettons que la France, demain, soit un pays «100%
écologique».
Si elle est la seule à l’être, alors les problèmes
demeureront identiques ou presque.
Bien entendu, cela améliorera un peu la santé de la planète
et, surtout, cela sera un exemple pour d’autres (ou, seulement, une «curiosité»
que l’on fêtera et que l’on montrera en exemple pou apaiser sa conscience) mais
cela ne changera pas la donne globale.
C’est pourquoi quand, du Brésil aux Etats-Unis en passant
par la Chine (malgré les déclarations lénifiantes des autorités sur leur
investissement en faveur de l’écologie), certains des dirigeants de la planète
et pas des moindres, nient le défi environnemental qui est face à nous ou même
le minimise, quand ils ne réfutent pas les travaux des scientifiques sur le
sujet, ils permettent à toute une partie de leur population de refuser d’agir
et de continuer ses pratiques dévastatrices.
De l’utilisation à grande échelle du charbon en Chine pour
produire de l’électricité à la déforestation de l’Amazonie au Brésil pour doper
une activité économique en berne en passant par le fracking (ou
hydrofracturation) pour extraire du pétrole aux Etats-Unis afin de permettre au
pays de continuer à vivre au-dessus de ses moyens écologiques, toutes les
décisions prises par ces dirigeants sont de véritables appel à continuer à
détruire notre environnement.
Malgré tout, dans un paysage assez désespérant, la «prise de
conscience écologique» dont je parlais plus haut et qui n’est plus
essentiellement issue des pays «riches», donne une raison d’espérer qu’elle se
traduira en volonté et, in fine et surtout, en action à très grande échelle.
Mais pour que l’on puisse arriver à mobiliser la planète
entière, il faut d’abord correctement l’informer sans interférence
d’affirmations dogmatiques, voire de simples croyances irrationnelles, qui,
comme celle diffusée par les collaspologues ou leurs adversaires les
climato-sceptiques, travaillent avant tout pour diffuser des idéologies qui
tordent le cou à la réalité (qui n’en a cure…) et qui, du coup, engendrent des
controverses qui, elles-mêmes, bloquent toute mobilisation d’envergure.
Dans le même ordre d’idées, les mouvements écologiques ont
autant été des vecteurs de prise de conscience des problèmes environnementaux
que des répulsifs à toute action collective efficiente.
Ce paradoxe vient avant tout de ce que l’écologisme en
politique a d’abord été affaire d’extrêmes et reste encore gangrénée par
ceux-ci.
Ce fut d’abord l’extrême-droite qui s’empara à la fin du
XIX° et au début du XX° siècle d’une défense de la nature où celle-ci était
glorifiée afin de servir des ambitions nationalistes et raciales.
Puis vint le tour de l’extrême-gauche à la fin des années
1960 où une partie de ses militants investit la défense de l’environnement pour
en faire une arme contre la société libérale et le capitalisme, plus préoccupée
d’abattre la démocratie que de sauver réellement la planète.
De cette double origine, la défense de l’environnement a du
s’émanciper pour trouver la crédibilité nécessaire même si la plupart des
mouvements écologiques dans le monde sont toujours noyautées par des militants
de la gauche radicale.
Heureusement, grâce la science et avec des personnes
vraiment focalisées sur la question écologique, les populations ont pu trouver
une information moins biaisée (même si les élucubrations de certains «écolos»
continuent à se propager, on le voit avec, par exemple, les appels à ne plus
vacciner les enfants).
Donc, aujourd’hui, c’est bien la volonté qui est au centre
de notre capacité ou non à prendre les mesures nécessaires pour sauver
l’Humanité.
Comment faire pour enclencher le processus vertueux?
On se sent assez démuni même si des pistes existent.
Je vais d’abord éliminer celle d’un régime autoritaire qui
prendrait des mesures sans l’assentiment de la population, autant par mon
engagement démocratique que par la constatation historique qu’une telle
architecture n’a jamais donné de bons résultats pour la cause défendue et pour
les populations sur le moyen et long terme.
Aussi séduisante – parce que «simple» à conceptualiser –
soit l’idée d’imposer par la force le sauvetage de l’Humanité face aux petites
mesquineries, à l’ignorance crade et à l’égoïsme puant d’une partie de ses
membres, cette solution à un taux réussite proche de zéro.
Et puis, il faudrait une gouvernance mondiale unifiée pour
contraindre tout le monde, ce qui semble inatteignable avant… toujours?
Il faut donc enrôler librement tous les individus de la
planète pour agir le plus vite possible.
Cela ne peut se faire que par la discussion.
Mais, ne nous méprenons pas.
Il ne s’agit pas de s’assoir autour d’une table pour déviser
autour d’un café et de quelques petits gâteaux de notre avenir.
Non.
Celle-ci doit devenir globale à l’échelle de la planète et
constante avec la prise de décisions, non pas à la fin hypothétique de ces
échanges mais pendant que ceux-ci continuent et à chaque fois qu’un consensus
apparait.
Certains prétendront qu’un tel processus est une utopie
vouée à l’échec et leur scepticisme n’est pas dénué de tout fondement, bien
malheureusement.
Et ils diront que les gilets jaunes, précédemment évoqués,
ont existé parce qu’on demandait aux Français de payer quelques cents de plus
le litre d’essence afin de permettre
de financer des actions en faveur de l’environnement.
Et que l’ampleur de ce mouvement de foule n’est pas venu du
nombre (limité) de ses participants mais bien d’un soutien sondagier majoritaire
de la population qui refusait, elle aussi, de payer ces cents.
Cependant, au vu de ce nous sommes, de comment nous agissons
et de la situation, on ne voit pas d’autres issues, d’autant que ce moyen de
faire a déjà donné quelques résultats mais s’ils sont largement insuffisants.
Ici, je ne parie pas sur la sagesse des peuples à laquelle
je ne crois pas un seul instant mais seulement dans leur instinct de survie.
Pour cela il faut qu’ils soient bien conscients que c’est de
cela qu’il s’agit.
D’où la discussion.
Mais aussi les décisions.