Par Aris de Hesselin
Dans cette rubrique, nous publions les points de vue
de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC.
Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la
pensée centriste.
Aris de Hesselin est un avocat international,
centriste et un européen, défenseur d’une mondialisation humaniste.
La présidence de Donald Trump, qu’on le veuille ou non, que
l’on se mette des œillères ou non, nous a appris une chose: il est possible que
les Etats-Unis sous le gouvernement d’un incapable fainéant, populiste et
démagogue ne viennent pas au secours de l’Europe en cas d’agression.
Le systématisme qui présidait jusqu’alors est mort avec lui car
même s’il est contenu dans le traité de l’Otan, on sait avec quel cynisme ce président
américain s’assoit, non seulement, sur la loi mais sur les engagements de son pays,
les Kurdes en savent quelque chose!
Et rien ne dit, qu’à l’avenir, un autre président du même
acabit que Trump ne sera pas en charge des Etats-Unis (Trump, déjà, s’il est réélu
en 2020).
C’est une révolution pour les Européens dans la façon dont
ils envisagent leur défense.
Là où Trump n’a pas totalement faux, c’est que certains pays
européens – dont les pays du nord mais aussi et surtout l’Allemagne et quelques
autres – se reposent sur l’Otan et la puissance de l’armée américaine pour refuser
de prendre leurs responsabilités en matière militaire, en particulier au niveau
sonnant et trébuchant, en consacrant si peu de leur budget à leurs forces
armées.
Leurs excuses sont qu’ils sont pacifistes (on voit ce que
cela a donné pour la Belgique lors des deux conflits mondiaux de se dire neutre…)
et qu’à l’ère nucléaire dépenser pour des tanks ou des porte-avions ne sert à
rien.
Sans oublier, pour l’Allemagne le traumatisme de deux régimes
militaires qui les ont entrainés dans la guerre, celui du kaiser Guillaume et
celui de Hitler.
Mais ces excuses ne tiennent pas la route en ce troisième
millénaire face à la réalité du monde et, surtout, sont avancées pour continuer
à investir leur argent ailleurs de manière plus rentable.
Les «miracles» allemands et japonais de l’après-Deuxième
guerre mondiale sont dus en grande partie à ce que ces deux perdants du conflit
n’avaient pas à investir dans leur défense.
Ainsi, depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale, à part
la France et à un moindre degré le Royaume Uni, les Européens bradent leur
défense allègrement.
Jusqu’à présent, comme on l’a dit, ils comptaient sur leur
oncle d’Amérique pour venir les sauver.
Mais cet automatisme n’est plus une certitude.
Dès lors, il n’est plus possible de tenir des discours
lénifiants sur l’Otan et son parapluie.
De ce point de vue, Emmanuel Macron a eu raison de signifier
par une phrase un peu provocatrice que l’Otan est en état de mort cérébral.
Mais, ce qu’oublient de dire tous ceux qui critiquent cette
formule, c’est le reste de ses propos qui, eux, n’étaient pas dans la
provocation mais dans la proposition, dans la responsabilité et la lucidité.
Car le but du président français est bien de construire
enfin cette défense européenne qui nous assurera la sécurité mais aussi le statut
de puissance qui permet, non pas d’imposer des diktats, mais de pouvoir défendre
ses intérêts et ses valeurs avec toute l’efficacité nécessaire.
Cela ne signifie évidemment pas que l’Europe doit en finir
avec son alliance avec les Etats-Unis.
Ce serait une erreur et une stupidité monstrueuse parce que
la «défense du monde libre» quoi qu’en pense des irresponsables notoires est
malheureusement toujours d’actualité.
Mais quand on voit le président américain actuel encensé à longueur
de journée les régimes non-démocratiques ainsi que les autocrates et les
dictateurs qui les dirigent, aucun responsable politique européen lucide ne
peut se dire qu’il n’y a aucun problème et que tout peut continuer comme avant.
C’est impossible.
De même, face à la menace terroriste, qui est une guerre n’en
déplaise à ceux qui veulent jouer avec les concepts, l’Europe a besoin de se
défendre en pouvant intervenir sur des théâtres d’opération extérieurs avant
que ladite menace ne touche notre sol.
Cette défense européenne souhaitée par Emmanuel Macron et d’autres
(dont on rappelle que ce fut d’abord une idée française dans les années 1950…
que les députés français torpillèrent ensuite!) fera évidemment partie d’une
alliance avec les Etats-Unis et d’autres pays (mais pourquoi avec la Turquie,
par exemple?).
Avoir une défense solide et performante, ce n’est pas être
va-t-en-guerre, c’est, pour les démocraties, le meilleur moyen de protéger leur
trésor: la liberté, l’égalité et la fraternité et toutes les valeurs humanistes
que portent ces trois mots qu’ils valent bien qu’on les défende.
Aris de Hesselin
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