Le dernier
en date nous vient de l’institut Ifop réalisé pour Le Figaro.
Et, sans
surprise, les sondés estiment, tous bords confondus, que le clivage «ne veut
plus dire grand-chose et est dépassé à 64% ou «à encore un sens mais n’est plus
le clivage dominant» à 27%.
Seuls 9%
affirment qu’il continue à jouer un rôle important.
Si l’on
regarde les résultats selon les proximités politiques, 56% des sympathisants
LaREM, 67% de ceux du MoDem, 58% de ceux de LR, 44% de ceux du PS, 57% de ceux
de EELV, 73% de ceux du RN, 53 de ceux de LFI et 81% de ceux qui disent n’avoir
aucune proximité avec aucune des formations politiques répondent que le clivage
est dépassé.
A l’inverse,
on ne trouve que 6% des sympathisants de LaREM, 3% de ceux du MoDem, 8% de ceux
de LR, 16% de ceux du PS, 7% de ceux d’EELV, 8% de ceux du RN, 20% de ceux de
LFI et 6% de ceux sans proximité avec un parti politique qui disent que ce
clivage demeure important.
Si l’on
détaille les résultats par grands courants politiques, 56% du Centre, 51% de la
Gauche, et 59% de la Droite pensent le clivage dépassé.
A noter que 61%
des électeurs d’Emmanuel Macron lors de la présidentielle de 2017 disent que le
clivage est dépassé (76% pour ceux de Marine Le Pen) et 6% qu’il est important
(8% pour Le Pen).
Tout cela
serait très clair et limpide si tous les votes de ces mêmes Français ainsi que
leurs positionnements sur la plupart des questions politiques, économiques,
sociales et sociétales ne contredisaient absolument ces résultats et montrent
que ce clivage est bien réel et en pleine forme!
Un sondage
réalisé par l’institut Ipsos en mars 2018 (lire ici) est, de ce point de vue,
très révélateur des contradictions des Français sur cette question.
Ainsi, 70%
(soir plus que dans ce sondage de 2019) affirmaient que ce clivage était
dépassé mais ajoutaient dans la foulée à 71% qu’«être de gauche et de droite
c’est pas pareil» et à 62% qu’«il existe de vraies différences entre la gauche
et la droite».
Si l’on
comprend bien les réponses des sondés, le clivage est dépassé mais nous la
pratiquons quotidiennement parce que nous croyons qu’il existe et qu’il est
pertinent…
Au-delà des
résultats de ces enquêtes, nous pouvons constater tous les jours que toutes les
grandes questions qui traversent la sphère politique au sens large sont
traitées de manière partisane et idéologique où chacun se positionne au centre,
à droite et à gauche.
Bien
entendu, cela ne veut pas dire que d’autres clivages ne peuvent se surajouter à
celui de l’échelle gauche-centre-droite, voire à mieux structurer cette
dernière.
Celui
qu’Emmanuel Macron a mis à l’honneur entre «progressistes» et «conservateurs»
existe bien et traverse le paysage politique autrement que celui entre la
gauche et la droite.
Mais on peut
être progressiste différemment et être, de multiples manières, conservateur
tout en restant avant tout de gauche, du centre ou de droite.
On pourrait
ajouter d’autres clivages comme celui entre les «mondialistes» et les
nationalistes», entre ceux qui sont écologistes et ceux qui ne le sont pas
(l’écologie n’étant pas le domaine réservé d’EELV), etc.
De même, il
y a nombre de clivages «secondaires» qui peuvent se révéler lors de débats sur
des questions précises comme on l’a vu récemment avec la PMA et la GPA.
On peut se
demander pourquoi ce clivage, alors même qu’il est utilisé sans cesse par
chacun pour se positionner (positivement, «je suis du centre», par exemple ou,
négativement «je ne suis pas d’extrême-droite»), est rejeté dans les sondages
par les Français.
Si l’on peut
comprendre que les sympathisants centristes soient plus enclins à penser que le
clivage est obsolète, eux qui militent pour un large rassemblement autour d’une
vision équilibrée de la politique, il est étrange qu’une majorité de
sympathisants des partis extrêmes, RN et LFI le prétendent alors même que leurs
critiques vis-à-vis du pouvoir en place est essentiellement idéologique
(gouvernement qui brade la France pour l’extrême-droite, président des riches
pour l’extrême-gauche).
Il est, bien
sûr, tentant d’utiliser les justifications des personnes interrogées mais ce
serait aller dans le sens de leurs réponses oxymoriques «il n’y a plus de
clivage mais je crois et pratique ce clivage»!
Dès lors, on
peut penser qu’il y a une sorte, à la fois, de désabusement dans les croyances
idéologiques dont les Français estiment qu’aucune n’est réellement pertinente
ou ne détient la vérité à elle seule, et, en même temps, d’estimer que ce que
l’on pense politiquement est une vérité qui transcende les clivages partisans,
c’est-à-dire en réactivant ces derniers de manière encore plus prégnante!
Toujours
est-il qu’il faut rappeler, in fine, que l’échelle gauche-centre-droite n’est
qu’un outil qui permet de pouvoir placer les différentes idéologies et opinions
politiques.
Et qu’à
preuve du contraire, elle demeure la plus pertinente pour cet exercice même si
elle n’est pas la seule à pouvoir être utilisée.
Alexandre
Vatimbella
Directeur du
CREC
(Sondage
Ifop réalisé par internet les 5 et 6 novembre 2019 auprès d’un échantillon de
1007 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus
/ Méthode des quotas / Marge d’erreur de 3 points)
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