Le parti centriste de Nabil Karoui |
Après les élections législatives du 6 octobre et la
deuxième tour de la présidentielle (organisée après le décès du président en
place, Béji Caïd Essebi), le nouveau paysage politique tunisien semble avoir
été chamboulé au détriment des formations centristes, les vraies et non pas celles
qui se disent centristes parce qu’elles se situent entre l’islamisme et la démocratie.
Les législatives ont ainsi placé en tête les
islamistes de Ennahdha (qui se revendiquent comme «modérés») devant le nouveau
parti centriste «Au cœur de la Tunisie» (Qalb Tounes), fondé par une des
figures du Centre tunisien (il fut une des chevilles ouvrières de la création
de Nidaa Tounes, la coalition centriste dominante dans l’ancienne Assemblée des
représentants du peuple), Nabil Karoui.
Comme toujours en Tunisie depuis l’instauration d’un
régime démocratique, il est difficile de donner exactement la couleur politique
de la plupart des formations qui ont concouru et obtenu des sièges dans le
nouveau parlement.
Ainsi, pas moins de 21 partis ont obtenu au moins un
député auxquels il faut ajouter l’élection de 10 «indépendants» affiliés à aucune
formation politique.
Si l’on tente de faire le total des députés centristes
élus par rapport aux revendications d’orientations politiques des différents
partis, on abouti (sans compter les indépendants), à un chiffre supérieur à 70 députés
sur les 217 que comptent l’Assemblée, soit loin de représenter la majorité.
De plus, ces diverses formations se revendiquant du Centre
sont souvent dirigées par des personnalités qui sont en guerre les unes avec les
autres ce qui réduit leur capacité de peser réellement dans les choix futurs d’un
gouvernement dont l’élaboration devrait être confiée aux islamistes d’Ennahdha.
Ceux-ci n’ont pas encore tranché s’ils vont se tourner prioritairement
vers les centristes et les autres forces démocratiques pour former une coalition
puisqu’aucun parti n’a obtenu la majorité absolue ou plutôt vers les autres formations
islamistes dont certaines sont qualifiées d’«extrémistes» ainsi que vers les nationalistes.
Ce prochain gouvernement ne devrait pas voir le jour avant
fin novembre.
Du côté de l’élection présidentielle, les résultats du
13 octobre sont sans appel avec la victoire du professeur de Droit constitutionnel,
Kaïs Saïeb avec plus de 70% des voix selon les dernières estimations devant le leader
d’«Au cœur de la Tunisie», Nabil Karoui.
Ce dernier a estimé que son emprisonnement durant la plus
grande partie de la campagne pour accusation de blanchissement et d’évasion fiscale
(alors même qu’il n’a pas été jugé), lui a fait perdre le scrutin.
Quant à Saïeb, il est présenté comme un «conservateur»
mais néanmoins un démocrate et non un islamiste comme certains ont voulu le présenter
pour le décrédibiliser.
C’est un homme qui ne vient d’aucun parti et qui n’en dirige
aucun, ce qui va rendre sa présidence compliquée.
En revanche, il pourra compter sur le peuple – et notamment
la jeunesse – qui a été séduit par son discours et son honnêteté.
Pour conclure, ces élections n’ont pas été un succès pour
le Centre qui était pourtant en position de force avant le scrutin.
Mais les problèmes d’égo ainsi que les scissions sans fin
et les créations sans cesse de nouvelles formations l’ont affaibli et risque de
n’en faire qu’un courant secondaire parce qu’incapable de parler d’une seule voix.
Ce qui, in fine, peut représenter un danger existentiel
pour la jeune démocratie tunisienne.
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