Jean-Christophe Lagarde |
On se demandait qu’allait être la stratégie de l’UDI après
la claque reçue lors des européennes où elle n’avait pas atteint la barre des
3% pour être remboursée de ses frais de campagne et encore moins celle des 5%
pour avoir des élus.
Parce qu’il s’agissait de la première élection où la
formation centriste se présentait seule, c'est-à-dire sans être accolée à un
autre parti, en l’occurrence, à chaque fois, LR et ses prédécesseurs de droite
(sauf lors des européennes de 2014 où elle avait fait alliance avec le MoDem de
François Bayrou).
On hésitait entre tomber dans les bras de LR, comme
d’habitude, ou ceux de LaREM, considérant la dérive radicale des premiers ainsi
que leur perte de vitesse électorale mais aussi la proximité d’une grande
partie de l’électorat de l’UDI avec les positionnements de la majorité en place
(à défaut d’être des fans de ses leaders).
Il semble que c’est la deuxième hypothèse qui est la bonne
si l’on s’en réfère à une interview donnée par son président, Jean-Christophe
Lagarde, au quotidien Le Parisien.
Même s’il explique que la stratégie pour les municipales de
2020 est multidirectionnelle puisque l’UDI pourra s’accoler à tous ceux avec
qui elle prétendra avoir des accointances (cela s’appelle aussi et souvent de l’opportunisme…),
on notera qu’il y aura un soutien du candidat LaREM à la mairie de Paris,
Benjamin Griveaux, alors même que LR devrait présenter un candidat et, peut-être
même, le mouvement «Libre» de Valérie Pécresse (qui a quitté LR) si l’on en
croit ses proches qui se réunissaient ce week-end à Brive.
Plus, c’est la dernière phrase de son intervention qui
montre un infléchissement beaucoup plus grand de la politique d’«opposition
constructive» que Lagarde se targuait de mener depuis l’élection d’Emmanuel
Macron en 2017 à l’Elysée.
Ainsi, après avoir déclaré que «si cet acte II [du
gouvernement] est bien un acte de dialogue et d'ouverture, nous n'avons aucune
raison de ne pas nous y engager», à la question, «pourriez-vous voter en faveur
du projet de loi de finances?», il répond, «s'il prend en compte un certain
nombre de nos idées sur l'environnement, l'égalité entre les territoires et une
répartition plus juste des efforts demandés aux Français, pourquoi pas».
Or, être membre d’une majorité parlementaire, ou tout au
moins un partenaire de celle-ci, c’est en démocratie républicaine, voter le
budget présenté par le gouvernement.
On verra bien si c’est cette voie que va choisir l’UDI et
son leader, en rappelant, tout de même, que plusieurs déclarations en ce sens
avaient déjà été faites par le passé sans passage à l’acte.
Cependant, cette fois-ci, les propos semblent plus clairs et
la volonté plus affirmée.
A voir maintenant comment ces propos et cette volonté seront
appréciés par les élus et les militants centristes lors de l’université de
l’UDI à Barcarès (Pyrénées-Orientales) les 5, 6 et 7 septembre prochains.
► Voici les propos de Lagarde dans Le Parisien
- La rentrée politique est déjà marquée par les municipales
à Paris. Qui l'UDI soutiendra-t-elle dans la capitale ?
Au plan national, nous avons une ligne simple : partout les
candidats UDI pourront signer des accords avec des partenaires sur la base des
projets locaux, sans tenir compte des étiquettes politiques. A Paris, nous
avons décidé de travailler avec Benjamin Griveaux. Cela fait 30 ans qu'on
connaît des alternances droite-gauche, claniques, et 30 ans que Paris recule
tant dans la qualité de vie que dans les classements internationaux. On a
besoin de retrouver le souffle qu'avait amené Bertrand Delanoë en 2001 et que
Mme Hidalgo n'a pas su faire vivre.
- Quelle sera la place des candidats UDI sur les listes LREM
menées par Griveaux?
Nous n'avons pas discuté des places. Nous discutons du
projet depuis cet été. Nous sommes d'accord sur une gestion plus décentralisée
des problèmes quotidiens, sur la prise en compte de la dimension métropolitaine
dans chaque décision, sur la propreté, le logement, la sécurité. Le travail
n'est pas fini, mais nous voyons bien que nous partageons les mêmes
orientations pour la Ville. De plus, Benjamin Griveaux porte en lui une volonté
de rassemblement nécessaire à tout maire.
- En 2014, vous aviez fait alliance avec LR à Paris.
Pourquoi pas cette année ?
J'observe que nombre de Républicains eux-mêmes souhaitent
travailler avec Benjamin Griveaux. Ils ont raison! Je ne crois pas à
l'affrontement LR-PS à Paris. Qu'est-ce que ça a emmené de bon pour les
habitants? Rien.
- Dans quelles autres communes des alliances entre l'UDI et
LREM se dessinent-elles?
Si Paris est un enjeu important, la métropole parisienne
l'est aussi. Nous devons donc en discuter avec LREM, notamment dans les
nombreuses villes dirigées par des élus UDI. Nous souhaiterions nous projeter
dans la gouvernance future de la métropole.
- Et dans le reste de la France ?
Nous constituerons des alliances, ville par ville, projet
par projet. Il n'y aura pas d'alliance systématique. Par exemple, nous
soutiendrons le maire de Bordeaux alors que LREM ambitionne de se présenter
contre lui. A Lyon, nous pouvons discuter pour travailler ensemble.
- Aux Européennes, vous meniez une liste autonome avec
l'idée de ne pas « signer un chèque en blanc » à Macron. Vous vous rapprochez donc
de la majorité?
Nous ne signerons jamais de chèque en blanc. Mais le
président de la République a dit, à l'issue de la crise des gilets jaunes,
qu'il voulait ouvrir un acte II du quinquennat. Sans doute sa victoire de 2017,
l'arrivée d'une majorité pléthorique trop sûre d'elle-même ont-elles conduit à
des erreurs, parfois à de l'arrogance. Mais le président de la République a
l'intelligence d'en tirer les leçons et de dire : je veux changer de méthode.
Cela veut dire être capable de discuter, de trouver des partenaires. Que ce
soit dans le cadre des municipales ou de la politique nationale, nous acceptons
ce dialogue.
- Êtes-vous favorable à la réforme à venir des retraites et
de l'assurance-chômage?
La retraite par point, c'est le projet que le centre porte
depuis 20 ans. Nous n'allons pas bouder une réforme que nous réclamions même si
le projet demande encore à être discuté et amélioré. Sur l'assurance-chômage,
l'orientation prise par le gouvernement est nécessaire. Avant l'été, Edouard
Philippe nous a invités pour que nous travaillions ensemble. Nous sommes prêts
à travailler en partenariat avec la majorité pour que ces réformes réussissent.
- Historiquement, le partenaire naturel de l'UDI était la
droite. C'est fini?
L'UDI, c'est le centre-droit et ça le restera. Mais ceux qui
incarnaient la droite ont accepté une dérive, notamment sous l'impulsion de
Laurent Wauquiez, qui les a éloignés des valeurs que nous portons. Je ne veux
pas parler de « partenaire naturel » mais quand la majorité présente des
projets qui nous correspondent, nous n'allons pas détourner la tête. Si cet
acte II est bien un acte de dialogue et d'ouverture, nous n'avons aucune raison
de ne pas nous y engager.
- Vous pourriez voter en faveur du projet de loi de finances?
S'il prend en compte un certain nombre de nos idées sur
l'environnement, l'égalité entre les territoires et une répartition plus juste
des efforts demandés aux Français, pourquoi pas.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
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