Emmanuel Macron pendant le Grand débat national |
L’annonce par Emmanuel Macron d’une très large concertation
à propos de la réforme des retraites et, surtout, la possibilité de l’amender
de manière importante afin de la faire correspondre à l’opinion des Français,
pose la question de savoir si les réformes en profondeur promises par le
Président de la République ne sont plus à l’ordre du jour suite aux divers
mouvements sociaux et de foule de ces derniers mois (ainsi que les conclusions
du Grand débat national) ou s’il s’agit d’une nouvelle méthode qui permettra
d’associer les citoyens tout en continuant à vraiment mettre le pays en phase
avec la réalité politique, économique, sociale et sociétale du moment.
Du côté du gouvernement et de la majorité présidentielle, on
explique que les réformes ne sont pas enterrées mais qu’il faut désormais une
large discussion avec les Français pour leur expliquer les tenants et les
aboutissants, recueillir leurs propositions et les associer à la décision
finale, et que le Grand débat national aurait acté cette nouvelle méthode de décision.
Lorsque qu’on évoque la possibilité d’un recul dans ce qui
est le cœur même du projet macronien (issu, notamment, de son ouvrage
Révolution), la réponse est la même: on ne peut plus agir comme on le faisait
auparavant, les crises récentes ainsi que le Grand débat national ont montré
qu’une nouvelle ère politique s’était ouverte.
Et devant l’incrédulité (voire la mauvaise foi) de certains,
de rappeler qu’on ne peut reprocher tout et son contraire à la majorité en
place, c'est-à-dire de ne pas avoir écouté les Français et de les écouter
maintenant.
Pour autant, la réforme étant au cœur d’un programme
centriste de gouvernement mais aussi d’une volonté progressiste, on peut se
demander si cette «nouvelle» méthode n’est pas seulement l’ancienne réhabilitée,
c'est-à-dire celle qui permet de faire des annonces fracassantes de changements
puis d’enterrer ces derniers dans des négociations interminables qui
aboutissent à dénaturer complètement la réforme initiale.
On peut également prendre l’opinion inverse et estimer que
cette méthode n’est en fait qu’un leurre qui permettra de faire croire que l’on
négocie alors qu’en fin de compte on fera passer les mesures que l’on avait
prévu au départ.
Bien évidemment, il n’y a pas de réponses pour l’instant
puisque le nouveau processus n’en est même pas à ses débuts mais à son annonce.
Reste qu’il faudra éviter deux écueils: oublier in fine la
nécessité de réellement réformer dans des domaines cruciaux pour l’avenir du
pays et le quotidien des Français (et le domaine des retraites comme celui de
la bioéthique en font partie pour parler de deux réformes qui vont se présenter
dans les semaines à venir); faire semblant d’écouter les citoyens.
Ce ne sera pas facile parce que dans certains cas, la
réforme n’est pas une option et on en connait le contenu et les mesures si l’on
veut avancer vers le mieux.
Or, par réflexe soit de peur, soit pour protéger des avantages
acquis, soit par conservatisme, les Français, conscients pourtant de la nécessité
de réformer sur ces questions, peuvent s’y opposer, telle l’autruche mettant sa
tête dans le sable.
Il y a donc de bonnes raisons de se poser des questions sur la
nouvelle méthode – si c’en est bien une – et sur ce qu’elle peut accoucher.
Parce qu’ici, il y a un principe qui doit guider, à la fois,
le gouvernement et la population et il s’appelle la responsabilité.
Or, si l’on analyse les précédents, il n’est pas sûr que cette
méthode le mette en avant…
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
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