Regards Centristes est une série d’études du CREC qui se penchent sur
une question politique, économique, sociale ou sociétale sous le prisme d’une vision
centriste. Dix-septième numéro consacré à la position du Centrisme vis-à-vis de la
démocratie et de la république ainsi que sur la primauté de l’une par rapport à
l’autre. Car, pour les centristes, le meilleur système est une démocratie républicaine
et non une république démocratique.
► Définitions
Qu’est ce que l’on entend en ce XXI° siècle par démocratie,
république, démocratie républicaine et république démocratique.
● Démocratie:
régime politique, système de gouvernement dans
lequel le pouvoir est issu du peuple, exercé par le peuple, en faveur du peuple
(selon la définition du président américain Abraham Lincoln, c’est «le
gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple»).
Dans une démocratie
représentative, le peuple élit des représentants pour gouverner en leur nom par
le biais d’un mandat provenant d’une élection où ces représentants ont proposé
un programme d’action.
Pour que la démocratie puisse
fonctionner pour tous, le pouvoir de la majorité ne peut contrevenir aux droits
de la minorité ou les limiter par rapport à ceux de la majorité.
C’est pourquoi, la
caractéristique principale des démocraties du XXI° siècle résident dans leur
capacité à garantir les droits de la minorité tout en permettant aux représentants
de la majorité d’exercer le mandat qui leur a été confié.
La démocratie est avant tout
caractérisée par la liberté individuelle.
Bien évidemment, l’utilisation du
terme «démocratie» n’est plus la même qu’au temps de la Grèce antique qui ne le
concevait que comme un gouvernement direct du peuple, gouvernement évidemment
impossible dans des sociétés aussi complexes et grandes (en nombre d’habitants
et en superficie) que celles d’aujourd’hui.
● République:
Le mot «république» provient du latin res publica qui
signifie au sens propre «chose publique».
Il désigne l’intérêt général puis le gouvernement, la
politique et enfin l’État.
Pour Jean Jacques rousseau, c’est «tout
État régi par des lois, sous quelque forme d'administration que ce puisse être;
car alors seulement l'intérêt public gouverne et la chose publique est quelque
chose. Tout gouvernement légitime est républicain.»
La république est donc le gouvernement de la chose publique.
La république est avant tout caractérisée par la défense de l’intérêt
commun et la promotion de la solidarité et de la tolérance par un organe de
gouvernement, l’Etat.
● Démocratie
républicaine:
Ici c’est la liberté individuelle garantie par la démocratie
qui prime sur l’intérêt général (autant que celui-ci peut être défini) garanti
par la république.
Et c’est la somme des libertés individuelles qui forment un
intérêt collectif qui permet un lien social.
Aujourd’hui, les régimes démocratiques occidentaux sont plus
ou moins proches d’un système de démocratie républicaine alors que les deux
principales, les EtatsUnis et la France, se sont définies au départ comme des
républiques avec un régime démocratique représentatif.
L’évolution des sociétés mais aussi la prise en compte de
plus en plus réelle des deux déclarations des droits humains contenus dans les
Constitutions françaises et américaines ont abouti à une prégnance du
démocratique sur le républicain.
● République
démocratique:
Si feus les pays de l’Est de l’Europe sous domination
soviétique et avec des régimes communistes totalitaires ont choisi de se faire
appeler des «républiques démocratiques», ce n’est pas un hasard.
Au-delà de la supercherie globale du terme, cela signifiait
que ces régimes privilégiaient avant tout le holistique (représenté ici par l’Etat
et, surtout, le Parti communiste) non pas pour les individus mais pour le
peuple dont nous avons vu dans un précédent numéro de Regards centristes, le
danger de cette notion (lire ici).
Mais, si ce concept est utilisé correctement, il signifie
que c’est bien avant tout la communauté qui est privilégiée par rapport à l’individu,
celui-ci n’étant pas constitutif et pierre angulaire du régime (comme dans la démocratie
républicaine) mais un simple membre de la communauté dont les droits (humains)
sont systématiquement supplantés par les droits de la collectivité.
Cette république démocratique privilégie la liberté des
anciens (celle de la collectivité) comme le notait Benjamin Constant alors que
la démocratie républicaine représente la liberté des modernes.
► Pour le Centrisme, l'alternative
n'est pas entre république et démocratie
En ce premier quart du XXI° siècle, certains estiment que la
république est menacée par une démocratie qui ne promeut que les intérêts
particuliers d’individus et de groupes.
Cependant, la glorification de la république et la critique
de la démocratie, est, non seulement, un faux débat mais une erreur historique
dangereuse.
Ainsi, selon les défenseurs de cette thèse, la république
est le seul et vrai régime politique de la France, celui issu de 1789 et de la
tradition française où le bien commun et le partage d’une destinée commune
seraient les ciments de la communauté nationale alors que la démocratie
libérale, venue d’ailleurs, serait porteuse de la déliquescence de la société
en exaltant l’individualisme débridé et le communautarisme.
D’une certaine manière, on pourrait rapprocher cette thèse
de celle défendue par les autocrates qui exaltent la république, régime de
l’ordre, pour condamner la démocratie, agent du désordre.
Cette présentation est évidemment partielle et partiale, surtout,
elle méconnaît ce qu’est aujourd’hui le libéralisme notamment sa version française
forgée au cours de la III° République par des hommes comme Léon Bourgeois,
Charles Renouvier et même Emile Durkheim.
Même s’il est individualiste et décentralisateur, le
libéralisme français s’est toujours inscrit dans le républicanisme,
reconnaissant la nécessité d’un lien social fédérateur et d’une solidarité
entre les personnes, sans oublier la dimension sécuritaire.
En outre, la présentation de la démocratie comme danger pour
la république est totalement négative alors même que celle-ci permet la
responsabilité individuelle et la libération des potentialités de l’individu.
En réalité, sauf à vouloir revenir sur les règles de
fonctionnement de la démocratie libérale et représentative issue directement
des révolutions américaines et françaises, elles-mêmes ayant puisé leur
inspiration dans l’évolution démocratique de la monarchie britannique,
l’opposition entre les deux notions est anachronique car les valeurs
démocratiques et républicaines sont liées dans ce qu’est aujourd’hui le régime
politique des sociétés occidentales. C’est bien là le point fondamental: la démocratie
et la république, loin de s’opposer, sont complémentaires.
Les deux piliers de base du régime politique français c’est
la démocratie et la république. Sans démocratie, pas de république humaniste.
Sans république, pas de démocratie sécuritaire. C’est ce que dit le Centrisme. Mais
il va plus loin en affirmant que le meilleur régime est une démocratie
républicaine.
La démocratie vient avant la république car elle libère
l’individu mais elle ne va jamais sans celle-ci car cette dernière permet de
rendre viable la première dans des sociétés où les intérêts individuels sont si
divergents qu’ils ont besoin d’un lien social qui organise la liberté. Mais la
république sans la démocratie est souvent une infamie car elle nie les valeurs
de liberté, de respect et de tolérance au nom d’un groupe qui a toutes les
primautés face à l’individu, ce qui permet, in fine, de nier les droits individuels.
Nombre de dictateurs ont été amoureux de la république,
aucun d’eux de la démocratie…
C’est la raison pour laquelle le Centrisme est le défenseur
intransigeant d’une démocratie républicaine.
Pour en revenir aux pourfendeurs de la démocratie, il faut
ajouter qu’ils opposent fallacieusement le régime démocratique des Etats-Unis
(avec son individualisme et son communautarisme) et le régime républicain de la
France (avec son peuple uni).
Voilà qui est méconnaître totalement l’histoire car les
Pères fondateurs américains n’avaient qu’une idée en tête, créer une république
selon les préceptes de Montesquieu…
Pourquoi la république qui avait tous les soutiens possibles
lors des révolutions américaine et française, s’est-elle transformée en démocratie
aux XX° et XXI° siècles dans le sens où l’idée que le collectif devait primer
sur l’individuel s’est trouvée dépassée par la primauté de l’individu sur la
collectivité? Tout simplement parce que l’approfondissement démocratique prédit
par Alexis de Tocqueville était une évolution naturelle de la république
démocratique dès qu’elle entendait garantir les droits de l’homme.
Mais cela ne signifie pas que la démocratie doit donner le
champ libre aux désidératas de l’individu, encore une fois qui ne proviennent
pas de l’individualisme mais de l’autonomie acquise dans un régime de liberté
et dont l’usage égoïste et égocentrique dans une vision égalitariste, détraque
petit à petit le système.
C’est pourquoi il faut continuer à approfondir le régime
démocratique tout en rappelant qu’il ne peut être que républicain s’il veut
perdurer en un ordre qui permet la réalisation effective de la liberté pour
tous dans une égalité des chances et des opportunités.
Alexandre Vatimbella avec l’équipe du CREC
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