mardi 23 juillet 2019

Une Semaine en Centrisme. Présidentielle USA 2020: le centriste Joe Biden peut-il tenir la distance?

Joe Biden
En tant que «frontrunner» (celui qui fait la course en tête) qui domine largement pour l’instant la concurrence dans les sondages – tant dans ceux qui concernent l’élection générale face à Trump que ceux des primaires démocrates –, Joe Biden est l’objet évidemment des attaques les plus violentes des républicains mais, tout aussi évidemment, de l’ensemble de ses concurrents pour la nomination comme candidat du Parti démocrate à la présidentielle de 2020.
Et sa longue carrière (plus que son âge) fait de lui un candidat solide mais aussi très fragile!
Car il a traversé de nombreuses périodes politiques qui ne sont plus «politically correct» dans les critères d’aujourd’hui et a pris des positions au cours de son parcours qui sont devenues quasi-indéfendables notamment au Parti démocrate souvent gangrené par les revendications communautaristes les plus extrêmes, voire les plus inacceptables ou entretenus des relations il y a plusieurs années qui désormais peuvent être un lourd handicap.
Ainsi, il a déjà été attaqué pour avoir eu des gestes affectifs trop appuyés à l’encontre de femmes, pour avoir travaillé avec des opposants lors de compromis voire avec des membres de son propre parti qui ne sont plus historiquement fréquentables maintenant, comme les dixies democrats, ces démocrates qui régnèrent sur le Sud du pays de la fin de la Guerre de Sécession à la fin des années 1960, où, pour la plupart de leurs électeurs, il n’était alors pas question de voter pour un candidat du parti de Lincoln (le Parti républicain en l’occurrence) et de l’abolition de l’esclavage, ce qui faisait que les candidats d’extrême-droite, racistes et ségrégationnistes, réactionnaires et violents se présentaient sous l’étiquette démocrate.
Mais, en vouloir à Biden d’avoir travaillé avec eux au début de sa carrière politique, c’est en vouloir alors à tous les présidents démocrates qui se sont succédés à la Maison blanche depuis 150 ans (dont Franklin Roosevelt ou John Kennedy) sauf les deux derniers, Bill Clinton et Barack Obama, tout simplement parce que ces candidats extrémistes ont tous, depuis la révolution nixonienne du début des années 1970, rejoints les rangs du Parti républicain dont ils sont désormais des élus quasiment inamovibles dans certains Etats comme l’Alabama, la Louisiane, le Mississipi ou la Géorgie, par exemple.
Mais il s’agit également de son programme centriste, qui ressemble à celui d’Obama en 2008 et à celui d’Hillary Clinton en 2016.
Si celui-ci est à même de séduire les électeurs modérés du Parti démocrate mais aussi du Parti républicain et de ramener du côté démocrate beaucoup de cols bleus qui sont allés voter Trump en 2016 (par haine d’Hillary Clinton et du fait qu’elle était une femme…), il va se heurter à tout ce que le Parti démocrate compte d’activistes de gauche, de genre ou ethnique qui ont réussi à phagocyter une partie de celui-ci ces dernières décennies et, surtout, la dernière.
D’autant qu’il faut rappeler qu’en 2008, lors de la présidentielle qui a vu l’élection de Barack Obama, cette frange gauche du Parti démocrate avait mené une violente campagne contre le programme centriste de celui-ci (et avait continué une guérilla pendant toute la durée de ses huit années de présidence) et avait récidivé en 2016 à l’encontre du programme d’Hillary Clinton (ce qui lui a peut-être coûté sa victoire dans les Etats où elle n’a perdu que par quelques milliers de voix).
On l’a bien vu lors du premier débat entre les candidats à la primaire démocrate où il a été la cible plus ou moins directe des autres prétendants à l’investiture du parti pour la présidentielle de 2020 avec des accusations qui faisaient fi des réalités politiques et sociologiques de l’époque.
Pourtant, Biden tient toujours avec une avance de neuf points du Donald Trump pour la présidentielle et une avance de quinze points sur son poursuivant direct pour la primaire démocrate selon les deux derniers sondages en date (NBC-Wall Street Journal pour la présidentielle, Politico-Morning consult pour la primaire).
On y verra sans doute un peu plus clair après le deuxième débat entre démocrates qui a lieu fin juillet à Detroit (Michigan).
Mais il est sûr que l’ancien vice-président de Barack Obama sera encore la cible des autres candidats et qu’il va devoir jouer serré pour ne pas se faire déborder par des attaques déstabilisatrices, à défaut d’avoir du contenu, comme notre époque en est désormais remplie en politique et qui peuvent briser net un parcours.
Sans oublier que Biden est considéré comme un gaffeur, ce qui lui a déjà joué de multiples tours dans sa carrière.
Et puis, s’il demeure en tête, au fur et à mesure que les primaires approcheront puis se dérouleront (leur début est programmée pour le 3 février 2020 avec la première, celle du New Hampshire) jusqu’à la Convention démocrate qui choisira le candidat du parti (qui se tiendra du 13 au 16 juillet 2020 dans la ville de Milwaukee dans le Wisconsin), il sera la cible, à la fois, à droite et à l’extrême-droite, du Parti républicain et de Donald Trump en personne, et à gauche et à la gauche radicale, d’au moins la moitié des prétendants démocrates avec en tête de liste Bernie Sanders et Elizabeth Warren soutenus pas les activistes radicaux telle Alexandria Ocasio-Cortez.
Dès lors, on peut prédire des moments très difficiles à Joe Biden.
Néanmoins, s’il se sort de toutes les chausse-trappes qui vont jalonner son parcours avec succès, il sera alors un candidat particulièrement sérieux, capable de débarrasser les Etats-Unis de l’indécent et scandaleux Donald Trump.
Mais, prédire aujourd’hui sa victoire lors des primaires ne peut se faire avec assurance.

Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC


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