Comme pour tout allié minoritaire d’une majorité, le MoDem
face à la grande sœur LaREM est constamment dans le désir d’affirmer son
identité et son autonomie.
Le gros problème pour le mouvement de François Bayrou c’est,
qu’il le veuille ou non, qu’il le reconnaisse ou pas, il doit son existence
actuelle, notamment à l’Assemblée nationale mais aussi en tant que parti de
dimension nationale, c'est-à-dire ayant des ministres et pouvant peser sur le
débat politique, à Emmanuel Macron et à La république en marche, ce qui ne lui
était en réalité jamais arrivé (le MoDem fut créé en 2007, après la
présidentielle pour surfer sur le bon score de François Bayrou mais ni l’un, ni
l’autre ne l’ont jamais réédité depuis).
Pourtant, depuis 2017 il tente sans cesse de trouver des
points d’appui pour exprimer une différence.
Bayrou s’en est d’ailleurs fait une spécialité et c’est avec
surprise que l’on a vu ses critiques systématiques sur l’action du Président de
la République et, surtout, sur celle du Gouvernement, être moins virulentes ces
derniers mois.
Toujours est-il que c’est au tour du parti de monter au créneau
sur plusieurs dossiers après les élections européennes où, encore une fois, il
a eu des élus grâce à LaREM.
Les trois dossiers sur lesquels il veut se démarquer sont
les municipales de 2020, la politique familiale et la PMA dans le cadre de la
loi bioéthique.
Mais a-t-il vraiment les moyens de joue sa propre
partition jusqu’au bout?
Si la volonté de promouvoir une politique familiale plus
traditionnelle avec des allocations distribuées à toutes les familles ressort
de sa vision démocrate chrétienne, de même que les réticences d’une partie de
ses membres sur l’autorisation de la PMA pour tous, ce qui ne devrait pas avoir
de réels impacts sur les décisions prises mais permettra de montrer son
«indépendance d’esprit», ce n’est pas du tout la même chose pour les
municipales où le MoDem veut, en quelque sorte, le beurre et l’argent du
beurre, ce qui a tendance à exaspérer LaREM.
Pour simplifier, disons que la formation bayrouiste veut, à
la fois, pouvoir s’allier avec la majorité et l’opposition!
Ce désir est essentiellement électoraliste dans le sens où
il s’agit de capitaliser sur ses alliances des municipales de 2014 et sur son
alliance avec LaREM forgée lors de la présidentielle de 2017.
En 2014, pour espérer avoir un nombre d’élus raisonnables,
le Mouvement démocrate avait pratiqué l’opportunisme à tous les étages (ce que
risque de faire l’UDI l’année prochaine!) en s’alliant, si ce n’est au plus
offrant, en tout cas à tous ceux qui pouvaient lui assurer une représentation
dans les conseils municipaux, à l’exclusion, toutefois, de toute liste qui
comportait des membres de l’extrême-droite (mais en étant moins regardant sur la présence
de membres de l’extrême-gauche…).
Car, il ne faut pas l’oublier, le parti centriste
était en pleine déshérence suite à l’échec cuisant de son leader à la
présidentielle de 2012 (un peu plus de 9% des voix) puis lors des élections
législatives où il avait été battu dans sa ville de Pau et n’avait réussi qu’à
faire élire trois des siens qui s’en allèrent ensuite voir ailleurs, le MoDem
n’ayant plus aucun député avant la présidentielle et les législatives de 2017.
Mais cette stratégie de se vendre à tous n’est pas
raisonnablement réplicable en 2017 alors qu’il est un membre de la majorité
présidentielle et que l’on ne voit pas quel peut être l’argument pour s’allier
avec l’opposition, quel que soit les relations avec celle-ci dans telle ou
telle municipalité, ceci manquant à l’évidence de clarté politique.
Pour l’instant, le Mouvement démocrate tente de
résister et même de jouer l’offensive comme à Bordeaux où il a regretté qu’un
candidat LaREM ait été désigné contre le maire sortant.
Il faut dire que le cas de la capitale de la Gironde
est emblématique de l’opportunisme du MoDem lors des précédentes municipales.
Voulant retrouver un mandat électif, Bayrou souhaitait
devenir maire de Pau, ce qu’il ne pouvait faire sans une alliance avec l’UMP
(devenue LR) qui, bien entendu, ne voulait pas en entendre parler puisque le
président du Mouvement démocrate avait indiqué qu’il avait voté contre Nicolas
Sarkozy à la présidentielle de 2012.
Il fallut une intervention énergique – qui lui fut
reprochée par beaucoup dans son parti et qui sans doute est une des raisons de
son échec à la primaire – d’Alain Juppé pour que Bayrou soit soutenu par la
Droite face à un candidat de gauche soutenu par François Hollande, l’homme pour
qui il avait voté à la même présidentielle!
Et il n’échappera à personne qu’avant de rejoindre le
Conseil Constitutionnel, Juppé était maire de… Bordeaux.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC
Jean-Louis Pommery
Directeur des études du CREC
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires anonymes ne sont pas publiés ainsi que ceux qui seraient insultants ou qui ne concernent pas le Centre et le Centrisme.