Bayrou & Macron lors de leur alliance en 2017 |
Au fil des dernières interviews qu’il a donné, François Bayrou
est devenu un défenseur sans nuance d’Emmanuel Macron et de ses nouvelles
orientations après le mouvement de foule des gilets jaunes et la tenue du Grand
débat national.
Le dernier en date, donné ce jour au JDD ne déroge pas à la
règle, bien au contraire.
Il serait même une sorte que quintessence de tous ceux qu’il
a donnés récemment.
Ainsi, d’un soutien critique, voire d’une défiance sans
rupture, au chef de l’Etat, le comportement du président du MoDem est devenu
celui d’un exégète convaincu, d’un disciple qui n’aurait plus aucun doute et qui
aurait laissé en plan tout son passé pour suivre la bonne parole...
Si plusieurs explications peuvent être données (voir
notre article ici), c’est un retournement de situation qui peut laisser
perplexe plus d’un et laisse pantois les observateurs politiques.
Que l’on en juge avec l’entretien au JDD.
A la question «Pourquoi dites-vous que le plan présenté
après le grand débat est ‘révolutionnaire’?», François Bayrou est littéralement
dithyrambique:
«C’est un projet de refondation de l’État et de la
République comme on n’en a pas connu depuis quarante ans. On prend les
questions les plus profondes et on les traite: un nouveau rapport entre l’État
et la société, entre Paris et le pays profond, entre les gouvernants et les
citoyens, entre l’Administration et les usagers. Si l’on va jusqu’au bout, les
acteurs de terrain, les élus locaux, les entreprises, les associations vont
avoir une légitimité nouvelle et la confiance qui va avec. Des services publics
réenracinés sur le terrain; la redéfinition de la haute fonction publique, de
son recrutement et de son organisation; la lutte systématique contre les
inégalités de destin: c’est un plan incroyablement ambitieux.»
Et pas de doute sur la capacité d’Emmanuel Macron de mener ce
projet à bien:
«Porter ce projet jusqu’à sa réalisation, changer l’État,
c’est incroyablement exigeant, et ça bouscule un univers d’habitudes et de
conformisme. Il y aura beaucoup de freins. Mais le Président s’est forgé une
volonté.»
Quant aux baromètres sur la confiance des Français à Emmanuel
Macron (dont nous rappelons que leur résultats fantaisistes ont fait que nous avons
renoncé à les publier), ne voilà-t-il pas qu’il invente une nouvelle lecture assez
improbable de ceux-ci pour relativiser les mauvais résultats de certains:
«Vous confondez confiance et popularité. La popularité, ça
va, ça vient, c’est superficiel. La confiance, c’est plus profond ; c’est
l’estime, le sentiment que l’homme vaut la peine, qu’il est fidèle à sa
mission, même quand il dit non. Cela ne s’obtient qu’avec du temps et des
épreuves. C’est cela qui se construit. Il a affronté l’épreuve, en homme
conscient des problèmes du pays dont il a la charge, sans concession et sans
ruse. On voit que cette crise l’a changé, lui a donné la gravité et le courage
pour saisir au bon niveau l’histoire que nous vivons.»
N’en jetez plus, serait-on tenté de dire.
Et bien non, pas encore, parce qu’il y a la cerise sur le gâteau
pour le moins étonnante dans la bouche du centriste.
Depuis des années, un des chevaux de bataille de François Bayrou
est la lutte contre les déficits publics et un budget de l’Etat gargantuesque.
Mais plus maintenant!
Car, si ce n’est pas lui qui va «oublier que l’équilibre des
finances est nécessaire», il précise qu’en l’espèce «l’investissement dans la
réforme de l’État, dans l’éducation ou dans le maintien des services publics,
ce sont des économies futures»!
Ou comment expliquer que les déficits sont les profits de demain,
ce que disent évidemment tous ceux qui en font et qui veulent les légitimer!
Un paradoxe qui fera certainement les choux gras de ses opposants…
Sans oublier, évidemment, qu’il ne pense pas une seule seconde
à être nommé premier ministre:
«La V° République, ce sont des gouvernements qui durent!
D’autant plus quand ils ont la charge d’un projet aussi décisif que celui qui a
été annoncé.»
Enfin, il revient sur son analyse de la «crise» qui n’est plus
«politique» mais qui est désormais celle de «l’Etat»:
«Ce n’est pas une crise politique. C’est bien plus profond.
C’est une crise de l’État, devenu trop éloigné des gens, par ses méthodes, par
son langage, par ses habitudes, par sa lenteur d’exécution. Il y a beaucoup de
talents dans l’État, et beaucoup de dévouement. Mais ça ne marche plus. L’État
comprend mal le pays et le pays ne comprend plus l’État. Il faut donc
reconstruire le lien. Et c’est cela que le Président a annoncé. Le
gouvernement, pour sa part, a la charge de construire la maison nouvelle que
l’architecte a dessinée. Pas seulement en obéissant, mais en proposant et en
inventant.»
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