Jean-Christophe Lagarde |
Jean-Christophe Lagarde l’affirme péremptoirement depuis des
semaines, sa liste UDI pour les élections européennes est ouverte à qui veut la
rejoindre, notamment aux fidèles d’Alain Juppé et plus globalement à tous les
déçus de LR, de LREM, du MoDem, …
Problème, c’est que personne ne veut rejoindre une liste
dont la moyenne dans les sondages est de 2,3%, c'est-à-dire même pas le seuil
pour être remboursée de ses frais de campagne et encore moins celui d’avoir des
élus (3% et 5% respectivement).
Lagarde espérait que les anciens UDF passés à LR et qui
dénoncent les dérives radicales de Laurent Wauquiez rejoindraient sa liste
ainsi que tous les droitistes libéraux.
Mais, en l’espace d’une journée, ses espoirs ont été
douchés.
Dans un entretien au Figaro, le plus connu des anciens UDF
encore à LR, Jean-Pierre Raffarin, ancien premier ministre de Jacques Chirac, a
annoncé son soutien à la liste LREM-MoDem.
Quant au parti Agir-la droite constructive, elle vient de
publier un communiqué qui indique son ralliement à la liste de la majorité
présidentielle alors même que le parti a créé un groupe commun à l’Assemblée
nationale avec l’UDI!
Seul un Dominique Bussereau, bien isolé, semble intéressé
par soutenir la liste UDI…
Alors, en désespoir de cause, le président de l’UDI vient de
publier une tribune sur le site internet du JDD où, à nouveau, il attaque sans
aucune subtilité Emmanuel Macron et sa vision de l’Europe.
On aurait préféré voir Jean-Christophe Lagarde se battre de
toutes ses forces pour les valeurs européennes contre les populistes et les
extrémistes qui mettent en danger même l’existence de l’Union européenne et non
contre un défenseur de toujours de l’Europe.
Mais la politique politicienne a, semble-t-il, ses priorités
qui ne sont pas les mêmes que la défense de la démocratie républicaine…
Cette tribune ressemble à une dernière tentative d’exister vis-à-vis
des électeurs centristes et de la droite modérée, tout autant qu’à un chant du cygne.
D’ailleurs, elle serait plus un programme électoral qu’un texte
contributif au débat politique s’il n’y avait pas ces attaques contre le Président
de la république.
Regrettons également des affirmations sans preuves et une relation
difficile de Lagarde avec le réel qui n’est pas nouvelle quand il veut dénigrer
un adversaire.
Sans oublier cette propension bien connue de sa part à tenir
des propos contraires à ce qu’il disait la veille…
Voici cette tribune qui, en dehors de son anti—macronisme
primaire, recèle de propositions intéressantes pour l’Europe:
L’Europe souhaitée
par Macron est bien faiblarde et étriquée
Dans son Discours à la Nation Européenne, Julien Benda
exhortait les Européens à faire corps autour de cette idée d’Europe comme
puissance: «Au sein de chacun de ces peuples, il existe des hommes qui veulent
unir les peuples, des hommes qui pensent à 'faire l’Europe'. C’est à eux que je
m’adresse. Souhaitant de donner à leur désir au moins l’incarnation verbale, je
les nomme la nation européenne.»
Si l’Europe veut encore trouver sa voie face au dépeçage qui
nous menace, au multilatéralisme renaissant et à l’hubris des dirigeants
américains, russes et chinois, elle doit s’interroger sur sa capacité à faire
puissance comme le dit l’universitaire Zaiki Laidi. Cela équivaut à un
changement de paradigme pour elle, qui s’était construite justement en
s’inscrivant en faux contre la notion traditionnelle de Puissance. Or cette
dernière a resurgi des cendres de l’Histoire et met désormais l’Europe au pied
du mur: soit elle construit sa puissance pour ne pas subir le monde, soit elle
accepte de devenir un ensemble d’Etats soumis aux autres grandes puissances
continentales. Au lieu de se diluer dans ses élargissements et son excès de
normes tatillonnes, l’Europe doit repartir de l’avant avec un groupe de pays
refondateurs, en se concentrant sur des objectifs stratégiques pour lesquels
nos Etats ne sont pas efficaces tous seuls:
- L’affirmation de l’euro que nous devons imposer comme
monnaie d’échange internationale pour ne plus subir le dictat du dollar et les
lois américaines, un euro ayant pour priorité la prospérité et convergence
progressive des normes fiscales et sociales (au lieu de la concurrence sauvage
actuelle);
- La défense de l’Europe (cyberdéfense ainsi que défense
spatiale communes et mutualisation de la R&D militaro-industrielle et de
leurs applications civiles);
- La sécurité, avec la création d’un parquet européen et
d’une police fédérale pour lutter contre le terrorisme, les fraudes et les
mafias;
- Le contrôle des migrations en créant un ministère européen
de l’immigration doté d’un corps de Garde-côtes et d’une Police des frontières.
Son rôle sera de protéger nos frontières et de délivrer les visas en fonction
des quotas que chaque Etat membre aura librement fixés; aucun pays ne devant se
voir imposer des migrants dont il ne voudrait pas;
- La préservation du climat, la transition et l’indépendance
énergétique de l’Europe, notamment avec 200 milliards d’investissements dans
l’isolation des bâtiments, la production d’énergies renouvelables, la
conception de véhicules propres;
- Le lancement d’une nouvelle Politique Agricole Commune
garantissant l’autonomie alimentaire de notre continent, la qualité et la
sécurité de notre alimentation et un vrai revenu à nos agriculteurs;
- La protection de notre environnement par le développement
de molécules respectant la nature, par l’économie de nos ressources, par la
sauvegarde de la biodiversité ;
- Une véritable stratégie industrielle commune pour gagner
la bataille des bouleversements technologiques en cours (intelligence artificielle,
ordinateur quantique, biotechnologie, nano-technologie, canaux de
communication, etc…). Si nous sommes décrochés technologiquement, nos pays
perdront toute indépendance;
- Un rapprochement fiscal et social au sein de la zone euro
pour mettre fin aux concurrences déloyales ;
- Une fiscalité européenne sur les géants d’Internet et en
les obligeant, comme le fait l’Inde, à stocker et exploiter en Europe les donner
qui font leurs richesses;
- Une agence de développement de l’Afrique, dont nous sommes
les seuls voisins, afin que les 2,5 milliards d’africains en 2050 soient nos
clients plutôt que des migrants potentiels.
Ces politiques communes doivent être conduites avec tous les
pays qui n’ont pas encore abdiqué d’être indépendants, souverains et qui veulent
peser sur leur destin.
Nul ne peut s’arroger le monopole de l’idée européenne. Ce
d’autant moins que le bilan des 18 derniers mois du gouvernement en la matière
est contestable. Au-delà de l’incarnation auto-persuasive, la stratégie
européenne de Macron a eu peu de résultats et porte en germe l’isolement et
l’affaiblissement de la France.
Il faut rappeler combien pour nos partenaires l’idée d’une
relance de la construction européenne était conditionnée, à la réussite d’une
France qui aurait remis en ordre ses affaires économiques et budgétaires. Or
non seulement les résultats et réformes d’envergure ne sont pas au rendez-vous,
mais le dérapage budgétaire récent, stigmatisé par la Commission, a rendu
caduque la création d’un premier budget européen stabilisateur qui aurait
pourtant été nécessaire. Nos partenaires n’ont pas de mots assez durs à l’égard
d’une France peu fiable en la matière. Notons aussi qu’Emmanuel Macron a
réussi, non seulement à détériorer nos relations avec les populistes italiens ou
de l’Est, mais également avec un pays comme les Pays Bas, avec qui la tension
monte et qui dans l’affaire Air France a clairement réagi à cette acrimonie.
La stratégie européenne de Macron porte en germe l’isolement
et l’affaiblissement de la France
La «taxophilie» française s’est aussi retournée contre nous.
Alors que la Commission tente d’harmoniser le calcul de l’assiette de l’impôt
sur les sociétés pour mieux y inclure les Gafa, la France veut faire cavalier
seul en la matière. C’est un nouvel échec de la diplomatie macronienne après
celui sur les travailleurs détachés, dont la directive finale ou l’idée du «bouclier
social» ne règlent rien. Vouloir le même salaire sans imposer les mêmes
cotisations, c’est accepter le dumping social et la concurrence déloyale, ce
qui nuit surtout aux Français dont la moitié du salaire finance notre
protection sociale. Pour nous, les salariés doivent être payés et cotiser selon
les règles du pays où ils exercent leur activité pour empêcher tout dumping
social.
Enfin, si nous avons le courage de confier ces missions
stratégiques à l’Europe, il faut que le pouvoir européen soit arraché des mains
des technocrates pour le remettre entre les mains des citoyens. C’est pourquoi,
il faut désormais élire un Président de l’Union Européenne, en charge de faire
valoir l’intérêt des citoyens plutôt que l’égoïsme des Etats. Il faut que les
Commissaires soient désignés et au besoin remplacés par les Députés Européens
de chaque pays, pas par des gouvernements nationaux. Il faut qu’un Sénat Européen
réunisse à Strasbourg les délégués de nos Parlements nationaux, afin de leur
donner la capacité de faire entendre la voix de nos peuples sur les politiques
européennes.
L’Europe souhaitée par M. Macron est malheureusement bien
faiblarde et étriquée. La protection qu’il propose est sans efficience
puisqu’elle ne s’appuie pas sur la volonté de faire de l’Europe une vraie
puissance bénéficiant à nos Etats. Les Européens réalistes que nous sommes,
soucieux de bâtir une Europe Puissance au service des citoyens, son prêts à
jouer leur rôle dans la prochaine élection.
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