Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a
toujours affirmé qu’il réformerait la France au risque de sa propre
impopularité et qu’il dirait les choses comme il les pense au risque des
polémiques.
Son objectif a toujours été et demeure de faire, selon ses
dires, une «révolution» des comportements et de permettre au pays de
(re)trouver une dynamique progressiste où, «en même temps» l’économie est
libérée mais les solidarités renforcées afin que chacun puisse réaliser son
projet personnel de vie dans une véritable méritocratie.
Pour cela, les réformes avaient clairement été indiquées
dans leur succession expliquées (d’abord libérer l’économie puis implémenter
des mesures sociales dans un juste équilibre).
De même, il estimait qu’il y avait des «vérités» à dire parce
qu’il fallait s’attaquer aux blocages politiques et sociétaux.
Et, avec ce programme présidentiel et ce projet politique,
Emmanuel Macron a été élu avec plus de 66% des voix.
Tout cela sont des faits.
Va-t-il parvenir à ses fins?
Il est trop tôt pour le dire mais ce qui est sûr, c’est
qu’il fait globalement ce qu’il a dit qu’il ferait au risque de l’impopularité
et des polémiques.
Bien entendu, n’étant pas Dieu, ni parfait, l’actuel
président de la république a commis quelques impairs et maladresses dans son
action, surtout dans son discours.
Mais, au-delà de l’accord ou non avec la politique menée, ce
qui est particulièrement révélateur de cette période (où les populismes et les
extrémismes montent en puissance), ce sont les réactions de la société à cette
entreprise où Macron apparait comme le révélateur des contradictions, des
blocages, des clientélismes, des irresponsabilités qui traversent le corps
social et minent le lien social de la démocratie républicaine.
On savait les Français réformateurs en parole.
En acte, ils le sont quand cela touche… les autres!
Ce particularisme assez mesquin ressurgit lors de chaque
réforme ou à chaque fois qu’il faut faire un effort, voire un sacrifice
conjoncturel.
Il a peut-être et sans doute surestimé la capacité d’un
peuple – qu’il soit français ou d’une autre nationalité – à prendre la mesure
des défis à relever, surtout à les accepter dans un monde libertario-hédoniste
du chacun pour soi, du tout, tout de suite et du sans contrainte pour soi avec
la montée ô combien dangereuse d’une autonomie égocentrique irresponsable
assistée irrespectueuse insatisfaite de l’individu.
De même, en voulant redonner de la «hauteur gaullienne» à la
présidence, il n’a pas calculé à sa juste mesure les risques qu’il prenait.
Depuis le début du millénaire, la fonction est devenue celle
qui cristallise contre elle tous les mécontentements, toutes les frustrations,
tous les ressentiments, toutes les insatisfactions, toutes les exaspérations,
toutes les irritations.
Et ce phénomène ne va qu’en s’accentuant quel que soit la
personne qui se trouve à l’Elysée.
En se mettant en première ligne constamment, il n’est plus,
souvent, qu’une sorte de pinata mexicaine où se défoulent, voire se déchaînent,
les médias, les oppositions politiques et le bon peuple avec le danger réel
d’un mur infranchissable de contestation pour la poursuite de son action réformatrice.
Quand on voit que les Français lui ont reproché majoritairement
le départ de Nicolas Hulot du gouvernement et qu’ils lui reprochent tout aussi
majoritairement l’augmentation des taxes sur les produits pétroliers, on voit
bien que tout est sujet à s’en prendre au président de la république quel qu’il
soit (Sarkozy et Hollande en savent quelque chose…).
En ouvrant en grand la boite de Pandore, Emmanuel Macron révèle à la société française, ses irresponsabilités, ses incapacités et ses incohérences face aux challenges qu'elle ne peut pas refuser d'affronter indéfiniment.
Mais la méthode abrupte qu'il a adopté pour faire prendre conscience de l'urgence de ces challenges recèle également l'énorme danger de braquer les Français et d'aboutir à un immobilisme létal.
Reste que le pari d’Emmanuel Macron, démontrer que la démocratie
républicaine a encore un avenir et qu’elle peut être soutenue par une majorité
de la population au moment du retour en force du populisme et de l’extrémisme
et face à a médiocrité démagogique d’une grande partie du personnel politique, est juste.
Ce pari n’est absolument pas gagné d’avance (avis à ceux qui
auraient «oublié» les scores de l’extrême-gauche et de l’extrême-droite lors de
la dernière présidentielle ainsi que la situation dans certains pays
occidentaux).
Mais il ne l’est pas non plus quand on voit les
comportements irresponsables des partis clientélistes de droite et de gauche
qui constamment mettent de l’huile sur le feu, non pas à propos d’un quelconque
débat idéologique, simplement pour s’opposer afin d’exister ou ne pas
disparaître.
Que personne ne se trompe, ce pari est aussi celui de tous
les démocrates du monde entier qui ne se résignent pas à la montée des
extrêmes, des populismes et des clientélismes qui détruisent la démocratie
républicaine de l’intérieur pendant que les terroristes, les autocrates et les
dictateurs l’attaquent de l’extérieur.
Après, à chacun de prendre ses responsabilités vis-à-vis de
ce combat puis d’assumer ses choix.