samedi 10 novembre 2018

Actualités du Centre. Etats-Unis – La victoire des démocrates aux midterms est plus forte qu’initialement observée

l'âne, emblème du Parti démocrate
Contrairement aux propos mensongers de Donald Trump mais également aux commentaires de nombreux «spécialistes» et de la plupart des médias, la victoire du Parti démocrate aux élections de mi-mandat s’avère être beaucoup plus importante qu’ils ne l’ont affirmé.
Avec 7 à 9% d’électeurs en plus que les républicains, il y a bien eu une «vague bleue» (la couleur du Parti démocrate, le rouge étant celui du Parti républicain) avec au moins 52 millions d’électeurs (certains votes ne sont pas encore comptabilisés) qui se sont portés sur les candidats démocrates.
Et les démocrates sont au-dessus de la moyenne de sièges enlevés à leurs adversaires (29) lors d’une élection de midterms à la Chambre des représentants (30 avec une possibilité d’atteindre 35 puisque certains sièges sont encore en balance suite à des recomptages et à des écarts extrêmement faibles).
De même, le Parti démocrate a conquis de nombreux postes de gouverneurs d’Etat ainsi que la majorité dans plusieurs Congrès locaux.
Concernant le Sénat, les élections dans certains Etats sont encore indécises (en Arizona et en Floride, notamment) pour dire si les démocrates ont réellement perdu ou si on assiste à un statu quo.
Dans beaucoup d’Etats-clés pour la présidentielle de 2020 (on rappelle que les grands électeurs sont choisis Etat par Etat et non nationalement, ce qui a permis à Trump d’être élu alors qu’il a eu 3 millions de voix de moins qu’Hillary Clinton), les démocrates sont à nouveau majoritaires (comme la Pennsylvanie, le Michigan ou le Wisconsin, trois Etats qui avaient permis à Trump de l’emporter).
Enfin, il n’y a pas eu de «vague gauchiste», le Parti démocrate restant au centre-gauche avec des victoires emblématiques de l’aile centriste et de l’aile social-démocrate, voire socialiste (dans peu de cas).


Vues du Centre. «Je vous déclare la paix»

Par Aris de Hesselin & Alexandre Vatimbella

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Aris de Hesselin est un avocat international, centriste et un européen, défenseur d’une mondialisation humaniste. Ses propos sont les siens et non ceux du CREC.
Alexandre Vatimbella est directeur du CREC

liesse parisienne le 11 novembre 1918
Indécrottable défenseur de la paix, le centriste Aristide Briand pouvait déclarer aux anciens combattants français le 14 juin 1931:
«La France ne se diminue pas quand libre de toute visée impérialiste et ne servant que des idées de progrès et d'humanité, elle se dresse et dit à la face du monde: ‘Je vous déclare la paix’».
Mais celui qui fut un des principaux architectes du rapprochement franco-allemand de l’entre deux guerres et qui reçut en 1926 le Prix Nobel de la paix pour cela (il mourut en mars 1932 avant l’arrivée au pouvoir d’Hitler) était tout sauf un pacifiste béat.
Ainsi, il disait aussi:
«Il ne suffit pas d'avoir horreur de la guerre. Il faut savoir organiser contre elle les éléments de défense indispensables. Mon pays peut le faire sans avoir à abandonner une politique de paix.»
Et il ajoutait:
«Il importe essentiellement en politique internationale de ne jamais démunir son pays des moyens dont il peut avoir besoin, non pas seulement pour lui mais pour la communauté des nations solidaires.»
Demeurer prêt à la guerre pour garder la paix: cette évidence était au cœur de son combat humaniste et de sa volonté de «plus jamais ça» tout en reconnaissant la réalité d’un monde où les jours de guerre sont plus nombreux que ceux de paix.
Onze fois président du conseil et longtemps ministre des Affaires étrangères, celui qui fut baptisé le «pèlerin de la paix» n’était pas de ceux qui ne font que des beaux discours et ne prennent pas leurs responsabilités dans l’action.
Pour que cette paix soit durable, il savait qu’il fallait une Europe unie et il était parfaitement conscient que le traité de Versailles façonné par Georges Clémenceau – qui le haïssait – avait été une occasion manquée en ce sens.
Promoteur, à l’instar de Victor Hugo, des «Etats-Unis d’Europe», il parle de manière prémonitoire de «Communauté européenne» et estime «qu’entre des peuples qui sont géographiquement groupés comme les peuples d’Europe, il doit exister une sorte de lien fédéral; ces peuples doivent avoir à tout instant la possibilité d’entrer en contact, de discuter leurs intérêts, de prendre des résolutions communes, d’établir entre eux un lien de solidarité qui leur permette de faire face, au moment voulu, à des circonstances graves si elles venaient à naître. C’est ce lien que je voudrais m’efforcer d’établir.»
Aristide Briand savait également que la paix, pour être réelle, devait avoir un soubassement légal dans les relations internationales:
«Il s’agit de fonder la paix du monde sur un ordre légal, de faire une réalité de droit de cette solidarité internationale qui apparaît comme une réalité physique.»
Le fameux pacte Briand-Kellogg signé en 1928 par une soixantaine de pays mettait «la guerre hors-la-loi».
Ce sont des personnalités comme lui et d’autres qu’il nous faut aujourd’hui pour que cette «déclaration de paix» demeure une réalité en Europe depuis près de 80 ans (malgré quelques anicroches épouvantables de l’ex-Yougoslavie à l’Ukraine) et qu’elle s’étende enfin sur toute une planète encore ravagée par les conflits où les populations civiles sont les principales touchées comme en Syrie ou au Yémen, en République du Congo ou en Birmanie.
Les centristes, gardiens du legs de Briand, doivent être en première ligne en défendant ce pacifisme lucide, cette paix qui ne se construit pas sur des abandons et des compromissions avec ses ennemis qui sont souvent ceux également de la liberté et de la démocratie républicaine.
Au moment où l’on commémore le centenaire de l’armistice de 1918, où tant de gens crurent que la guerre était enfin et définitivement reléguée dans les poubelles de l’Histoire dans une exaltation extraordinaire, rappelons-nous le sacrifice de ces millions de gens qui ne servirent à rien puisque la Deuxième guerre mondiale éclata vingt ans après (les deux conflits mondiaux sont souvent groupés par certains historiens contemporains qui parlent d’une même grande guerre mondiale avec un armistice de deux décennies entre ses deux phases) et que nous en sommes toujours à comptabiliser les millions de morts qui jonchent les champs de bataille mais aussi les champs et les villes de civils depuis la capitulation de l’Allemagne et du Japon en 1945.
Oui, la paix mais pas à tout prix, notamment à celui qui fait que ses ennemis en profitent pour créer le chaos grâce à la naïveté de certains pacifistes.
Fragile comme la démocratie, la paix à l’instar de la liberté, se défend sans concession.

Aris de Hesselin
Alexandre Vatimbella


L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. Macron, révélateur des contradictions et des blocages de la société française

Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a toujours affirmé qu’il réformerait la France au risque de sa propre impopularité et qu’il dirait les choses comme il les pense au risque des polémiques.
Son objectif a toujours été et demeure de faire, selon ses dires, une «révolution» des comportements et de permettre au pays de (re)trouver une dynamique progressiste où, «en même temps» l’économie est libérée mais les solidarités renforcées afin que chacun puisse réaliser son projet personnel de vie dans une véritable méritocratie.
Pour cela, les réformes avaient clairement été indiquées dans leur succession expliquées (d’abord libérer l’économie puis implémenter des mesures sociales dans un juste équilibre).
De même, il estimait qu’il y avait des «vérités» à dire parce qu’il fallait s’attaquer aux blocages politiques et sociétaux.
Et, avec ce programme présidentiel et ce projet politique, Emmanuel Macron a été élu avec plus de 66% des voix.
Tout cela sont des faits.
Va-t-il parvenir à ses fins?
Il est trop tôt pour le dire mais ce qui est sûr, c’est qu’il fait globalement ce qu’il a dit qu’il ferait au risque de l’impopularité et des polémiques.
Bien entendu, n’étant pas Dieu, ni parfait, l’actuel président de la république a commis quelques impairs et maladresses dans son action, surtout dans son discours.
Mais, au-delà de l’accord ou non avec la politique menée, ce qui est particulièrement révélateur de cette période (où les populismes et les extrémismes montent en puissance), ce sont les réactions de la société à cette entreprise où Macron apparait comme le révélateur des contradictions, des blocages, des clientélismes, des irresponsabilités qui traversent le corps social et minent le lien social de la démocratie républicaine.
On savait les Français réformateurs en parole.
En acte, ils le sont quand cela touche… les autres!
Ce particularisme assez mesquin ressurgit lors de chaque réforme ou à chaque fois qu’il faut faire un effort, voire un sacrifice conjoncturel.
Il a peut-être et sans doute surestimé la capacité d’un peuple – qu’il soit français ou d’une autre nationalité – à prendre la mesure des défis à relever, surtout à les accepter dans un monde libertario-hédoniste du chacun pour soi, du tout, tout de suite et du sans contrainte pour soi avec la montée ô combien dangereuse d’une autonomie égocentrique irresponsable assistée irrespectueuse insatisfaite de l’individu.
De même, en voulant redonner de la «hauteur gaullienne» à la présidence, il n’a pas calculé à sa juste mesure les risques qu’il prenait.
Depuis le début du millénaire, la fonction est devenue celle qui cristallise contre elle tous les mécontentements, toutes les frustrations, tous les ressentiments, toutes les insatisfactions, toutes les exaspérations, toutes les irritations.
Et ce phénomène ne va qu’en s’accentuant quel que soit la personne qui se trouve à l’Elysée.
En se mettant en première ligne constamment, il n’est plus, souvent, qu’une sorte de pinata mexicaine où se défoulent, voire se déchaînent, les médias, les oppositions politiques et le bon peuple avec le danger réel d’un mur infranchissable de contestation pour la poursuite de son action réformatrice.
Quand on voit que les Français lui ont reproché majoritairement le départ de Nicolas Hulot du gouvernement et qu’ils lui reprochent tout aussi majoritairement l’augmentation des taxes sur les produits pétroliers, on voit bien que tout est sujet à s’en prendre au président de la république quel qu’il soit (Sarkozy et Hollande en savent quelque chose…).
En ouvrant en grand la boite de Pandore, Emmanuel Macron révèle à la société française, ses irresponsabilités, ses incapacités et ses incohérences face aux challenges qu'elle ne peut pas refuser d'affronter indéfiniment.
Mais la méthode abrupte qu'il a adopté pour faire prendre conscience de l'urgence de ces challenges recèle également l'énorme danger de braquer les Français et d'aboutir à un immobilisme létal.
Reste que le pari d’Emmanuel Macron, démontrer que la démocratie républicaine a encore un avenir et qu’elle peut être soutenue par une majorité de la population au moment du retour en force du populisme et de l’extrémisme et face à a médiocrité démagogique d’une grande partie du personnel politique, est juste.
Ce pari n’est absolument pas gagné d’avance (avis à ceux qui auraient «oublié» les scores de l’extrême-gauche et de l’extrême-droite lors de la dernière présidentielle ainsi que la situation dans certains pays occidentaux).
Mais il ne l’est pas non plus quand on voit les comportements irresponsables des partis clientélistes de droite et de gauche qui constamment mettent de l’huile sur le feu, non pas à propos d’un quelconque débat idéologique, simplement pour s’opposer afin d’exister ou ne pas disparaître.
Que personne ne se trompe, ce pari est aussi celui de tous les démocrates du monde entier qui ne se résignent pas à la montée des extrêmes, des populismes et des clientélismes qui détruisent la démocratie républicaine de l’intérieur pendant que les terroristes, les autocrates et les dictateurs l’attaquent de l’extérieur.
Après, à chacun de prendre ses responsabilités vis-à-vis de ce combat puis d’assumer ses choix.