jeudi 8 novembre 2018

Actualités du Centre. Bayrou: «Soumission ou souveraineté, c’est la vraie question historique» de l’Europe

François Bayrou
Lors d’une interview sur RTL, le centriste et président du MoDem,François Bayrou, évoquant les élections de mi-mandat aux Etats-Unis, a estimé que le défi crucial concernant l’avenir de l’Union européenne était soit l’affirmation de l’indépendance de sa souveraineté, soit sa soumission aux puissances extérieures au premier rang desquelles on trouve les Etats-Unis de Donald Trump et la Chine de Xi Jinping. Sans parler des menaces venues de Russie.

Extraits:

- La seule question qui se pose, c’est que nous voyons se développer une politique qui est ouvertement dans l’égoïsme de l’intérêt purement national que Trump l’imagine, sans se préoccuper du reste du monde, et au contraire, en biffant d’un trait de plume, un certain nombre d’engagements, qui étaient essentiels pour l’équilibre du monde. Et en face de cela, la seule question c’est: est-ce que l’Europe veut faire quelque chose ou bien, est-ce qu’elle accepte au contraire de devenir servile?
- (…) Il y a quelques semaines Donald Trump a décidé tout seul, unilatéralement, de sortit des accords sur l’Iran et d’imposer des sanctions à l’Iran. Que s’est-il passé? Les entreprises américaines ont suivi, c’est assez normal. Mais ce qui s’est passé de plus inquiétant, c’est que les plus grandes entreprises européennes, dont les gouvernements n’avaient pas pris cette décision, bien au contraire… Ce qu’il s’est passé de plus inquiétant, c’est que les plus grandes entreprises européennes dont les gouvernements n’avaient pas pris cette décision, bien au contraire – Peugeot, Total, Bouygues, on peut en trouver d’autres – ont été obligées de replier leurs valises, faire leurs valises et de quitter l’Iran en dépit des investissements très importants qu’elles y avaient fait. C’est une soumission imposée et donc c’est une soumission acceptée; et les emplois, tout ce que nous aurions pu acquérir dans une décision qui avait été librement prise par les gouvernements européens et par les directions de ces entreprises, tout cela a été balayé d’un trait de plume. Si l’on ne se rend pas compte que cette question – soumission ou indépendance, soumission ou souveraineté – c’est la vraie question historique du moment que nous sommes en train de vivre et cela dépend uniquement de nous. La seule question est de savoir que nous baissons les bras ou est-ce que, au contraire, nous affirmons être une puissance indépendante capable de décider pour elle-même face à ce défi – qui n’est qu’une part des défis de la planète. Il y en a beaucoup d’autres : la Chine, la Russie, etc.
- (…) Il y a eu un moment de l’Histoire, précisément dans les années 30, ce n’était pas une forme de chantage, où les démocraties, les pays libres, étaient devant une question simple: est-ce que l’on construit une capacité de défense face aux menaces du monde ou pas? Alors les menaces ont changé, on n’est pas sous le feu des canons – pour l’instant – mais la soumission dans laquelle les Etats européens, les pays européens, acceptent de se placer est aussi dangereuse, destructrice – en tout cas pour notre économie et notre fierté – qu’elle peut l’être, et donc ce n’est pas une forme de chantage.
- (…) Cette affaire du prix du carburant, elle a pris naissance en 2007. Il y a avait une élection présidentielle, et vous vous souviendrez que Nicolas Hulot a invité, convoqué –  je ne sais pas ce qu’il faut dire – tous les candidats à l’élection présidentielle – j’en étais – pour dire «On est en train de courir à l’abîme, en multipliant, en faisant en sorte que la consommation de pétrole ne baisse pas. Il faut qu’on prenne tous un engagement», et dire «Nous allons augmenter régulièrement le prix du pétrole pour que notre consommation soit raisonnable». Deuxièmement, 2009-2010, Nicolas Sarkozy a décidé de mettre en place cette augmentation progressive. Et ça a été confirmé par tous les gouvernements successifs en 2015, pour une raison profonde qui est que tout le monde s’accorde à dire que la consommation d’énergie fossile est pour l’humanité un danger et un risque.


Vue du Centre. Dans le monde de Trump, une défaite est donc une victoire…

Par Aris de Hesselin

Dans cette rubrique, nous publions les points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire progresser la pensée centriste.
Aris de Hesselin est un avocat international, centriste et un européen, défenseur d’une mondialisation humaniste. Ses propos sont les siens et non ceux du CREC.

Donald Trump
Dans le monde de Donald Trump une large défaite à la Chambre des représentants lors des élections de midterms est donc un «énorme succès» (son tweet: «Tremendous success tonight. Thank you to all!»).
Cette sémantique transformant un rejet majoritaire de la population américaine (le Sénat, lui, n’était renouvelable que par tiers et dans beaucoup d’Etats pro-Trump) serait risible si des journalistes et des commentateurs avaient abondé en son sens en particulier dans notre pays!
On se pince quand on voit certains gros titres comme celui du Figaro qui prétend que «Trump est en position de force pour 2020» alors que, comme je viens de le dire, son parti vient de perdre la Chambre des représentants et qu’une majorité des Américains a voté contre lui pour ces élections de midterms avant de sanctionner le Parti républicain lui-même.
On aurait aimé que le quotidien de plus en plus à droite (voir, par exemple sur les Etats-Unis, les reportages complaisants réalisés sur Steve Bannon, l’ex-conseiller d’extrême-droite de Trump) ait la même vision après la défaite de Barack Obama en 2010 lors de ces mêmes élections avec la perte de la majorité à la Chambre des représentants!
Les journalistes du Figaro parlaient alors d’une «machine politique menacée de complète paralysie» et d’un «sérieux revers» pour un président centriste rejeté par le peuple qui avait peu de chances de se faire réélire en 2012...
Le pire, sans doute, est que la rhétorique de Trump a joué dans les commentaires journalistiques.
En qualifiant sa défaite d’énorme succès, il a entraîné avec lui une partie de la presse qui l’a suivi comme mouton de panurge sur ce mensonge gros comme une maison.
Quant à l’«ancrage» de Trump dans le paysage politique américain qui serait sa principale victoire et son passeport pour un deuxième mandat, rappelons seulement que 62 millions d’électeurs ne s’évanouissent pas en un claquement de doigt ou deux ans de mandat, surtout quand vous êtes soutenu sans réserve par l’un des deux grands partis du pays.
Comme le rappelait Alexandre Vatimbella ici, Trump avec cette élection et celle de 2016, n’a jamais été majoritaire dans le pays, ce que nos fins observateurs oublient de mentionner…
Mais, donc, dans un déni propre à ceux qui n’aiment pas la démocratie (et aux ignorants qui parlent sans savoir), une défaite est une victoire…
Pour ces «experts» et ces «spécialistes», j’ai une autre affirmation trumpienne à leur soumettre.
Lors d’un meeting au Kansas, il a déclaré: «J’ai tenu plus de promesses que j’en avais faites».
Je leur laisse cogiter le sens et le fond de cette phrase…
Attention, il y a un piège!
Le même à peu de chose près sur la transformation d’une défaite en victoire.

Aris de Hesselin