Christophe Castaner (délégué général de
LREM, France), Guy
Verhofstadt (ex-Premier ministre, Belgique), Matteo Renzi (sénateur, ancien président du Conseil, Italie), Albert Rivera (président de
Ciudadanos, Espagne), Joseph
Muscat président du Parti travailliste et Premier ministre, Malte), Alexander Pechtold (chef politique des
Démocrates 66, Pays-Bas), Dacian
Ciolos(ancien commissaire européen, président du mouvement Roumanie ensemble,
ex-Premier ministre, Roumanie), tels sont les cosignataires prestigieux et
emblématiques d’une tribune intitulée «Réveillons l’Europe!» qui vient d’être publiée
dans plusieurs journaux européens.
Au-delà du texte (le lire ci-dessous), c’est
bien la signature de ces différentes personnalités qui est importante.
Voilà réunis, à quelques mois des élections
au Parlement européen de mai 2019, sept leaders centristes dans une démarche
qui pourrait devenir bientôt ce fameux rassemblement des progressistes voulu et
souhaité pour ce scrutin par Emmanuel Macron pour faire face aux populistes
nationalistes anti-européens et que Guy Verhofstadt, responsable de l’ADLE (Alliance
des démocrates et des libéraux pour l’Europe) qui regroupe l’ensemble
des partis centristes européens (dont l’UDI, le MoDem et le Mouvement radical) a
appelé de ses vœux récemment en répondant favorablement à la proposition du
président français.
Quoi qu’il en soit, ce texte est une première victoire pour
Emmanuel Macron dans son combat pour une Union européenne approfondie et plus
forte.
Texte de la tribune:
En 1918, l’Europe sortait exsangue d’une guerre qui avait
saigné ses peuples et ne réglait rien des tensions qui la minaient. En 1939, un
nouveau conflit éclatait sur fond de crise et de montée des fascismes. Il
fallut des décennies d’efforts et de compromis pour qu’une nouvelle génération
puisse enfin proposer aux Européens ce que les dirigeants somnambules de deux
guerres leur avaient refusé: une Europe de paix, de prospérité et de liberté.
Un siècle plus tard, alors que notre continent fait de
nouveau face à la division et à l’immobilisme, nous refusons d’être une
génération endormie. Il faut agir maintenant, ou le projet européen
s’essoufflera. Pire: il pourrait être asphyxié par des dirigeants populistes
pour qui l’Union est une anomalie de l’Histoire qu’il convient de déconstruire.
A huit mois d’élections qui permettront aux citoyens de 27 pays
de choisir l’Europe qu’ils veulent, nous lançons donc un appel: nous proposons
de refonder l’Europe pour enfin répondre aux attentes des citoyens et renouer
avec la promesse européenne.
L’Europe actuelle paraît trop souvent dépassée par les défis
auxquels elle fait face, qu’ils soient écologiques, économiques ou migratoires.
Elle est dépassée par les attentes des citoyens qui exigent moins de normes et
plus d’action. Elle est dépassée par des engagements qu’elle ne peut plus tenir
faute de vision commune et d’un fonctionnement performant.
La promesse européenne n’est pourtant pas perdue: elle
sommeille. Les avancées récentes en matière de travail détaché et de défense
montrent que l’Europe progresse quand la volonté politique rallie les Européens
autour d’un projet clair et ambitieux. Sur la taxation numérique nous sommes au
début du processus mais nous savons qu’une solution européenne est la seule
possible. Le discours de la Sorbonne du président Macron, prononcé il y a un
an, va dans ce sens: il nous appartient maintenant d’en faire une réalité de
tous les jours.
Il ne s’agit pas seulement de dépasser pour de bon les
clivages qui animent la politique européenne depuis quarante ans et qui ont
mené à l’impasse actuelle – ou de rappeler avec force que tous les Orbán, les
Le Pen, les Salvini d’Europe ne savent rien faire d’autre qu’incriminer l’Union
de tous les maux sans rien proposer de constructif, sans même se mettre
d’accord sur une réponse. Nous devons proposer.
C’est pourquoi notre projet de refondation est clair. Plutôt
que les menaces de «nettoyage de masse» de M. Salvini, de «se débarrasser de
l’islam» de l’AfD ou d’«en finir avec l’Europe» de Mme Le Pen, nous revendiquons
fièrement les valeurs fondatrices de paix, de liberté, de prospérité, de
solidarité. Plutôt que les appels à museler la justice et les oppositions, nous
revendiquons le respect strict de l’Etat de droit et des institutions
démocratiques. Plutôt qu’un continent divisé et affaibli maintenu à la merci
des autres grandes puissances du monde, nous revendiquons une Europe souveraine
qui agit avec force partout où l’action de pays isolés est impuissante : la
politique économique et monétaire, la sécurité et la défense, la transition
écologique et agricole, la politique sociale, l’immigration et l’intégration,
le changement numérique.
C’est également pourquoi notre méthode est claire. Nous
sommes résolus à ne rien nous interdire. Nous sommes prêts à réformer les
traités si la refondation l’exige. Nous sommes décidés à avancer en dépit des
blocages, chacun devant aller à son rythme. Nous voulons une Europe plus forte,
ensemble, donc nous resterons ouverts à ceux qui voudront nous rejoindre sur le
parcours. Nous sommes résolus à dépasser les structures partisanes existantes
si celles-ci agissent comme des obstacles. Nous nous engageons à faire porter
cette refondation par des hommes et des femmes représentatifs de leur pays, de
l’Ouest comme de l’Est, du Nord comme du Sud, passionnés d’Europe, déterminés à
s’investir dans ce projet historique – là où les autres se contentent d’incantations
ou de faire de la figuration. Il nous reste ainsi huit mois pour convaincre,
dans chacun de nos pays, que l’Europe mérite ce nouveau projet, et que les
citoyens méritent cette nouvelle Europe. Huit mois, c’est le temps que nous
donnons pour proposer la voie du sursaut européen.