vendredi 29 juin 2018

L’Humeur du Centriste. Si Macron a séparé les nouilles du gratin, Borloo, lui, aurait du mettre de l’eau dans son vin…

Jean-Louis Borloo & Emmanuel Macron
Or donc, le citoyen Borloo – il insiste bien «je ne suis pas un acteur de la vie politique, j'ai quitté la vie politique, ce qui m'autorise à faire de temps en temps des alertes» – ne serait pas content de la politique du président Macron.
Or donc, cul sec, le citoyen Borloo s’est répandu en critiques sur l’action du président Macron lors d’une réunion dans sa bonne ville de Valenciennes malencontreusement enregistrée – oups! – et diffusée un peu partout.

Ecoutons-le:

«Moi, mon sentiment c'est qu'on est en train de remplacer le vieux monde des solidarités par le jeune monde des abandons de ceux qui ont besoin de la solidarité, en d'autres termes, il faut faire attention à ce que notre pays ne se retrouve pas dans la situation désagréable où le gratin se sépare des nouilles (…) C'est le problème d'une monarchie qui en fait n'a plus de moyens, et ce qui me dérange c'est que les quelques moyens qu'elle a, elle a décidé d'arbitrer pour permettre à ce qui courent le plus vite de courir de plus en plus vite. (…) Cette vision de la société, je la trouve inefficace et dangereuse».

C’est son droit le plus strict de citoyen et sans doute a-t-il quelques arguments à faire valoir et que j’attends avec impatience de la part d’un homme aux convictions de centre-droit, membre inamovible des gouvernements Chirac et Sarkozy et ayant fait fortune en tant qu’avocat d’affaires.

Mais le problème est que le citoyen Borloo disait exactement le contraire il y a peu, notamment lors d’un entretien sur Radio classique, contredisant même ceux qui voulaient qu’il soit en pétard contre ledit président Macron lorsque celui-ci avait semblé mettre son plan banlieue au placard et peut-être même aux oubliettes.

Ecoutons-le:

«J'observe que dans le discours (de Macron) un certain nombre d'éléments (de son rapport) étaient présents et que le président de la République a donné rendez-vous en juillet (…) Je n'ai aucun problème avec le président, vous n'avez pas de problèmes avec quelqu'un qui vous confie une mission sur un sujet aussi compliqué. Quand le Président de la république demande à quelqu'un un rapport pour contribuer à des prises de décision, le Président de la république est souverain. Ce n'est pas à celui qui remet le rapport, construit avec l'ensemble des acteurs, ses ministres, les régions, les départements, les villes, de faire le moindre commentaire».

Mais voilà-t-il pas que juste après ce revirement, le citoyen Borloo intervient tout de go dans Le Figaro pour dire qu’il ne visait pas le président Macron mais les dérives politiques de notre époque, comme si il n’y avait jamais participé…

Ecoutons-le:

«Ce n'était pas un meeting. J'étais dans ma bonne ville de Valenciennes, invité dans une réunion sur la rénovation urbaine où nous avons parlé de l'Afrique et des migrants. C'était une vision globale sur les élites (…) On ne peut pas aborder la question des migrants sans évoquer le sujet de la relation Europe/Afrique. On peut être interrogatif sur la façon dont cette question est gérée! Je maintiens: attention à ce que les élites européennes ne se séparent pas peuples européens (…) Si certains l'ont pris pour eux, ce n'était pas mon propos qui ne s'adressait pas au gouvernement ou au président. Ça n'avait rien à voir avec le président! Si on essaie de faire le lien, c'est juste ridicule (…). On peut sortir une phrase d'une intervention d'une heure! Mais j'ai pris la précaution de dire que je ne parlais pas de la situation française. Je peux avoir une vision globale sans que l'on me mêle aux petites phrases du jour».

Puis, se ravisant encore, le citoyen Borloo dit sur franceinfo, que, quand même, c’était bien un peu, beaucoup, passionnément contre ce que représente le président Macron, sa politique et les élites qui le suivent qu’il a parlé et qu’il en avait gros sur le cœur vis-à-vis de celui qui n’a pas voulu de son plan pour les banlieues – «c'était un moment symbolique, le rendez-vous avec le chef de la nation a été raté».

Tout cette emberlificotage borlooesque est un épisode politicien peu reluisant, teinté de frustration revancharde dont tous les opposants du président Macron se sont emparé, ce que le citoyen Borloo ne pouvait ignorer (on a beau n’être plus qu’un citoyen lambda, quand on a 30 ans de politique derrière soit, on sait jouer le jeu politicien).

De gauche et de droite, le voilà avec beaucoup de nouveaux amis, ce qui le consolera d’avoir perdu celui de l’Elysée.

Déjà, Valérie Pécresse et Xavier Bertrand l’ont adoubé...

Deux remarques, tout de même, sur le citoyen Borloo dans cette affaire.

La première est que pour un ex-avocat d’affaires parmi les mieux payés du monde (spécialisé dans les entreprises en difficultés) et conseil de Bernard Tapie, sa descente sur les élites est, ad minima, paradoxale.

La deuxième, surtout, est une question simple: le citoyen Borloo, ex-avocat d’entreprises, aurait-il oublié que pour redistribuer la richesse il faut d’abord la créer, crédo centriste s’il en est un qui va à l’encontre de celui de gauche «redistribuons même si l’on ne crée pas de richesse» et celui de la droite «celui qui a créé la richesse n’a pas d’obligation de la redistribuer».

Enfin, un constat:

Si le président Macron a séparé les nouilles du gratin, le citoyen Borloo, lui, a oublié de mettre de l’eau dans son vin.



Centristement votre



Le Centriste