S’il
y a une constante chez Jean-Christophe Lagarde et une majorité de membres de
l’UDI, la formation qu’il préside, c’est cette volonté de faire progresser
l’intégration européenne et d’aller vers une fédéralisme de l’UE.
Il
la redit une nouvelle fois lors d’un entretien sur LCI dans lequel il a estimé
positif la décision de la France et de l’Allemagne, lors de la dernière
rencontre entre Emmanuel Macron et Angela Merkel, de bientôt doter la zone euro
d’un budget, ce que refusait cette dernière mais qui semble désormais d’accord
d’avancer sur une Europe plus unie face à la montée dangereuse des populismes
et des extrémismes, notamment dans son pays où une crise grave se prépare
peut-être sur la politique d’immigration, autre thème abordé lors de cette
réunion.
Dans
ce cadre l’UDI s’est réunie samedi afin de lancer l’élaboration de son
programme pour les élections européennes de 2019 (voir ci-dessous la tribune
publiée par Lagarde sur le site Huffington post).
Au cours de celle-ci, son président a déclaré que «la
conviction se dessine en moi que l'Europe est en train de mourir (parce qu') on
n'a pas voulu construire l'Europe» ajoutant, «Nous avons besoin de changer
complètement l'Europe, de porter ce message».
Le
projet de l’UDI sera donc fédéraliste et sera proposé à d’éventuels partis qui
pourraient avec la formation centriste, aller au combat électoral sur une liste
unique.
On
pense évidemment à la formation de droite libérale Agir.
Mais
cela ne fera pas grand monde et surtout pas beaucoup de voix (2% dans les
sondages) et donc pas d’élus.
Et
si Lagarde affirme encore qu’il est prêt à aller seul à ce combat, il est
beaucoup plus, probable qu’il tente de négocier sa place, soit sur la liste
LREM-MoDem (les responsables des deux partis ont déjà déclaré qu’ils iraient
ensemble, empêchant l’UDI de s’allier uniquement avec le MoDem comme lors du
précédent scrutin), soit sur une liste éventuelle de la droite libérale.
On
a parlé d’Agir mais il est possible qu’avec la crise ouverte de LR, il y ait le
départ de toute la frange pro-européenne du parti et la constitution d’une
liste autour de Valérie Pécresse et d’autres leaders de cette mouvance.
Dès
lors, l’UDI pourrait proposer une union.
Par
ailleurs, Jean-Christophe Lagarde a rappelé fort opportunément que s’il n’y
avait pas de politique migratoire de l’Union européenne c’est parce que
certains gouvernement l’avaient refusé et que les plus hostiles à celle-ci
étaient les partis d’extrême-droite et populistes, ceux qui reprochent,
justement, à l’Europe de ne rien faire alors même qu’elle n’a aucun mandat pour
agir…
La
tribune de Jean-Christophe Lagarde sur le site internet Huffington post:
Nous poursuivrons le
dialogue avec tous ceux qui partagent notre diagnostic et nos ambitions.
Après l’effondrement du Mur de Berlin et de l’ensemble du
bloc soviétique, l’Europe a raté la chance historique qui était la sienne de
donner un nouvel élan à la construction européenne. L’Europe qui s’est relevée
des guerres et de la barbarie de la première moitié du XX° siècle en inventant
un modèle unique de coopération entre nations, nous apporté paix et croissance.
Mais elle n’a pas su retrouver le même souffle et saisir l’occasion de devenir
la puissance qu’elle devrait être. Elle s’est rabougrie dans une vision administrative
et pusillanime de ses missions.
Par manque de vision, elle accompagne et subit, aujourd’hui,
une mondialisation qui nous impose des intérêts et des modèles économiques et
sociaux aux antipodes de ceux que l’humanisme européen a fait émerger au cours
des siècles.
Tandis que les populistes de tous bords trouvent de plus en
plus d’écho auprès de nos concitoyens déboussolés, la responsabilité des
gouvernements nationaux, au cours des dernières décennies, est immense. Car
plus les voix des europhobes portent haut, moins les dirigeants nationaux
défendent l’étendard européen. Chaque fois qu’une mesure impopulaire est prise,
ils brandissent l’Europe comme bouc-émissaire, pour s’exonérer de leurs propres
responsabilités. Aucun d’entre eux n’a été capable de fixer des perspectives
fédératrices.
De petites lâchetés en grands renoncements, le plus beau
projet politique porté sur notre continent se détisse sous nos yeux.
Nos concitoyens ont fini par croire que nos échecs collectifs
étaient imputables à «trop d’Europe» alors même que c’est parce qu’il n’y avait
«pas assez d’Europe» que nous avons échoué.
Dans un monde où l’Union européenne représente moins d’un
quart de l’économie mondiale et où la France elle-même ne pèse plus que 3%,
dans un monde de plus en plus incertain où les alliances se font et se défont à
une vitesse inédite, dans un monde où les alliés d’hier deviennent plus
incertains d’aujourd’hui, comment notre pays pourrait peser seul dans les
échanges mondiaux, résister aux diktats économiques des nouvelles puissances,
assurer son indépendance énergétique, lutter contre les menaces qui pèse sur
nous?
La question qui nous est posée aujourd’hui n’est pas de
savoir si nous risquons de perdre notre souveraineté nationale en mutualisant à
l’échelle de l’Union européenne les compétences que nous ne savons plus exercer
efficacement seuls. La question est de prendre conscience que nous avons déjà
perdu beaucoup de nos souverainetés vis-à-vis des autres grandes puissances
mondiales en n’acceptant pas de nous fédérer.
La première mission de l’Europe, aujourd’hui, doit être de
préserver nos souverainetés encore existantes et de reconstruire celles que
nous avons perdues dans le but de défendre nos modes de vie.
Dans un monde qui ne fait plus cas des valeurs humanistes et
universalistes que la civilisation européenne a façonnées, il en va de la
survie de nos modèles de société.
Dans la droite ligne du chemin tracé par Valéry Giscard
d’Estaing, nous devons créer deux cercles bien distincts: «une Europe Puissance»
fédérée par un socle de valeurs communes et par des partages de souveraineté et
une «Europe géographique», un espace de libre-échange que nous connaissons mais
qui devra harmoniser ses règles de concurrence interne afin d’en garantir la
loyauté.
Cette «Europe Puissance» que nous voulons bâtir devra
s’organiser autour de quelques missions stratégiques:
- Un Ministère Economique Fédéral (MEF)
Ce ministère planifiera dans la zone euro des stratégies
industrielles, commerciales, de recherche, d’innovation et énergétiques
communes parce qu’il n’y a qu’en étant à l’avant-garde que l’Europe pourra
retrouver son rang et préservera sa souveraineté face aux grandes puissances.
- Un véritable Parquet Européen (PE) et une Police Fédérale
Européenne (PFE)
Ils seront habilités à lutter contre le terrorisme et contre
les grands réseaux criminels qui profitent des frontières pour prospérer.
- Un Ministère Européen des Migrations (MEM)
Doté d’une administration fédérale de garde-côtes et de
garde-frontières ayant des moyens renforcés, ce ministère harmonisera le droit
d’asile à l’échelle européenne avec des critères d’accueil cohérents et précis.
Chaque pays fixera tous les ans le nombre et la typologie des étrangers qu’il
souhaite recevoir. Le MEM sera chargé de faire respecter ces règles et
d’instruire les demandes dans les pays de départs à partir de centres d’accueil
situés hors de l’Union ;
- La construction d’une défense européenne commune
Elle doit être bâtie sur une autonomie stratégique,
technologique, industrielle et une coopération opérationnelle au sein de
l’OTAN, car les évolutions du monde démontrent, mois après mois, que l’Europe
ne doit plus dépendre à ce point des Etats-Unis qui sont devenus très
imprévisibles ;
- Une Europe plus verte
Il s’agit de faire de la politique énergétique commune un
nouveau pilier pour garantir notre souveraineté énergétique, tout en assurant
la solidarité entre Etats européens et en faisant de la transition énergétique
un relais de croissance et un facteur d’indépendance ;
- La relance d’une nouvelle PAC
Afin que la PAC réponde à des objectifs fondamentaux:
assurer la souveraineté alimentaire en étant capable de nourrir le continent et
d’exporter ses productions par une industrie agroalimentaire durable et
performante tout en garantissant la sécurité et la qualité alimentaires. Parce
que les agriculteurs assument ces missions vitales, un revenu doit leur être
garanti.
- Un corridor fiscal
Sur le modèle du serpent monétaire européen, créer un
corridor fiscal fixant des minima et des maxima que les taux d’imposition
nationaux des entreprises devront respecter, avec l’objectif de les rapprocher
suffisamment en dix ans. Sur le même modèle, nous voulons un corridor social
pour rapprocher les droits sociaux afin d’éviter le dumping entre Etats
européens. Le dumping social et fiscal que nous constatons aujourd’hui est une
violation flagrante de l’esprit même de solidarité sur lequel l’Union s’est
construite ;
- Le transfert de 2 points de TVA vers l’Europe
Compensé par la baisse des contributions des États (donc
neutre pour le contribuable et les États), afin que l’Union européenne ait des
ressources propres leur permettant de sortir des logiques égoïstes des Etats membres.
La mise en place d’une taxe sur les mouvements financiers et sur les GAFA pour
financer notamment les investissements structurants, le droit à Erasmus pour
tous les jeunes et la nouvelle PAC;
- Bâtir une co-croissance entre l’Europe et l’Afrique
Parce que nous sommes les seuls voisins de ce continent qui
représente autant une formidable chance économique de développement commun pour
l’Europe qu’un risque majeur si nous n’accompagnons les mutations de l’Afrique
parallèlement à son explosion démographique.
L’UDI est la seule famille politique française à porter avec
constance et sans ambiguïté le projet fédéraliste européen.
Lorsque les autres formations politiques majeures baissent
pavillon, face aux doutes de nos concitoyens, c’est à chaque fois notre famille
qui relève l’étendard européen et porte ce message pour lui redonner du
souffle. C’est encore ce que nous ferons en 2019.
C’est l’une de nos plus impérieuses missions. Il est de
notre responsabilité de porter haut ce message d’une Europe Fédérée qui est
notre dernier rempart pour protéger nos souverainetés et nos modes de vie face
au reste du monde.
Nous le ferons, tout au long des douze prochains mois. Nous
poursuivrons le dialogue avec tous ceux qui partagent notre diagnostic et nos
ambitions. Parce qu’ils sont singuliers, ces valeurs et ce projet devront être
portés par nos candidats lors des élections européennes à venir et nous avons
la volonté de rassembler autour de cette vision ambitieuse de l’Europe.