Jean-Christophe Lagarde |
Jean-Christophe
Lagarde, le président de l’UDI veut absolument convaincre les médias et les
Français que son parti peut présenter une liste autonome aux prochaines
élections européennes de 2019.
Et
cela alors même que les sondages créditent une telle liste de 2% des intentions
de vote (et donc d’aucun élu) mais que le parti centriste n’est même pas sûr d’exister
encore lors de cette échéance.
Rappelons
que les députés Les centristes, parti présidé par Hervé Morin, encore affiliés
au groupe UDI et Agir devraient s’en aller tout comme certains élus radicaux.
Tous
sont pour l’instant comptabilisés dans l’UDI.
Cette
affirmation d’une liste indépendante aux européennes doit néanmoins être
relativisée tant les promesses de Lagarde dans ce domaine ont souvent été
contredites par ses actes.
N’oublions
pas, ainsi, qu’il s’était fait élire à la présidence de l’UDI sur la promesse d’un
candidat du parti à la présidentielle de 2017.
Une
promesse qui s’était transformée en un soutien à François Fillon…
Voici l’interview donnée au quotidien l’Opinion dans lequel
il dévoile les ambitions de l’UDI:
- L’UDI a-t-elle, sur
l’Europe, une voix différente de celle d’Emmanuel Macron?
Oui. Même si nous avons clairement dit que nous approuvions ses
discours de la Sorbonne et d’Athènes, cela n’épuise pas le sujet européen.
Aujourd’hui, l’Europe est à la croisée des chemins. Soit elle se construit en
vrai, soit elle se condamne à disparaître. C’est pour cela que nous voulons
porter le projet fédéraliste européen. On reproche à l’Europe ses
dysfonctionnements qui sont réels. On oublie que là où elle échoue, c’est parce
qu’on ne lui a pas confié les clés ou qu’on l’a fait seulement à moitié. C’est
pourquoi nous voulons défendre une profonde transformation de l’Union
européenne.
-Quelle serait-elle?
Elle doit continuer à permettre les échanges intérieurs mais
il faut abandonner le culte ultralibéral qui pervertit l’Europe depuis la chute
du Mur de Berlin. Elle doit cesser de mettre en concurrence nos salariés entre
eux et permettre de retrouver notre souveraineté face aux Etats-Unis, la Chine,
la Russie ou aux GAFA. Si nous continuons comme cela, nous nous condamnons à
devenir leur colonie. L’Europe doit devenir une Europe puissance. Derrière la
défense de nos intérêts économiques, il y a celle de notre mode de vie: notre
idée de la place de l’homme dans la société, l’importance de la concurrence et
de la solidarité, la capacité de conduire l’aménagement du territoire, la
défense de l’environnement ou encore le développement de l’Afrique car les 2,5
milliards d’Africains qui se trouveront de l’autre côté de la Méditerranée dans
vingt-cinq ans seront soit de formidables clients, soit un danger qui nous
submergera… Il faut donc aller plus loin que ce dit Emmanuel Macron
aujourd’hui. Celui-ci est dans une situation particulière. Même s’il est le
Président le plus européen depuis Valéry Giscard d’Estaing, il a logiquement
des limites liées aux contraintes du pouvoir. Sa stratégie européenne, à ce
jour, a été mise en échec. Ce qui s’est passé en Italie, en Autriche, la déstabilisation
d’Angela Merkel l’ont placé dans un certain isolement. Puisqu’il y a blocage au
niveau des chefs d’Etat, c’est à travers les élections européennes que nous
devons porter le projet d’une Europe qui soit une puissance protégeant nos
modes de vies, nos valeurs.
- Le discours semble
bien rodé. Cela veut dire que l’UDI s’apprête à présenter une liste sous ses
propres couleurs?
L’UDI considère que beaucoup ont pris le problème à
l’envers. A un an de l’échéance, on parle de tactique. Qui doit se présenter
avec qui? Nous nous voulons d’abord parler du projet. C’est ce que nous ferons
le 23 juin. J’ai dit lors du congrès de l’UDI en février dernier que nous étions
prêts à le porter seul. Mais si d’autres sont d’accord avec notre ambition
fédéraliste assumée, comme sur la façon de la porter au sein du Parlement
européen, nous pourrons discuter avec eux. Il y a évidemment des gens auxquels
nous sommes très clairement étrangers: Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen,
Laurent Wauquiez. Il y en a d’autres avec qui nous pouvons regarder si nous
partageons le projet, LREM fait partie de ceux-là. Le 23 juin, nous
accueillerons d’ailleurs des personnalités extérieures à l’UDI pour débattre de
nos visions. Cet automne, nos fédérations organiseront des débats dans tous les
départements. Ceux qui critiquent l’Europe y seront aussi les bienvenus. La
campagne électorale ne commencera qu’en janvier. Nous ferons à ce moment-là le
choix de partir seuls ou avec d’autres partageant nos idées.
- Emmanuel Macron
défend, lui, l’idée d’une grande liste rassemblant tous les Européens. Vous
pourriez donc ne pas en être?
Pour faire quoi ? Pour porter quel projet ? Avec qui demain
? Pour nous, c’est très clair: nous sommes membres de l’Alliance des démocrates
et des libéraux pour l’Europe (ADLE). Les députés européens UDI y siégeront.
Aujourd’hui, il semble qu’après les élections européennes, le PPE n’aura pas la
majorité. L’ADLE pourrait construire une alliance avec lui pour transformer
l’Europe. D’ici là, cela n’empêche pas que d’autres forces politiques, comme La
République en marche en France ou d’autres partis de centre gauche ailleurs en
Europe, rejoignent ou élargissent l’ADLE. L’élargir oui, le dissoudre non et
d’ailleurs dans quoi? Le 28 juin, je serai à Bruxelles pour participer à la
réunion des chefs de parti membres de l’ADLE (sept sont chefs de gouvernement)
pour discuter de notre stratégie européenne globale. J’ajoute un point. S’il y
avait une grande liste comme celle-là, ma crainte c’est que les extrémistes
français cherchent à transformer les européennes en référendum sur la politique
nationale d’Emmanuel Macron. On peut comprendre sa volonté de rassembler les
pro-Europe mais prenons garde à ce que les européennes ne soient pas dévoyées
par la politique nationale.
- En cas de liste
séparée, pourriez-vous être tête de liste ?
L’UDI a les moyens de porter son propre projet et sa propre
liste. C’est un parti désormais unifié, apaisé et libéré. Nous n’avons plus de
problème financier. Oui, si nous y allons seuls, c’est moi qui conduirai la
liste.
- L’UDI se
situe-t-elle aujourd’hui dans la majorité ?
C’est un parti libre qui se trouve dans l’opposition car
nous avons été élus contre les candidats d’Emmanuel Macron. En revanche, nous
souhaitons la réussite de ce quinquennat car s’il échoue, nous en paierons tous
les pots cassés. Il n’est pas question d’être à La République en marche, mais
nous pourrions travailler avec eux. Nous refusons de tomber dans la critique
systématique. J’exerce le droit d’inventaire chaque jour, sans attendre la fin
du quinquennat. Je soutiens la politique éducative d’Emmanuel Macron, sa
réforme de la SNCF ou du travail, sa politique européenne… En revanche, je
regrette l’énorme erreur qu’il a commise sur les banlieues. En n’envoyant pas
un signal d’égalité des chances aux quartiers populaires, il a fait sa première
grande faute politique. La question est: Emmanuel Macron sera-t-il le premier président
capable d’élargir sa majorité en acceptant des différences? C’est le défi qui
est devant lui.