Emmanuel
Macron a tranché en matière de réforme constitutionnelle et a préféré caresser
dans le sens du poil le président du Sénat et membre de LR, Gérard Larcher,
plutôt que de contenter les centristes, en particulier ses alliés du Mouvement
démocrate en particulier à propos de la proportionnelle.
Le
Président de la république a de fait rompu le pacte qu’il avait scellé avec
François Bayrou lors de la campagne présidentielle de 2017 et qui devait
garantir la mise en place d’une dose de proportionnelle conséquente.
Ainsi
le projet annoncé officiellement par la Premier ministre, Edouard Philippe, est
bien en-deçà de ce qu’espérait le président du MoDem mais également tous les
centristes en matière de proportionnelle lors des élections législatives.
En
effet, le taux retenu est de 15% de députés élus de cette manière alors que les
centristes avaient fixé la barre à 25% avec une limite de 20% à ne pas franchir
vers le bas pour l’UDI.
Voici les autres annonces faites lors de son discours.
Le projet:
- «Conforte l’indépendance de nos juridictions avec le
renforcement des pouvoirs du Conseil supérieur de la magistrature pour la
nomination et l’exercice du pouvoir disciplinaire des magistrats du parquet ;
il organise également la fin de la présence de droit des anciens Présidents de
la République au Conseil constitutionnel.»
- «Modernise la procédure de mise en cause de la
responsabilité pénale des Ministres pour les faits commis dans l’exercice de
leurs fonctions, procédure qui sera désormais du ressort de la Cour d’appel de
Paris et non plus de la Cour de Justice de la République, qui sera supprimée. Sur
la proposition du Gouvernement et avec l’approbation de l’ensemble des groupes
parlementaires, un filtre sera toutefois conservé pour que la responsabilité
des ministres ne soit engagée qu’à bon escient.»
- «Procède à une transformation profonde du Conseil
économique social et environnemental, qui deviendra une chambre de la société
civile, chargée, avec un nombre de membres réduit de moitié, d’organiser les
consultations des citoyens et des experts sur les projets d’avenir pour notre
pays.»
- «Renforce l’efficacité de la procédure législative et
l’effectivité du contrôle parlementaire: le Gouvernement a pris en compte
l’opposition du Parlement à l’idée d’un contingentement des amendements; cette
disposition a donc été retirée, mais les présidents des assemblées ont convenu
qu’il était nécessaire de limiter les amendements sans portée normative, sans
lien direct avec le texte ou qui ne seraient pas du domaine de la loi.
Sans revenir sur la réforme de 2008, qui a défini un
équilibre entre une semaine de contrôle, une semaine d’initiative législative
parlementaire et deux semaines d’initiative législative gouvernementale, les
projets de texte les plus importants ou urgents pourront bénéficier d’une
inscription prioritaire à l’ordre du jour.
Par ailleurs, la procédure sera accélérée après la
commission mixte paritaire, même si la nouvelle lecture au Sénat sera
maintenue.
Enfin, sur le modèle de ce qui se pratique au Sénat, la
discussion en séance pourra être focalisée sur les points principaux, grâce à
un meilleur travail en commission.
L’évaluation des lois sera plus systématique, et, pendant
les semaines de contrôle, les parlementaires pourront procéder aux corrections
ou aux simplifications des lois faisant l’objet de l’évaluation ;
Le vote du budget sera plus rapide (50 jours au lieu de 70
jours) mais un temps plus long sera dédié chaque printemps à l’évaluation des
politiques publiques et au contrôle de l’exécution du budget par les ministres.
- Donne «la capacité des collectivités locales de métropole et d’outre-mer d’adapter elles-mêmes les règles qui régissent leurs domaines de compétence à la réalité de leur territoire. C’est un pacte girondin que nous proposons aux territoires, en suivant les recommandations du Conseil d’Etat. C’est aussi un gage d’efficacité et une façon de réformer sans céder à l’esprit de système.»
- Donne «la capacité des collectivités locales de métropole et d’outre-mer d’adapter elles-mêmes les règles qui régissent leurs domaines de compétence à la réalité de leur territoire. C’est un pacte girondin que nous proposons aux territoires, en suivant les recommandations du Conseil d’Etat. C’est aussi un gage d’efficacité et une façon de réformer sans céder à l’esprit de système.»
- Donne à «la Corse (…) sa place dans notre Constitution, ce
qui permettra d’adapter les lois de la République aux spécificités insulaires,
mais sous le contrôle du Parlement.»
- Inscrit «l’impératif de lutte contre le changement
climatique à l’article 34, qui définit le domaine de la loi. Le Parlement
prendra ainsi sa part dans ce défi majeur du siècle.»
- Met en place un «Service national universel (…)pour
valoriser l’engagement des jeunes au service de la nation».
- Met en place «une réduction de 30% du nombre de députés et
de sénateurs dans des conditions qui garantissent la représentation de tous les
départements et territoires».
- Introduit «une dose de représentation proportionnelle aux
élections législatives pour 15% des sièges de députés à pourvoir.
- Interdit le «cumul des mandats dans le temps, au-delà de
trois mandats identiques, complets et consécutifs, sauf pour les maires des
communes de moins de 9000 habitants».
La réforme sera divisée en trois lois:
- une révision constitutionnelle (réforme du Conseil
économique et social, du Conseil supérieur de la magistrature, suppression de
la Cour de justice, réforme du travail parlementaire, notamment);
- un projet de loi organique (baisse du nombre de
parlementaires, non-cumul dans le temps);
- un projet de loi ordinaire (introduction d’une dose de proportionnelle
aux législatives, mise en place d’une nouvelle carte électorale).
Edouard Philippe estime que «ces textes contribueront à
rénover profondément la vie politique et parlementaire dans un triple souci de
responsabilité, de représentativité et d’efficacité».
Le
délégué général de La république en marche, Christophe Castaner a emboîté le
pas du Premier ministre en estimant que «cette réforme porte l’ambition d’une
V° République renouvelée, moderne, répondant aux exigences de notre temps» et
constitue «une première étape du retour de la confiance de nos concitoyens dans
la vie politique».
C’est également le cas du Président de l’Assemblée
nationale, François de Rugy mais avec quelques nuances puisqu’il «souhaite» que
l’examen du projet «soit l'occasion d'enrichir le texte, notamment pour
améliorer la procédure parlementaire et renforcer les moyens de contrôle et
d'évaluation des politiques publiques par le Parlement».
De même, il affirme que «cette réforme offre une occasion, à
ne pas manquer, de renforcer et de préciser le rôle du Parlement, sans remettre
en cause l'équilibre institutionnel de la V° République. C'est en rendant le
Parlement plus représentatif dans sa composition, plus efficace dans ses
procédures de décision, et plus puissant dans son rôle d'évaluation qu'on
apportera des réponses adaptées à la crise démocratique».
En revanche, les réactions au MoDem et à l’UDI ne sont pas
de même tonalité conciliante.
Pour le président du Mouvement démocrate, François Bayrou,
cette réforme n’est qu’«un point de départ et non pas un point d'arrivée» car
Il y aura «des choses à améliorer» et «il faudra trouver le bon équilibre,
celui qu'Emmanuel Macron a proposé aux Français lors de la campagne
présidentielle».
On ne peut être plus clair pour exprimer un mécontentement
lorsque l’on est dans la majorité présidentielle…
L’UDI s’est exprimée par deux communiques de presse, celui
de son président, Jean-Christophe Lagarde et celui du président du groupe Union
centriste au Sénat, Hervé Marseille.
Lagarde «prend acte des premières annonces du Premier
Ministre concernant la réforme des institutions. Il réaffirme la position de
l’UDI, demeurant inchangée depuis le début des consultations, sur la baisse du
nombre de parlementaires, à savoir conserver, au moins, un député et un
sénateur, par département. Ce serait une
bonne règle et reviendrait à une réduction de 25% du nombre de parlementaires. Concernant
la dose de proportionnelle, le président de l’UDI considère que 20% est un
minimum pour permettre de dégager une majorité capable de gouverner et à la
fois pour représenter convenablement les différents courants de pensées au parlement.
La nature de la proportionnelle mise en œuvre, additionnelle ou compensatoire,
devra en outre être précisée rapidement afin de mesurer les intentions du
Gouvernement.»
Marseille déclare, de son côté, qu’«aujourd’hui, le compte
n’y est pas!»:
«La diminution du nombre de parlementaires n’était déjà pas
une fin en soi. Elle s’avère excessive dès lors qu’elle ne pourra pas assurer
une représentation satisfaisante des territoires. Une baisse de 25 % serait
plus pertinente. A cet égard, le gouvernement devra garantir que chaque
département devra être représenté par au moins un député et un sénateur. La
part de proportionnelle retenue, à 15 %, est loin de répondre à nos attentes.
Elle ne permettra pas une représentation conforme à la réalité des diverses
sensibilités politiques de notre pays. La nature de la proportionnelle mise en
œuvre devra être précisée rapidement afin de mesurer les intentions du
Gouvernement».