Le site internet Vice a récemment
interrogé cinq personnes venues d’univers et de bords politiques difféérents
qui se disent centristes et veulent renouveler le paysage politique américain à
l’époque de Donald Trump.
On y trouve un ancien républicain (Robert Levine, responsable
du site The moderate voice), un démocrate (Jonathan Cowan, président de Third
Way) et trois «independents» (Neal Simon, homme d'affaires candidat au Sénat du
Maryland, Nick Troiano, directeur exécutif du Centrist project, Charles Wheelan,
auteur de «The Centrist Manifesto») qui ne se disent affiliés à aucun des deux
grands partis.
Si Jonathan Conwan veut faire en sorte que le Parti
démocrate s’ancre définitivement au centre et au centre gauche, Charles Wheelan,
qui souhaitait auparavant créer un troisième parti centriste, s’est dorénavant
rallié à l’idée de Nick Troiano de trouver et de soutenir partout dans le pays
des candidats «independents».
Robert Levine, lui, veut promouvoir les idées centristes et
les candidats «independents» que Neal Simon veut représenter dans son combat
politique local, mais il souhaite aussi la création d’un troisième parti situé
au centre.
Leurs propos – dans les
entretiens à Vice –semblent plutôt vouloir se démarquer des deux grands partis
– à part Jonathan Conwan –, qu’ils renvoient d’une manière un peu simpliste dos
à dos (alors que c’est le Parti républicain qui s’est largement déporté sur sa
droite et qui a bloqué le système politique pour des raisons uniquement
idéologiques) que de définir un vrai centrisme.
Leurs principaux points communs
sont la modération et le constat que le système politique américain est bloqué.
Néanmoins, chez Conwan et Troiano,
il y a une réflexion plus large sur ce que doit être le centrisme.
Quand on demande aux trois
«independents» de définir ce qu’ils entendent par être centriste, Neal Simon
explique qu’il se «considère
comme un indépendant modéré» puis ajoute, «je suis dans le grand milieu du
pays, sur le plan politique, où beaucoup de gens se sentent sans abri parce
qu'ils ont l'impression que les dirigeants des deux partis les ont poussés à
l'extrême.»
Une sorte de centrisme ad minima.
En revanche, Nick Troiano, lui, affirme «je me considère
comme un centriste parce que je suis prêt à prendre les meilleures idées, peu
importe d'où elles viennent. Souvent, le centrisme est confondu avec être au
milieu, ou diviser la différence entre les deux côtés. Le centrisme consiste à
utiliser la raison, la logique et le bon sens pour évaluer la politique telle
qu'elle est et pour déterminer ce qui est pragmatiquement la solution à un
problème donné.»
Quant à Charles Wheelan, lui,
estime qu’«être un
centriste signifie que je ne rentre pas dans le camp politique actuel. Le mot centriste n'est pas génial, j'espère que
nous en avons eu un autre. Ce n'est pas parce que je me trouve directement
entre les deux partis, c'est parce que je suis beaucoup plus attiré par
certaines idées des Républicains, et beaucoup plus par les Démocrates.»
En cela, il se rapproche de Jonathan Conwan qui estime que «notre
idéologie (ndlr: celle de son organisation Third way) est un très bon mélange
des deux derniers présidents démocrates, Bill Clinton et Barack Obama. Ils
étaient des centristes démocrates, même s'ils traitaient de différentes questions
de toute évidence parce qu'ils étaient présidents à des décennies d'intervalle.»
Mais il précise que, «comme avec le libéralisme et le
conservatisme, il y a beaucoup de différents courants et marques de centrisme. Nous
sommes des démocrates centristes, ce qui est très différent des autres courants
du centrisme.»
Enfin, Robert Levine rappelle qu’il
a été «un républicain de
la Nouvelle-Angleterre, mais le Parti républicain a été pris par le Texas et le
Sud profond et ils ne respectent plus mes normes de la façon dont ils veulent
que le gouvernement fonctionne. Les démocrates ne semblent pas avoir de
leadership, et je pense qu'un nouveau parti qui n'est pas fasciné par les
lobbyistes et les intérêts spéciaux pourrait vraiment avoir beaucoup de succès.
Le système bipartite, qu'on appelle le duopole, ne fonctionne vraiment pas.»
Et il poursuit: «Les centristes, ou modérés, sont vraiment
des gens qui sont prêts à faire des compromis. Ce sont des pragmatistes, des
gens sensés que vous ne trouvez pas à droite et à gauche. Une partie du
problème c’est que seuls les républicains actifs et les démocrates actifs
participent au système des primaires (ndlr qui désignent les candidats de
chaque grand parti pour toutes les élections), et ce sont eux qui sélectionnent
les candidats au poste. Donc, les gens les plus extrêmes des deux côtés ont une
longueur d'avance en termes de candidature. Lorsque les décisions sont prises,
les politiciens essaient d'apaiser leurs bases, et leurs bases sont les extrémistes
des deux partis. Même lors des élections ordinaires, seuls 60% des électeurs
inscrits votent aux élections présidentielles et, lors des élections annuelles,
seuls 40% votent. C'est terrible. Les gens ne veulent pas voter parce qu'ils
estiment que leurs votes n'ont aucun sens et qu'il n'y a pas de candidats qui
les représentent.»
(Le CREC publiera dans les
semaines qui viennent un ouvrage d’Alexandre Vatimbella, Le Centrisme
Américain)