Alors que la question semblait un peu marginale, voire une
solution d’arrimage pour quelques personnalités politiques en déshérence à
droite et au centre-droit depuis la victoire d’Emmanuel Macron, l’élection à la
présidence de LR de Laurent Wauquiez et, surtout, ses «dérapages» plus que
contrôlés, populistes et radicaux, l’ont remise au cœur de l’actualité
politique: faut-il un grand parti de droite libérale et de centre-droit?
Des élus comme Franck Riester, Jean-Christophe Lagarde,
Fabienne Keller ou Hervé Morin ont fait part de leur volonté de s’atteler à sa
création et il pourrait permettre à des personnalités politiques comme Alain
Juppé, Dominique Busserau, Xavier Bertrand, Jean-Pierre Raffarin ou Christian
Estrosi, voire Valérie Pécresse ainsi que les ministres de droite d’Emmanuel
Macron, au premier rang desquels Edouard Philippe et Bruno Le Maire, de trouver
une formation d’accueil qui réponde pleinement à leurs idées.
Reste à savoir si cet hypothétique parti à un présent et,
surtout, un avenir.
Si l’on prend comme exemple ce qui s’est passé aux Etats-Unis
au Parti républicain depuis l’élection de Donald Trump à la Maison blanche, la
réponse est plutôt négative.
Ainsi, l’électorat de droitiste américain est légitimiste et
a préféré suivre le populiste démagogue radical dans ses multiples dérives plutôt
que de demander à l’aile modérée du Parti républicain de faire sécession et de
créer une nouvelle formation.
D’ailleurs, la plupart des élus républicains critiques
envers Trump sont petit à petit rentrés dans le rang, oubliant leurs valeurs,
leurs principes, surtout, les humiliations subies et les insultes proférées par
Trump sans oublier leurs serments de ne jamais travailler avec lui.
Au vu de ce qui se passe chez Les républicains où les
départs et les mises en retrait ont été, pour l’instant, peu nombreux malgré
quelques gestes et propos spectaculaires de plusieurs personnalités de premier
plan, on peut penser que la grande majorité des militants et des électeurs du
parti ne bougeront pas.
Bien sûr, de nouveaux dérapages, des proximités avec le FN ou
d’autres formations de droite radicale et d’extrême-droite pourraient changer
la donne.
Jusqu’à créer une grande transhumance?
La question est ouverte.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier qu’il y a déjà une
structure d’accueil pour les droitistes libéraux ainsi que les centristes de
droite et elle s’appelle La république en marche.
Des personnalités comme Jean Arthuis ou Thierry Solère ont
déjà rejoint ses rangs.
Dès lors, l’on peut se demander s’il existe un espace
politique suffisant entre LR et LREM pour une grande formation.
Si l’espace existe, pas sûr qu’il soit aussi grand que
l’affirment certains de ses supporters.
De même, pourrait-il être dans une «opposition constructive»
et un «soutien critique» au gouvernement ou ne serait-il pas voué à n’être
qu’un appendice de LREM et, en cas de changement de majorité lors des prochains
législatives vers la Droite, que celui de LR?
Rien ne permet de trancher cette problématique en l’état.
On a parlé plus haut du profil de ceux qui pourraient le
rejoindre mais qu’en serait-il en réalité et, surtout, existe-t-il un leader
charismatique et/ou capable de mener le parti à la victoire?
On voit bien Agir-les constructifs, l’UDI et Les centristes
se fondre dans ce parti et voir une bonne partie de l’aile modérée de LR faire
de même sans oublier, à terme, quelques déçus de LREM, tellement celle-ci est
actuellement une sorte d’attrape-tout où le seul ciment est Macron.
Mais ce ne sont que supputations.
Quant à un leader pouvant fédérer tout ce monde autour de
lui, il semble bien qu’Alain Juppé n’a plus l’âge et la volonté (il pourrait
néanmoins être une sorte de guide spirituel, voire une sorte de produit d’appel
qui permettrait de faire venir beaucoup de ceux qui l’ont soutenu pendant la
primaire de LR).
D’autres noms peuvent être évoqués, comme celui d’Edouard
Philippe (mais il faudrait, soit que ce parti se retrouve dans la majorité
présidentielle, soit attendre la sortie du gouvernement du susnommé) ou de
Xavier Bertrand.
Quoiqu’il en soit, derrière cette création ainsi que celle d’une
force social-démocrate sur les ruines du PS, se pose la question de l’axe
central (regroupant libéraux réformistes et progressistes de droite, de gauche
et du centre), de sa concrétisation et de son avenir.
Va-t-on vers une parti dominant, voire hégémonique ou même
unique, regroupant tout l’axe central (qui pourrait être LREM) face à deux
formations radicales et extrémistes de gauche et de droite ou plutôt, à terme,
vers une alliance entre plusieurs formations moyennes?
Là aussi l’avenir n’est pas encore écrit.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC