Alain Juppé |
L’aile droite de l’axe central
(regroupant les libéraux progressistes de droite, de gauche et du centre, d’Alain
Juppé à Manuel Valls en passant par Emmanuel Macron et François Bayrou) poursuit
son émancipation.
Après le ralliement de certains
de ses membres à Emmanuel Macron avant le premier tour de la présidentielle,
après la présence de ministres de droite dans le gouvernement de ce dernier et
notamment du premier ministre, Edouard Philippe, après la création de Les
Constructifs puis de Agir, regroupant tous les droitistes qui se veulent dans
un soutien critique au président de la république, après la départ de personnalités
comme Xavier Bertrand, le président de la région des Hauts-de-France, c’est au
tour désormais de l’aile modérée et libérale de Les républicains de quitter
cette dernière formation qui a décidé, avec l’élection de Laurent Wauquiez à sa
tête de se radicaliser et de se rapprocher des thèses du Front national.
Ainsi, en deux jours, ce sont
deux de ces figures qui ont décidé ce rompre les amarres après bien d’autres
militants et élus auparavant.
D’abord, c’est Dominique
Bussereau, président du conseil départemental de la Charente Maritime et de l’Assemblée
des départements de France qui s’est mis «en congé» de LR.
Mais c’est surtout, Alain Juppé,
le maire de Bordeaux, ancien premier ministre et fondateur de feue l’UMP qui a
décidé de «prendre du recul» de ne pas payer sa cotisation au parti pour 2018.
Le maire de Bordeaux, lors de sa
présentation de ses vœux à la presse, a expliqué, «J'ai fait savoir que je ne
souhaitais pas rester à la tête de la fédération LR de Gironde. Je prends du
recul en attendant de voir ce que devient LR notamment dans la perspective des
élections européennes de 2019».
Ces dernières, selon lui, seront «un
rendez-vous majeur, un point de clivage fondamental. Il y aura ceux qui sont
contre et ceux qui sont pour» l'Europe.
En outre, il a estimé que «L'un
des problèmes du parti Les républicains, c'est que sa composante centriste
s'est détachée».
Alain Juppé n’a, par ailleurs, ni
l’intention d’adhérer à La république en marche, ni «à créer un parti ou une
chapelle» mais «veux être libre»: «J'ai envie de liberté et d'analyse».
Si ces départs ne sont pas une
surprise tant l’aile libérale progressiste de LR n’y avait plus sa place, elles
sont, à la fois, un coup dur pour la formation de droite qui se réduit comme
peau de chagrin et un passage à l’acte qui renforce cet axe central dont on rappelle
que Juppé souhaite son regroupement dans une liste unique pour les prochaines
élections européennes de 2019.
Cette recomposition de l’espace
politique de la droite française est dans l’ordre des choses comme l’est celle
de l’espace politique de la gauche où une partie des réformistes à rejoint la
président de la république ou ont intégré cet axe central informel pour l’instant.
Il faut rappeler que si l’élection
d’Emmanuel Macron a été un accélérateur de cette recomposition, elle en est
aussi une des conséquences.
Ainsi, l’apparition d’un axe
central est antérieure à son offre politique et à la création d’En marche!
Toute son intelligence a été de
formaliser ce mouvement en profondeur et, grâce à des circonstances favorables
(notamment la défaite d’Alain Juppé à la primaire de LR face à François Fillon),
de l’incarner et de le porter au pouvoir.
Quant à la Droite, les mois qui
viennent devraient clarifier une situation qui peut encore bouger dans un sens
ou l’autre.
Ainsi, si Wauquiez se voit
contester de l’intérieur de LR – ce qui n’est pas du tout le cas pour l’instant
–, cela pourrait redonner des couleurs à une aile modérée qui n’aurait pas
besoin d’aller chercher ailleurs un espace politique.
En revanche, si le nouveau
président du parti parvient à conforter son pouvoir et à mettre en avant ses
idées et sa stratégie, on ne voit pas comment les libéraux progressistes
pourraient demeurer dans LR sauf à se fourvoyer, en abandonnant leurs valeurs.
Alexandre Vatimbella
Directeur du CREC