La France d’en-haut et celle d’en-bas, celle des métropoles
et celle de la périphérie, celle des riches et des pauvres, des diplômés de
l’enseignement supérieur et de l’échec scolaire, celle des élus et des
électeurs, et l’on pourrait continuer, sans bien sûr oublier celle des élites
et celle du peuple, distinction qui est devenue récemment celle des sans et
celle des avec gilets jaunes, nos «spécialistes», nos «experts», nos
«commentateurs» et nos «intellectuels» médiatiques ont trouvé le bon filon pour
délivrer une pensée binaire, évidemment caricaturale et pauvre mais, pire,
fausse qui leur permet de parader avec, en poche, leur kit prêt à l’emploi de
réponses basique et parfois d’une inconsistance abyssale afin de pouvoir
«réconcilier» ces deux France ou d’expliquer que cette dernière n’est pas
possible et qu’il faut se préparer à la révolution si tendre à leurs fantasmes.
Faire rentrer les gens dans des cases a toujours été
l’objectif de ceux qui en simplifiant à l’extrême se parent d’une explication soi-disant
simple mais en réalité simpliste qui permet la posture du «je-sais-tout» et
«j’ai-tout-compris».
Le Centre et le Centrisme a toujours refusé ces cases où
l’on enferme le gens parce qu’ils sont le lieu et la pensée de la
reconnaissance de l’individualité irréductible de chaque individu, cette
différence ontologique qui est notre plus grand bien et qui n’est pas soluble
dans de sommaires cases grossières et des théories manichéennes.
Chaque personne (au sens du personnalisme) est un
individu-monde et l’on peut prétendre sans se tromper qu’il y en a plus de 67
millions de ces mondes en France…
Bien entendu, il ne s’agit pas de nier la science politique,
la sociologie ou l’anthropologie, ni même leur volonté de créer des groupes
distinctifs dans la population à partir de certains critères.
Mais ce sont des outils qui permettent de comprendre des
phénomènes et des situations, pas de faire des raccourcis aussi peu
scientifiques que grandement dangereux car permettant de créer des oppositions
exacerbées entre des groupes aux contours aussi larges que grossiers.
Ce fut l’un des pêchers de Marx et cela reste celui du marxisme
de s’y adonner avec les classes sociales qui permettaient et permettent
toujours à certains de vous mettre dans l’une ou l’autre alors même que les
situations de ceux qui se trouvent regroupés dans telle ou telle, sont disparates
et ne représentent ni des comportements sociaux, ni des aspirations
existentielles, ni des manières de vivre identiques.
En réalité, cette présentation dichotomique permet de créer
de la tension, d’attiser les haines et de provoquer des chocs frontaux parfois
paroxystiques.
C’est si vrai que les promoteurs de ces théories binaires
sont souvent des militants politiques qui veulent démontrer la pertinence de
leurs idéologies (et la validité de leurs pratiques clientélistes) plutôt que
de relater des faits issus d’une réelle recherche scientifique.
Dans nos sociétés modernes qui voient la montée de
l’autonomisation égocentrique assistée irresponsable irrespectueuse
insatisfaite de l’individu, celle qui est une menace pour la démocratie
républicaine (et non l’individualisme dont elle n’est qu’une perversion),
réduire ce maelström presque infini de différenciations et de demande de leurs
reconnaissances à une variable booléenne, ressemble à des élucubrations
idéologiques et à de la supercherie.
Mais elle est tellement reposante sur le plan intellectuel
que nous n’avons malheureusement pas fini de nous la voir rabâcher à longueur
de journées.
In fine, soit la France est soit une, c’est-à-dire que dans
sa diversité, elle fait société et crée cette communauté d’intérêt et de
sécurité où l’on partage des valeurs basiques et un lien social (cette «fiction»
permet le vivre ensemble), soit elle est décomposée en autant d’habitants qu’il
y en a sur son territoire.
Mais elle n’est jamais deux.
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