Par Jean-François Borrou & Alexandre Vatimbella
Dans cette rubrique, nous publions les
points de vue de personnalités centristes qui ne reflètent pas nécessairement
ceux du CREC. Ces points de vue ont pour but d’ouvrir le débat et de faire
progresser la pensée centriste.
Jean-François Borrou est le pseudonyme
d’un journaliste proche des idées centristes.
Alexandre Vatimbella est le directeur du
CREC
Donald Trump |
«Idiot», «crétin», «incapable», «dangereux», ce ne sont pas
des adjectifs à nous, ni ceux d’opposants à Donald Trump mais ils sortent
directement de la bouche de ceux qui travaillent avec lui à la Maison blanche.
Il faut bien comprendre ce que cela veut dire quand vos
conseillers affirment vous empêcher de faire des bêtises (comme provoquer une
guerre), qu’ils vous cachent des choses, qu’ils refusent de transmettre vos
ordres les plus inconséquents et qu’ils déclarent un peu partout que vous
devriez être destitué.
Dans le fauteuil du bureau ovale, se trouve assis l’homme le
plus puissant des Etats Unis, la première puissance mondiale, la plus vieille
démocratie du monde, et cet homme est un «moron», un «abruti» (toujours selon
ses conseillers).
Ce n’est pas un simple fait, mais un séisme qui a frappé la
démocratie mondiale le 8 novembre 2016 et dont les répliques continuent de
faire trembler le monde sans discontinuer depuis lors.
Bien sûr, c’est d’abord la faute à Trump.
Mais aussi au Parti républicain qui lui a permis de concourir
sous ses couleurs avant de l’adouber sans trop de scrupules.
Sans oublier les plus de 60 millions d’électeurs qui l’ont
porté au pouvoir.
On ne mésestimera surtout pas le système électoral américain
qui permet, une nouvelle fois, à un candidat ayant eu moins de voix que sont
concurrent (en l’occurrence trois millions!) de gagner un scrutin, ce qui n’est
vraiment pas très «normal» en démocratie.
Et puis il faut citer les médias qui, tout en combattant
Trump majoritairement, lui ont donné la parole, ont relayé tous ses mensonges,
lui ont permis toutes ses insultes, pas du tout parce que cela faisait partie
du débat démocratique mais parce que leurs audiences étaient boostées et leurs
revenus publicitaires également donc, globalement, leurs chiffres d’affaires…
On pourrait, dans une provocation finale, y ajouter la
démocratie républicaine qui n’a pu empêcher un tel personnage de se faire élire
à la tête de la première puissance mondiale mais on préfèrera parler des
dysfonctionnements de celle-ci à plusieurs niveaux que de l’incriminer dans ses
fondements mêmes.
L’élection de Donald Trump est bien un moment pivot qui nous
fait comprendre que la démocratie est attaquée en son cœur même, là où on
pensait qu’elle était à l’abri d’une telle mésaventure.
Bien entendu, les Etats-Unis n’ont pas toujours été des
parangons de vertu démocratique.
L’épisode George W Bush est le plus récent avant l’élection
de Trump.
Cependant, jamais un populiste démagogue, incapable,
menteur, foulant au pied toutes les valeurs de la démocratie (mot qu’il ne
prononce pratiquement jamais) qui se veut ami avec les pires canailles de la
planète (il vient même de déclarer que lui et Kim Jon-Un, le dictateur sanguinaire
nord-coréen était «tombés amoureux l’un de l’autre»…) n’avait été élu au poste
suprême.
De même, l’élection de Trump a dynamisé les forces anti-démocratiques
dans de nombreux pays (comme la Pologne, l’Italie ou les Philippines) et les
autocrates déjà en place (comme en Russie ou en Turquie).
Sans oublier que de nombreux populistes et extrémistes
utilisent désormais les recettes de Trump (mensonges, insultes, menaces,
promesses irréalisables) pour se donner de la visibilité comme Marine Le Pen, Jean-Luc
Mélenchon ou Laurent Wauquiez en France.
Et la polarisation qui en résulte rend fou une partie des
médias qui, d’un bord à l’autre, se transforme en simple outil de propagande, s’inspirant
largement de ce qui se passe sur internet (sur certains sites et sur la plupart
des réseaux sociaux).
Tout cela, bien sûr, était en gestation depuis quelques
années et les mouvements extrémistes et populistes ne sont pas nés avec Trump,
ni même leur résonnance dans la société.
Mais les voilà parés, sinon d’une légitimité, en tout cas d’une
visibilité et d’une aura qui semble difficilement à contrer pour l’instant.
Oui, l’installation d’un idiot à la Maison blanche a réellement
déclenché un mouvement qui fait sombrer petit à petit la démocratie.
Jean-François Borrou
Alexandre Vatimbella
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires anonymes ne sont pas publiés ainsi que ceux qui seraient insultants ou qui ne concernent pas le Centre et le Centrisme.