Emmanuel Macron |
Présidentielle ou parlementaire?
La Constitution de la V°République serait, selon ses
défenseurs, dont l’actuel président de la république, un objet hybride qui
allie avec bonheur les deux systèmes de gouvernement d’un pays démocratique.
Au régime présidentiel, elle emprunte un exécutif fort et
stable et au régime parlementaire, le vote de la loi par les représentations de
la nation et la responsabilité du gouvernement devant ces derniers qui peuvent
le défaire.
Emmanuel Macron s’en est encore félicité lors de l’anniversaire
de ce texte fondamental lors d’un discours devant le Conseil constitutionnel,
le 4 octobre dernier (lire
le texte de celui-ci ici).
Il a notamment déclaré que «la France dispose, face aux
déferlantes de l’Histoire, d’un socle de stabilité et de solidité que nous
devons maintenir en résistant aux effets de mode, au aspirations du moment, aux
tentations du court terme qui, trop souvent, ont motivé les altérations de la
Constitution. A ces tentations, opposons le sens du temps long, et sachons
utiliser le droit pour façonner l’Histoire.»
Or, pour beaucoup de spécialistes de droit constitutionnel
mais aussi pour beaucoup de centristes, c’est bien les emprunts négatifs aux
deux régimes qui dominent la Constitution gaullienne et rendent le débat
démocratique quelque peu bloqué.
Ainsi, aucun réel contre pouvoir n’existe face à la
présidence de la république comme dans un régime présidentiel tel qu’il est
pratiqué aux Etats Unis (ou contrairement à ce que l’on croit, le président à
moins de pouvoir que son homologue français).
De même, le Parlement, désormais élu (pour ce qui est de l’Assemblée
nationale) dans la foulée de l’élection présidentielle, ne possède pas les
pouvoirs et les moyens pour faire réellement la loi, n’étant souvent qu’une chambre
d’enregistrement des projets de loi gouvernementaux, ses propositions de loi
étant souvent enterrées par la priorité des textes venus de l’exécutif.
Ce ne sont que deux exemples que l’on pourrait multiplier d’un
régime hybride qui a permis une présidentialisation extrême où une personne
entourée de quelques conseillers dirigent toute la vie politique ou pratiquement.
Bien entendu, il est difficile de rédiger un texte qui soit
parfait en la matière et, surtout, qui survive en l’état à une pratique du
pouvoir où l’une des branches a tendance à prendre le pas sur l’autre et à
refuser ensuite de revenir en arrière (le Parlement sous la IV° République, le
Président de la république sous la V°).
Pour autant, le Président de la république estime que les
institutions nées de la Constitution de la V° République peuvent permettre de gouverner
à notre époque de l’immédiateté, de l’impatience et de la défiance:
«Je sais (…) les tempêtes et les avanies que notre époque
réserve à ses dirigeants politiques et particulièrement au premier d’entre eux.
L’impatience et l’exigence, la tyrannie de l’immédiat, le règne de l’image et
le goût pour l’écume des jours n’aident pas forcément à mener une action
sereine pour qui céderait à cette tyrannie mais aucun président de la V°
République n’en a été préservé jusqu’au général de Gaulle lui-même. Qu’on ne
prétende pas gouverner la France ni même la présider si l’on n’est pas prêt aux
déferlantes et aux vents contraires. Il faut tout ignorer de notre pays pour
espérer une mer d’huile, l’important est ici de conserver le cap et nos
institutions nous le permettent, c’est leur grande force, car il en va de
l’avenir de la France.»
Quoi qu’il en soit, Emmanuel Macron veut tout de même
réformer la Constitution pour la mettre en conformité avec le temps présent
comme il l’avait promis lors de sa campagne électorale avec des mesures qui
avaient commencé à être discutées à l’Assemblée nationale au début de l’été
avant que l’«affaire» Benalla ne vienne perturber cette procédure qui devrait
bien reprendre au début de l’année 2019:
«La réforme constitutionnelle à laquelle je m’étais engagé
est à mes yeux une tentative de réponse à cette crise. Elle reviendra devant
l’Assemblée nationale début janvier et je sais que le Gouvernement, par le
dialogue avec l’Assemblée nationale et le Sénat, trouvera la manière de faire
intelligemment cheminer cette réforme.»
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