Les députés ont donc voté les
dispositions (dans deux lois séparées) contre les «fausses informations» («fake
news» en anglais d’où le terme français est issu) et la «manipulation de
l’information» en période électorale, c’est-à-dire trois mois avant un scrutin
national (municipales, législatives, présidentielles, etc.).
Une «fausse information» étant définie dans ces lois comme «toute
allégation ou imputation d’un fait, inexacte ou trompeuse».
Rappelons par ailleurs que ce n’est pas celui qui invente
cette fausse information qui sera sanctionné mais celui qui la diffuse de
«manière délibérée» et de «mauvaise foi».
C’est, à la fois une législation de bon
aloi et de circonstance.
De circonstance car elle vise à
répondre au déversement de fausses informations par des officines payées ou
appartenant à des entités étatiques ou des groupes partisans qui veulent
délibérément fausser le rendez-vous primordial que représente dans une
démocratie républicaine, une élection des représentants du peuple.
De bon aloi parce qu’elle reconnait que
la fausse information et que la manipulation de l’information sont des cancers
de la démocratie représentative à l’ère de l’information en continu et des
réseaux sociaux.
Bien entendu, ces fausses informations
et ces manipulations ont toujours existé, on les a appelées au cours des temps
rumeurs, propagande, désinformation, endoctrinement, intoxication, …
Il faut bien comprendre que dans une
démocratie républicaine libérale et représentative, le rôle du savoir et de
l’information sont primordiales pour le bon fonctionnement du système et des
institutions.
Seul un citoyen qui sait et qui est
informé, peut choisit, en toute connaissance de cause, ce qui est bon pour lui.
Seul un peuple à qui l’on a transmis le
savoir et à qui l’on permet de s’informer, peut choisit son présent et son
avenir en toute responsabilité.
Cette loi ne répond évidemment pas à
cette mission essentielle de ceux qui transmettent le savoir et l’information
mais elle est une reconnaissance concrète, avec d’autres dispositions qui
existent déjà, de cette mission pour la démocratie républicaine.
Pour autant, il reste encore tellement
à faire pour que le citoyen possède le savoir et les informations adéquats afin
d’être capable de se faire sa propre opinion en toute indépendance.
Si l’on devait, par exemple, relever
toutes les «fausses informations» et toutes les «manipulations de
l’information» auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement, et pas
seulement sur des plateformes internet malhonnêtes ou phagocytées par des
«trolls», nous verrions que la tâche est immense et particulièrement compliquée.
Manipuler un fait par idéologie, que ce
soit par un politique, un spécialiste ou un journaliste est, à la fois, courant
et normal puisque ceux-ci ont une opinion en tant que citoyens et en tant
qu’acteurs engagés.
Et cela s’appelle la liberté
d’expression qui est fondamentale dans une démocratie républicaine.
Mais celle-ci entre souvent en
collision avec la réalité qu’elle interprète et inscrit dès lors dans un
contexte partisan où l’individu ne peut souvent plus faire la part des choses
entre l’opinion et le fait.
L’important n’est pas qu’un centriste
ne croit pas ceux qui diffusent la pensée du Centre, idem pour ceux qui sont de
gauche et de Droite avec leurs pensées politiques respectives.
Non, il s’agit de permettre aux
personnes d’acquérir pour leur vie durant le savoir et l’information juste ainsi
qu’une capacité à décrypter, à analyser et à se faire une opinion en toute indépendance.
Il s’agit de leur permettre de trouver
des canaux d’informations dont le but n’est pas de diffuser une idéologie ou de
faire du sensationnalisme afin de gagner le plus d’argent possible mais de
permettre, autant que possible, de trouver le fait brut.
A eux, ensuite, de l’interpréter et,
pour cela, de s’aider de toutes les opinions diffusées.
On en est encore loin, tant le service
public de l’audiovisuel est loin de cette configuration, à la fois parce qu’il
permet dans son fonctionnement de teinter idéologiquement toute l’information
et parce qu’il se bat contre les chaînes commerciales dont le but premier est
de dégager des bénéfices en se servant de leurs programmes pour attirer le
chaland-téléspectateur.
Quant à ceux qui crient au scandale
pour les dispositions législatives qui viennent d’être votées par l’Assemblée
nationale, parlant de censure, atteintes à la liberté d’expression et autres
bâillonnements de l’information, il ferait mieux de sa battre pour que le
citoyen soit en capacité de recevoir une information la meilleure et la plus
neutre possible par le biais d’un vrai service public citoyen de l’information
qui coexisterait avec toute la presse d’opinion et tous les réseaux sociaux.
Ce ne serait pas la solution ultime –
qui n’existe sans doute pas – parce que nous sommes des êtres communicants et
que nous vivons dans un monde d’hyper-communication où nous disons tout et n’importe quoi et où nous
sommes sensibles au tout et n’importe quoi des autres, surtout où le mensonge à
une fonction sociale importante...
Néanmoins, ce serait une avancée
salutaire pour la démocratie républicaine.
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